• #Solidarité et #antifascisme : Information / Débat

    Le Samedi 24 Mars 2018
    à partir de 13 :30

    A La Chapelle,
    36, rue Daniel Casanova à #Toulouse
    (Métro Compans-Caffarelli)

    Au programme :

    #SIA : HISTOIRE ET ACTUALITÉ
    Intervenants : Valentin FREMONTI, Placer MAREY THIBON et Jean SERMET

    – Antifascisme : Passé & présent par Yves COLEMAN (mondialisme.org)

    – Lectures de textes et poésies

    – Chants de la République espagnole par El Comunero

    LIBRAIRIE
    BAR ET PETITE RESTAURATION
    ENTRÉE LIBRE

  • Ou est passé #Santiago_Maldonado ?


    En Août 2017, disparaissait, en #Argentine dans la province du Chubut, Santiago Maldonado. Son crime fut d’avoir participé à une manifestation en solidarité avec les Indiens Mapuche. S’en suivit une vaste campagne de recherches, et donc de questions, à propos de celui qui est devenu le premier disparu « officiel » de la présidence Macri.

    Santiago Maldonado est né dans la province de Buenos Aires, en 1989. Il part s’installer comme artisan dans le Rio negro, pas loin du Chubut. A cette époque, il est un jeune homme pas très politisé, mais on le dit plutôt proche des milieux progressistes, voir libertaires. En effet, il s’intéresse aux problèmes de société, au sort des Indiens Mapuche en conflit depuis des années, à la fois, avec l’État et les grands propriétaires terriens du sud de l’Argentine – lesquels sont pour beaucoup de riches industriels comme Benetton. Santiago se trouvait donc dans un pu lof celui de Cushamen. Un pu lof est une sorte de campement, un petit village de résistance où se trouvent les gens, mapuche ou non, qui résistent aux politiques d’exclusion contre les indiens. Quand les forces répressives, à savoir la gendarmerie, ont fait irruption en tirant des balles en caoutchouc sur les gens qui se trouvaient là, c’était pour incendier les cabanes et tirer au canon à eau afin de disperser tout le monde, et, éventuellement, mettre quelques indiens en prison (qu’ils soient jeunes, vieux, femmes ou enfant). De toute façon, l’image des indiens, dans l’opinion publique, est si mauvaise que personne ne lèvera le petit doigt ; c’est globalement ce que se disent les autorités. Les gens se sont enfuis où ils ont pu. Beaucoup se sont dirigés vers le Rio Chubut, et Santiago était parmi ceux-là. C’est dans cette cohue que les gendarmes l’ont intercepté, puis l’ont fait disparaître dans leur camionnette, selon certains témoins visuels.

    Suite à ces événements, nous avons assisté à une vaste campagne de communication, d’abord locale, ensuite mondiale. Cette campagne a eu comme effet de forcer le gouvernement argentin à sortir de son mutisme et à saisir la justice afin qu’une enquête soit menée dans le but de connaître la vérité ; cela grâce à la contrainte de l’opinion mondiale. En effet, les petites affiches avec la photo de Maldonado portant en en-tête « ¿Dónde está Maldonado ? » se sont répandues comme une traînée de poudre, grâce aux connections à travers le monde et aux réseaux sociaux.

    Le 21 Octobre 2017, fut retrouvé – et officiellement identifié – le cadavre repêché dans le Rio. C’était bien le corps de Santiago Maldonado qui avait été retrouvé. A ce jour, un seul gendarme a été mis en examen et l’enquête suit son cours. Il est fort probable que les témoins de cette sordide histoire disparaîtront à leur tour et que la gendarmerie, la chancellerie, l’administration Macri, s’en tireront à bon compte pour manque de preuves et de témoins. C’est une histoire parmi tant d’autres, désormais banale en Argentine, ce pays où les tortionnaires d’hier ont repris les manettes grâce à leur complices d’hier. Au mieux, ils prendront un des gendarmes présents, lui infligeront un blâme ou du sursis, mais, malheureusement, il ne se passera rien.

    Au passage nous noterons le cynisme et l’aplomb de la ministre Bullrich, d’abord, et du président Macri, ensuite. En cherchant à atténuer les faits et à soutenir leur gendarmerie, ils ont tout nié en bloc, en allant jusqu’à laisser entendre que s’il était arrivé quelque chose à Maldonado, c’est, sans doute, parce qu’il l’avait bien cherché. C’est vrai que, au final, la cause indienne, ça n’intéresse pas, ou si peu ; surtout, en Argentine où la bourgeoisie a toujours fait en sorte que la population déteste les Indiens. De nos jours encore, on les appelle les pauvres « indios », et les gens qui vivent dans les bidonvilles de Buenos Aires, sont des negros ou des indios. C’est dire à quel point la propagande d’extrême-droite a marché à plein régime pendant près d’un siècle. Cette propagande, à la solde de la bourgeoisie locale, a fermé les yeux sur les massacres des indiens en Patagonie et les a même applaudis. La Patagonie où, quand on était riche, le dimanche on partait avec ses amis à la chasse à l’indien comme, aujourd’hui, nous partons, en toute simplicité, ramasser des champignons. C’est par cette propagande que l’on appelait au meurtre, les migrants venus d’Europe au début du siècle dernier, et qu’on faisait appel à l’armée pour réprimer tout mouvement social anarchiste ou communiste. C’est cette même propagande qui appela au massacre d’ouvriers comme lors de la semaine tragique, dans Buenos Aires (700 morts et 4000 blessés), et qui fit inscrire dans la constitution que les anarchistes étaient interdits sur le sol argentin. C’est cette bourgeoisie qui, aujourd’hui, cire les pompes du pape François, grand ami du Général Massera, chef du camp de concentration clandestin de l’ESMA, de triste mémoire. La disparition de Santiago, sans vouloir la minimiser, est un épisode de plus dans la guerre que le pouvoir livre contre le peuple, les riches contre les pauvres, les conquistadors, ou gauchos, contre les Indiens. Ces gauchos sont le symbole, malgré eux, de la classe dominante ; laquelle se pose victorieuse de la barbarie indienne, donc des pauvres. Si Maldonado avait été un Indien, en aurait-on seulement parlé ?

    @Anarchosyndicalisme ! n°158 / Mars - Avril 2018
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  • « Mémoires et Écrits » de #Nestor_Makhno


    En ces temps d’instabilité, le capitalisme, s’appuyant sur le nationalisme et le patriotisme, a montré sa sauvagerie avec ses guerres, ses infamies, ses actes ignobles et sa logique de monopolisation des richesses. La finance et les grands groupes industriels sont prêts à dévaster la terre entière au nom de la croissance. La place de l’Homme s’efface derrière consommation, coffre-forts, taux de rendements et de chômage, PIB, etc. L’avenir des générations futures et notre milieu naturel sont en péril.

    Pourtant, d’autres idées de vie en société existent, avec d’autres manières de vivre ensemble, sans concurrence, division, compétition ou écrasement du voisin. Il faut réfléchir et agir pour le bien commun, avec un système fondé sur l’entraide, la solidarité, la liberté. C’est pour tenter de bâtir un monde fondé sur ces valeurs que des anarchistes révolutionnaires ont sacrifié leur vie. Le mouvement des paysans et ouvriers dans l’Ukraine de 1917 en est un exemple. Nestor Makhno les décrit dans son ouvrage « Mémoires et écrits ».

    Il ne l’a pas fait pour rendre un hommage à octobre 1917 qui s’est hélas soldé par le pouvoir exclusif des bolcheviks, l’avènement de leur dictature contre le prolétariat et l’édification de toutes les structures nécessaires visant à renforcer le pouvoir d’un seul homme ; lequel deviendra par la suite un dictateur sanguinaire. Staline, avec son lot de massacres, a marqué l’histoire. Lénine et Trotsky (et d’autres bolcheviks) se sont ainsi détournés de la révolution et de tous ceux qui aspiraient cette société nouvelle. Reprenons ici une phrase lue on ne sait où : « Les staliniens sont des léninistes qui ont tous réussi, les trotskystes sont des staliniens qui ont tous échoué ».

    Dans ses mémoires, Makhno décrit sa vie, son engagement pour la révolution russe et ukrainienne, la place qu’il y occupa en tant que révolutionnaire, dans une période où le système tsariste avait été laminé par la révolution et où la classe laborieuse avait pris conscience de sa force, un processus pour un changement radical était en cours.

    Tout commença, pour lui, par une enfance difficile. Fils de paysan pauvre et orphelin de père, il connaît le servage qui soi-disant a été aboli mais qui, en fait, a pris une autre forme. Ce faisant, il vit l’injustice au quotidien. Une histoire de son enfance lui fit prendre conscience que, face à l’injustice, la crier ou la dénoncer pouvait déjà être une étape pour un changement. Ainsi, alors qu’un autre fils de paysan subissait des harcèlements de la part de la progéniture bourgeoise du propriétaire d’un koulag, les cris de Nestor alertèrent les ouvriers agricoles, ces esclaves modernes, qui laissèrent tous éclater leur colère face à de tels actes et le bourgeois propriétaire n’eut d’autre choix que de mettre au pas sa descendance insolente et mal éduquée. Ce fut un premier combat collectif victorieux car, à partir de ce jour-là, cet autre enfant ne fut plus humilié bien que toujours exploité.

    Adolescent, les événements de 1905 le font s’intéresser à la politique et il rejoint les anarcho-communistes. Son activité militante le fera passer par la case prison. Il approfondira ses connaissances et ses idées, il fera régulièrement des séjours au cachot, ses tentatives d’évasion ne seront que des échecs. En février 1917, les révolutionnaires le sortent de prison avec tous les autres prisonniers. Tout s’accélère, et de retour à Gouliaï-Polié, sa ville natale, il voit sa vie s’imprégner d’une intense histoire collective dans un monde en pleine ébullition. Il développe et pratique l’anarchisme dans les comités révolutionnaires, dans les unions de paysans, dans les soviets locaux, dans les assemblées, dans les meetings, dans les réunions des groupes anarcho-communistes, dans les échanges entre ouvriers et paysans, et avec toute cette population laborieuse qui s’organise en une société nouvelle qui se construit jour après jour. La parole, comme l’action commune, se libère et les chaînes se brisent. C’est avec entrain et espoir que Nestor le raconte. #A peine libéré, le gouvernement russe provisoire de Kérensky tente de museler les élans de solidarité et de prendre en main le destin de tous. Les socialistes révolutionnaires ont du pain sur la planche pour garder le pouvoir, et les critiques à leur égard fusent.

    L’histoire de Makhno, très entouré et bien occupé, continue et son parcours en croise d’autres qui nous sont totalement inconnus : des noms, des moments intenses, qui ne sont pas cités dans les livres d’histoire. Comme cet exemple dans lequel les paysans, suite à une décision collective, prennent des chariots, des fusils, des fourches ou des bâtons, et, chemin faisant, les bourgeois propriétaires prennent la clé des champs pendant que eux collectivisent les terres et adieu, ou plutôt au revoir, les bourgeois – et tout cela, la plupart du temps, sans effusion de sang, même si, parfois, bien sûr, des propriétaires récalcitrants s’opposent à la liberté des ouvriers et des paysans.

    Dans cette vie trépidante, vient le temps des critiques et des méfiances envers le parti bolchevique. Dès la chute de Kérensky, d’autres s’avancent pour prendre la place, et c’est là que « l’astucieux lénine », comme Makhno le nomme, fait son entrée en scène. Son mot d’ordre « Tout le pouvoir aux Soviets », déjà dans le cœur de la révolution, fait écho, mais dans les faits ça sera plutôt « Tout le pouvoir au parti bolchevique ». Si, partout en Russie, la sauce bolchevique a la cote ; en Ukraine, et notamment chez les paysans, elle aura un goût amer. Pendant ce temps, en Ukraine, les expériences d’autonomie font leurs preuves. Makhno confirme que la voie et la façon d’agir du groupe anarcho-communiste, qui est aux côtés de la classe laborieuse, est la bonne solution.

    « Prolétaires du monde entier, descendez dans vos propres profondeurs et cherchez-y la vérité. Créez la vous-mêmes ! Vous ne la trouverez nulle part ailleurs ».

    En 1918, Nestor nous fait partager son désarroi quand Gouliaï-Polié tombe aux mains des Autrichiens et des Allemands. Mais son retour, il le prépare. Patience. Les départs vers le front, pour beaucoup de révolutionnaires ukrainiens, étaient probablement une des causes. L’entrée de traîtres au sein des comités révolutionnaires, et autres outils de l’organisation collective comme les Soviets, en sont la vraie raison. Avec d’autres révolutionnaires, Nestor se fixe une date de retour, mais sa destination à ce moment sera celle d’autres villes russes, afin d’observer et d’analyser où en sont les forces révolutionnaires et la contre-révolution, Moscou, Pétrograd et Kronstadt. Il nous fait part de son écœurement à propos de certains groupes anarchistes ayant rejoint les rangs des bolcheviks.

    Nestor continue a nous faire vivre ces événements et il nous raconte toutes ces rencontres constructives, ou pas, nous faisant rire ou bien pleurer. Si des anarchistes paraissent être sur la « bonne » voie, certains sont vraiment sur le bas-côté et regardent passer le train sans même chercher à s’accrocher au wagon, mais d’autres, plus lucides, sont bien présents. Pour leur action et leur dévouement à la révolution sociale, pour leur soif de liberté mais aussi pour leur courage, Nestor nous amène à avoir de la compassion pour ces hommes et ces femmes qui ne cherchent ni le pouvoir, ni la gloire, et sont prêts à prendre les armes pour s’opposer à la contre-révolution grandissante venant de partout. Ensuite, tous ceux qui s’opposeront à la direction du parti bolchévique seront déclarés contre-révolutionnaires. Les arrestations, les fusillades, les nombreuses disparitions d’anarchistes et la suppression de toute propagande anarchiste deviendront monnaie courante.

    Au fur et à mesure de la lecture, nous avons la sensation de l’accompagner dans sa quête, mais aussi dans ses émotions qu’il nous fait partager, dans ses espoirs, ses craintes, ses envies de vengeance après tant de traîtrises. Le traité de Brest-Litovsk, signé par les bolcheviks, donne l’Ukraine aux Allemands. C’est un mélange de guerre, de révolution et de contre-révolution. C’est entre la joie, la liberté, la tristesse et la souffrance. Il arrive à Moscou, la ville où se déroule, comme le narrateur l’appelle, « la révolution de papier ». Il y fait des rencontres ; celle avec Kropotkine – enrichissante – et celle avec Lénine – inutile. Ensuite, viendra l’heure de son retour, et de la Makhnovchtchina, et de tout ce que les paysans et ouvriers d’Ukraine ont mis en œuvre malgré d’énormes difficultés. Mais ceci sera raconté prochainement dans un autre article. D’ailleurs, pour en savoir plus sur l’Ukraine de 1918 à 1921, Voline, dans son livre « la révolution inconnue », dédie un chapitre à ce mouvement et conseille la lecture des livres de Piotr Archinov qui a croisé le chemin de Nestor Makhno à maintes reprises.

    Citons un texte de La Voie vers la Liberté, organe de la Makhnovchtchina :

    « La Makhnovchtchina n’est pas l’anarchisme. L’armée makhnoviste n’est pas une armée anarchiste, elle n’est pas formée par des anarchistes. L’idéal anarchiste de bonheur et d’égalité générale ne peut être atteint à travers l’effort d’une armée, quelle qu’elle soit, même si elle était formée exclusivement par des anarchistes. L’armée révolutionnaire, dans le meilleur des cas, pourrait servir à la destruction du vieux régime abhorré ; pour le travail constructif, l’édification et la création, n’importe quelle armée, qui, logiquement, ne peut s’appuyer que sur la force et le commandement, serait complètement impuissante et même néfaste. Pour que la société anarchiste devienne possible, il est nécessaire que les ouvriers eux-mêmes dans les usines et les entreprises, les paysans eux-mêmes, dans leurs pays et leurs villages, se mettent à la construction de la société anti-autoritaire, n’attendant de nulle part des décrets-lois. Ni les armées anarchistes, ni les héros isolés, ni les groupes, ni la Confédération anarchiste ne créeront une vie libre pour les ouvriers et les paysans. Seuls les travailleurs eux-mêmes, par des efforts conscients, pourront construire leur bien-être, sans État ni seigneurs. »

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  • Double jeu

    Faire une série de retours sur l’histoire de la #FNSEA, nous permet de mieux comprendre la dose de violence et d’impunité consentie par l’État aux agriculteurs. La FNSEA a toujours eu un comportement ambigu ; d’un côté, elle attise la colère des agriculteurs, et de l’autre, elle se pose en médiatrice incontournable entre eux et l’État pour régler les crises à sa façon ; quitte à se faire huer par sa base comme ce fut le cas à Paris en septembre 2015 pour Xavier Beulin, homme d’affaires et capitaliste notoire(1) et président de ladite FNSEA.

    Dès sa fondation, en 1946, la FNSEA domine le paysage syndical. Par la suite, ni le MODEF(2) (d’orientation socialiste), ni le CNJA (centre national des jeunes agriculteurs) ne pourront sérieusement menacer le monopole de la FNSEA. Depuis le début, ce leadership convient parfaitement à l’État dont c’est l’unique interlocuteur. La France agricole de l’après-guerre vit une profonde mutation puisque en moins de vingt-cinq ans se met en place un modèle d’agriculture intensive qui fera de l’État français l’une des premières puissances agricoles d’Europe. La FNSEA a toujours soutenu cette orientation et, pour parvenir à ses fins, elle a, dès 1961, mis en œuvre l’emploi de la violence en organisant des manifestations particulièrement musclées dont les premières du genre se déroulèrent en Bretagne. Cette politique se révéla payante car les pouvoirs publics y cédèrent sur une série de revendications majeures.

    Dans les décennies suivantes, au gré des crises (surproduction, sécheresse, etc), caillassages de préfectures, blocus de gares, descentes dans les supermarchés, etc deviendront monnaie courante. Le paroxysme sera atteint en 1976, quand des viticulteurs en colère tueront un commandant de CRS à la carabine approvisionnée en munitions pour gros gibier et en blesseront 28 autres. L’enquête n’aboutira jamais, conformément à une tradition d’impunité solidement ancrée et qui resurgira avec les bonnets rouges .

    En 2013, la FDSEA(3), encouragée par son président, Thierry Merret, met en mouvement les légumiers de Bretagne mécontents des contraintes fiscales et administratives. Ils incendient le centre des impôts et les locaux de la MSA de Morlaix ; ils vont jusqu’à retarder l’arrivée des pompiers par un ballet de tracteurs et en leur déversant des tonnes d’artichauts sous les pieds. Ils ont droit alors aux plus vives félicitations de Thierry Merret (alors qu’au regard du droit, certains faits sont d’une extrême gravité). Trois jours plus tard, conjointement rédigé par le syndicat et la chambre d’agriculture de Bretagne, un communiqué hypocrite tout à la fois regrettait « le recours à des actions violentes » et les justifiait en affirmant que « La profession tout entière n’encourage pas à l’excès, mais elle ne sait plus comment se faire entendre afin que des mesures efficaces et rapides soient prises ! ». En fait, notre impression est qu’elle sait trop bien comment se faire entendre ! Malgré l’enquête, Thierry Merret ne sera pas inquiété et les forces de l’ordre feront mine de ne pas pouvoir identifier les auteurs des faits.

    A l’image de feu X. Beulin, les dirigeants FNSEA sont des notables souvent de droite, maires de leurs villages, administrateurs de coopératives, de la MSA et/ou du crédit agricole. Malgré que les manif’ organisées par la FNSEA aient causé des centaines de millions FF de dégâts, François Guillaume, après de bons et loyaux services (1979 à 1986) comme président de la FNSEA, devient ministre de l’agriculture sous Chirac, entre 1986 et 1988. Cette nomination est un signal clair en direction de la FNSEA et de ses méthodes. C’est une reconnaissance pure et simple, par l’État, de ses actions violentes ; pour le passé et l’avenir.

    Au fur et à mesure, la FNSEA s’est professionnalisée et aujourd’hui son expertise est appréciée jusqu’à Bruxelles. Elle est devenue une entreprise capitaliste plus soucieuse de ses parts de marchés et de ses profits que du monde agricole et des agriculteurs. Si les agriculteurs de la Fédération nationale des jeunes exploitants familiaux (FNJEF), liée au Modef, déclarent : « Si le système ne fonctionne pas, il faut changer le système » et que la Confédération paysanne déclare que « les plans d’allégements des charges ne changent rien car on ne s’attaque pas aux racines du mal », nous savons qu’ils sont uniquement motivés par une volonté de s’assurer des privilèges. Si nous sommes d’accord sur le principe qu’il faut changer de système, nous ne sommes pas, pour autant, d’accord avec les objectifs corporatistes poursuivis par les différentes organisations d’agriculteurs.

    Adhérer à la FNSEA, c’est aussi bénéficier de réductions diverses, façon comité d’entreprise, avec la « carte moisson » (réductions pour matchs de foot, pour décathlon, etc), y compris chez… le grand ennemi (carrefour & co). Les fédérations encaissent, au passage, un pourcentage sur les ventes ; ce qui revient à pratiquer ce que la FNSEA, elle-même, dénonce, à savoir, les marges arrières. Bien entendu, les exploitants agricoles ne se doutent pas des rétrocessions au profit des FDSEA.

    Lors de la grande grève du lait de 2009, la FNSEA dénonce à grand fracas les marges exorbitantes de la grande distribution. La réalité est toute différente. Entre 2005 et 2009, la marge des transformateurs (mise en boîte du lait, fabricants de beurre ou yaourt) a beaucoup plus augmenté que celle des distributeurs. Selon le ministère de l’agriculture, sur le prix de vente au public d’une brique de lait, la grande distribution s’octroie 18 %, le producteur reçoit moins de 30 % et le transformateur en prend la moitié ! Or, ce qui est le « plus amusant », c’est que si, parmi ces transformateurs, il y a des industriels, il est à noter qu’il y a aussi de nombreuses coopératives tenues par des organisations membres de… la FNSEA ! Par exemple, la plus importante de France, la société SODIAAL, avait comme président de son conseil d’administration Damien Lacombe, fils d’un Raymond du même nom qui fut président de la FNSEA de 1986 à 1992 !…

    Ce double jeu ayant été éventé, nombre d’agriculteurs quittèrent la FNSEA et continuèrent à livrer leur lait à des coopératives laitières qui, en fait, adhèrent à la FNCL (Fédération nationale des coopératives laitières) qui n’est autre qu’une antenne de la FNSEA qui, à l’évidence, centralise le pouvoir. Ce mécontentement, palpable chez les producteurs, se traduisit par quelques déboires électoraux avec la perte, par exemple, du contrôle d’une chambre d’agriculture au profit de la coordination rurale. Cependant, le monopole de la FNSEA demeure solide ; d’autant plus que cette dernière sait se rendre indispensable sur le front juridique et bancaire. Beaucoup d’exploitants agricoles sont empêtrés dans des situations difficiles, criblés de dettes et de problèmes juridiques. Coincés, ils sont souvent obligés d’adhérer à la FNSEA malgré leur aversion car c’est elle qui octroie prêts et « facilités ». La baisse continuelle du nombre d’agriculteurs depuis un demi siècle est la preuve d’une politique délibérée d’asservissement et d’une guerre d’usure contre les petits paysans. La FDSEA n’hésite pas à les mobiliser contre leurs intérêts tout en les manœuvrant dans des actions spectaculaires afin d’entretenir chez eux l’illusion d’actions efficaces, sauf que l’efficacité est, en définitive, destinée à promouvoir une politique de grands propriétaires. La FNSEA est, également, bien implantée au niveau des commissions d’installation ce qui lui permet de favoriser ceux qui y adhèrent ; obligeant ceux qui souhaiteraient rester indépendants ou qui voudraient se tourner ailleurs, à la rejoindre.

    Le nombre d’exploitants agricoles ayant été divisé par quatre entre 1955 et 2015, il est aujourd’hui inférieur à 500 000. C’est là le résultat de la politique agricole menée par l’État et la FNSEA qui s’est faite au bénéfice des agriculteurs les plus riches, dirigeants ou membres importants de ce syndicat. Ces dirigeants sont les gagnants de cette politique car ils ont pu moyennant les aides du Crédit Agricole (où ils ont leurs entrées) agrandir leurs propriétés en rachetant les terres abandonnées par leurs anciens collègues et en même temps s’enrichir en profitant, en tant que notables, du formidable développement du système coopératif agricole. Le crédit agricole, au niveau bancaire, et les coopératives, au niveau de l’agro-industrie, sont des puissances économiques de premier ordre.

    Malgré les manifestations fréquentes et spectaculaires, il y a une profonde identité de vue entre l’État et la FNSEA sur un objectif à long terme, connu sous le terme de PAC et fixé par la loi de modernisation de l’agriculture française de 1962 : Bâtir une agro-industrie puissante, centralisée et fortement capitalisée. Si la FNSEA doit prendre quelques libertés avec les règles en chemin pour protéger et développer ce secteur, qu’elle les prenne. Les pouvoirs publics ferment les yeux. Dans une confusion des genres, Bernard Lannes de la Coordination rurale (proche de l’extrême-droite), concurrente de la FNSEA, dénonçait : « … la FNSEA [qui] organise des pseudo-manifestations pour râler contre des décisions prises en cogestion avec l’État ».

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    Notes :

    ₁ En 2011, Xavier Beulin soutenait la proposition de loi du sénateur Christian Demuynck (UMP) visant à transposer un règlement européen de 1994 destiné à protéger les obtentions végétales et dont la conséquence pour les agriculteurs est que, s’ils veulent ressemer leur propre récolte, ils doivent verser une « rémunération aux titulaires des certificats d’obtention végétale » que sont les semenciers. Xavier Beulin était non seulement à la tête de la FNSEA, mais dirigeait également le groupe Sofiproteol qui détient des participations dans plusieurs grands groupes semenciers français (Euralis Semences, Limagrain, RAGT Génétique, Serasem
    – groupe InVivo)

    ₂ Mouvement de défense des exploitant familiaux

    ₃ Fédération Départemental des Syndicats d’Exploitants Agricoles

  • Les manifs’ de la #FNSEA

    Manifester est un droit fondamental qui est gravé dans la déclaration des droits de l’Homme. En régime de démocratie représentative, les citoyens peuvent ainsi affirmer publiquement leur opposition ou leur soutien à des projets. Parce qu’il offre la possibilité à des groupes de personnes d’affirmer une volonté collective en dehors des instances légales, tous les pouvoirs ont de tout temps cherché à interdire ou a limiter fortement ce mode d’expression. En France, le droit de manifester est strictement encadré par la loi qui fixe les modalités et les limites de son usage. Si comme la constitution l’affirme tous les citoyens sont égaux devant la loi, l’État se devrait de traiter toutes les manifestations de la même façon, guidé par le principe d’égalité ; les forces de l’ordre devraient adopter des comportements identiques face à tous les manifestants. Pourtant, il n’aura échappé à personne, pas même à l’observateur le plus étourdi, qu’il n’en est rien et c’est enfoncer des portes ouvertes que de dire qu’en France les forces de l’ordre adoptent un comportement très différent en fonction du type de manifestants qu’elles ont en face d’elles.

    Quand il s’agit de manifestations de salariés exprimant leur opposition à des fermetures d’usine, à des projets de loi ou luttant pour améliorer leurs conditions de vie et de travail, elles ne manquent jamais, au moindre débordement (jets de canettes ou de pierres, dégradations quelconques), de faire preuve de la plus grande intransigeance : interventions musclées (jets de grenades lacrymogènes, matraquages) et interpellations brutales de manifestants qui seront condamnés par la suite à des peines de prison. Ce sont là des pratiques habituelles. Tout le monde se souvient de l’interpellation par la police de militants syndicalistes qui, pour s’être opposés à un plan social destructeur d’emplois et avoir déchiré la chemise d’un cadre de leur entreprise lors d’une bousculade, ont été condamnés à des amendes et à de la prison avec sursis.

    Quand il s’agit de manifestations s’opposant à la destruction de milieux naturels ou à des projets absurdes, elles sont féroces : les opposants de Sivens, de Bure, de Notre-Dame-des-Landes et d’ailleurs savent ce qu’il en coûte de s’opposer, même pacifiquement, à des décisions technocratiques destinées uniquement à satisfaire des intérêts privés. Pour les réprimer, les forces de l’ordre utilisent une débauche de moyens, tant humains que matériels. Clairement, l’objectif poursuivi est de, à la fois, instaurer l’effroi chez les opposants et d’empêcher un soutien massif de la population, en les faisant passer pour des délinquants. La conséquence de cette stratégie répressive est que, à chaque manifestation, il y a de nombreux blessés parmi les manifestants ; le comble de l’horreur ayant été atteint, encore une fois, avec le décès de Rémi Fraysse, victime d’un tir de grenade par un gendarme. Lors de ces manifestations, la police multiplie les interpellations et la justice, qui par ailleurs s’obstine à considérer la mort de Rémi Fraysse comme un simple accident, montre alors sa vraie nature en condamnant lourdement les interpellés : prison ferme pour des jets de canettes, des bris de vitrines ou de mobilier urbain. Les media font preuve, quant à eux, d’une belle complicité ; ils dénoncent les casseurs en attirant l’attention du public sur le coût pour la collectivité de leurs agissements.

    Pour les manifestations initiées par la FNSEA ou la Coordination Rurale, l’attitude des forces de l’ordre est, totalement différente. Dans la région toulousaine, nous avons vu des compagnies de gardes mobiles assister passivement au déchargement de bennes de purin et de fumier sur des lieux publics par quelques paysans surexcités et ne pas réagir quand ces mêmes paysans incendiaient des stocks de vieux pneus sur des voies de circulation, couvraient de merde les murs d’une préfecture, dégradaient du mobilier urbain, bloquaient des rocades, des carrefours, des voies ferrées, avec d’énormes tracteurs valant des dizaines de milliers d’euros, perturbant ainsi gravement l’activité économique de toute une région.

    Ainsi, ces représentants de l’État, prompts à sanctionner une petite vieille ayant laissé pisser son chien sur un trottoir, une voiture mal stationnée ou un jeune excité, font preuve d’un laxisme et d’une bienveillance remarquables à l’égard de gens qui causent au total des centaines de milliers voire des millions d’euros de dégâts. Le plus extraordinaire est que ces actions se répètent d’année en année, et que, de plus en plus, elles s’amplifient et durent de plus en plus longtemps (déjà 2 semaines en ce début 2018 en région toulousaine). Ici, l’État d’habitude si soucieux de se faire respecter laisse bafouer son autorité et son prestige. Étrangement, toutes ces actions délictueuses ne sont suivies d’aucune interpellation ni mise en accusation par la justice. La même presse, qui habituellement dénonce les grèves de fonctionnaires comme une prise en otage des français, fait mine de ne rien voir ou minimise les faits. Quant aux hommes politiques, sans doute soucieux de ne pas heurter l’électorat rural, ils apportent, de façon unanime, leur soutien aux revendications des agriculteurs casseurs.

    Cette différence de traitement de la part de L’État (pas d’illusions, les forces de l’ordre agissent selon les consignes reçues) méritent une explication. Les statistiques nous disent qu’il y a en France 452 000 exploitants agricoles dont le revenu moyen est de 25 200 €/an. Mais derrière ces chiffres se cachent des réalités très différentes : entre les producteurs de céréales exploitant de vastes domaines, les propriétaires viticoles de grands crus, les propriétaires de grands vergers… et le petit paysan vivant difficilement de ce que produit sa petite exploitation en montagne, il y a un abîme, le même qui sépare un grand patron de son salarié. Mais alors que patrons et salariés sont dans des syndicats différents, dont les objectifs sont en principe opposés, une majorité d’agriculteurs adhère à la FNSEA. Y cohabitent ainsi d’authentiques capitalistes, à la fois propriétaires de vastes domaines, administrateurs de coopératives agricoles ou d’entreprises diverses (crédit agricole, mutuelles, etc) et des petits propriétaires obligés de travailler comme des abrutis pour percevoir un revenu parfois inférieur au RSA ; le seul lien qui les réunit est l’amour infini de la propriété qui les amène à sacraliser la propriété de leur outil de production. Même pauvres, les adhérents de la FNSEA se considèrent avant tout comme des propriétaires et pensent que leurs intérêts sont opposés à ceux des non-propriétaires (les classes exploitées) et leur lutte, à l’évidence, n’est en aucune manière une remise en cause de l’ordre capitaliste existant.

    C’est bien parce qu’ils sont animés par ces sentiments que l’État fait preuve de tant de bienveillance à leur égard ; État qui est d’abord le garant de la propriété privée, de l’ordre établi et le protecteur des classes dirigeantes. Ainsi les adhérents du MEDEF ou de la FNSEA partagent le même penchant pour la richesse, souffrent de la même aliénation et donc des même névroses. Les gros tracteurs (pour l’achat desquels ils s’endettent lourdement) sont à la volonté de puissance des agriculteurs ce que les voitures de luxe sont à la richesse des patrons. A chaque manifestation, ils n’hésitent pas à s’exhiber sur leurs engins, tels des chevaliers sur leurs montures. C’est ce spectacle qu’un certain public urbain apprécie car, dans ce simulacre de défi lancé à l’État et aux forces de l’ordre, ils se présentent comme des révoltés et nombre de personnes sont dupes et les plaignent. En réalité, ce qui motive leurs actions est la recherche du profit, leur amour de l’argent les empêchant d’apprécier toute autre valeur. Les lobbys industriels, malgré qu’ils empoisonnent la planète au mépris de la vie des personnes (amiante, diesel, perturbateurs endocriniens, etc), se battent pour augmenter leurs bénéfices. De la même manière, les lobbys agricoles continuent de se battre pour pouvoir continuer à utiliser des méthodes et des produits aussi nocifs pour les gens que destructeurs pour les équilibres naturels (glyphosate, insecticides, élimination des grands prédateurs, etc). Imprégnés du culte de la propriété, les adhérents de la FNSEA ne se rendent même pas compte qu’ils sont les premières victimes des méthodes de l’agriculture industrielle ; c’est, en effet, parmi les exploitants agricoles qu’il y a une des plus fortes hausses de cancers et de maladies professionnelles. Si cet aveuglement les amène à se tromper d’ennemis, c’est parce que les cadres syndicaux de la FNSEA exercent un parfait contrôle sur leurs troupes. D’un côté, ils les laissent saccager des biens publics, de l’autre ils s’évertuent à les faire épargner les biens privés appartenant aux « exploiteurs » dont il est légitime de se demander si certains d’entre eux n’auraient pas des intérêts communs avec la FNSEA.

    Ainsi, nous avons vu, lors des précédentes manifestations de la FNSEA, des agriculteurs dévaster consciencieusement l’espace public, bloquer des axes de circulation et perturber gravement, pendant plusieurs jours, le quotidien de salariés qui ne sont en rien la cause de leurs problèmes. En revanche, dans les centres commerciaux situés juste à coté, la vie continuait paisiblement, comme si de rien n’était. Les agriculteurs, très respectueux de la propriété privée, n’ont rien entrepris contre ces magasins. Pourtant, ce sont bien ces mêmes enseignes qui, poussées par le jeu de la concurrence, rivalisent de ruses pour acheter toujours moins cher les produits des producteurs et les presser encore plus. D’ailleurs, Leclerc vient de délocaliser sa centrale d’achats en Belgique afin de contourner les récentes lois visant à limiter la pression que la grande distribution exerce sur les petits producteurs car la législation belge est, sur ces points, bien moins contraignante.

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  • Morale d’une crise endémique

    Si le #capitalisme est tant glorifié par le discours dominant, c’est parce qu’il serait, selon les bourgeois, ce qui se serait fait de mieux jusqu’à présent. Certes, depuis plusieurs décennies, une croissance est au rendez-vous. C’est celle des inégalités sociales qui augmentent dans un monde livré à la cupidité des élites. Notre pouvoir d’achat baisse, nos impôts grimpent et les États endettés se sont mis à la merci des agences de notation qui disposent d’un véritable pouvoir de vie et de mort sur eux, sans que cela ne nous soit profitable en quoi que ce soit. Malgré la crise des années 2007-2008, la finance a continué de grossir et de prospérer en distribuant des bonus et des gratifications toujours plus obscènes à ceux qui la servent. Alors qu’ils en avaient l’occasion, les États ont fait en sorte de ne rien changer et ont tenté de nous vendre des chimères ; promesses de régulation-moralisation… promesses creuses et mensongères. C’est en faisant l’éloge de leur morale que les dirigeants ont fait passer cette pilule amère.

    Lors de cette crise, les dirigeants politiques de tous les pays capitalistes avaient fait mine de s’élever contre les excès du capitalisme, se joignant, à demie voix, à ceux qui réclamaient le scalp des banquiers et, ce, afin d’apaiser la colère des populations. Ce krach a, d’ailleurs, plongé le monde dans un marasme tel que nous sommes, encore maintenant, en train d’en subir les conséquences. Pourtant, les tenants du néo-libéralisme qui, jusqu’alors, prônaient le retrait de l’État ont, unanimement, imploré ce dernier de sauver la finance et l’économie en déroute. Une fois l’orage passé, ils ont abandonné cette position en faisant le chemin inverse, sans peur des contradictions. Hier, il était vulgaire de critiquer la dérégulation, laquelle s’est imposée depuis plusieurs décennies sous le vocable de « mondialisation ». Aujourd’hui, il serait, à les entendre, indécent de douter que ceux qui en étaient les auteurs ont su remettre en ordre le chaos qu’ils ont créé. Cela signifie qu’ils feignent de ne pas comprendre quelles sont les causes réelles de cette crise historique.

    Après la II° guerre mondiale, la menace d’un affrontement entre l’est et l’ouest occupait les esprits et le rapport de forces semblait favorable à la classe ouvrière. Cela imposait aux accapareurs de composer avec l’ambiance générale afin d’avoir le temps de porter un coup d’arrêt au développement des idées socialistes. A cette fin, ils acceptèrent de limiter leurs appétits de profit et ils acceptèrent de financer le développement d’un volet social (sécurité sociale, etc). Le système bancaire et le crédit étaient, alors, au service des politiques économiques et sociales des États. Cette situation paradoxale fut d’une durée suffisamment longue pour qu’elle put apparaître comme définitive. D’autant plus que la reconstruction d’après-guerre contribuait à faciliter les choses et à brouiller les cartes. La collusion entre État et capital fut telle que ce dernier fut amené à ne plus fixer à l’économie des finalités et des limites. Cela se traduit, dans les faits, par une volonté de laisser la finance redevenir le maître de l’économie. Celle-ci n’étant plus bridée, elle n’est plus, à l’évidence, l’instrument d’une logique de renforcement de l’État (qui se recentre d’autant plus dans ses fonctions coercitives – et pour cause), et surtout elle cesse de devoir se justifier d’une quelconque utilité. L’économie, alors subordonnée à la seule idée de profit, ne fonctionne plus qu’en se conformant à l’idéologie marchande. Si les États ont été sommés de mettre leurs moyens au service de la libéralisation des échanges, il faut clairement reconnaître qu’ils ne se sont pas trop faits priés pour le faire.

    A l’origine, il s’agissait de mettre en application la théorie libérale d’Adam Smith. Prenons un exemple succin pour en illustrer l’esprit et la morale : « Ce n’est pas de la bienveillance du boulanger que nous attendons notre pain, mais bien du soin qu’il apporte à ses intérêts. Nous ne nous adressons pas à son humanité, mais à son égoïsme ». Ce sophisme suppose que l’économie trouve en elle-même sa justification morale. En bref, la moralité collective naîtrait de l’immoralité individuelle. Cela justifierait que les marchés n’aient d’autre règle à respecter que la leur – l’appât du gain – rendant ainsi inutile le fait d’être gouvernés et contrôlés. La réalité a démenti le postulat du marché vertueux dont la main invisible réglerait tout. Ce ne sont pas quelques faillites (rançon du système) et des condamnations sacrifiant quelques individus avides et cupides qui peuvent effacer le réel. Celui-ci ayant mis en défaut les émules d’Adam Smith, ces derniers ont tenté, par ce biais, de faire passer les marchés pour les victimes de quelques banquiers et traders indélicats afin d’entretenir le mythe de l’infaillible marché. Même ses partisans les plus farouches auraient dû avouer que le marché livré à lui même a produit le contraire de ce qu’ils proclamaient et qu’il n’est en rien vertueux. En définitive, le dogme de l’infaillibilité du marché a servi à mettre en place des mécanismes structurels et permanents qui contredisent toutes les promesses sur lesquelles il repose. Une récupération de ce pouvoir par les États n’y changerait absolument rien car ce serait leur transmettre le mandat pour poursuivre dans la même voie, car ils ne sont que des instruments au service du capitalisme.

    Depuis lors, c’est une véritable industrie financière qui s’est installée au pouvoir ; les États se réduisant sciemment au rôle complice d’exécutants. S’ils n’interviennent pas, c’est parce que l’interventionnisme a perdu toute légitimité et c’est, principalement, sur les marchés que tous les projets économiques doivent se financer. Comme tout investissement repose sur une contrepartie, c’est sur la spéculation et les critères propres à la finance – telle la rentabilité – que reposent les choix. Ce sont, donc, les intérêts du marché qui prévalent ; et c’est lui seul qui décide de ses intérêts et des moyens nécessaires à leur satisfaction, avec la complicité des États.

    Comme le voulait la doxa libérale, les États laissent les marchés gouverner à leur place. Pour ce faire, toute l’invraisemblable machinerie de la mondialisation économique et financière libère les forces scélérates qui sont d’autant moins contrôlées qu’elles en font l’inavouable prospérité. Le système financier mondial auquel les États ont délégué leur pouvoir de régulation a inventé un « nouveau » concept de gouvernement à l’échelle planétaire : l’anomie. L’anomie est, à la fois, matrice et motrice d’une dynamique de destruction et elle est devenue la condition essentielle de son propre développement.

    L’anomie ; cela ne vous rappelle-t-il rien ? En effet, il est souvent parlé de l’anarchisme (on utilise plus souvent le terme anarchie) comme d’un courant dangereux pour la société car laissant libre cours au instincts les plus bas ; un enfer où les prédateurs s’attaqueraient impunément aux honnêtes gens. Cette caricature doit être démentie. C’est l’anarchisme qui, à tort, est accusé de cette anomie qui est l’apanage « exclusif » du capitalisme dans sa plus pure expression. En revanche, l’anarchisme (dans lequel s’inscrit l’anarchosyndicalisme) plébiscite la liberté totale de l’individu et revendique sa participation directe aux prises de décision qui impactent sur son existence et son bien-être ; c’est un de ses fondements. L’anarchisme est la plus haute expression de l’ordre. Si l’individu est libre, la propriété privée est abolie et l’administration des choses et des biens y est strictement encadrée par la collectivité concernée, au profit de tous. Les rapports politico-sociaux sont basés sur la solidarité et l’entraide, sans idée de profit ou de marché, sans qu’ils soient brouillés par des mythes salvateurs et transcendants. L’universalité des besoins y est reconnue et leur satisfaction est la priorité. Il n’y a que dans ces conditions que l’individu pourra s’émanciper et échapper aux comportements névrotiques – qui se retrouvent d’abord dans les sphères du pouvoir – qui se consolident dans un cercle vicieux.

    Depuis qu’il existe, le capitalisme a largement démontré son pouvoir de nuisance, mais cela n’a jamais suffi pour qu’il s’effondre. Seules des forces sociales révolutionnaires sont à même de proposer une véritable « alternative » au capitalisme. Sans ça, les crises succéderont aux crises ; et, la prochaine est déjà annoncée comme plus terrible que la précédente.

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  • #Économie et #écologie

    Depuis quelques années, le monde prend lentement conscience des dégâts causés par le mode de développement productiviste lié à l’économie capitaliste. Réchauffement climatique, destruction de la biosphère, effondrement de la bio-diversité, épuisement des ressources naturelles, raréfaction des espaces naturels, artificialisation des sols, empoisonnement par des résidus chimiques de l’eau, de l’air et des sols… la liste des menaces qui planent sur l’humanité en ce début de XXI° siècle est très longue et laisse présager un futur très sombre pour les générations à venir.

    Pour autant, malgré que tous ces faits soient scientifiquement établis, malgré que des voix incontestables ne cessent à longueur de tribunes de nous alerter, malgré même que de grandes messes réunissant États, institutions internationales et ONG se multiplient, presque rien ne change. Ainsi on sait que les objectifs pourtant minimes adoptés lors de la COP21 pour limiter l’amplitude du réchauffement climatique ne seront pas tenus, que la production d’hydrocarbures comme celle des biens manufacturés augmente, que les ventes d’armes battent des records, que la destruction des forêts vierges continue, que l’extinction d’espèces d’êtres vivants se poursuit au même rythme infernal, que l’artificialisation des sols progresse et que les surfaces de terres arables diminuent, etc. L’adoption de lois, de règlements, de décrets par la communauté internationale ne change, dans les faits, rien à la triste réalité, l’appât du gain immédiat, la volonté de puissance, les désirs de richesse et de domination sont beaucoup plus forts que la crainte suscitée par d’hypothétiques catastrophes à venir. La grande majorité des politiciens, des financiers, des entrepreneurs est fascinée par l’argent et lui voue un véritable culte. Comme Midas, le légendaire Roi grec qui aveuglé par sa passion pour l’or en vint à se suicider, les dirigeants de la planète compromettent pour la même raison notre futur commun. La seule différence avec le Roi Midas est que lui n’était pas conscient des conséquences de ses actes alors que les dirigeants actuels ne pourront pas dire qu’ils ne savaient pas.

    Leur unique souci est que rien ne vienne mettre en péril le régime capitaliste actuel. Au contraire, leur préoccupation principale est de favoriser la croissance économique en créant de nouveaux besoins et de nouveaux marchés. Il n’y a rien d’humain dans leur credo purement marchand. Énergies renouvelables, voitures électriques, habitats écologiques, agriculture bio, etc. Ce sont autant de nouveaux terrains de jeu pour les multinationales sur lesquels elles vont étancher leur soif inextinguible de croissance et de profits. Tant pis si les nouvelles technologies mises en œuvre se révèlent à leur tour mortifères, si toute cette expansion se fait comme les précédentes au détriment des hommes et de la nature. Au XIX° siècle, la révolution industrielle s’est faite sur l’exploitation insensée du travail des hommes, des femmes et des enfants dans les mines et les manufactures de la vieille Europe, la révolution écologique du XXI° siècle se fait sur l’exploitation du travail des hommes, des femmes et des enfants dans les mines et les usines d’Afrique, d’Asie, d’Amérique du Sud. Les siècles passent, les besoins évoluent. Sans cesse, de nouveaux marchés et de nouveaux biens apparaissent. Seules ne changent pas les formes d’exploitation de l’homme et de la nature par les capitalistes modernes qui retrouvent les accents de leur prédécesseurs pour justifier l’innommable. Récemment, le responsable d’une multinationale exploitant des mines au Congo affirmait à un journaliste américain : « il serait irresponsable d’arrêter le travail des enfants car cela aggraverait la pauvreté dans les régions minières et rendrait encore pire la condition des mineurs locaux ». Pour produire les batteries électriques, les panneaux photovoltaïques, les smartphones, etc, il faut de plus en plus de minerais précieux (cobalt, lithium, etc) de terres rares aux prix les plus bas possibles pour satisfaire tout à la fois la soif de profit des capitalistes et l’appétit de biens des foules « modernisées ». Pour maintenir dans un état d’asservissement volontaire les populations exploitées, les classes sociales dominées, pour que leur état de résignation amorphe persiste et qu’elles acceptent sans trop rechigner leur état de servitude, il faut impérativement que le système puisse continuer à leur fournir leur dose de gadgets innovants, de produits à la mode, de jeux, de spectacles, d’émissions télés. Exploitation outrancière de l’homme et exploitation outrancière de la nature sont les deux fondements du système capitaliste, les deux choses sont étroitement liées et de la même manière que ce système vampirise et détruit la nature, il épuise et détruit les fondements de notre humanité.

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  • La bourse ou la vie

    Évoquer l’#écologie, aujourd’hui, c’est comme quand, jadis, il était question du suffrage universel. Tous les bourgeois et tous les partisans de l’ordre vous diront que vous voulez leur ruine, le triomphe de l’obscurantisme et de l’anarchie. Mais, par la force des choses, quand la pression populaire devient irrésistible, il nous est accordé ce que l’on nous refusait, hier ; mais, fondamentalement, rien ne change (La COP 23 en est un bel exemple).

    La prise en compte des exigences écologiques a déjà ses partisans capitalistes même si beaucoup d’adversaires subsistent au sein du patronat. Et pour cause, si certains voient dans l’écologie une belle occasion de faire de fructueuses affaires, d’autres s’inquiètent de l’incompatibilité de leur business avec un changement dans ce sens-là. L’impasse écologique est une certitude depuis les années 70’. Le capitalisme s’ingénie à intégrer cette contrainte de la même façon qu’il a intégré toutes les autres. C’est pourquoi il est important de se poser la question : Que voulons-nous ?

    Voulons-nous un capitalisme qui s’accommode des contraintes écologiques ou bien une révolution sociale et culturelle qui abolisse les contraintes du capitalisme et qui instaure un nouveau rapport des hommes à la collectivité, à l’environnement et à la nature ?

    Il faut répondre à la question car l’urgence, aujourd’hui, c’est de ne plus saloper la planète au point qu’elle en devienne inhabitable. Il nous faut tenter de définir, dès le départ, pour quoi nous luttons et pas seulement contre quoi. Il nous faut, aussi, essayer de prévoir comment le capitalisme sera affecté et changé par les contraintes écologiques. Expliquons, d’abord, en termes économiques, ce qu’est une contrainte écologique. Prenons par exemple les gigantesques complexes chimiques de la vallée du Rhin. Chaque complexe combine les facteurs suivants :

    – les ressources naturelles (air, eau, minéraux) jusqu’ici gratuites car elles n’avaient pas à être reproduites.
    – des moyens de production (machines et bâtiments) qui sont le capital immobilisé et qui s’use. Il faut, donc, en assurer le remplacement (la reproduction).
    – de la force de travail humaine qui, elle aussi, demande à être reproduite (il faut nourrir, soigner, loger, former le travailleur).

    Dans l’économie capitaliste, la combinaison de ces facteurs au sein du processus de production a pour but principal le maximum de profit possible. La firme, par exemple, ne se demande jamais comment faire pour que le travail soit le moins pénible possible ou pour que l’usine ménage, au mieux, les équilibres naturels et l’espace de vie des gens, ou encore pour que ses produits servent les fins que se donnent les communautés humaines.

    Dans la vallée du Rhin, la concentration humaine, les pollutions de l’air et de l’eau ont atteint un degré tel que l’industrie chimique, pour continuer de croître ou même seulement de fonctionner, se voit obligée de filtrer ses fumées et ses effluents. L’investissement dans la dépollution accroît plus encore la masse des capitaux immobilisés, dont il faut assurer l’amortissement (installations d’épuration) et le produit (la propreté relative de l’air et de l’eau) qui ne peut être vendu. En somme, il y a une augmentation simultanée du poids du capital investi, du coût de la reproduction de celui-ci et des coûts de production sans augmentation des ventes. Par conséquent, ou bien le taux de profit baisse ou bien le prix du produit augmente. La firme cherchera, bien évidemment, à relever le prix de vente, comme le font déjà toutes les autres firmes polluantes (cimenteries, métallurgie, sidérurgie, etc). En définitive, tous chercheront à faire payer le consommateur, car c’est sur son dos qu’ils vivent. La prise en compte des exigences écologiques aura pour conséquence l’augmentation rapide des prix alors que les salaires réels stagnent déjà. Le pouvoir d’achat populaire sera comprimé et le coût de la dépollution sera prélevé sur les ressources dont disposent les gens pour vivre (pour consommer, en langage capitaliste).

    Il faut bien comprendre que l’économie a pour tâche de tout mettre en œuvre, aussi efficacement que possible, afin d’optimiser les facteurs de production pour créer le maximum de richesses avec le minimum de ressources naturelles, de capital et de travail. Prenons, par exemple, la réduction de la force de travail humain dans le milieu ouvrier. La proportion de la population active occupée dans l’industrie est tombée d’environ 40 % en 1970 à environ 30 % en 1990, puis à moins de 20 % en 2000 ; chiffres éloquents.

    Le président Macron, ce grand récupérateur, a décidé de se poser en défenseur du climat et a organisé le 12 décembre 2017 un « sommet climat » qu’il prétend être celui du « sommet de l’action » pour montrer que la dynamique se poursuit, malgré le retrait des États-Unis, autour des questions de finances et de climat. Nous assistons à l’alliance entre les écologistes tiers-mondistes et la grande finance, le tout orchestré par l’Union Européenne sous le regard amusé du géant américain qui a désormais pris congé de toute cette mascarade.

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  • Gros bonnets et bonnets rouges !

    La presse et autres « pro » de la « com » nous présentent toujours le salon de l’agriculture (et pas des #agriculteurs) comme un nec plus ultra ; un événement à ne pas manquer. Qu’à cela ne tienne, Président et présidentiables, ministres, élus et autres notables s’y précipitent ; être filmés, vus, applaudis, remarqués… et être sifflés ou hués, bien loin de les desservir, leur donne une aura de combativité. Tout cela aide la puissante #FNSEA à faire sa petite cuisine.

    Au-delà du salon et de la cuisine, que nous donne-t-on d’autre à voir ? Chambres (agricoles), bureaux ?… ou même étables, bergeries, vergers,… ? Eh, bien, non ! Ce sont leurs poubelles que les exploitants agricoles, bridés par les antennes de la puissante fédération, ont décidé de faire valoir : Bennes de fumiers, de purin, de végétaux invendus ou invendables, etc sont réservés à la population. Et, c’est sans doute motivés par un souci aigu de l’environnement (ou par désespoir ?) qu’ils brûlent des quantités de pneus qui dégagent des fumées extrêmement toxiques et polluantes pour protester contre ce qui leur semble injuste (et nous ne contestons pas le caractère injuste de ce que nombre d’entre eux vivent). Les journaux apprécient et en font leurs choux gras, en accord parfait avec l’ambition capitaliste de l’État et des gros propriétaires. Aucune critique ; ni sur les moyens ou la façon de les employer, ni sur le fond du problème.

    Il est vrai que la grande précarité de beaucoup d’agriculteurs les obligent à considérer leur situation à court terme et ne leur laisse pas trop le choix. Pourtant la baisse drastique du nombre d’agriculteurs, une hécatombe (nombre divisé par quatre en soixante ans environ), devrait les faire réfléchir ; sur leurs méthodes, certes, mais aussi sur leurs cibles et sur la puissante fédération nationale (divisée en FDSEA ou FRSEA) qui régit leur présent et détermine leur futur ; ainsi que sur l’efficacité réelle de leurs spectaculaires actions puisque la baisse ne s’arrête pas. Avec une moyenne de vint-cinq mille paysans par an mettant la clef sous la porte, l’hémorragie est devenue chronique.

    Dans le sud de la France, le délégué d’une FDSEA justifiait le recours à des méthodes musclées en déclarant que la solidarité de la population était essentielle et que leurs actions seraient d’autant plus efficaces que la solidarité serait effective. Grand étonnement de notre part. En effet, nous comprenons parfaitement que l’on nous parle de solidarité mais nous demandons quand même : Où étaient-ils ces exploitants agricoles (pas les gros bonnets, ceux qui triment) lorsqu’il fallait se mobiliser et agir contre la loi « El Khomri » du nom de la ministre qui a donné son nom à cette loi résolument anti-sociale ? Leur absence de solidarité en dit long. Les agriculteurs pauvres en colère semblent, dans une forte proportion, ne pas se rendre compte qu’ils sont instrumentalisés par la « fédé » et que s’il leur est permis de casser, vandaliser et perturber la vie de gens qui ne sont en rien coupables de ce qui leur arrive (lesquels sont souvent dans des situations similaires à la leur), c’est parce que, outre que leurs actions leur donnent l’illusion d’une radicalité et l’impression de faire le maximum, ils servent les intérêts de ceux-là mêmes qui les exploitent. Tant qu’ils n’ouvriront pas les yeux, ils seront, pour beaucoup d’entre eux, irrémédiablement condamnés à disparaître, à plus ou moins brève échéance.

    La solidarité est l’une des armes des exploités ; et, il est indispensable que les agriculteurs concernés – comme d’ailleurs les autres exploités – prennent du recul avec ceux qui s’octroient le droit de les représenter. Les agriculteurs ne pourront changer durablement leur situation, et dans un sens qui soit favorable à tous (à eux et à tous les exploités), qu’à l’unique condition d’acquérir une conscience de classe. Sans cela, sans avoir conscience de la lutte des classes qui se déroule, ils resteront isolés et à la merci d’un système qui rabote par le bas et se développe à leurs dépens. Il nous semble, donc, que les agriculteurs pourraient aller déverser leurs poubelles ailleurs et faire le ménage chez les profiteurs qui les incitent à, uniquement, penser et agir de façon corporatiste.

    #Edito d’@Anarchosyndicalisme ! n°158 / Mars - Avril 2018
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  • Le manifeste de Sarajevo.

    Contre l’apartheid linguistique.

    Au printemps 2017, à Sarajevo, des croates, des bosniaques, des serbes ainsi que des monténégrins ont lancé un manifeste dans lequel ils affirment conjointement qu’ils parlent "une langue commune". Les quelques huit mille signataires de ce manifeste posent un constat. De Sarajevo à Podgorica, en passant par Belgrade et Zagreb, quinze millions de personnes utilisent le même idiome : une langue qui fut normée aux XIX° et XX° siècle, connue du temps de la Yougoslavie comme le serbo-croate (ou croato-serbe) et écrite tantôt en alphabet latin (croatie et bosnie), tantôt en cyrillique (serbie et monténégro).

    Cette langue est désormais officiellement sans nom. Cependant, dans le monde de l’éducation, de la recherche et au sein des administrations, elle est parfois appelée "BCS" (bosno-croato-serbe), comme au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie à La Haye, ou bien "BCMS" (M pour "monténégrin") ou encore "BHS". Quand ils vivent à l’étranger, les ressortissants des pays où elle est parlée "disent le plus souvent « Notre langue » (ndlr : Nas jezik)". C’est ce que déclare la romancière croate Slavenka Drakulic. Il s’agit d’une langue standard polycentrique, parlée par plusieurs populations d’États différents.

    A contrario, cela pointe le levier linguistique dans l’émergence des nationalismes qui furent à l’origine de la tragédie de l’ex-Yougoslavie. Par conséquent, le manifeste de Sarajevo dénonce l’action des identitaires linguistiques. En effet, encore de nos jours - dans les écoles de ces ex-Républiques yougoslaves - les enfants sont séparés en fonction de leur supposée origine sous prétexte qu’ils ne parleraient pas la même langue. Comme cela arrive souvent, dès que quelqu’un ose critiquer les constructions pseudos-culturelles, mais réellement nationalistes et identitaires ; cette position leur vaut d’être menacés et accusés d’être des parasites ou des traîtres à leurs nations respectives - nations qui sont nées de l’éclatement sanglant de l’ex-Yougoslavie dans les années 90’. Durant cette période, 150 000 yougoslaves sont morts pour que, selon l’expression conne et sacrée, « des langues puissent vivre ». Nous pouvons voir maintenant à quoi et à qui cela a servi.

    Autre constat : depuis l’éclatement de la Yougoslavie, les élites nationalistes n’ont eu de cesse de creuser le fossé linguistique qui est à la source de leurs fonctions et privilèges. Au premier rang de la corporation des distingués linguistes qui, passés les massacres, se sont bâtis de belles carrières, nous ne nous étonnerons pas de trouver la présidente croate Kolinda Grabar Kitarovic. "Cette prétendue langue commune était un projet politiquement mort avec l’ex-Yougoslavie" a-t-elle déclaré. Bien sûr, une réunification lui coûterait son poste. Dans un style plus direct, plus post-stalinien, l’écrivain Davor Velnic a qualifié les anti–nationalistes de "Yougo-intellectuels", d’"apatrides", de "parasites" qui n’ont "jamais accepté le fait qu’il y ait un État croate souverain et internationalement reconnu". Voilà qui fleure bon le poteau d’exécution.

    La linguiste croate Snjezana Kordic a donc essuyé, avec ses co-signataires du manifeste, une violente campagne de presse dans son pays. Son tort ? Dans son dernier ouvrage, « La langue et le nationalisme", publié aux éditions Durieux en 2010, elle a énoncé quelques évidences historiques sur l’utilisation de la langue à des fins nationalistes. Son livre affirme, en effet, que les langues croate, serbe, bosniaque et monténégrine ne sont que les différentes variantes d’une seule et même langue. C’est en Croatie que la pureté de la langue a atteint son paroxysme. Elle y est devenue, depuis vingt ans, une grande priorité ; ce qui est un signe flagrant de la domination du nationalisme. Cela est d’autant plus vrai que les différences imposées par les linguistes croates sont artificielles et que leurs travaux sur la langue sont subventionnés par l’État croate.

    Le fait est que, en Croatie, depuis l’indépendance, l’aéroport n’est plus un « aerodrom » mais un « zracna luka », tandis qu’un porte-parole est un « glasnogovornik » et non plus un « portparol ». La tentative de transformer la "televizija" (télévision) en "dalekovidnica" ("vision lointaine") a, en revanche, fait long feu. Dans ce pays, les films serbes ont un temps été sous-titrés ... jusqu’à ce que les continuelles crises de rire des téléspectateurs ne viennent mettre un point final à cette étrange pratique burlesque.

    D’autres exemples d’artifices linguistiques nous sont également offerts ; mais en Bosnie, cette fois. En effet, les autorités bosniaques, soucieuses de la santé de leurs administrés, ont décidé de diffuser en serbe, en croate et en bosniaque - que « fumer tue ». Cette séparation linguistique, beaucoup la jugent artificielle et dictée par une volonté d’attiser les nationalismes. En réponse à ces contorsions, les bosniaques ont également réagi avec humour. En 2014, lors de manifestations en Bosnie, un slogan était apparu dans les cortèges : « Gladni smo na sva tri jezika ! » ("Nous avons faim en trois langues !"). Quant aux dirigeants du Monténégro, indépendant de la Serbie depuis 2006, ils ont vite fait ajouter deux lettres dans leur alphabet .…

    @Anarchosyndicalisme ! n°158 / Mars - Avril 2018
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  • La grande régression d’#octobre_1917

    https://www.facebook.com/notes/cnt-ait-toulouse/la-grande-r%C3%A9gression-doctobre-1917/921520861334082

    60 ans après l’abolition du servage en Russie, les Bolcheviks ont rétabli l’esclavage en condamnant des millions de détenus aux travaux forcés et à la mort lente. Le marxisme-léninisme a la prétention d’être une théorie émancipatrice avec comme finalité d’instaurer une société sans classes où l’exploitation de l’homme par l’homme disparaîtrait à jamais. Hélas, pour réaliser cet idéal, il serait nécessaire, selon les « textes sacrés », de passer par une dictature du prolétariat laquelle se convertirait quasi-instantanément en dictature sur le prolétariat, mais pour une durée assez brève, selon Marx. Dans les faits, elle s’est transformée en une tyrannie absolue pendant plus de 70 ans, en Russie.

    La prise du Palais d’hiver

    La « révolution » de 1917 (prise du Palais d’hiver) a, en fait, accouché d’un État totalitaire dont la spécificité a consisté à mettre en place un système pénitentiaire gigantesque et d’une ampleur inégalée au XX° siècle : la fameuse institution du Goulag (1) qui va maintenir en détention, entre 1930 et 1953, 20 millions de personnes (estimation minimale) plus 6 millions de « déportés » ou « déplacés spéciaux » (2). C’est un des régimes les plus répressifs et sanglants de l’histoire.

    En ces temps de commémoration larmoyante, où le souvenir de la « révolution d’octobre » (soi-disant prolétarienne) fait encore battre des cœurs ingénus (léninistes, trotskistes, maoïstes & co), il est bon de rappeler que cette prise d’armes « blanquiste » fut la confiscation d’un processus révolutionnaire au profit d’une avant-garde soi-disant éclairée dont les agissements contribueront à assombrir et ternir, pour des décennies, l’idée même de révolution.

    Sur les ruines de l’État tsariste, à peine sorti de la féodalité, les Bolcheviks édifient leur magnifique « État ouvrier » dont les réalisations, véritablement pharaoniques, vont reposer en grande partie sur l’esclavage de millions de détenus. Soumis à l’arbitraire, dans des conditions de « travail » épouvantables (Températures allant jusqu’à - 50°C, à la Kolyma), mal vêtus, sous-alimentés, ils sont voués à une mort lente par épuisement et dénutrition. Les Zeks ou ZK (terme désignant les détenus affectés au creusement du canal mer Baltique-mer Blanche, puis les détenus de tous les goulags) sont sans conteste les esclaves dont le régime a besoin pour mener à bien sa politique de grands travaux. C’est une main d’œuvre docile, à très faible coût d’entretien, et qui présente l’avantage d’être aisément renouvelable : il suffit simplement de procéder à de nouvelles vagues d’arrestation pour les remplacer.

    Malgré la publication de nombreux témoignages de rescapés et l’accès désormais possible à une énorme quantité d’archives, l’opinion publique occidentale fait encore coïncider le goulag avec l’accession de Staline au pouvoir. Or, c’est dès l’été 1918 que sont créés les premiers « konsentrasionny lager ». Le décret du 5 septembre 1918 à propos de la Terreur Rouge (publié dans le journal « Izvestia » le 10 septembre 1918), signé de la main de Lénine, stipule que ces camps ont pour fonction de « protéger la république soviétique contre ses ennemis de classe en isolant ceux-ci dans des camps de concentration » .

    Bien que dans cette Russie à peine sortie de la féodalité et peu industrialisée, la bourgeoisie soit numériquement très faible et que l’aristocratie terrienne représente assez peu de monde, la catégorie « ennemis du peuple » (plus tard appelés « éléments anti-soviétiques ») s’accroît de façon vertigineuse jusqu’à englober, au début des années 50’, des dizaines de millions de personnes. Phénomène assez remarquable puisque plus on élimine d’ennemis, plus il en apparaît. Il est donc légitime de s’interroger sur le fait de savoir si ces ennemis ne surgissent pas plutôt du peuple et si, en fin de compte, et vu l’ampleur du phénomène, ce n’est pas la population dans son ensemble qui est l’ennemie du régime.

    Présents dès les débuts de l’instauration du « socialisme », les camps ne sont donc pas une quelconque pathologie, ni une maladie honteuse du système bolchevique, comme voudraient nous le faire croire certaines sectes léninistes ; ils sont un élément constitutif de ce régime. Leur fonction répressive, dissuasive et terrifique se double, en quelques années, d’un rôle économique important, d’autant plus que l’afflux quasi-constant de nouveaux détenus permet à l’administration pénitentiaire de lancer sans cesse de nouveaux projets, toujours plus grandioses et démesurés : mise en valeur de contrées inhospitalières, percements de canaux, construction de routes, villes, voies ferrées, exploitation du pétrole, de ressources minières, etc. A son apogée, en 1950, le Goulag assurera en URSS la totalité de la production de platine et de diamant, 90 % de la production d’or, 35 % des métaux non-ferreux, 35 % du nickel, 12 % du charbon et du bois, etc (3).

    C’est à la police politique, la Tchéka, fondée le 7 décembre 1917, dirigée par F. Dzerjinski jusqu’à sa mort en 1926, qu’est confiée la gestion des premiers camps de concentration. A partir de février 1922, la Tchéka devient GPOU puis OGPOV et enfin NKVD. En ces temps de misère et de rationnement pour la population, les membres de la Tchéka jouissent de privilèges exceptionnels (rations alimentaires supérieures à la moyenne, même à celles des membres de l’Armée rouge, prérogatives quasi-illimitées, etc), privilèges qui attirent toute sorte d’individu à la moralité et aux motivations douteuses. Dzerjinski, dans une lettre à sa sœur, avoue : « je suis entouré de canailles, mais ce sont les seules personnes qui veulent rester » . Comme toutes les gardes prétoriennes de tous les États du monde, la Tchéka se vit accorder une grande liberté d’action pour traquer les « ennemis du peuple », ennemis dont la définition deviendra au fil du temps de plus en plus extensible et en conséquence l’empire pénitentiaire du goulag va, en quelques années, s’étendre sur tout le territoire soviétique, devenant un véritable État dans l’État, doté d’une garde armée, la VOKHR (elle comptera jusqu’à 1 million d’hommes) et de territoires entièrement sous son contrôle. Le plus grand complexe de camps, le Dallstrooï, fondé en 1932 et connu sous le nom de Kolyma, gère 2 millions de détenus. Le Goulag en arrivera à occuper un septième de la surface totale de l’URSS.

    Aux îles Solovki, archipel de la mer Blanche, un camp célèbre pour avoir été le premier fondé par le régime soviétique (entre autres, les marins survivants de Kronstadt y seront détenus), le responsable en chef accueillait les arrivants par ces mots : « Sachez tout d’abord que le pouvoir ici n’est pas soviétique, mais soloviétique (fine allusion aux Solovki). Toutes les lois, toutes les règles, vous les oubliez, ici règne une loi à part » (4). C’est, ajoute N. Werth, l’arbitraire absolu érigé en règle. Si les citoyens soviétiques ne disposent, dans les faits, que de très peu de droits face à l’État, les détenus, eux, n’en ont plus aucun. Aux Solovki, l’encadrement des prisonniers est confié à des droits communs, très souvent des anciens tchékistes condamnés par leur hiérarchie pour des exactions et des abus divers. Le système n’hésite pas à appeler ça « l’autogestion des camps ». D’après Jacques Rossi (ex-communiste français et ex-membre du Kommintern condamné en 1937 à 18 ans de camp et à 5 ans de relégation) qui a collecté, au cours de sa détention et de ses nombreux transferts, de multiples témoignages de détenus « le camp des Solovki est célèbre pour la cruauté bestiale de ses chefs, de certains détenus et des employés de l’OGPOV. Les passages à tabac, parfois mortels, y sont chose courante ainsi que l’exposition à la faim et au froid jusqu’à la mort ; courants, aussi, sont les viols individuels ou collectifs des femmes et des jeunes filles détenues, courants également des supplices comme en été la torture par les moustiques (entièrement nu, le détenu est immobilisé et au bout de quelques heures, recouvert de moustiques particulièrement voraces, il n’est plus qu’une plaie purulente) ou en hiver, aspergés d’eau des prisonniers sont laissés à l’extérieur jusqu’à congélation » .

    Le camp des Solovki servira de modèle à des dizaines de camps édifiés par les ZEK à travers tout le pays. Au total, 35 camps de « redressement par le travail » seront construits. Ces unités pénitentiaires sont souvent des complexes énormes regroupant des camps secondaires et pouvant recevoir de 5000 à plusieurs centaines de milliers de prisonniers (ex. la Kolyma).

    La théorie pénitentiaire bolchevique prétend transformer, « refondre », les détenus en les soumettant au travail forcé pour les amener peu à peu à reconsidérer leurs opinions, à prendre conscience de leurs erreurs, pour participer enfin, avec enthousiasme, à l’édification radieuse du socialisme. La réalité du redressement par le travail est bien sûr toute autre : il s’agit de briser les individus et d’obtenir une main d’œuvre docile. La faim et le froid sont les deux tourments auxquels les ZEKs sont systématiquement exposés.

    Suivant les motifs de leur condamnation, les détenus sont astreints à 8 différents types de régime alimentaire dont le plus sévère équivaut à une condamnation à mourir de faim à petit feu. Si jusqu’en 1923, les « politiques » bénéficient d’un traitement relativement décent, dans les années qui suivent, et jusqu’à la fin du goulag, ils deviennent les plus mal lotis, notamment ceux estampillés KRT (contre révolutionnaires trotskistes, qu’ils le soient réellement ou pas). Les politiques sont les plus mal nourris, jamais amnistiés et très souvent voient leur libération « repoussée jusqu’à nouvel ordre » lorsqu’ils arrivent au bout de leur peine.

    La faim est un vrai supplice en soi, mais il se double de l’épuisement dû aux travaux forcés auxquels les détenus sont contraints. Exemple : l’abattage et le sciage d’arbres avec toujours une « norme » précise à atteindre, en général 10 m³ de bois par jour par équipe de 4, avec pour seul outillage, des scies et des haches. Ceux qui n’y arrivent pas voient leurs rations alimentaires, déjà insuffisantes, baisser encore. Les ZEKs doivent aussi subir le froid intense de régions inhospitalières ; et ils sont couramment victimes de gelures graves et d’amputations de doigts et d’orteils. La gangrène due au manque de soins fait des ravages. Nombre de maladies liées à ces conditions de vie inhumaines frappent de façon endémique la population de détenus : scorbut, tuberculose, et parfois typhus font des ravages. La pellagre (dûe au manque de vitamines et à l’exposition permanente au grand froid) qui se traduit par la perte de tout ou partie de la peau est courante, comme la furonculose, les problèmes ophtalmologiques, etc. Il se crée ainsi une catégorie de détenus dénommés les « crevards », profondément amaigris, squelettiques, qui deviennent inaptes au travail ; leur seule chance de survie est « l’hôpital » du goulag où exercent dans des conditions très difficiles des détenus médecins ou des agents de sécurité formés à la va-vite et qui souvent, avec le peu de moyens dont ils disposent, font preuve d’une grande inventivité pour sauver leurs camarades. Ces efforts sont très souvent vains pour les « crevards ».

    Soumis à l’arbitraire des gardiens pendant des journées de 12h (7J / 7J), les ZEKs une fois rentrés dans leurs baraquements, souvent en mauvais état, tombent sous la coupe de la pègre (les « vori v zvakonie » traduction : les voleurs dans la loi), de réseaux organisés de criminels refusant tout travail mais rançonnant, pillant, terrorisant les autre détenus. Après 1945, l’afflux de centaines de milliers de soldats de l’Armée rouge, condamnés au Goulag pour avoir été pris par les allemands (et donc considérés traîtres à la patrie soviétique) inverse le rapport de forces entre la pègre et les détenus.

    Malgré ces terribles conditions de détention, il s’est trouvé des hommes et des femmes pour résister à l’anéantissement programmé, à l’asservissement. Le système pénitentiaire dispose de différents moyens pour briser les tentatives des ZEKs d’organiser des réseaux de résistance : d’une part, l’incitation à la délation est généralisée et, d’autre part, les détenus sont souvent transférés d’un camp à l’autre. Ces transferts sont un vrai cauchemar pour les détenus qui sont sans cesse obligés de reconstruire leurs réseaux d’entraide. En dépit des risques encourus, un certain nombre de ZEKs vont essayer de faire circuler des pétitions, d’organiser des grèves de la faim, individuelles ou collectives, tenter de s’évader ou de se mutiner. A chaque fois, la répression est terrible : en 1946, 5000 détenus révoltés auraient ainsi été exterminés par épandage de gaz ; en 1947, « une insurrection éclate dans la cale du bateau Kim qui transporte les ZEKs à la Kolyma. Ils sont arrosés avec une lance à incendie. A l’arrivée à Mayadan, on décharge des centaines de cadavres congelés et une foule d’invalides aux membres gelés » ; en 1948, des milliers de ZEKs, échappés du camp de Vorkouta, sont massacrés par l’aviation. Il y aura 42 survivants (5).

    Il faudra attendre la mort de Staline pour qu’un mouvement général de grèves et de mutineries éclate au goulag ; il durera de l’été 53 à 1955. L’annonce de la mort du « petit père des peuples » et de l’exécution de Béria (grand chef des organes de sécurité) plonge les autorités soviétiques dans le désarroi. Les ZEKs, bien conscients de ce flottement général dans les institutions étatiques, en profitent pour se soulever en masse : pour la première fois de leur histoire, les autorités soviétiques sont alors contraintes de négocier avec des mutins ! Dans un premier temps, déconcertés, abasourdis par l’audace et la force du mouvement, les Bolchevicks cèdent sur la plupart des revendications puis, dans un deuxième temps, suivant une tactique bien établie et jouant sur le pourrissement de la situation (camps isolés et peu ravitaillés), ils reviennent sur leurs promesses et dans un troisième temps, entament une répression sanglante. Malgré la défaite finale des mutins, le Goulag a été touché au cœur. Il est devenu trop grand pour être totalement sous contrôle et la peur de la répression ne semble plus suffisante pour arrêter des détenus déterminés.

    Avec le dégel correspondant à l’arrivée au pouvoir de Kroutchev, la décroissance du Goulag s’amorce : 600 000 détenus sont libérés. L’accession au pouvoir de Brejnev relance la machine à broyer, mais les arrestations sont moins nombreuses. Le Goulag change de nom et devient « colonies pénitentiaires ».

    Peu à peu, l’URSS s’est modernisée, industrialisée et les armées de ZEKs, dont on exploitait la force de travail avec les mêmes méthodes esclavagistes qui étaient d’usage dans l’antiquité pour réaliser des travaux gigantesques, ne sont plus aussi indispensables.

    L’URSS des années 70’ entre dans l’ère de la modernité et, signe des temps, les contestataires et les politiques, considérés comme des malades mentaux, seront désormais envoyés dans des asiles psychiatriques.

    Quelques colonies pénitentiaires dureront jusqu’à la fin de l’URSS, et il se murmure que l’ex-tchékiste Poutine conserve, aujourd’hui encore, un certain nombre de bagnes.

    (1) En français, direction centrale de l’administration pénitentiaire.

    (2) Les déportés ou déplacés spéciaux appartiennent soit à une communauté ethnique, linguistique par exemple : Tchétchènes, Kalmouks, Lettons etc. dont tous les membres sont déportés en Sibérie ou au Kasaksthan ; soit à une catégorie sociale par exemple les koulaks (paysans riches , propriétaires terriens). Les détenus, eux sont condamnés à titre individuels pour des manquements aux obligations de l’état.

    (3) & (4) in « Le Goulag » de Nicolas Werth et Luba Jurgenson

    (5) in « Le manuel du Goulag » de J. Rossi

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  • Pourquoi l’homme n’est pas un cochon comme les autres.

    Indéniable succès de communication, l’expression « #balancetonporc » devrait aussi nous inciter à une réflexion de fond sur le comportement sexuel et l’origine de la domination masculine. Rappelons, tout d’abord, que, en matière de sexualité, l’évolution des espèces a connu plusieurs ponctuations : la reproduction sexuée, la viviparité (c’est-à-dire le portage de l’embryon par la femelle) et enfin, ce qui distingue l’« homo sapiens » du reste du règne animal, une conscience qui lui permet d’imaginer l’avenir de sa filiation. Si nous écartons les récentes options bio-technologiques (PMA, clônage, utérus artificiel, etc.), il s’agit là de trois invariants structurels ayant pesé lourdement dans la construction du rapport homme-femme.

    Les deux premiers points sont communs à de nombreuses espèces animales, mais ils impliquent, déjà, de nombreuses contraintes comportementales. Ainsi, la reproduction sexuée confère, au désir et aux caractères sexuels secondaires, des avantages sélectifs ; la viviparité interdit un partage égal des tâches, comme ce peut être le cas pour les oiseaux chez lesquels le contenu du nid offre un accès partagé, à la fois, par le mâle et par la femelle. Le dernier point constitue, quant à lui, une rupture avec l’ensemble du règne animal. En effet, homo sapiens a la capacité de se projeter dans le futur lointain ; pour lui même, certes, mais aussi pour les autres et, en particulier, pour ses enfants.

    A notre connaissance, homo sapiens est le seul qui puisse imaginer, pour son « oeuf », un avenir de président de la république. Comme l’a dit Françoise Héritier, c’est le « privilège exorbitant d’enfanter » qui, dès l’origine, a constitué chez homo sapiens le cœur de l’aliénation féminine ; les mâles ayant dû engager une véritable épreuve de force pour s’assurer le contrôle de cet œuf(1). C’est pour cela que l’homme a inventé des mythes et des traditions qui, tous, auront comme but de lui permettre de se s’approprier une fécondité à laquelle il ne participe pas. La mystification du corps humain, la soumission et l’invisibilisation de la femme, la non-mixité et la répression du désir sexuel sont autant d’éléments qui se retrouvent dans différentes civilisations. Ils contribuent à l’élaboration d’un ordre moral ayant comme objet, sur le plan politique, de contrôler les ventres, c’est-à-dire, d’une part, la nécessité de renouveler le capital humain(2) et, d’autre part, celle de garantir la « pureté du sang », celle du lignage, comme le montre ce que fut l’institution des curateurs au ventre.

    L’appropriation de la fécondité, par l’homme, s’est traduite par la codification des rôles sexuels. Il s’en est suivi que, dans les sociétés humaines, c’est l’homme qui doit être actif et conquérant ; la femme, au contraire, se doit d’être passive, réservée et prude. Profitons-en pour, ici, rendre justice au cochon lequel n’est pas un « porc » puisque, comme c’est souvent le cas dans le monde animal, c’est la femelle qui est la plus active et qui, au moment de l’oestrus, exprime un comportement sexuel caractéristique, avec une augmentation de l’activité et de la nervosité, ainsi qu’une attirance particulière pour les mâles(3).

    Pouvoir et sexualité.

    Le spectacle des « affaires sexuelles » est une mise en lumière de l’imbrication de la sexualité et du pouvoir. L’affaire Weinstein et celles qui ont suivi impliquent les villas de la jet-set, les boudoirs des prédicateurs, les bureaux de patrons, les couloirs des grands media , les salons des politiciens. Il est intéressant de noter qu’il n’a pas été trouvé, par les media, d’expression générale pour désigner ces violences. En effet, quand il s’agit de la rue, ils n’hésitent pas à parler de « harcèlement de rue » faisant de tout homme de la rue l’agresseur potentiel. Pour les « affaires », là, ils individualisent les cas ; ils utilisent une sémantique opposée à celles qu’ils emploient contre l’homme de la rue et ils ne parlent pas de harcèlement des puissants ou de harcèlement du pouvoir.

    Toutes les célébrités mises en cause ont abusé de leur position dominante pour arriver à leurs fins avec des femmes, des hommes ou des enfants. Pourtant, ce qui a fragilisé les victimes (femmes, hommes ou enfants) dans ces affaires, c’est bien leur position de subordonnés spirituels ou sociaux par rapport à leurs prédateurs. Ce sont bien les hiérarchies qui ont favorisé ces agressions et ces viols et ce sont bien ces hiérarchies que le pouvoir, tout anti-sexiste qu’il puisse se réclamer, préserve et défend. Cela devrait, pour le moins, le rendre circonspect et dubitatif quant à son intervention pour régler les problèmes qu’il a engendrés.

    Nous notons que, dans le discours du président de la république, lors de la journée contre les violences faites aux femmes, la plupart des mesures prises étaient d’ordre répressif et ne visaient que « le harcèlement de rue ». De la sorte, le pouvoir fait d’une pierre deux coups. D’un côté, il renforce le rôle passif de la femme au bénéfice de celui de l’État et, de l’autre, il estompe l’effet désastreux des « affaires ». De façon tout aussi arbitraire, la loi ne distinguera pas plus entre la trivialité et la passion. A ce sujet, certains feraient bien de se souvenir du suicide, en 1969, de Gabrielle Russier, cette jeune enseignante de 32 ans condamnée à de la prison pour avoir eu une relation amoureuse avec un de ses élèves, jeune homme de 16 ans. Ce drame contribua à amplifier la contestation de cette morale bourgeoise et hypocrite que l’on veut nous resservir maintenant.

    Quelques pistes pour ne pas se perdre …

    L’inversion des rôles sexuels chez l’humain, c’est-à-dire le passage du matriarcat au patriarcat, apparaît comme un caractère culturel acquis et transmissible de l’espèce et il a également pour conséquence d’introduire nombre de frustrations très utiles pour augmenter l’agressivité des guerriers ou bien pour créer un très rentable marché du sexe. La domination masculine et le sexisme ont des causes biologiques et des raisons politiques qui ont créé des habitudes sociologiques qui perdurent depuis l’aube du néolithique. Ce n’est pas avec des lois anti-sexistes, des associations subventionnées ou des gadgets orthographiques que nous ferons reculer le problème, si ce n’est, tout au plus, que de façon artificielle ; et encore, cela se fera au prix de l’augmentation de l’état névrotique de la population. Le combat est, donc, plus intime que cela ; il est culturel. Les progrès de la connaissance scientifique, puis les mouvements de libération de la femme pour la mixité et la libération des mœurs, ont contribué à des avancées notables de la condition féminine. Ce qui, aujourd’hui, met en péril cette difficile démarche émancipatrice, face au poids des traditions, c’est le retour en force de l’obscurantisme sous toutes ses formes ainsi que les nouveaux appels à la censure et à la non-mixité, lesquels contribuent à renforcer l’ordre moral.

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    Les curateurs au ventre, une institution patriarcale tombée en désuétude.

    Depuis Aristote, l’homme pensait que, par sa semence, il injectait son homoncule et que le ventre de la mère n’avait qu’un rôle nourricier. A partir du XIX° siècle, les progrès de la génétique allaient changer les mentalités. Avec la découverte des gamètes et du mécanisme embryologique, la fin des peurs ancestrales autour de la procréation allaient, peu a peu, reléguer dans l’oubli l’institution des curateurs au ventre, cet édifiant exemple du contrôle de la fécondité et de sa morale. Le cas le plus connu est celui de la reine Clémence de Hongrie, veuve de Louis X, mais voici encore, dans sa forme atténuée, ce que nous pouvons lire dans un traité de droit civil de 1833 :

    583. Le curateur au ventre est celui qui est préposé à surveillance de la grossesse d’une femme enceinte au décès de son mari

    584. Si lors du décès du mari, la femme est enceinte, porte l’article 393 du code civil, il sera nommé un curateur au ventre par le conseil de famille

    585. La légitimité d’un enfant posthume est indépendante de l’institution du curateur au ventre, … mais dans son intérêt moral la femme enceinte doit elle même provoquer sa nomination. Par cette précaution elle préviendra les chagrins d’une malignité offensante

    588. Le curateur doit donc veiller à l’événement de la grossesse. Il n’a point d’autorité sur la mère. Son caractère ne lui donne pas le pouvoir de la suivre partout, de critiquer ses actions, et de lui prescrire une règle de conduite ; mais il a le droit de faire des visites à son domicile, de prendre des renseignements, d’examiner ses démarches, d’assister à l’accouchement

    L’institution des curateurs au ventre disparaîtra définitivement en 1964.

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    (1) http://www.lemonde.fr/disparitions/article/2017/11/15/l-ethnologue-et-anthropologue-francoise-heritier-est-morte_5215270_3382.html

    (2) En 1974, Houari Boumediene, alors président algérien, déclarait à l’ONU : « Un jour, des millions d’hommes quitteront le sud pour aller dans le nord. Et ils n’iront pas là-bas en tant qu’amis. Parce qu’ils iront là-bas pour le conquérir. Et ils le conquerront avec leurs fils. Le ventre de nos femmes nous donnera la victoire ». https://blogs.mediapart.fr/victorayoli/blog/160610/khadafi-les-musulmans-vont-heriter-de-leurope-la-turquie-sera-le-che

    (3) « Dans l’espèce humaine, c’est généralement l’homme qui cherche la femme … C’est l’inverse chez l’immense majorité des primates infra-humains chez lesquels, très souvent, la femelle prend l’initiative de l’accouplement avec des exigences, qui, transposées au palier humain feraient frémir les plus courageux » - Jacques RUFFIE « De la biologie à la culture » chez Flammarion, 1983.

    Article d’@anarchosyndicalisme n°157 janvier - février 2018

  • POUR LA LUTTE DES CLASSES, CONTRE LA LUTTE PATRIOTIQUE.

    Devant le désarroi que certains libertaires ont éprouvé quand ils ont vu comment la ferveur patriotique a réussi à faire descendre dans la rue un certain nombre de cenetistes lesquels, au coude à coude et drapeau contre drapeaux, sont allés manifester avec des nationalistes, nous nous devons, ici, de rappeler qu’aucun pays, qu’aucune nation ou État, ne nous rendra libres, bien au contraire. C’est dans ce sens qu’il convient d’évoquer et de citer une partie du communiqué « La CNT face aux nationalismes », qui fut diffusé, il y a de nombreuses années déjà, et qui nous apparaît comme étant toujours d’une totale validité. « Le concept de “nation“ a, très tôt, servi à englober, tout comme il a incité à revendiquer l’indépendance ; “nation“ ou “patrie“ sont des idées-forces qui peuvent être employées dans des sens très opposés, accablants ou émancipateurs ; ce qui, pour les uns, est un vaillant patriotisme, est, pour les autres, un impérialisme oppressif centraliste, ce que les uns considèrent comme un séparatisme antipatriotique, les autres le voient comme l’affirmation maximale d’une identité nationale. La CNT est l’ennemie du concept de "patrie" sauf quand il lui est donné la signification que Malatesta lui avait donnée “Ma patrie, c’est le monde” ».

    Pour nous, un exemple de la contradiction que suppose le mélange de la lutte des classes avec les aspirations patriotiques reste manifeste dans ce que nous vivons en Catalogne ces derniers mois. Nous sommes témoins de ce que, dans sa prétention à vouloir « faire pays », la droite bourgeoise de toujours et la dénommée gauche catalaniste –même celle qui se dit être « anti-système » – se donnent la main pour construire un nouvel État, l’État catalan, en tournant en même temps le dos à ceux qui préfèrent suivre celui qui existe déjà, l’État espagnol. En continuant avec le communiqué précité, nous répétons que l’argumentation nationaliste est « pauvre et obstinée : en fin de compte,ils rêvent d’établir un autre État, avec son armée, sa police et ses notables, mais avec drapeau et nom distincts ». À ce stade, nous pouvons nous demander : Où est restée la lutte de classes, sinon enveloppée dans les chiffons patriotards ?

    Il convient d’éclaircir le fait que si comme anarchosyndicalistes nous nous opposons à n’importe quel État nouveau, nous ne défendons pas pour autant l’État déjà existant, comme cela nous est souvent malintentionnellement attribué. À ceux qui utilisent cet argument fallacieux, il faudrait rappeler que lors de la proclamation de la République Catalane, en 1934, c’est la militance de la CNT qui ramassa les armes que les patriotes catalanistes jetaient, quand l’armée entrait à Barcelone sans vraie difficulté. Et comme ils furent utiles par la suite pour prendre d’assaut les casernes et pour faire trembler les uns et les autres en démontrant la viabilité de l’autogestion et du communisme libertaire ! Lamentablement, cet exemple révolutionnaire fut atténué par une Generalitat qui voyait avec horreur comment les travailleurs contrôlaient la production, et par quelques communistes auxquels il fut permis de faire tout ce qu’ils voulaient pour leur rôle contre-révolutionnaire en tant que « parti de l’ordre » et en échange de quoi la République obtiendrait l’appui soviétique. Quelques décennies après, il paraît incroyable que nous soyons dans une situation similaire, bien que pas complètement. A l’époque, nous, anarchosyndicalistes, savions déjà que nous ne serions jamais libres sans exercer, auparavant, le contrôle de la production. Aujourd’hui, une partie de ceux qui s’en autoproclament semble l’avoir oublié, ils acceptent que la classe travailleuse s’assoupisse en adoptant les mêmes approches que les syndicats institutionnels et, de concert, avec une vaste frange de la cité se laisse entraîner et dicter sa conduite par les différents « vecteurs d’intoxication » en fonction de leurs intérêts. Et, lorsque sont organisées des grèves patriotiques supportées et financées par l’Administration et les marchands, quand la lutte populaire est reconduite jusqu’à son atténuation au Parlement via les urnes ou quand ils veulent que tu fasses un choix entre différents chiffons patriotards, c’est que quelque chose ne tourne pas rond.

    Nous ne sommes pas, non plus, convaincus par les arguments de certains anarchistes qui prétendent que nous ne pouvons pas rester à la marge du processus social et politique en cours. Selon nous, cela signifie une adhésion non critique envers des objectifs qui n’ont absolument rien à voir avec une émancipation des travailleurs, d’autant plus par la simple volonté irréfléchie de « faire quelque chose ». Il faut évaluer et peser dans quelles initiatives concrètes nous devons participer et pourquoi, sans tomber dans le piège du « mouvement pour le mouvement ». Dans la CNT Catalunya, malgré tout cela, les choses sont claires. Nous serons toujours dans la lutte des classes, jamais dans la lutte entre travailleurs pour des motifs patriotiques car ces derniers bénéficient seulement aux gouvernants désireux de couvrir leurs relents afin de continuer à profiter de leurs privilèges.

    Salutation et révolution sociale

    CNT Catalunya Octobre 2017

  • Dommage pour la #Catalogne (1)

    Barcelone n’est plus ce qu’elle fût. La glorieuse capitale de l’anarchisme ibérique s’est transformée en une mégapole traversée par toutes les modes ; celles du fric, mais aussi celle du fanatisme et du sentiment identitaire. En conséquence, c’est l’ennemi historique de l’anarchisme, le #nationalisme, catalan, avec ses affairistes et ses politiciens, qui tiennent le haut du pavé et domine les esprits. Les événements de cet été, qui se sont succédés dans et autour de la capitale régionale, ont tour à tour mis en scène les uns et les autres.

    Il y a d’abord eu cette attaque contre un bus de touristes par quatre individus cagoulés se réclamant du mouvement « Arran ». Heureusement, cette action particulièrement stupide n’a fait aucune victime. Selon son porte-parole, son but était purement médiatique. Nous savons que, de nos jours, le ridicule ne tue pas mais qu’il est un moyen de faire du bruit virtuel. Comment dit-on « buzz » en catalan ? En tout cas, « Arran » se traduit par racines. Rien d’original là-dedans car, dans notre monde moderne, la métaphore écolo-politicienne fonctionne à pleins tubes ; les racistes parlent de souche et les gauchistes auraient des racines. La spéculation immobilière, quant à elle, fait flamber les loyers et ceux qui raisonnent avec leurs pieds (de vigne ?) attaquent des touristes, à chacun ses bouc-émissaires.

    En politique, la tragédie n’est souvent pas loin de la farce. Quelques jours après cet incident sans gravité, mais intellectuellement pénible à supporter, les islamistes ont également choisi la cible touristique pour sévir. Le massacre du 17 août 2017, sur les Ramblas de Barcelone, et l’attaque de la plage de Cambrils ont mis en avant un autre pur produit du chauvinisme local que sont les « mossos de esquadra », la police catalane. Rappelons que, suite au mouvement dit des indignés qui l’étaient suffisamment à Barcelone pour obliger le « govern » (en dialecte catalan, on le dit comme ça pour dire gouvernement) à s’enfuir en hélicoptère en 2011, le pouvoir a édicté une série de lois répressives contre les contestataires qui l’avaient placé en si mauvaise posture. Ces lois ont permis aux politiciens catalans d’étancher leur rancune et aux célèbres « mossos » de s’illustrer dans une répression arbitraire qui connut son apogée avec deux séries d’opérations nommées « Pandora » et « Piñata » (voir encadré). Ces opérations furent du type de celles que tout État sait mener contre ses ennemis, un grand spectacle « sons et lumières », celui d’une foule de policiers sur-équipés et sur-armés s’agitant au son d’accusations mensongères : Les cibles étaient éloquentes, l’Athénée Anarchiste de Poble Sec, l’Athénée Libertaire de Sant Andreu, ainsi que la maison occupée « Kasa de la Muntanya » …

    Depuis 2015, vingt personnes poursuivies comme appartenant à la mouvance anarchiste (2) ont arbitrairement été placées sous les verrous ... Et, tout cela s’est terminé sur deux jugements rendus en 2016 et 2017 par le haut tribunal espagnol, lequel a, à chaque fois, désavoué et annulé ces deux opérations en dénonçant l’action abusive du « govern » catalan. Dépités et s’essuyant la bave qui leur coulait des lèvres, flics et politiciens catalans ont dû relâcher leurs proies.

    La sardane des menteurs.

    Tout comme le dit un dicton, on ne peut pas courir deux lièvres à la fois, et les fameux « mossos de esquadra », trop occupés à persécuter des innocents, ont négligé des religieux criminels. Ce 17 août 2017, la camionnette meurtrière des Ramblas a donc pu courir comme elle l’a voulu et écraser de paisibles touristes dont un enfant de 7 ans. Aussitôt, les « mossos » se sont plaints que eux, pauvres petits policiers, étaient sans moyens (sauf visiblement contre les Anarchistes) et qu’ils avaient été mis à l’écart des renseignements détenus par les méchants flics espagnols. A leur suite, le chef du « govern » est monté au créneau pour déclarer, le 29 Août, qu’une police catalane ne suffisait pas et que « une armée catalane était indispensable » (pour mieux défoncer les portes des athénées libertaires qui leur font si peur ?). Ces mensonges d’État (pardon de govern) n’ont tenu que quelques jours car la presse a révélé que, l’an dernier déjà, la police belge avait pris directement contact avec un officier des « mossos de esquadra » pour lui signaler la dangerosité de l’iman de Ripoll et, en mai 2017, c’est la CIA qui avait informé les « mossos » du risque d’attentat qui planait sur les Ramblas. Les « mossos » et les politiciens catalans ont commencé par menacer les journalistes puis ont décidé de mentir, les yeux dans les yeux, que jamais de la vie, au grand jamais, ils n’avaient eu ces renseignements. Ce n’est que, une fois, placés devant l’évidence des preuves qu’ils ont de maniére pitoyable fini par avouer qu’ils avaient menti en connaissances de cause.

    Pour clore cette ronde, les nationalistes catalans se sont mobilisés pour transformer la marche du 26 août 2017, marche qui se déroulait en hommage aux victimes des attentats, en une démonstration de chauvinisme ; et cela, au mépris des victimes. Des drapeaux, des centaines de drapeaux catalans, étaient déployés en tête de cortège, sans aucun rapport avec les victimes des attentats. Il y était dénoncé, tenez-vous bien, l’islamophobie et, cela, tout en suscitant et en stimulant l’hispanophobie. Pour les catalanistes qui venaient d’être pris la main dans le sac, ou mieux, dans leur boîte à manipulations, cette récupération était primordiale pour relancer le processus sécessionniste dont le nouveau point culminant devait être le référendum du 01° octobre 2017 sur le thème du « pour ou contre » l’indépendance d’une mystification nommée "peuple catalan".

    (1) En référence à l’ouvrage de Georges Orwell « Hommage à la Catalogne ».
    (2) http://www.elmundo.es/cataluna/2017/05/30/592db9b146163fd34e8b462b.html article intitulé « Críticas a los Mossos en el final del ’caso Pandora » .

    Paru dans @Anarchosyndicalisme ! 156 / Octobre-Novembre 2017 / cntaittoulouse.lautre.net

  • Un ouragan de rumeurs sur Saint-Martin

    Au Moyen-Âge, c’était simple. Lorsque la nature montrait sa force, en même temps qu’elle renvoyait les hommes à leur impuissance, avec ses tremblements de terre et ses tempêtes, il était dit que c’était l’œuvre de Dieu. Dans notre monde moderne, le domaine explicatif s’est élargi. Les discours scientifiques puis politico-scientifiques se sont ajoutés aux discours religieux. Tout se mélange, de telle sorte que chaque catastrophe procure à chacun l’occasion de montrer où en est son niveau de préjugés. La quantité d’informations non vérifiée mais, tout de même, bien propagée est encore le meilleur moyen de comprendre ce à quoi les mass-média veulent nous faire croire mais, aussi, réseaux sociaux obligent, ce à quoi des gens ont envie de croire.

    Ce mois d’août 2017, un journaliste déclarait sur BFMTV qu’il fallait « prendre des précautions avec la vérité » . Il dévoilait, en ces termes crus, l’extraordinaire inversion du but informatif, car ce n’est certes pas avec la vérité qu’il faut prendre des précautions ; c’est avec les rumeurs qu’il faut le faire. Celles-ci, même totalement fausses, ont toujours une base, plus ou moins, consciente qui est celle de l’état d’esprit de ceux qui les colportent. Souvenons-nous de la rumeur d’Orléans. Dans les années 70’, cette rumeur n’avait d’autre base réelle que l’antisémitisme s’exprimant contre les commerçants juifs. Dans « La vie devant soi », Romain Gary fait dire à Momo, le narrateur, qui utilise souvent l’expression « Rumeurs d’Orléans » : « Les rumeurs d’Orléans, c’était quand les Juifs dans le prêt-à-porter ne droguaient pas les femmes blanches pour les envoyer dans les bordels et tout le monde leur en voulait. » !

    Ce que nous avons pu voir et entendre au lendemain de l’ouragan qui a dévasté Saint-Martin, c’est exactement cela : Une rumeur qui repose exclusivement sur des angoisses post-traumatiques, des peurs sociales et des préjugés racistes. En mélangeant le tout, nous obtenons les bonnes vieilles salades d’antan. Il est vraiment étonnant que cette rumeur de Saint-Martin sur des pillages menés par des bandes armées qui se seraient introduites, avec violence, chez des particuliers, n’ait pas été dénoncée par les lanceurs d’alerte bien connus.

    Que nous montre-t-on à l’appui de ces affirmations de pillages et de bandes armées ?

    Aucun document visuel objectif. Rien que du suggestif. Les deux seules photos ayant servi à illustrer cette information sont sur internet. Sur la première, nous pouvons voir des personnes qui embarquent du matériel sur une camionnette débâchée et, sur la seconde, un groupe qui, peut-être, entre dans un commerce. Sur TF1, un film nous montre deux femmes qui errent à travers les rayons dévastés d’un magasin. Personne n’est armé, mais tout le monde est noir (de peau). C’est censé faire peur et ça désigne des coupables sans prendre la peine d’anonymer ; comme ça, au « pifomètre ». Cela marche plus ou moins, ou pas du tout. Cela dépend du niveau mental de chacun ; de l’esprit critique de chacun. Et, au pays de la présomption d’innocence, tout le monde trouve ça normal ? Silence radio.

    Ensuite, il y a les témoins ; car après le suggestif, c’est le digestif version gavage qui nous a été servi en boucle. Une femme nous a dit à la télé, quelque chose du style « oulalalala, il va faire nuit et il nous faut l’armée » . Un autre évoquait « des gens armés de machettes et de revolvers faisant régner la terreur dans les rues » . Mais, les seuls que l’on nous a montré armés sont ceux qui se sont montés en milices dans les quartiers riches … Et enfin, le plus énorme, c’est sur Facebook, entendu le 10 septembre et largement diffusé ; une voix anonyme, celle d’un homme qui répétait en boucle « Ici les gens ont peur … Les gens sont armés … On est peut être à 10000 morts … Les cadavres remontent à la surface … » . Cet énergumène habitait-il seulement sur l’île ? Nul n’était en mesure de le savoir avec certitude, mais si tu poses la question, c’est que tu fais, forcément, partie du complot. Facebook chauffe ; et l’intelligence, elle, s’éteint.

    Pour les sites d’extrême-droite, la chose est entendue, on y confond les dégâts de l’ouragan avec ceux d’un bombardement. Pour eux, Irma n’est pas un ouragan, de force 5, avec des vents dépassant 350km/heure. Non, Irma, c’est la guerre civile. Quand les cons volent, ceux-là ne restent pas à terre, n’est-ce pas.

    Plutôt que de prendre des précautions avec la vérité lorsqu’il s’agit d’attentats islamistes, les journalistes feraient mieux d’en prendre [des précautions] avec les rumeurs. Pourquoi y aurait-il eu des pillages, seulement, à Saint-Martin et pas à Saint-Barthélémy ? Comment se fait-il qu’aucun témoignage audio évoquant des bruits d’armes à feu n’ait été enregistré ? Dans notre monde d’images (Facebook, trombinoscopes, galeries de photos, etc.) où il se fait des photos partout, tout le temps et pour n’importe quoi, où l’on brandit son portable comme hier l’on brandissait le crucifix, comment se fait-il qu’aucune photo concrète n’ait pu être produite ?

    Face à ce qui, d’évidence, était une rumeur exaltée par les préjugés racistes, quelles précautions furent prises par les journalistes ? Aucune ! Bien au contraire ! Ils nous ont désignés des coupables de crimes fictifs alors que les îles de Saint-Barthélémy et de Saint-Martin étaient dévastées et que d’autres problèmes bien plus dramatiques que la récupération de quelques denrées avariées étaient beaucoup plus visibles et prévisibles. Ils ont fait leurs choux gras de cette rumeur.

    « Irma » a touché Saint-Martin, le 6 septembre. Les premières rumeurs nous sont arrivées le 7. Ce n’est que le 11 septembre qu’un article du journal « Le Monde » appelle, à leur sujet, à la prudence (1) ; et depuis ça, plus rien, ou pas grand-chose. La rumeur s’éteint après avoir diffamé une population et on passe doucement à autre chose.

    Seule la vérité est révolutionnaire.

    (1) http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/reactions/2017/09/11/irma-attention-aux-rumeurs-sur-la-situation-a-saint-martin_5184022_4355770.h

    Paru dans le journal @Anarchosyndicalisme ! n°156 / Octobre-Novembre 2017 / cntaittoulouse.lautre.net

  • Piège nationaliste en #Catalogne

    Le processus de sécession mené par les nationalistes et le gouvernement catalan atteindra un paroxysme ce dimanche premier octobre, date du #référendum pour ou contre l’indépendance du « peuple catalan », il s’agit d’une #mascarade_politicienne, typiquement le genre de #farce_identitaire qui comme ce fut le cas en Ukraine peut tourner au tragique.

    La bourgeoisie et les politiciens catalanistes, pseudos martyres de la garde civile mais véritables carriéristes veulent entrainer dans cette aventure les travailleurs en faisant jouer leur fibre libertaire toujours vivante. Ces mêmes dirigeants corrompus qui ont arbitrairement emprisonnés des anarchistes, qui ont ordonné à leur police, les « mossos », le saccage des athénées libertaires de Barcelone, qui ont défendu le grand patronat contre les ouvriers, nous parlent maintenant de Justice, de Démocratie et de Liberté. Rappelons à tous ces imposteurs que l’émancipation des travailleurs se construit contre toute sorte de #nationalisme et de #xénophobie.

    CNT-AIT - Union locale de Toulouse, le 27 Septembre 2017

    • En ne critiquant pas le nationalisme espagnol et la violence de sa réaction, vous donnez vraiment l’impression de défendre l’Unité nationale-républicaine espagnole héritière du franquisme... bizarre pour des personnes se réclamant de l’anarchisme. L’indépendantisme catalan ne peut se résumer à une mascarade politicienne. Avec vos argument on croirait entendre les eurobéas.

      Mais ce n’est pas la première fois que vos position sont « bizarrement » orientées. D’ailleurs je constate que vous n’avez toujours pas retiré votre illustration sexiste avec El-Khomri

      https://seenthis.net/messages/550475#message550752
      https://seenthis.net/messages/535622#message535646
      https://seenthis.net/messages/550456#message550524

    • Le nationalisme espagnol n’est pas le thème du référendum et ce sont bien les indépendantistes catalans qui sont a la manoeuvre et ce de façon parfaitement cynique .

      Par exemple il évoquent le concept d’émancipation des peuples, c’est logique pour des nationalistes , mais il faut alors leur demander pourquoi Puigdemont qui est leur dirigeant en chef a en 2014 voté contre l’indépendance du Kurdistan ...

      Ensuite « parler de violence de la réaction » , quand on parle d’une poignée de politiciens corrompus interpellés quelques heures par la GC ,on se moque du monde, sans parler de ceux qui comparent ça a la répression franquiste, ces propos sont indécents ,ils insultent les centaines de milliers de personnes massacrées sous Franco . Par contre il n’est pas bizarre que ceux qui pratiquent un tel discours révisionniste insultent des travailleurs antinationalistes , sans Dieu, ni Maitre .

    • Une illustration , comme toute forme d’expression peut prêter a interprétations , pour ma part j’y vois une allusion a Manuel Valls et a sa marionnette El-Khomri, et a des critiques , je conçois qu’on puisse considérer les"valseuses "comme un film sexiste . A l’époque de sa sortie d’autres le considéraient comme un film pornographique et sous Franco ce film était carrément interdit .

      Il existe un fossé entre la critique et la censure , entre la Liberté et la Dictature , mettre a jour ce fossé devient une deuxième raison de cette illustration. .

    • Je ne comprends pas bien la logique : l’illustration est censée donner une image négative de Myriam El-Khomri et pour cela vous l’identifiez à un personnage ciblé par la censure ? Vous validez donc implicitement les arguments de la censure ?

    • L’allusion n’est pas identification, et quand cela serait cela ne validerait rien du tout, car les arguments de la censure pour interdire l’image ne visent pas ici la personne mais appartiennent au domaine de la morale , religieuse en 1974 et pseudoféministe de nos jours .

    • La censure franquiste peut donc être invoquée pour qualifier ceux qui émettent des doutes quant à la pertinence de cette illustration. On ne serait pas dans un cas où « ces propos sont indécents [et] insultent les centaines de milliers de personnes massacrées sous Franco » ?

    • Bien sûr que la censure franquiste (ou autre ) peut être « invoquée » puisque les productions jugées pornographiques étaient interdites sous Franco . Tout comme maintenant sous prétexte d’antisexisme montrer l’Image du corps de la femme était en soi scandaleux . La comparaison est parfaitement valable sur ce terrain , elle est même exemplaire d’un certain état d’esprit , car dans le premier message on ne se contente pas « d’émettre des doutes » , ce qui aurait été éminemment recevable , non, on demande le retrait de l’illustration . ..

    • Il faudrait arrêter avec les conneries supposées sexistes. Ce n’est pas l’objet du fil de discussion. Il ne faut pas détourner le débat de son objet. Ouvrez un fil sur l’illustration de khmri, si ça vous chante et discutez-en, si ça vous enchante, mais sur un autre fil, SVP.

      Pour ma part, je suis tout à fait d’accord que ce qui se passe en catalogne est une mascarade politicienne des plus immondes et hypocrites.
      Les pov’catalanistes élus, comme tous les bourgeois politiciens, n’ont qu’une envie, c’est de s’en foutre plein les fouilles ; ils en peuvent plus d’attendre et sentent bien qu’ils pourraient s’en mettre encore plus dans les poches s’ils étaient aux commandes, sans concurrence aucune.

      Les seuls qui tireront un bénéfice de cette séparation seront d’autres clans de la bourgeoisie de la politique, le patronat et les institutions religieuses. On n’échappe pas à l’oppression d’un Etat en créant un autre Etat. Les Etats fonctionnent tous dans le même sens ; d’abord son autoconservation, ensuite, servir les intérets de leur bourgeoisie.

      Quand je vois l’intox des médias qui nous parlent de violentes charges policières et de nombreux blessés dans le style « X blessés légers et quelques autres un peu plus gravement », ça montre que la presse encense les catalanistes et tente de donner une image exagérément tragique de la situation. Un peu plus gravement signifie clairement que ce n’est pas grave. Sinon, on aurait parlé de blessés graves ou de grèvement blessés. Mettre le mot gravement peut faciliter la surrenchère en faveur des catalanistes car les propos sont vite déformés.

      Il ne faut pas oublier qu’en catalogne, il y a beaucoup de gens qui sont contre l’indépendance, mais aussi contre le référendum. De ceux-là, la presse en parle si peu. Les médias font comme s’ils n’existaient pas. Ces anti-indépendantistes, très nombreux, ne sont pas, dans leur majorité, des fascistes, bien au contraire.
      En catalogne, une grosse part des habitants n’est pas, et ne se revendique pas, catalane. Et, même à barcelone, on croise énormément de gens qui parlent l’espagnol plutôt que le patois catalan. Personne n’empêche ceux qui le veulent de parler catalan, si ça les chante. Qu’en serait-il avec les catalanistes au pouvoir ?

      Il est exact que le spectre du scenario de l’euromaïdan plane sur barcelona et il est souhaité par les puigmont et compagnie. Et son prédécesseur, jordi pujol, n’a-t-il pas des casseroles au cul pour détournements de fonds et pour corruption ? A mon avis, les autres catalanistes brulent d’en faire autant. C’est le but de la manoeuvre. Et le pujol n’est certainement pas le seul dans son cas.

      Je rappelle que les molossos de escuadra s’en sont donnés à coeur joie pour matraquer les manifestants en 2011 et les anarchistes à chaque fois qu’ils en ont eu l’occasion. Je ne sais pas si vous vous souvenez de l’opération policière pandora, qualifiée d’anti-terroriste. Là, ils ne se sont pas gêné pour matraquer personnes agées et gamins. mais ça c’est vite oublié comme la fuite « courageuse » des « vaillants » élus par hélico.
      Rien que cela devrait suffire à faire réfléchir ceux qui pensent que le catalanisme est une cause à défendre car ce sont les mêmes qui « seront » au pouvoir.

      Les appels à soutenir cette mascarade sont ridicules. ça montre que la confusion règne en maitre et qu’on ne réfléchit pas plus loin que le bout de son nez. Surtout si on est anarchiste, il est impossible de défendre le nationalisme quel qu’il soit, de défendre tout ce qui revendique des peuples supposés, de défendre les mythes réactionnaires, tout comme il est impossible de défendre les religions comme étant un droit alors qu’elle véhiculent des idées totalitaires.

      On entend les catalanistes se revendiquer de l’UE et en appeler à l’europe des nations, c’est digne des nationalistes franquistes. Je ne fais pas de différences entre nationalistes catalans et espagnols ; ils véhiculent la même idéologie nauséabonde. C’est un faux débat, un faux combat.
      ce n’est pas mon combat !

      La charte des langues régionales est seulement un préalable à faciliter la création d’une europe de petits Etats faciles à mettre au pas (ou à corrompre) si besoin est. des petits Etats, ça peut mieux gérer des populations forcément plus petites mais plus proches, surtout si l’esprit communautariste est suffisamment cultivé par la propagande pour couper les populations des différents petits Etats les unes des autres.

    • Tout comme maintenant sous prétexte d’antisexisme montrer l’Image du corps de la femme était en soi scandaleux

      Décider à la place des femmes de ce que l’on doit faire de leurs corps, que ce soit pour le cacher ou le montrer, c’est dans les deux cas l’expression d’un patriarcat sexiste.

    • Catalogne : prendre parti dans une situation étrange, Santiago López Petit
      https://lundi.am/PRENDRE-PARTI-DANS-UNE-SITUATION-ETRANGE

      Il y a des moments où la réalité se simplifie. Ce n’est plus l’heure de faire la part de la vérité et du mensonge dans les arguments qui prétendent défendre l’unité d’Espagne ou proclamer l’indépendance de la Catalogne. (...) Quand on en appelle à ’la Loi et l’Ordre’, tout à coup, tout s’éclaire et chaque position apparaît parfaitement définie sur la table de jeu. Puis, de façon viscérale, ceux d’entre nous qui restaient silencieux savons où nous situer : nous serons toujours face à ceux qui veulent imposer la consigne de rétablir l’autorité. Nous connaissons bien une phrase forgée en France avant la révolution de 1848 qui disait : ’La légalité tue’.

      Effectivement nous sommes, donc, contre l’État espagnol et sa légalité, bien que pour cela nous ayons à prendre parti entre des drapeaux qui nous étouffent, parce qu’ils nous pompent l’air, et des hymnes qui assourdissent et empêchent d’écouter ceux qui, rassemblés, parlent. Il serait magnifique d’affirmer qu’à cette légalité de l’État espagnol s’oppose la légitimité d’un peuple.

    • Il serait magnifique d’affirmer qu’à cette légalité de l’État espagnol s’oppose la légitimité d’un peuple.

      Il ne s’agit pas, ici, de la légitimité d’un peuple supposé, c’est à dire d’une mystification, contre la légalité de l’État espagnol, mais de l’opposition entre deux légalités d’Etat. Je rappelle qu’en catalogne, il y a, au moins, autant de gens qui sont contre l’indépendance que de gens qui se prétendent pour.

      Pour ma part, ma position est de rejeter tous les Etats. Les multiplier est fait pour compliquer la tâche qui va dans ce sens.

    • Il existe un fossé entre la critique et la censure

      La remarque est intéressante, même si hors sujet.
      Je dirai simplement que critique et censure sont diamétralement opposées. Par natures, la censure interdit la critique et la critique transgresse la censure. C’est comme le fossé entre liberté et dictature.

    • Il suffit de lire le fil de la conversation pour comprendre qui en a détourné le sujet , cela permet de ne pas argumenter et de procéder par de la censure, des insultes et autres injonctions . unagi , ktche, aude, madmeg , on n’ a pas entendu votre avis sur la question de la situation en catalogne ....

      J’ai lu les textes mis en ligne personne n’évoque le plan international . La référence a l’ Ukraine est ici intéréssante , il semblerait que face a l’UE la Russie voudrait rendre la monnaie de la pièce de Maidan (l’intervention de Assange dans les réseaux sociaux va dans ce sens )

      Qu’en pensez vous ?

    • Il ne s’agit pas, ici, de la légitimité d’un peuple supposé, c’est à dire d’une mystification

      Non mais as-tu lu l’article ou juste l’extrait ? La phrase qui suit immédiatement est

      Malheureusement il n’en va pas ainsi, et que les partis indépendantistes ne recommencent pas à nous rouler dans la farine.

    • Aux autres j’en profite pour transmettre les remerciements pour vos disgressions de la part de l’illustratrice qui l’a commise : elle a bien ri !

      C’est bien pour sa santé, mais je voie pas le rapport. Être une femme n’offre pas d’immunité à la culture du viol. Utiliser la caution d’une femme ne vous fait pas paraître moins sexistes, c’est tout le contraire.
      @l’illustratrice_ventriloque tu devrais lire ceci qui explique les problèmes posé par ton image ; https://seenthis.net/messages/547951

      Sinon pour la Catalogne c’est épatant de voire que vos brillantes lumières sont en harmonie avec les matraques espagnoles.

    • La charte des langues régionales est seulement un préalable à faciliter la création d’une europe de petits Etats faciles à mettre au pas (ou à corrompre) si besoin est. des petits Etats, ça peut mieux gérer des populations forcément plus petites mais plus proches, surtout si l’esprit communautariste est suffisamment cultivé par la propagande pour couper les populations des différents petits Etats les unes des autres.

      Ça vous fait un joli point commun avec le super-jacobin Mélenchon.

      Donc, si je comprends bien, la libre association au niveau local doit être encadrée pour maintenir l’unité au niveau d’une entité issue de l’État national bourgeois ?

    • « Sinon pour la Catalogne c’est épatant de voire que vos brillantes lumières sont en harmonie avec les matraques espagnoles »

      Les matraques espagnoles font partie du scénario classique , de la nécéssaire martyrologie pour tenter d’ entrainer la population dans l’aventure chauvine.

    • Pour parvenir a faire un choix entre deux parties,qui sur le fond défendent la même idéologie politique, on est obligé de sortir du réel pour rentrer dans le sentiment .
      N’étant ni un politicien ni un romantique j’observe les faits sociaux , et en la matière il s’avère qu’en Catalogne les partisans du séparatisme se recrutent dans les classes aisées et qu’a l’inverse plus on descend l’échelle sociale plus on s’oppose a l’idée d’indépendance .
      Du coup je ne vois pas dans cet imbroglio l’amorce d’une révolution sociale , je renvoie a cette anecdote qui illustre la complexité de la situation , celle de gitans qui le 01/10 dans un quartier pauvre de Gérone ont piqué les urnes, que les mossos ont voulu arrêter et qui ont été défendu par la garde civile . Cet épisode a fait le tour des réseaux espagnols .
      https://www.mediterraneodigital.com/gente-y-tv/ultimas-noticias-gente-y-tv/prensa/milagro-gitanos-y-guardia-civil-se-defienden-y-echan-a-los-moss

    • il s’avère qu’en Catalogne les partisans du séparatisme se recrutent dans les classes aisées et qu’a l’inverse plus on descend l’échelle sociale plus on s’oppose a l’idée d’indépendance

      C’est bien de dire ça, mais cela repose sur quoi ? (Je ne sais pas hein, ça peut parfaitement être vrai, mais il faut que ça repose sur quelque chose.) Est-ce qu’il y a des statistiques des intentions de vote et de non-vote suivant le milieu social, comme il peut y en avoir pour d’autres élections en France ou autre ?

      Car il y a un article de Contretemps qui a été posté sur seenthis qui démontre justement l’inverse, que les classes bourgeoises aisées de ce territoire sont contre l’indépendance (groupement patronaux, grands patrons, etc, qui pour beaucoup se sont positionnés contre, et ensuite ont fait quelques revirement opportunistes mais que dans tous les cas ils n’en sont pas à l’origine du tout).

    • Manuel Cervera-Marzal : « Le référendum catalan, c’est l’action de désobéissance civile la plus massive de l’histoire de l’Union Européenne »
      http://www.regards.fr/web/article/manuel-cervera-marzal-le-referendum-catalan-c-est-l-action-de-desobeissance

      La Catalogne s’embrase sur fond de processus d’indépendance. Quelles sont les forces en présence ? Comment se positionne la gauche espagnole ? Va-t-on vers une guerre de sécession ? Manuel Cervera-Marzal, sociologue spécialiste de la gauche espagnole, nous aide à y voir plus clair.

      https://youtu.be/NezvE0HpBv8

      #Indépendance_de_la_Catalogne

    • C’est bien de dire ça, mais cela repose sur quoi ? (Je ne sais pas hein, ça peut parfaitement être vrai, mais il faut que ça repose sur quelque chose.) Est-ce qu’il y a des statistiques des intentions de vote et de non-vote suivant le milieu social, comme il peut y en avoir pour d’autres élections en France ou autre ?

      oui des observations personnelles puis l’anecdote de Gérone et surtout cette étude de « el pais »
      https://politica.elpais.com/politica/2017/09/28/ratio/1506601198_808440.html

  • L’ÉLECTOXICOMANIE

    Encore méconnue des médias, l’électoxicomanie s’apparente à une drogue, comme le tabac, l’alcool et autres dérivatifs psycho-sociaux ! La maladie provoque une dépendance plus ou moins forte. Le malade éprouve une curieuse envie : le besoin irrésistible de déposer un bulletin de « démission citoyenne » dans une boite. Mais, il a honte d’un tel comportement. Aussi le fait-il à l’abri des regards, dans un sas appelé isoloir ! Ce geste semble procurer au malade une extraordinaire jouissance, il se sent fort, invincible, et, pour tout dire, heureux ! c’est la phase dite de « citoyennite aiguë ». Après, vient la phase descendante, véritable situation de crise, de déprime ! La dure réalité retrouvée, au lendemain d’élections, avec son cortège de mensonges, de trahisons, met le patient en état de manque.

    L’État, qui se dit pourtant soucieux de la santé des citoyens, ne fait rien, et, au contraire, entretient la maladie, en renouvelant des scrutins plus ou moins dosés en « sondaginelles » et « médiatox ». Des chercheurs en électoxicologie avancent même l’hypothèse selon laquelle cette maladie servirait l’État : les malades maintenus dans un état de léthargie, n’ont plus aucun esprit critique, ni velléité de réflexion et d’action autonomes.

    Les soins permettant de guérir l’électoxicomanie existent et ne sont pas onéreux. Il suffit de faire une cure d’abstentionnisme qui consiste à : rester au chaud chez soi, seul ou avec d’autres convalescents, les jours d’élections, afin de ne pas attraper le virus électoxicologique, puis il faut poursuivre le traitement en participant le plus souvent à des groupes d’anciens malades (meetings, comités de luttes, assemblées générales, etc.), lutter matin, midi et soir contre le retour de la maladie par l’action revendicative, directe, dans son entreprise, son quartier. Cette méthode thérapeutique a pour effet rapide de se débarrasser des réflexes de dépendance vis a vis de l’électoxicomanie, fortement anxiogène. Par l’abstention électorale, le patient revit, prend du recul, retrouve son indépendance, son autonomie !

    En conclusion, VOTER NUIT GRAVEMENT À NOTRE SANTE ET PEUT MENER AU CERCUEIL DES ILLUSIONS ! ! !

    Docteur Pierre Noire

    N.B : le docteur Pierre reçoit gratuitement et sans rendez vous et peut fournir, si nécessaire des « arrêts de voter » renouvelables, à fournir à votre antenne locale « d’insécurité sociale ».

  • #ABSTENTION !
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article859

    Le rituel de la farce électorale provoque chez les libertaires de tout poil, d’âpres discussions, mais à peu près tout le monde semble d’accord sur le sujet. L’abstention est bien la meilleure réponse face à l’inutilité du vote. Les urnes n’ont jamais engendré de Révolution, mais le principe du vote dans les démocraties auto-proclamées représentatives n’en est pas pour autant un rituel désuet et inutile. Bien au contraire, le vote a été la voie royale par laquelle se sont mis en place des États totalitaires et dictatoriaux qui ont acquis et tirés leur légitimité de l’élection. Car, le rôle premier du vote est bien de donner une apparente légitimité à ce qui n’en a pas, à ce qui n’en a jamais eu.

    En effet l’acte de mise en urne de sa propre voix est, avant tout, l’acte de soumission volontaire et délibérée de l’individu au pouvoir d’un autre. Voter, dans un système électoral représentatif, c’est avant tout accepter qu’un autre parle et décide à ta place. Le système électoral n’est rien d’autre que la capitulation de l’individu au nom du principe de majorité où le nombre fait loi. En période électorale, les injonctions au « civisme » se font toujours plus pressantes. Et, nous pouvons entendre des « Faites voter, abonnez un ami, inscrivez-vous sur les listes électorales, etc ». Cela s’adresse à tout le monde, bien sûr, mais en particulier aux jeunes, surtout les jeunes de banlieue. L’argument massue qui est supposé les convaincre leur dit « plutôt que d’aller casser ou brûler des voitures, profitez de l’élection pour exprimer vos colères ».

    En général nous assistons à une compétition entre partis politiques dits de « droite » et partis politiques dits de « gauche ». Certains vous la promettent « dure » (la compétition), pendant que d’autres vous l’édulcorent pour vous le refiler en « douceur ». Mais vous refiler quoi au fait ? … Le capitalisme et tout ce que cela engendre. Donc, si nous votons, nous votons comment nous nous ferons licencier, de quelle manière la police nous tapera dessus si nous protestons, de comment la « justice » nous jugera, etc. Et, attention ! Tout cela, sans que nous ayons notre mot à dire !

    Nous entendons souvent à la télé, lisons dans les journaux et écoutons un peu partout et jusque dans le bar du coin, ce genre de sottises : « Le droit d’vote, y faut l’dire, c’est sacré ! Vraiment !… Hé, y’a des gens qui sont morts pour ça, hein ! »... Cela résumerait, en quelque sorte, toute l’histoire de l’humanité qui serait, dès lors, ramenée à « ça » : Si Spartacus a défié Rome, si les Sioux ont résisté, si les Canuts ont cassé leurs machines, si Louise Michel, Valles, Reclus, se sont insurgés lors de la commune de Paris, c’est uniquement pour « ça » ! ... Pour que nous puissions aller voter ! voter ! Et voter ! … Alors qu’en fait, il s’agit d’élire ceux qui pourront gérer la paix sociale afin que notre exploitation puisse continuer.

    Au delà du vote pour élire un président (ce qui nous est présenté comme le summum de la démocratie – suffrage universel oblige) qui aura pour seules fonctions de nous représenter et, surtout, de nommer le gouvernement qui sera chargé de nous imposer sa politique, il y a parfois des votes pour prendre des décisions dans la plus pure tradition démocratique capitaliste et qui sont censés donnés la nécessaire touche démocratique pour que tout baigne.

    Mais, quelques exemples nous montreront que, hélas, le vote, lorsqu’il ne va pas dans le sens souhaité par l’administration, quelle qu’elle soit, est purement et simplement bafoué.

    Il y a quelques années, à Chamonix ou à Chaulnes, les habitants ont exprimé, par le vote, leur refus de vivre au milieu des avions et des camions. Leurs décisions, pourtant démocratiquement acquises – par le biais du principe de la majorité, s’entend - furent invalidées par les tribunaux. D’après les députés (qui font les lois), les habitants sont incompétents pour décider de leurs conditions de vie (mais seulement quand ils ne votent pas comme il faut !).

    Plus récemment, en 2005, le fameux vote sur le traité pour la constitution européenne qu’une majorité d’électeurs avait officiellement refusé ... eh, bien ! Sarkozy nous l’a imposé quelques années plus tard, avec cynisme et sans la moindre vergogne, car les électeurs n’auraient pas compris comment il fallait voter. Et là, tous les donneurs de leçons qui nous disent qu’il faut aller voter, on les entend moins. Mais, nous dira-t-on, nous caricaturons, nous sommes négatifs, ils ne sont pas tous pourris, et y’ en a même des qui sont biens, ou que sais je encore ...

    Faut-il, également, vous rappeler les votes fastidieux pour faire adopter ce fameux traité de Lisbonne qui eurent lieu en Irlande ? Là, Messieurs, dames, pour faire bien voter, il a fallu s’y reprendre à deux fois ! Sachez que, lors du premier vote, les irlandais, non plus, « ne comprirent pas » comment il fallait voter et, donc, il fallut recommencer pour voter comme les politiciens le souhaitaient.

    Prenons, maintenant, le cas de Lula, au Brésil, à Porto Alegre. Cette municipalité est (ou a été) dirigée par des trotskistes du parti des travailleurs (PT). C’est au sein de ce soit-disant « laboratoire social » que se concoctait l’infaillible recette pour donner aux masses un avenir radieux - du moins le prétendaient-ils. Pratiquement seuls dans ce panorama à être un « tantinet » critiques, nous, les militants de la CNT-AIT, nous en avons pris pour notre grade : « sectaires, dogmatiques, donneurs de leçon …, et j’en passe … » Mais nos compagnons de la COB-AIT qui dénonçaient la logique électoraliste de Lula et appelaient à l’abstention, eux, se faisaient carrément tirer dessus à coup de revolver ! (Et vive la démocratie représentative ! bang !)

    Quelque temps après, c’était en octobre 2002, Lula est élu à la présidence de la république bananière du Brésil. Cette fois-ci, avec un trotskiste pur jus président de la république, on allait voir ce qu’on allait voir. Et en moins d’un an, nous avons vu, tout le monde a vu, et les brésiliens ont vu : Réduction drastique des budgets sociaux, réforme fiscale favorisant les hauts revenus (ben tiens), blocage des salaires des fonctionnaires, réformes des retraites dont l’âge de départ a été relevé de 7ans ! les pensions, elles, diminuées de 30 %, etc.

    Et tout ça, sans mouvements sociaux. Alors, content du voyage ? Ce fut plus fort que Sarkozy, Valls et Hollande réunis. Il m’a souvent été dit, et j’imagine, à tous les abstentionnistes aussi, que : « Si tu ne votes pas, tu fais le jeu du FN ». Et, avec notre critique du vote, nous aussi, nous ferions, paraît-il, le jeu du FN.

    Rappelons ce que l’Anarchiste Buenaventura Durruti disait à Barcelone, en 1932 : « Les socialistes et les communistes disent que nous abstenir aux élections, c’est favoriser le fascisme. Mais nous avons toujours dit que l’État est un instrument d’oppression au service d’une caste. Et nous restons fidèles à nous-mêmes. Le mouvement de libération doit toujours faire face à l’État. C’est pourquoi nous prônons l’abstention électorale active. Active veut dire que, tout en nous abstenant de la stupidité électorale, nous devons rester vigilants dans les lieux de production et dans la rue.

    Les vrais bandits, les vrais malfaiteurs, ce sont les politiciens qui ont besoin de tromper et d’endormir les ouvriers en leur promettant la semaine des 4 jeudis pour leurs arracher un vote qui les porte au parlement et leur permet de vivre en parasites sur la sueur des ouvriers. Lorsque nos camarades députés socialistes ont, eux aussi, unis leurs voix à cette cohorte d’eunuques, ils ont montré leur vrai visage. Car il y a de nombreuses années qu’ils ont cessé d’être des ouvriers, et par conséquent des socialistes. Ils vivent de leur activité de député.

    Que les républicains socialistes le sachent : ou bien ils résolvent le problème social, ou bien c’est le peuple qui le résoudra. Nous savons que la république ne peut pas le résoudre. Aussi, disons nous clairement à la classe ouvrière qu’il n’y a plus qu’un dilemme : ou mourir comme des esclaves modernes, ou vivre comme des hommes dignes, par la voie directe de la Révolution sociale. Vous donc, ouvriers qui m’écoutez, sachez à quoi vous en tenir. C’est de vous que dépend le changement du cours de votre vie ».

    Quatre ans plus tard, le 19 juillet 1936, les Anarchistes Espagnols, et parmi eux Durruti, barraient la route au coup d’État fasciste en prenant les armes et par la révolution sociale. Pendant ce temps, les députés parlementaient gaiement ... avant que les partis politiques ne tirent dans le dos des Anarchistes et autres Révolutionnaires, tuant ainsi la Révolution en Espagne !

    Alors que fait-on si nous n’allons pas voter ? Bien avant l’apparition tragique de l’économie marchande et du travail forcé, bien avant le règne mortifère et destructeur de la bourgeoisie, l’humanité des temps anciens a vécu pendant des dizaines de milliers d’années au sein de sociétés sans État où les décisions concernant la vie commune étaient prises par des assemblées générales de tous les membres de la communauté. Il ne s’agit pas d’idéaliser ces sociétés, mais il est bon de rappeler que les pratiques de démocratie directe et d’assembléisme sont issues de ce très lointain passé. (NDLR : voir les travaux de P. Clastre, J. Mallaury, ou M. Sahlius). Les rebelles et les révolutionnaires de toutes les époques ont cherché à renouer avec cette pratique, tout simplement, parce qu’elle est la seule à tourner le dos à toutes les oppressions et la seule qui donne la possibilité de fonctionner sur un mode réellement humain.

    La démocratie directe empêche la confiscation de la parole de tous au profit d’un seul ou de quelque-uns. Le porte-parole ou le délégué n’est, effectivement, que le porteur, le vecteur de la parole des autres. L’assemblée qui l’a choisi peut, à tout moment, le révoquer s’il s’avère que le mandat confié n’est pas respecté.

    Ce système politique n’engendre donc pas de prise de pouvoir. Non seulement le mandaté est constamment soumis au contrôle pour les mandats qui lui sont confiés mais encore sa délégation est limitée, dans le temps et dans son objet. Il est évident que la bourgeoisie et toutes les classes dominantes qui l’ont précédée ont toujours cherché à justifier leurs oppression. La bourgeoisie a toujours prétendu que les sociétés humaines n’avaient jamais fonctionné sur d’autres modes que tutélaires et a donc toujours nié qu’elles aient pu avoir la capacité d’échapper à une tutelle, c’est-à-dire au supplice de la domination. Mais cet argument (qui n’est en fait qu’un « simple » déni) ne tient pas la route, car l’humanité à vécu beaucoup plus longtemps sans joug que sous le fer. Elle saura sans nul doute, tôt ou tard, retrouver le chemin de la Liberté. Ce n’est qu’une question de temps.

    Article d’@Anarchosyndicalisme ! n°153 mars - avril 2017
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article853

  • Le vote : « la mise en urne » de sa propre voix
    https://archive.org/details/le_vote_la_mise_en_urne_de_sa_propre_voix

    Le rituel de la farce électorale provoque chez les libertaires de tout poil, soit d’âpres et sanguinaires débats (vote tactique, vote de protestation, vote blanc, vote de déstabilisation,...), soit un long bâillement indulgent, tant le dilemme de l’utilité ou non du vote semble résolu une fois pour toute (inutile bien sur !).

    Aux uns qui rêvent de faire vaciller le pouvoir par le biais des urnes, les autres opposent la vacuité des messes électorales et la fourberie des élus. S’il me paraît évident que les urnes n’ont jamais engendré de révolution, le principe du vote dans les démocraties auto-proclamées représentatives n’en est pas pour autant un rituel désuet et inutile, une survivance ringarde des pratiques sociales du 20ème siècle. Je crois bien au contraire que c’est le premier élément de police de la république bourgeoise. L’acte de mise en urne de sa propre voix est avant tout l’acte de la soumission volontaire et délibérée de l’ individu au pouvoir d’un autre. Voter dans un système électoral représentatif, c’est avant tout accepter qu’un autre parle et décide à sa place. Voter, c’est donc en tout premier lieu se défaire de sa propre liberté, de sa propre responsabilité. Les scribes de la république ne s’y trompent pas lorsqu’ils gravent sur leurs tablettes les termes explicites de « représentation par les élus », de « délégation de pouvoir », ou encore de « légitimation par les urnes ». Bien plus qu’un escadron de gardes mobiles, qu’une armée en parade aux portes du désordre, qu’un juge à la robe aussi noire que la mort et la peine, le système électoral n’est rien d’autre que la capitulation de l’individu au nom du principe du nombre, du principe de majorité. Contrairement à ce que prétendent bon nombre de « citoyens » en brandissant leur carte d’électeur, participer à ce rite païen, ce n’est pas prendre ses responsabilités, c’est les fuir, c’est demander à quelqu’un d’autre de décider à sa place. Voter ce n’est pas agir, c’est s’engager à ne pas agir, c’est admettre que ses propres actions soient interdites, décidées ou ordonnées par d’autres.

    Cette vision du système électoral n’est pas une construction théorique, mais le constat du mode de fonctionnement réel de nos sociétés totalitaires. Comme le disait mon prof de droit : l’élection, c’ est le prix de la paix sociale. Les politiciens de profession qui, eux, vivent (et très bien) d’un tel système le savent parfaitement, qui après chaque grondement social, se dépêchent d’organiser de nouvelles élections. D’ailleurs, même en temps de « paix sociale », l’élection est nécessaire pour assurer aux dirigeants la soumission consentante et récurrente de la population. Les rituels organisés à intervalles de temps plus ou moins réguliers ont pour fonction première de rappeler à l’individu qu’il accepte ce pacte de résignation. Peu importent les résultats des élections (ils s’ arrangent toujours entre eux), l’essentiel est que les « citoyens » acceptent le pouvoir des élus. Tout est mis en œuvre pour rappeler au quidam que c’est là le fondement du fonctionnement démocratique. Journaleux en tête, tous les communicateurs de la république sont alors chargés de donner l’ impression à chaque individu - républicain qu’il participe à l’élaboration de la démocratie. Les combats télévisés de petits chefs, les révélations croustillantes, les discours sur la constitution, même les affaires juridico - mafieuses sont avant tout un spectacle destiné à faire de l’élu le garant (fragile) de la démocratie, et de l’ électeur un irresponsable consentant.

    La construction d’une société nouvelle nécessite d’abattre jusqu’à la dernière pierre ce temple de l ’exploitation qu’est la république. Mais cela nécessite avant toute chose que chaque individu refuse que d’autres parlent, décident, organisent et légifèrent à sa place.

    Voter, c’est se soumettre.

    Netto

    Article du Combat syndicaliste de Midi Pyrénées n°66

  • LA FICTION AU POUVOIR
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article854

    "Le spectacle électoral vient-il de commencer sur les chapeaux de roues qu’il éclabousse déjà la classe politique. Les anarchistes le répètent depuis fort longtemps, le pouvoir corrompt. Dans les années 1970, le Canard Enchaîné avait, déjà, réactualisé cet aphorisme au cours de l’affaire Aranda en écrivant que « le Pouvoir est toujours de boue ». Quelques décennies de scandales plus tard, essayons d’aller au delà du simple calembours pour tenter de comprendre les soubassements idéologiques d’un scandale permanent. Qu’est-ce qui fait que tant de boue tienne toujours debout ?

    Nous avons bien entendu que si le pouvoir est toujours debout, c’est parce que nous restons à genoux. Mais c’est que l’affaire du travail fictif de Pénélope nous renvoie à autre chose. Ce pouvoir de boue ne serait-il debout que parce que la majorité le considère comme tel ?

    En effet, toute institution est imaginaire et, à ce titre, il est logique qu’elle produise un travail fictif. Pour être précis, si nous parlons de travail à son sujet, nous commettons un abus de langage. L’idéologie dominante a clairement récupéré, à son profit, tout le capital symbolique du mot. En effet, une institution ne travaille pas, elle fonctionne … quand fonctionne la croyance à sa fiction. Dans ce schéma, ce sont les croyants qui paient. En effet, l’institution, que ce soit l’Église ou l’État, a introduit l’idée qu’elle effectue une action éminemment utile et nécessaire, comme "travailler" pour que nos âmes aillent au paradis ou pour relancer l’économie ; ce qui par conséquent compterait plus que le travail réel. Comme souvent en matière d’exploitation des hommes, les choses se font petit a petit, mais toujours dans le même sens. Ainsi, au départ, les indemnités parlementaires étaient-elles bien plus modestes car justifiées par l’intention de permettre aux ouvriers d’exercer les fonctions électives. Aujourd’hui, combien d’ouvriers à l’assemblée ou au sénat ? Concrètement, ces indemnités et leurs attributs successifs sont devenus des sources d’enrichissement pour une caste sociale. Voilà pourquoi le travail des politiciens, si fictif soit-il, paie bien plus que le travail productif des travailleurs, aussi réel soit-il !

    Comme par hasard, dans des discours pleins de promesses, il a beaucoup été question de travail, ou plutôt de non-travail, de la part de gens qui font de leur non-travail une source d’enrichissement ; ce qui n’est pas étonnant. A les écouter, il semblerait que le travail tende à disparaître. Certes, les délocalisations dont ils sont directement responsables, d’un côté, et l’augmentation de la productivité à laquelle ils sont totalement étrangers, de l’autre, ont fait œuvre de mutations. Mais, il n’en reste pas moins que des millions de tâches pénibles ont toujours besoin de main-d’oeuvre et, dans certains domaines comme celui de la santé ou de l’accompagnement des anciens, ces besoins sont en réelle augmentation. Bien entendu, les personnes employées a ces travaux réels ont été invisibilisées par le pouvoir. Mais ce n’est pas parce que les politiciens nous méprisent que nous n’existons pas.

    Alors est réapparue, chez certains des candidats à la roue de la fortune, cette vieille rengaine du revenu universel, couplée a celle du robotisme. Résumons cette pensée si peu complexe qu’elle en paraît, elle aussi, fictive ou, plutôt, science-fictive. Les robots (Et qui les fabriquera ? Et qui les entretiendra ?) travaillerons à notre place et nous recevrons alors un revenu universel. En fait, ce sera un revenu de survie minable et financé par cette automatisation généralisée. Mais les Pénélopes, et il faut en parler au pluriel car il serait injuste de laisser au singulier celle par qui la toile s’est déchirée, nous disent tout autre chose. Elles disent clairement à tout le monde (et même aux croyants) que, pour le politicien, blablater et tenir salon légitimerait un "travail" ; et, ce travail, certes intangible selon l’expression hardie de l’avocat du couple Féllon, mériterait d’être grassement rétribué. Dans un tel contexte idéologique où ceux qui proposent de mettre un terme à toute perspective d’emploi, pour une grande partie de la population en lui distribuant quelques miettes, sont aussi ceux qui profitent de tels privilèges. En définitive, le concept de revenu universel nous renvoie non pas à l’avenir mais au passé. Un passé qui a transformé, en pierre, la boue du pouvoir. A l’époque, il y avait les aristocrates, les esclaves et la plèbe. Aujourd’hui, il y a les Pénélopes, les robots et … le reste."

    Edito d’@Anarchosyndicalisme ! n°153 mars - avril 2017
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article853

  • ÉLECTIONS PARTOUT, DÉMOCRATIE NULLE PART : DE HITLER A TRUMP
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article849

    L’exemple le plus frappant, qui devrait à lui seul décourager les gens, est celui d’Adolf Hitler. Le führer, responsable de la pire idéologie que l’humanité ait connu, leader d’un régime d’une extrême violence fut porté au pouvoir par les urnes. Déjà en 1932, Hitler faisait un score de 36,7 % aux élections présidentielles. En juillet de la même année il atteint 37,27 % aux élections législatives, son parti, le NSDAP, parti NAZI, remportant 230 sièges au Reichstag, l’Assemblée allemande.

    Le président refuse de nommer Hitler chancelier, participant encore plus à permettre l’agitation d’Hitler dans tout le pays. De toute façon la machine infernale était en marche. Hitler est fait chancelier après de nouvelles élections législatives et des hésitations en janvier 1933. Ce fut le prélude à la barbarie qui suivit. En 1933, lors des élections législative Hitler et son parti le parti national-socialiste (parti NAZI) font un score 43,9% et remportent 288 sièges au reichstag.

    Peu après l’Assemblée vote les pleins pouvoirs à Hitler et le parti NAZI devient parti unique. Cette séquence politique est au cœur d’un contexte particulier qui nous parle aujourd’hui. L’Allemagne de l’époque est en proie à une crise économique qui plonge les Allemands dans la misère. Le chômage est très élevé et les gens sont désespérés. Les politiciens de tout bord font preuve d’une incompétence évidente. Ils sont incapables de trouver des solutions, trop occupés à essayer de sauvegarder le système et leurs propres avantages. Ils militent pour leur pouvoir.

    Au final, leurs tentatives de lutter contre les nazis se soldent par des échecs. Ils se contentent de les stigmatiser et tentent de les ostraciser, quitte à ne même pas respecter les lois qu’ils sont censés représenter (refus de Von Hindenburg de nommer Hitler chancelier). Cela sert les nazis qui deviennent de fait plus populaires et peuvent brandir ces preuves de la corruption des politiques.

    Cette histoire, bien que connue, ne semble pas avoir servi de leçon à l’humanité.

    Aujourd’hui les élections ont tellement perdu de sens que dans de nombreux régimes autoritaires sont organisées des élections plus saugrenues les unes que les autres. Le but étant de légitimer ces régimes souvent sanguinaires et liberticides et leur passer un vernis « démocratique ».

    Régulièrement l’État nord-coréen organise des élections... En mars 2014 ont eu lieu les élections parlementaires dans cette dictature. Le parti unique remporta tous les sièges, et pour cause, il a été le seul à présenter des candidats, qui n’ont donc eu aucun mal à se faire élire. Cependant on ne peut que constater leur « légitimité électorale », le taux de participation ayant frisé les 100 %. Ce serait risible si ce régime ne maintenait pas sa population dans la plus grande misère sociale et mentale.

    Dernièrement, on a pu voir la tenue d’élections en … Syrie organisées par le régime de Bashar El Assad, responsable de la destruction du pays, de la mort de centaines de milliers de personnes et de l’exil de millions d’autres. Le 3 juin 2014, l’élection présidentielle voit la réélection de Bashar El Assad avec 89 % des voix et un taux de participation de 73,42 % … de ceux qui ne sont ni morts ni en exil. N’ayant pas peur du ridicule, le régime a rempilé pour les élections législatives en avril dernier. Le parti Baas, a remporté 80 % des sièges... un plébiscite pour ce régime « démocratique ». La Russie a salué ces élections « conforme à la Constitution syrienne actuelle » selon elle.

    Aux États-Unis, encore une fois, les urnes ont accouché d’un phénomène qui est bien loin de la « démocratie » annoncée. Même si les soupçons de fraude électorale sont plus que lourds, il n’en reste pas moins que le vote Trump est clairement le vote de l’échec des politiciens classique et que des millions de voix se sont portées sur Trump pensant qu’il représentait – ce qui est tout à fait faux – la critique de l’establishment, ces « élites » coupées de toute réalité sociale (comme l’autre, avec ses croissants à 10 centimes), qui exaspèrent la population.

    Ici même, en France, la montée du Front National au fil du temps devrait poser quelques questions. Depuis 2002 et la présence de Jean Marie Le Pen au second tour de la présidentielle, son parti suit une pente ascendante apparemment inexorable. Et les partis classiques et leurs représentants nous font le chantage du « si vous ne votez pas pour nous vous aurez droit aux fascistes du FN ». Plus le temps passe et plus leurs programmes se vident de leur substance. Ils semblent incapables de répondre aux enjeux actuels, et plus précisément à ceux apparus à la suite de la crise économique de 2008. Face aux problèmes bien réels qui touchent notre société, comme le chômage et la pauvreté, la réponse des politiciens de gauche et de droite consiste à défendre leurs intérêts propres, à nous pondre des lois de plus en plus liberticides, et à brandir la menace de l’extrême-droite.

    Face à ces politiques si éloignées des besoins, face à cette situation apparemment sans solution, les gens se tournent vers … l’extrême droite. Et l’appel à faire barrage à chaque élection alimente la rhétorique paranoïaque du FN et le fait encore progresser ; élection après élection. Le travail de fond contre l’extrême- droite, auquel nous avons appelé si souvent n’a jamais été fait ni par le pouvoir, ni par la gauche ni par l’extrême-gauche. Le résultat de cette incurie est là, parfaitement prévisible, comme nous l’avions écrit, en 2002, entre les deux tours du duel Chirac / Le Pen, cette élection s’étant traduite par le triomphe de Chirac (grâce à toute la gauche et à l’essentiel de l’extrême-gauche) avec un score de république bananière (82,21 %), ce qui lui laissa les mains totalement libres pour poursuivre sa politique antisociale et introniser sur la scène politique des intrigants comme Sarkozy.

    Nous reproduisons ici https://seenthis.net/messages/550469, pour rafraîchir la mémoire, ce que nous avons écrit en 2002, entre les deux tours, dans un numéro spécial de notre journal.

    Article d’@Anarchosyndicalisme ! n°152 déc 2016 - Janv 2017
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article844

    #abstention

    • @Anarchosyndicalisme vos articles sont (de plus en plus ?) affligeants !

      Cette affirmation est simplement fausse :

      Le führer, responsable de la pire idéologie que l’humanité ait connu, leader d’un régime d’une extrême violence fut porté au pouvoir par les urnes.

      Entre élections grossièrement truquée et pouvoir offert par l’État en l’absence de majorité, il est faux de dire que le pouvoir « fut porté par les urnes ». Et si je dis ça ce n’est pas pour défendre un système parlementaire dit représentatif que je considère comme anti-démocratique et nuisible.

      Sur un autre sujet, les élections présidentielles américaines, vous tenez le même type d’affirmations fausses. Nous sommes le 12 décembre 2016, votre article est publié le 9 décembre, et vous maintenez cette affirmation périmée depuis environ le 15 novembre :

      Aux États-Unis, encore une fois, les urnes ont accouché d’un phénomène qui est bien loin de la « démocratie » annoncée

      Vous n’avez pas intégré les environ 6 millions de voix qui ont été dépouillées depuis et qui donnent une avance de 3 millions de voix en faveur d’Hillary Clinton (quand bien même celle-ci ne représente pas non-plus, de fait, une alternative démocratique). Peut-être vous réfugierez vous en amalgamant « les urnes » avec « le système électoral américain » voire carrément l’État.

      Par ailleurs vous, qui vous revendiquez de l’anarchisme, reprenez l’analyse mainstream des hommes-femmes d’États et médias oppressants qui consiste à jouer les ventriloques sur des bases sondagières douteuses :

      il n’en reste pas moins que le vote Trump est clairement le vote de l’échec des politiciens classique et que des millions de voix se sont portées sur Trump pensant qu’il représentait – ce qui est tout à fait faux – la critique de l’establishment,

      Si une sérieuse sociologie du vote Trump mériterai d’être faite, ce qui serait difficile et long à réaliser, il n’est pas difficile de voir qu’une large majorité des personnes (75%) n’a pas voté pour Trump car soit a voté pour Clinton (26%) soit s’est abstenu (45%) soit a voté pour un autre candidat (4%). On notera que Trump réalise un des pires score républicain depuis 1936, ce qui rend difficilement tenable le discours du « vote populaire et contestataire en faveur de Trump ». Il semblerait plutôt que l’électorat républicain se soit mobilisé comme à son habitude, un peu moins même. Si on prend en compte la situation favorable, l’usure de 8 ans de présidentielle Démocrate, la haine d’une part importante de la population américaine contre les Clinton et contre Hillary Clinton en particulier et une dynamique favorable aux républicains aux élections législatives, son échec est encore plus patent. Je trouve étonnant cette volonté de reprendre et légitimer l’analyse qui fait croire que les électeurs de Trump auraient voté contre un « establishment ».

      Pour la situation française, encore une fois vous reprenez le discours des pouvoirs en place de « la hausse inexorable du vote extrême droite » signe d’une révolte par les urnes :

      Ici même, en France, la montée du Front National au fil du temps devrait poser quelques questions. Depuis 2002 et la présence de Jean Marie Le Pen au second tour de la présidentielle, son parti suit une pente ascendante apparemment inexorable.

      Je ne dit pas qu’il n’y a pas de nombreuses questions à se poser, mais une pseudo hausse de l’extrême droite n’est pas nécessaire pour enclencher la réflexion - surtout si on veut la faire sur des bases saines.

      D’une part cette hausse est extrêmement faible, pour l’instant la hausse la plus marquante a lieu lors des élections faciles mais où l’électorat FN était peu mobilisé et en plus le lit de la rivière n’a pas débordé, c’est à dire les valeurs maximales atteintes aux présidentielles ne sont ni égalées ni dépassées. Mais d’autre part, ce qui est notable c’est que cette hausse n’est pas inexorable puisque l’extrême droite a connue une forte baisse à toutes les élections pendant environ 6 ans entre 2005 et 2011.

      Enfin concernant vos publications en général. Je tiens à souligner le caractère sexiste de votre fond d’écran sur Seenthis où l’on voit, à partir d’un photo-montage reprenant une image du film Les Valseuses, Myriam El Khomri quasi seins nus encadrée par Valls et Macron.

      Habitude sexiste que l’on retrouve dans un de vos billets récents, où vous appelez un homme par son nom de famille et une femme par son prénom :

      Avec l’arrivée de Fillon au pouvoir, voire de Marine, https://seenthis.net/messages/550456

      Un récent débat autour d’un de vos articles me confirme que vos analyses sont au mieux périmées, au vu des récents travaux en histoire et sociologie et de l’évolution des réflexions du milieu libertaire, sinon régulièrement erronées et au pire forgées en restant engluées dans les imaginaires des pouvoirs en place :

      https://seenthis.net/messages/535622#message535646

    • Mais bien sûr que Hitler a été porté au pouvoir par les urnes ! Sans les élections il n’aurait eu aucune légitimité pour accéder au poste de chancelier offert par Hindenburg .

      Le fait que ce dernier , le boucher en chef de la der des der , ait pu accéder au poste de président du Reich quelques années après avoir fait massacrer des millions de gens démontre également en quoi il est pertinent de dénoncer le danger électoraliste .

      Je comprends le besoin de se rassurer en décrétant que la montée des fascismes et de l’antisémitisme « n’est pas inexorable » , mais quand je constate que pour ce faire on recourt aux mêmes analyses chiffrées et sociologiques qui n’ont prévu ni le brexit ni le vote Trump ...Cela me rend assez pessimiste .

      Du coup comme on veut pas voir venir la bête immonde on cherche la petite

      Enfin concernant vos publications en général. Je tiens à souligner le caractère sexiste de votre fond d’écran sur Seenthis où l’on voit, à partir d’un photo-montage reprenant une image du film Les Valseuses, Myriam El Khomri quasi seins nus encadrée par Valls et Macron.

      Et comme c’est bizarre, on donne là encore avec ce genre de « réflexion » du grain a moudre a tous les tartuffes (comme s’ils n’étaient pas déjà assez nombreux ) .. Parce que permettre aux hommes d’exhiber leurs pectoraux et interdire aux femmes (au prétexte de sexisme ) d’aller quasi sein nus , ou de rentrer dans un café , ce n’est en tout cas pas égalitaire .

    • Je voie que les anarcouilles ne lâchent pas le morceaux, il vous faut le dernier mots quitte à déversé les calomnies les plus délirantes.
      Voila les féministes accusées d’ « interdire aux femmes (au prétexte de sexisme ) d’aller quasi sein nus , ou de rentrer dans un café » au prétexte qu’ici, elles ne trouvent pas rigolo une blague sur le viol de Mme El Khomri venant d’un groupe qui affiche son antiféminisme à longueur de temps.
      El Khomri n’est pas une militante pour le topless et c’est pas elle qui a fait ce photo montage pour exprimé son droit à l’accès à l’espace publique. Cette image est une utilisation sexiste d’une femme politique. Ce n’est pas une image militante de femme qui revendiquent l’accès à l’espace publique. C’est une instrumentalisation de l’image d’une femme par un groupe masculin et masculiniste.
      A propos de bêtes immonde et de petits bêtes, Trump aussi aime bien les blagues sur le viol, vous avez pas mal de choses en commun. Machos de gauche, machos de droite, même combat.

      #anarcouille #mansplanning #instrumentalisation #masculinisme #déni #confusionnisme #dernier_mot

    • "c’est un coup d’Etat qui permet à Hitler d’accéder au gouvernement. Quant à son principal soutien, il vient des industriels allemands.

      Dans sa déclaration gouvernementale du 1er février 1933, Hitler promettait au peuple allemand l’amélioration de la situation des travailleurs et des paysans et le maintien et la consolidation de la paix. « Donnez-moi quatre ans, et vous ne reconnaîtrez plus l’Allemagne », prophétisait-il. Quatre ans plus tard, les acquis sociaux étaient détruits et les libertés fondamentales étaient bafouées. L’Allemagne, effectivement, était méconnaissable.

      Contrairement aux affirmations souvent entendues, les nazis ne sont pas arrivés au pouvoir suite à à une victoire électorale mais par un coup de force présidentiel, dans un climat de violence et de division de la gauche. Ainsi lors des derniers scrutins de 1932, à la présidentielle du 13 Mars, Hitler a obtenu 30,1% et a été battu au deuxième tour par Hindenburg ; lors des législatives de Juillet 1932, au summum de sa poussée, le parti nazi a obtenu 37,4 % des voix mais lors des législatives de Novembre 1932 (les dernières élections libres), il retombe à 33,1 en perdant 2 millions de voix. La nomination de Hitler comme chancelier en Janvier 1933 ne doit donc rien à choix démocratique. C’est le début de la destruction des libertés, accélérée par l’incendie du Reichstag.

      Le président de la République, le vieux maréchal Paul Von Hindenburg (86 ans), charge Hitler, chef du parti nazi, de former le nouveau gouvernement allemand.

      Tractations indignes

      Cette nomination fait suite à des tractations entre l’ancien chancelier conservateur Franz Von Papen et le financier Schacht, qui représente les nazis.

      Von Papen et les conservateurs espèrent se servir du Führer nazi pour enrayer la menace communiste. Son parti est en effet selon eux en perte de vitesse. Le nouveau chancelier constitue un gouvernement largement ouvert aux représentants de la droite. Il ne compte que trois nazis, Hitler compris. Von Papen est lui-même vice-chancelier. Faute de majorité absolue au Parlement, Hitler paraît loin de pouvoir gouverner à son aise.

      Le 30 janvier 1933, le président allemand Paul von Hindenburg nomme Adolf Hitler, le dirigeant du Parti National-socialiste (NSDAP, abrégé en nazi) Premier ministre. Le premier gouvernement Hitler ne compte que trois nazis, dont Hitler lui-même. Il n’ose même pas se présenter devant le Parlement, car il y est minoritaire. Au lieu de cela, il demande à Hindenburg de dissoudre le Parlement et d’organiser de nouvelles élections, fixées au 5 mars.

      Ce délai lui donne l’occasion de gouverner cinq semaines sans contrôle parlementaire. Il s’agit d’un coup d’Etat légal, car la Constitution allemande de l’époque permet au président de dissoudre le Parlement ou de le suspendre temporairement.

      en juillet 1932, aux législatives : Hitler avait fait 13.745.680 vois et un pourcentage de 37,3 %
      quelques mois après en novembre 1932
      Hitler fait 11.737621 voix, ce qui fait une perte de 2 millions de voix et 4,2% de pourcentage et il perd 34 sièges, il lui en reste 196.
      Le parti social démocrate SPD fait 20,4 % des voix, il perd 1,2% et 12 sièges, il a 7247 901 voix
      Le parti communiste allemand fait 5.980. 239 voix, il gagne près de 700.000 voix et 2,6% en pourcentage, il fait 16,9% et gagne 2,6% et gagne 11 sièges, il en a 100.
      Oui, perdre 2 millions de voix en 5 mois est une déculottée… Et Hitler le vit comme telle… Il est littéralement repêché par les forces conservatrices et les barons de l’industrie de l’armement en particulier…
      Quant aux dernières élections, celles de mars 1933, alors que les nazis sont au pouvoir elles donnent lieu à une fraude massive reconnue comme telle par tous les historiens et Hitler n’a même pas atteint la majorité."

  • LA CRISE QUI DÉBUTE DÉMONTRE QUE LA SOCIÉTÉ A BESOIN D’UN CHANGEMENT PROFOND (2002)
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article849&artpage=2-2#outil_sommaire_1

    [Extrait du numéro spécial que nous avons publié entre les deux tours de l’élection présidentielle de 2002]

    L’#ABSTENTION MAJORITAIRE

    Le 21 avril, onze millions de personnes se sont abstenues. Plus d’un million ont voté blanc ou nul. Le nombre d’abstentionnistes est supérieur au double du nombre de voix recueillies par le candidat qui arrive en tête du scrutin (5 millions seulement). C’est la première fois que l’abstention est numériquement majoritaire aux présidentielles. Ce n’est pas simplement un véritable camouflet infligé à Chirac, Jospin et aux politiciens dans leur ensemble. C’est surtout la marque du rejet massif de la logique politicienne ; cette abstention ayant été, pour une large part, volontaire.

    LA PEAU DE L’OURS

    Forts de la manipulation des esprits à laquelle elle a participé (sur le thème de l’insécurité), de sa main mise sur les rouages de l’État (Gouvernement, préfets, radios et télés dites de service public) de ses nombreux relais (syndicats institutionnels, associations contrôlées.) les socialistes et leurs alliés avaient vendu la peau de l’ours électoral avant de l’avoir tué. Toutes les fractions de la gauche et de l’extrême-gauche politicienne ont voulu compter leurs voix, évaluer leur influence. Elles ont toutes présenté un candidat. Pourquoi ? Pour pouvoir négocier au prix fort les strapontins ministériels dans le prochain gouvernement !

    Cet éparpillement a coûté sa deuxième (et même sa première) place à Jospin. La course effrénée au partage du butin de toute cette politicaillerie a été sanctionnée. Mais, sur ce point, les politiciens, les commentateurs politiques et les médias sont discrets : ils réservent leurs attaques, violentes et quotidiennes, aux abstentionnistes. Ils ont très peu souligné la responsabilité de ceux qui ont divisé leurs propres camps. Ils oublient de dire qu’il aurait suffit qu’une seule des fractions de la gauche plurielle S’ABSTIENNE de présenter un candidat pour que Jospin « passe » au deuxième tour ! […]

    LE PIÈGE S’EST DÉJÀ REFERMÉ

    S’il y a une seule illusion qui n’est pas permise, c’est celle de penser que le deuxième tour et les législatives permettront de « faire barrage », et que protégé par ce « barrage », tout le monde n’aura plus qu’à partir tranquillement à la plage pour les vacances, tout danger étant écarté. Quel que soit le résultat de ces élections, on peut affirmer que le piège s’est déjà refermé sur la population. Les déclarations qui se sont succédé après le 21 avril à 20 heures, montrent que le jeu politicien et parlementaire a simplement franchi un pas de plus dans la perversité. La gauche renouvelle le calcul cynique qu’elle fait depuis vingt ans.

    Si aujourd’hui, elle n’ose pas dire aussi clairement que le faisait le Premier ministre Pierre Bérégovoy « Le FN est la chance historique du PS. Tant qu’il sera fort, la droite sera inéligible », elle compte bien utiliser la peur pour enrayer l’abstention populaire, comprimer le vote protestataire et obtenir une majorité parlementaire aux prochaines législatives (car les seuls enjeux électoraux qui l’intéressent désormais sont là). La gauche espère donc reprendre le gouvernement.

    Mais quel sera le résultat ? Si elle continue la même politique (soit seule, soit dans le cadre d’une alliance gauche plurielle-UDF-divers droite), les mêmes causes produisant les mêmes effets, la misère et le mécontentement de la population ne feront que grandir. Il sera encore plus facile la prochaine fois pour l’extrême-droite de capter les électeurs, de faire un score encore plus « historique » Le choix électoral que nous préparent les politiciens « pour dans cinq ans » [1] sera de ce fait encore pire. […]

    LES ÉLECTIONS PASSENT, LES PROBLÈMES S’AGGRAVENT

    La logique parlementaire et les jeux politiciens de conquête du pouvoir, amènent à un compromis républicain c’est-à-dire antisocial. Ce qu’ils veulent sauver, sous les noms de « démocratie » et « république », c’est l’ensemble du système politique, idéologique et économique qui perpétue l’exploitation.

    L’exclusion, les licenciements, le manque de libertés, l’arsenal répressif, les conflits armés, la mondialisation libérale, l’exploitation du tiers monde, les pollutions, augmentent quels que soient les gouvernements car ils sont tous à la botte du capital. En appelant à voter et à soutenir le système parlementaire anti-démocratique, la gauche et l’extrême-gauche ont œuvré à déshabituer les travailleurs à lutter pied à pied, par la grève et l’action directe, contre les attaques patronales. Aujourd’hui, avec le vote Chirac, ils rompent un nouveau seuil psychologique et idéologique. Le choc qui en découle nous ouvre des perspectives. La lutte contre l’aggravation de la situation sociale doit nous inciter à l’action.

    AUJOURD’HUI, NOS TACHES

    […] Notre message sera clair. A la veille du deuxième tour, malgré l’ambiance de panique médiatico-politique montante, malgré la scandaleuse (et, on nous permettra de le dire, l’antidémocratique) « chasse aux abstentionnistes », malgré les mensonges et les calomnies dont on nous accable, nous assumons calmement et sereinement notre abstention du premier tour et nous renouvelons notre soutien fraternel à tous ceux qui ont relayé notre campagne.
    Si l’abstention au premier tour a été un refus, l’abstention au deuxième tour sera une rupture. Rupture psychologique et idéologique aujourd’hui, rupture sociale demain.

    Face à ce qui se profile, à l’aggravation de nos conditions de vie, à l’augmentation de l’oppression et de l’aliénation, il est indispensable de construire un rapport de force à la base. Il n’y a pas d’autre solution. Faire semblant de croire que Chirac est le rempart de la démocratie et les législatives la solution définitive, c’est reculer pour mieux se faire manger demain.

    CNT-AIT Toulouse

    [1] Finalement, cela a été pour dans 14 ans.

    Article d’@Anarchosyndicalisme ! n°152 déc 2016 - Janv 2017
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article844

  • Réponse à une paire de sottises

    Les textes d’@Anarchosyndicalisme ! soulèvent l’ire des post-modernes sur divers sites internet, et on les comprend : nous battons en brèche leurs âneries. En ce moment, deux « arguments » principaux nous sont opposés. Voici les réponses qu’ils appellent.

    Le premier est nouveau. Donnons-lui la préséance, d’autant qu’il « tourne » sur les réseaux sociaux, comme si c’était une grande découverte. Le voici :

    « … lorsqu’on refuse à l’islamophobie le qualificatif de racisme, parce que, je cite, « les musulmans ne sont pas une race », c’est a priori admettre qu’on pense tout au fond, même inconsciemment, malgré l’universalisme proclamé, que d’autres groupes sont des races pour de vrai. »

    Le petit exemple suivant va suffire à dévoiler l’inanité de ce propos. En cette période d’avant Noël, ma petite fille de 4 ans et demi est revenue hier de la maternelle toute chamboulée car une « grande » venait de lui révéler que « Ce sont les papas qui font les pères Noëls » . Sa maman l’a rassurée : « Mais non, ton papa n’est pas le père Noël » .

    Si notre interlocuteur avait assisté à la scène, j’imagine qu’il aurait appliqué immédiatement ce qui lui tient lieu de raisonnement à cette maman et qu’il aurait conclu qu’indubitablement ma belle-fille, tout au fond d’elle-même, pense que le père Noël existe. Je suis en mesure de lui apporter un démenti cinglant : depuis l’âge de 5 ou 6 ans, ma belle-fille sait que, pour de vrai, le père Noël n’existe absolument pas.

    De même, quand nous opposons au discours « J’ai été enlevé par des extra-terrestres » du gourou Raël (secte des raëliens) un démenti formel « Non, Raël, tu n’as pas été enlevé par des extra-terrestre » , cela n’indique ni de près ni de loin que nous croyons aux soucoupes volantes, aux visites et aux enlèvements d’humains par des petits hommes verts munis de leurs sympathiques petites antennes.

    Le raisonnement de notre interlocuteur rappelle celui d’un Grec inepte qui affirmait :

    « S’il y a des temples, il y a des dieux. Or il y a des temples, donc il y a des dieux » ,

    ce qui fit se rouler de rire tous les philosophes de l’époque, Lucien en tête si mes souvenirs sont bons. Je dois dire que la phrase de notre interlocuteur m’a fait le même effet.

    Pour finir, il est clair que, quand on écrit « les musulmans ne sont pas une race » , on s’oppose tout simplement aux individus (manifestement nombreux, du Ku-Klux Klan à l’extrême gauche) qui sont persuadés, eux, qu’il existe des races. On combat leur sinistre illusion sans en partager une once. Point barre.

    L’autre type « d’argument », plus classique, est le suivant : « N’y a-t-il pas d’arabes parmi vous ? » , ce à quoi un ou une autre internaute ajoute

    « Non il n’y a pas d’arabes, c’est 3 ou 4 vieux blancs racistes qui voudraient revenir au militantisme des années 60… » .

    Dans son texte, la première personne avait écrit également

    « C’est une violence que ne pas vouloir écouter les gens » .

    Ce type de violence, les post-modernes ne se gênent pas pour nous la faire. Très probablement, ces deux personnes que je cite ici n’ont jamais mis les pieds dans notre local, ce qui n’empêche pas l’une d’elles de nous « décrire ». Si par le plus grand des hasards elles l’ont fait, elles mentent. Cela dit, revenons aux « arguments ».

    Nous ne demandons jamais aux personnes qui prennent contact avec nous de quelle supposée origine raciale elles sont. Pour une raison bien simple : on s’en fout. Par contre, nous échangeons sur leurs conditions de vie, de travail, sur l’exploitation qu’elles subissent… et justement, de ces échanges, il ressort que beaucoup d’entre-nous avons subi directement de fortes discriminations parce que nous étions sans papiers, souvent sans revenu stable ou que la langue française nous était parfaitement étrangère (sans compter, pour les très âgés, le passage par quelques camps de concentration. Il en reste parmi nous, les anarchos ont la peau dure…) bref, autant d’oppression sinon plus, que des personnes nées en France et qui revendiquent maintenant leur « racialisme ». Ça devrait donner à réfléchir, non ?

    Ensuite, ça c’est exact, il y a des « vieux » à la CNT. Deux petites remarques en passant : 1/ pas que des vieux 2/ les dénoncer comme de « vieux blancs » est typiquement une formulation raciste. L’avantage que nous avons, nous les vieux (1), est que nous avons un passé qui parle pour nous (au moins pour ceux qui continuons à être ce que nous avons été). Dans les années 60, qui semblent si éloignées à l’internaute qui nous critique, beaucoup d’entre nous étaient engagés aux côtés de la résistance libertaire espagnole. Un certain nombre de copains y ont laissé la peau. Ainsi, le militant anarchiste Salvador Puig Antich, à 26 ans fut assassiné par l’Etat espagnol au « garrotte vil » (2). D’autres militants ont été torturés, lourdement condamnés… Dans ces mêmes années 60-70, pour ne donner qu’un autre exemple, l’avortement était considéré comme un crime, passible de la réclusion à perpétuité. Et bien, il y a eu des gens, maintenant vieux, pour organiser des avortements clandestins, dans l’appartement de tel ou tel militant. Le risque était grand, il fut pris. Ici aussi il y eut des morts, au moins indirectement : la dernière personne incarcérée en France pour crime d’avortement fut un militant anarchiste, un très bon copain : Aristide Lapeyre (1899-1974). Il était, lui aussi vraiment très vieux. Ça n’empêcha pas l’Etat de l’expédier en prison. Il y fit un accident vasculaire cérébral et en succomba.

    Avec l’arrivée de Fillon au pouvoir, voire de Marine, il est fort possible que l’avortement ait à revenir clandestin, entre autres joyeusetés. Nous gardons précieusement les adresses internet de nos deux internautes, sûrs que nous sommes qu’elles offriront leurs domiciles pour les faire dans la clandestinité, comme ce fut le cas dans ces fameuses années 60-70. Ce que les vieux ont eu le courage de faire quand ils étaient jeunes dans un contexte ultra-répressif, des jeunes internautes d’aujourd’hui, qui ont le verbe si haut, ne manqueront pas de le faire avant de devenir vieux (ou vieilles), n’est-ce pas ?

    Et si ce n’est pas l’avortement qui devient illégal, il y a déjà beaucoup de choses à faire en ce moment : cacher des sans-papiers, aider des « arabes » : mais oui, il y a des dizaines de milliers de Syriens (par exemple) réfugiés en France, dans des conditions parfois sordides. Ils ont besoin d’aide concrète et de solidarité (pas que verbale). La CNT-AIT après avoir lancé l’initiative « Du lait pour les enfants réfugiés syriens », transformée ensuite en « Initiative laïque de soutien et d’aide aux réfugiés syriens » leur apporte une aide, au quotidien (3). Qu’attendez-vous, chèr(e)s internautes pour vous joindre à nous ou pour faire de même ? Pour aider les « arabes » (et les autres) qui sont dans d’inextricables difficultés ? Mais peut-être êtes vous tellement centré(e)s sur votre petit nombril que rien d’autre ne vous importe.

    (1) Vu ce type d’attaque jeuniste, la rédaction a demandé à un vieux de répondre.

    (2) Le garrotte, c’est un collier de fer qu’on passe autour du cou du supplicié. Le bourreau le serre ensuite progressivement, lentement, jusqu’à ce que mort s’en suive.

    (3) Nous réfléchissons actuellement à étendre et développer cette initiative.

    Article d’@Anarchosyndicalisme ! n°152 déc 2016 - Janv 2017
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article844

    • Je rajoute, j’avais déjà commenter le texte dans les commentaire d’un article précédent :

      https://joaogabriell.com/2016/07/14/ce-que-releve-lune-des-phrases-preferees-des-islamophobes-lislamophobi

      Déjà c’est un jargon difficile à lire. Car en substance on dit "ils sont de mauvaise fois ces raciste", "antiracisme politique = nous, "eux = naïfs dans le système du racisme d’État".. mais bon.

      Premièrement le texte vise habilement à ne pas distinguer "Musulman" et "Islam", soit "Musulmans" des personnes et "Islam" un dogme, une idéologie.

      « les musulmans ne sont pas une race », c’est a priori admettre qu’on pense tout au fond, même inconsciemment, malgré l’universalisme proclamé, que d’autres groupes sont des races pour de vrai.

      Effectivement faire on fait la différence entre religion/idéologie une distinction sur le caractère physique. Il y a une net différence entre un Juif et un pratiquant du Judaïsme. Comme entre venant des pays à confession musulmane et pratiquant musulman ce que ne semble ignorer l’auteur.

      Si tu es pour affirmation "les musulmans ne sont pas une race" donc "d’autres groupes sont des races pour de vrai". On est là dans l’argumentation typique du faux dilemme, en générale les argument des racialiste ne vont pas plus loin.

      Mais là.

      Deuxième cas :

      Soit ils pensent que « noir » « arabe » sont bien des catégories construites et non pas des races, mais que le mot « musulman » tout en renvoyant lui aussi à une construction historique relèverait d’une réalité trop différente pour que le traitement discriminant des populations auquel il renvoie puisse être qualifié de « racisme ».

      Notons le cotée amphigourique et tordu à la phase, j’ai mis du temps à comprendre mais je suis peut-être un pu lent.

      Ceux qui pense que le mot « musulman » :
      – Une construction historique
      – Mais la réalité trop différente (..) pour être qualifié de « racisme ».

      (..) pour ceux qui adhèrent à cette lecture, tout en invectivant constamment les militants de l’antiracisme politique, cela montre qu’ils sont particulièrement hypocrites

      Car :

      la mobilisation politique de catégories produites par l’histoire ne signifie pas nécessairement qu’on les légitime, mais peut aussi servir à contester l’ordre social qu’elles ont produit.

      En :

      en acceptant de mobiliser l’idée de racisme contre les « noirs » ou contre les « arabes » (...) les antiracistes universalistes auto-proclamés reconnaissent eux-mêmes que nommer les catégories visées le racisme, n’est pas ce qui constitue le racisme, et peut être aussi une manière d’y répondre.

      Prenons un autre exemple pour voir le soucis argumentatif :
      "anti-communiste" c’est du raciste anti-russe. Donc tous ceux qui s’attaque au communiste sont des racistes.
      Si tu dis que "communiste" c’est pas pareil tu est pas cohérents parce que tu pense aussi que "slave" n’est pas une catégorie pertinente. Même si je pense que les slaves ne sont pas en soit une catégorie cohérente.

      Oui, mais si je dit que "anti-communisme" c’est raciste cela nous empêche de détacher l’idéologie / de la ’race’.
      1) Ça rajoute une couche à l’essentialisation en validant l’idée que les slaves sont tous communiste
      2) Ça voudrait dire que critiquer l’idéologie communiste est impossible ce n’est pas sain.

      Quoi me répondrai l’auteur du texte (qui ignore qu’une religion n’est pas en dehors du monde des idées) :

      " à l’origine « musulman », cela désigne le fidèle d’une religion. "

      " Seuls des hypocrites peuvent prétendre que lorsqu’on dit « musulman », on pense à une catégorie purement religieuse, absolument neutre et aucunement liée à une quelconque "origine" "

      "Arrêtons de nous mentir : quand on dit musulman, on pense à arabes"

      "On" ? Le raciste, le blanc progressiste, l’universaliste, le musulman, qui ? Je réponds à ce que je crois : le raciste (’hypocrite’ ou pas).

      le contexte produit le « musulman » comme une « race » c’est à dire une catégorie qui d’un point de vue raciale n’existe pas en dehors du contexte de stigmatisation qui la produit

      Comme le raciste pense "musulman = arabe" il faut défendre les musulmans et l’islam et après on verra.

      J’ajoute la citation cette phrase en milieu de texte :

      Savoir si oui ou non cette stratégie est efficace, dans quelle mesure, et en s’y prenant de quelle façon est une autre discussion.

      J’en suis pas si sûr.

    • Il me semble des plus opportun de reprendre ici une expression, forgée il y a quelques temps déjà par #Nicole-Claude_Mathieu à propos de la Domination masculine de Bourdieu : et, au sujet de cet antiracisme blanc qui, face aux paroles autonomes de racisés, s’empresse à chaque fois de donner bruyemment à voir et à entendre à quel point il n’y entrave que couic, d’envisager que, sous l’affichage de cette incapacité réitérée à prendre en compte un point de vue de dominé- incapacité toujours suspicieuse a minima, quand elle n’est pas résolument hostile et agressive - , c’est le
      #pouvoir_auto-hypnotique_de_la_domination_de_race
      qui s’exprime.

    • @martin5 ton argumentaire est incompréhensible. Son seul apport est de valider les thèses racistes en vogue dans les milieux gauchistes actuellement. Catégoriser sur des bases raciales en traitant son contradicteur de raciste parce qu’il réfute cette catégorisation est en soit un sophisme. Les copiés collés de théories postmodernes d’universitaires américains ne font pas de toi un intellectuel...

    • @mad_meg ton acharnement à attaquer la CNT-AIT Toulouse est louable, l’argumentaire hashtag est le degré zéro de l’argumentation, il semble que la lutte concrète contre l’oppression ne soit pas ta priorité vu le temps que tu passe à calomnier et diffuser des thèses fausses et mensongères.

    • @critical_Hi-Fi

      Je l’avoue, « n’y entraver que couic » est une expression post-moderne bien connue, dont il se trouve que j’ai eu connaissance par les oeuvres d’un de ces probables universitaires d’outre-atlantique auxquels vous faites allusion - ah oui, ça me revient : il s’appelait Léo Ferré.

      Au vu de votre réaction à mon bref commentaire - dont, après l’avoir péremptoirement jugé « incompréhensible », vous prétendez faire néanmoins l’autopsie, en y fourrant vous-même pèle-mèle ce qu’il vous conviendrait d’y trouver ... il semble en effet que le français, pour vous, ce soit de l’américain . Vous m’en voyez navré !

      Je ne serai donc pas votre homme de paille. Répondez tant qu’il vous plaira et ce qu’il vous plaira à tous les américains post-modernes que vous vous imaginez lire ou entendre ici ou ailleurs : cela vous regarde.
      Il n’empêche qu’il s’y dit et s’y écrit, sans vous attendre ni devoir vous rendre des comptes, tout autre chose.
      L’histoire des luttes contre le racisme est déjà longue, mais elle semble encore loin d’être terminée.
      Il se trouve que ce sont d’abord celleux qui le subissent qui la font et la feront. En France, comme en Amérique, comme partout.
      Et l’#hypnose ne dure qu’un temps.

      Par ailleurs, le grossier mépris avec lequel vous vous permettez de traiter Mad Meg est des plus malvenus.

      #non-comprenants

    • @martin5 Combattre le racisme en le validant par une catégorisation systématique selon des critère ethniques est très contre productif. Et l’assignation systématique est un moyen de maintenir les gens dans la domination en essayant de faire croire qu’on les défend et, surtout, en se donnant bonne conscience. Traiter systématiquement de raciste tous ses contradicteurs à pour seul effet celui du « crier au loup » de l’histoire : face à un racisme effectif il n’y a plus de mots et il n’y a plus d’actions non plus. Vous êtes un postmoderne avéré, héritier des pomos américains, ne vous en déplaise. Quand à Mad Meg, qui est le mépris caractérisé, je n’ai rien à rajouter.

    • Que tu assume un manque de compréhension et une vision volontairement simplifié et binaire c’est dommage. L’absence de nuance et de modération c’est aveuglant. Mais passons.

      Sur ce seul mot dont tu donnes un autre définition qui t’arrange tu juge un article.
      Tu présuppose que Kamel Dahoud est dans le camps des violeurs ?
      Est-il possible d’avoir un peu de nuance et sortir d’une pensée hashtag ?

      C. Delphy parle d’avantage d’une récupération de la "revolution sexuelle" post-68 par les matchistes : "tu es libéré, alors couche avec moi".
      Contexte différents par rapport à un avant les années 60 ou la répression sexuelle (pouvoir de la censure religieuse et de l’ordre moral était plus fort).
      Daoud parle d’une autre situation ou la répression sexuelle plus forte.

      " Qu’est ce que la répression sexuelle ?

      Ce terme recouvre toute forme de dévalorisation de la sexualité, qu’elle soit brutale (par exemple la menace adressée au petit enfant surpris en train de se masturber : « si tu recommence je vais te la couper ! », ou l’injonction adressée à la petite fille : « fermes tes jambes ! ») ou plus subtile, se voilant derrière les termes de "modestie" ou de "pudeur".
      Il en est de même pour toute valorisation de l’abstinence sexuelle ou de la virginité. Elle s’exerce entre autres par la pression mise à l’encontre des jeunes filles et femmes qui souhaite avoir une sexualité libre (ou même simplement porter une jupe) : elles se font traiter de "fille facile", "salope" ou "pute".

      Elle peut s’exercer par le simple fait d’entretenir le mystère autour de l’activité sexuelle (sujet tabou ou réservé aux adultes, histoires d’enfant naissant dans des choux ou apporté par des cigognes, langage allusif...) ainsi que par la négation de la sexualité infantile.

      Cette répression peut aussi prendre la forme d’une dévalorisation plus générale du corps, considéré comme "sale", "impur", "grossier", "honteux", par opposition avec un esprit, une "âme" jugés plus élevés. La sexualité se voit alors rabaissée à "la satisfaction d’instincts ou de besoins matériels grossiers".

      "

      http://www.ecologielibidinale.org/fr/miel-faq-fr.htm#faq-repressionsexuelle

      Vu aussi :
      L’Europe face à une “Colognisation" ? : pourquoi la misère sexuelle ne suffit pas à expliquer la montée de l’extrémisme
      http://www.atlantico.fr/decryptage/colognisation-pourquoi-misere-sexuelle-ne-suffit-pas-expliquer-montee-radi

    • C’est pas honnête de modifié posterieurement vos messages comme vous le faites @critical_hi
      Je copie cette perlouse avant que vous l’effaciez aussi.

      j’ai aussi constaté que vous partagiez du Vacarme et du Ballast, preuve que vous êtes bien un postmoderne idiot utile du PIR et de son idéologie raciste et essentialiste.

      #révisionnisme #hypocrisie #faux-culisme

      Le plus drôle c’est que la seule et unique source que @critical_hi a échangé sur seenthis est un article de Liberation...

    • Je l’avoue, j’ai lu et partagé au moins un, et probablement plusieurs articles de Vacarme et de Ballast, et parfois ce n’était pas pour les éreinter. Mais il m’aura fallu une confrontation avec un expert en idiotie pour que j’apprenne que cela

      prouve

      que je suis

      « un postmoderne idiot utile du PIR et de son idéologie raciste et essentialiste. »

      A son intention, qu’il cherche bien : n’étant pas affligé par cette tare très en vogue, qui pousse tant d’antiracistes à exhiber sans honte leur incapacité à rendre compte d’un texte simple, lorsqu’il est signé du PIR, sans le rendre méconnaissable et prétendre lui faire dire les énormités les plus ineptes qu’ils parviennent à concevoir, j’ai dû citer aussi sur seenthis d’autres ami-e-s du PIR, en effet, (et certaines musulmanes ou portant des noms arabes), voir le PIR lui-même. Ce qui pourrait peut-être bien repousser les limites du postmodernisme, du racisme promu par les racisés et de l’affreux essentialisme qui pousse à analyser des constructions sociales - bref, de l’idiotie utile, ou de l’utilité idiote.
      En effet, si avoir lu des gens qui prennent le temps de parler du PIR et interviewent parfois sa porte-parole (ce qui fait d’eux leurs « amis ») suffit à faire de vous un idiot utile pour lui, que fait donc de vous de le lire directement dans le texte ?
      Je sollicite donc ici l’expertise généreuse dont j’ai déjà bénéficié plus haut pour en apprendre plus à ce sujet.

  • Avant les #Lumières : l’éthique contre la Morale avec #Spinoza

    Voici des idées qui paraîtront inhabituelles depuis que, dans ce journal, nous discutons des Lumières. La thèse selon laquelle la Raison serait impuissante devant une nature humaine intégralement déterminée va, a priori, à l’encontre de tout ce qui s’est écrit ici-même à propos des Lumières, et trouve difficilement sa place dans la pensée anarchiste. Ces idées, qui sont celles de Spinoza (1632-1677), ont pourtant largement contribué au développement des philosophies des Lumières, en reprenant les thèses de Thomas Hobbes (1588-1679), à l’origine des théories du Contrat avant Rousseau, et en faisant la critique de la religion, de la superstition et du caractère coercitif de la morale classique, au motif qu’elle empêche les individus de s’exprimer. Comment dire ce qu’il faut être et ce qu’il faut faire, sans hiérarchie de valeurs a priori ? Puisque la Morale implique en effet une hiérarchie des valeurs : il n’y a pas de morale si tout se vaut ou si tout est égal. Admettre une hiérarchie des valeurs implique, à son tour, un principe supérieur qui impose des devoirs. Son esprit est le principe d’obéissance. Avec Spinoza, c’est au contraire un peu de l’esprit libertaire que l’on voit souffler dans l’histoire de la philosophie morale. Effectivement, il n’y a pas de morale si tout se vaut ou si tout est égal, pas de morale dans un monde qui refuse la hiérarchie, pas de morale dans un monde horizontal. En revanche, il y a une éthique.

    LE SYSTEME DE LA NATURE DES CHOSES

    L’Ethique de Spinoza est un livre-système. Il veut proposer une explication totale de l’ensemble du système du monde, en poursuivant ce qu’avait initié Descartes (1596-1650) juste avant lui, lui qui marque définitivement la fin du Moyen-Âge, en se débarrassant de la scolastique, c’est-à-dire du commentaire toujours recommencé d’Aristote qui faisait « école ». Descartes oublie toute la bibliothèque scolastique, et recommence tout à partir de lui-même, seul avec lui-même, méditant sur soi, doutant de tout, ne conservant comme valable que ce qui est absolument certain, en évacuant tout ce qui peut relever de la projection de l’imagination humaine sur les choses. Spinoza se situe dans la continuité de cet esprit cartésien.

    Son livre s’intitule l’ Ethique , c’est-à-dire qu’il est une réfexion sur la vie et l’action bonnes (en grec, ethos : le comportement), sur ce qu’il faut être et ce qu’il faut faire, sur la liberté et le bonheur des hommes. La première partie porte sur la nature des choses, partie qu’il appelle De Dieu (mais qui en redéfinit totalement le concept par rapport à l’esprit judéo-chrétien), et que Spinoza achève par un Appendice qui défait totalement le mécanisme de la croyance religieuse, en montrant qu’elle est une conscience inversée de l’homme, deux siècles avant Feuerbach et Marx, qui reprendront la même idée. C’est ensuite qu’on passe à la nature humaine , étant donnée cette nature des choses : la partie 2 porte sur l’esprit humain , la partie 3 porte sur les affects , elle est centrée sur la question du pouvoir propre du corps, l’inconnu du corps et l’inconscient de la pensée. Spinoza termine son livre-système en examinant quel est notre degré de puissance sur cet inconnu du corps et cet inconscient de la pensée : la partie 4 s’intitule De la servitude humaine , et la partie 5, De la liberté humaine .

    À l’intérieur de cette vision totale de la nature des choses et du monde, de l’Être en tant que tel, la question est : quelle place avons-nous ? Quel pouvoir avons-nous sur la nature des choses et sur notre propre nature ? Quelle liberté ?

    Au terme de la partie 1, les choses sont très claires, et la vision de Spinoza en définitive très simple. On peut l’énoncer comme ceci, sans réduire la complexité du détail du texte : Nous ne sommes que des parties insignifiantes de la Nature, et nous n’avons de pouvoir sur rien. La Nature n’est rien d’autre qu’un réseau de rapports de causes à effets, et l’homme n’est pas « comme un empire dans un empire » , c’est-à-dire qu’il est lui aussi le produit de rapports de causes à effets. C’est ce que ne voient pas les hommes de croyance et de superstition, qui pensent que les choses ont une raison d’être ou, comme dit la scolastique depuis Aristote, que « la nature ne fait rien en vain » , dieu ayant fait les créatures pour servir les hommes, et les hommes qui sont à son image, pour servir dieu. Cette croyance est toujours le fait de la projection des habitudes humaines sur la nature des choses, que nous interprétons à partir de notre propre nature, plus exactement à partir de ce dont nous avons conscience quant à notre nature, ce qui est peu de choses. Etant ignorants de la nature des choses, Spinoza explique que nous avons seulement conscience du fait que nous recherchons ce qui nous est utile, et que nous agissons en vue de finalités, raison pour laquelle nous voulons connaître la finalité de toutes choses, ce qui nous conduit à penser que les choses ont été disposées par dieu, recteur de la nature dôté de liberté humaine.

    Feuerbach et Marx, à sa suite, diront bien plus tard que la conscience religieuse est une conscience inversée. Les hommes, en imaginant dieu, ne font rien d’autre que transférer dans une figure imaginaire, étrangère et supérieure, leurs propres qualités essentielles. On comprend du coup que lorsque les hommes pensent dieu, ils ne font rien d’autre que se penser eux-mêmes, comme étrangers à eux-mêmes. En ce sens la conscience religieuse est une conscience aliénée (aliénation : devenir étranger à soi-même), et il s’agit pour Feuerbach de faire la critique de la religion pour que les hommes récupèrent, sur le sol terrestre, la conscience d’eux-mêmes. Marx ajoutera que s’il en est ainsi, c’est parce qu’il y a une situation sociale qui crée ce besoin de conscience inversée de soi, que la misère religieuse est l’expression d’une misère réelle :

    _« exiger qu’il soit renoncé aux illusions concernant notre propre situation, c’est exiger qu’il soit renoncé à une situation qui a besoin d’illusions »_ .

    Spinoza est peut-être le premier à faire de cette manière l’analyse des causes de la croyance religieuse.

    Sa réponse, c’est que le système de la Nature n’étant rien d’autre qu’un réseau de rapports de causes à effets, il faut par conséquent que la réalité humaine soit traitée de la même façon, comme étant causée.

    LES JUGEMENTS MORAUX SONT FONDES SUR DES PREJUGES

    Conséquence directe de cette pensée de la nature des choses comme n’étant faite de rien d’autre que de rapports de causes à effets : il n’y a ni Bien ni Mal dans la Nature . Et les comportements des hommes étant causés, comme n’importe quelle autre partie de la Nature, il n’y a donc pas plus de bien ou de mal dans nos comportements que dans le mouvement d’une feuille qui se trouve déterminée à tomber à l’automne. Les mêmes lois valent pour toutes les parties de la Nature, et la vision que Spinoza se fait du monde est une vision radicalement anti-hiérarchique, elle est horizontale . Nous ne valons pas davantage qu’une feuille dont la nature la détermine à être affectée de telle sorte qu’elle tombe à l’automne. C’est ainsi que le mécanisme de projection qui fait la conscience religieuse est lui-même l’expression d’une illusion sur notre propre nature. Nous imaginons un dieu dôté de liberté humaine, et nous projetons nos propres schémas d’action, mais en amont de tout cela, nous sommes dans l’illusion qui consiste, dit Spinoza, à croire que nous sommes libres parce que nous sommes ignorants des causes qui nous déterminent , comme si la feuille qui tombe de l’arbre pouvait se mettre à croire qu’elle est l’auteur de son mouvement et qu’elle est libre, parce qu’elle aurait seulement conscience de ce mouvement, oubliant qu’elle n’est qu’une partie de la Nature (Spinoza, dans sa correspondance, prend l’exemple d’une pierre dévalant une pente).

    C’est à partir de ce fait, qu’il n’y a ni Bien ni Mal dans la nature, et pas davantage de Bien ou de Mal dans la façon dont cette nature s’exprime dans nos propres comportements, que l’on peut saisir la différence entre la Morale et l’Ethique.

    HOBBES : CRITIQUE DE LA MORALE ET REORIENTATION DANS LA THEORIE JURIDIQUE

    Sur cette question, c’est Hobbes qui est l’auteur décisif dans l’histoire de la philosophie morale et politique. Avant Hobbes, une certaine théorie juridique, que l’on appelle la théorie du Droit Naturel, correspondait à la morale classique. Dans cette conception, une chose se définit par son essence (par exemple, Aristote : l’homme est un animal rationnel), le droit naturel est ce qui correspond à l’essence. Conformément à cela, l’état de nature n’est pas un état pré-social, mais un état conforme à l’essence dans une bonne société, et la bonne société est celle dans laquelle l’homme réalise sa nature, qu’il ne possède d’abord qu’en puissance. Une bonne société, c’est donc quelque chose qui correspond à une essence que l’on a fixée à l’avance et à laquelle il est de notre devoir de correspondre, le problème étant évidemment que cela vient figer le modèle auquel il faut correspondre. Ce cadre ainsi posé, on comprend que c’est le devoir qui est premier, qui prescrit à chacun de réaliser sa nature. Il y a une définition a priori, l’essence, notre nature, vers laquelle chacun doit tendre. Celui qui a le savoir de l’essence dispose de la compétence de déterminer quels sont nos devoirs. C’est la compétence du sage, d’où découlent des prétentions politiques. C’est ce qui se passe dans toute l’histoire de la philosophie morale et politique jusqu’à Hobbes.

    Dans la Morale il y a donc compétence de quelque chose de supérieur. Toute Morale présuppose cette idée qu’il y a un Bien et un Mal a priori, le Bien correspondant à une essence fixée de toute éternité. Ce que fait la Morale, c’est prescrire des devoirs, et son principe, c’est le principe d’obéissance envers la compétence de quelque chose de supérieur.

    Avec Hobbes, la théorie du droit naturel est bouleversée, et une nouvelle théorie juridique voit le jour, qui est à l’origine de toutes les théories du Contrat. A la base du droit naturel, il n’y a plus l’essence, mais la puissance , idée centrale chez Spinoza. Juridiquement, cela veut dire : il est dans le droit naturel du gros poisson de manger le petit. C’est une provocation contre les anciennes théories du droit naturel et contre la morale classique, puisque cela semble dire : est permis ce qu’on peut. Cela se comprend bien, si l’on voit que l’état de nature désormais se distingue de l’état social, et le précède : effectivement, dans un état pré-social, est permis ce qu’on peut. Peu importe que l’on croie à l’existence historique de cet état pré-social : si la définition du naturel, c’est la puissance, alors il s’agit nécessairement de quelque chose qui ne concerne pas encore le social. L’état social, ce sont les défenses, les interdits, qui s’appliquent à ce que je peux. Donc : être social et raisonnable, c’est un devenir. Le problème de la politique est : comment faire pour que les hommes deviennent sociaux (et non comment faire pour qu’ils réalisent une nature a priori) . Ce qui est premier dans cette conception, c’est le droit. Les devoirs sont seconds, puisqu’ils ne sont que des obligations venant limiter le droit, pour que l’homme devienne social. L’important c’est qu’en matière de morale, pour autant qu’il est question du droit naturel, le principe de la compétence supérieure disparaît.

    Par conséquent : personne n’est compétent pour moi ; et si la société civilisée se forme, cela ne peut être, d’une manière ou d’une autre, que par le consentement de ceux qui y participent. Le principe d’obéissance devient quelque chose de second.

    CE QUE VEUT L’ETHIQUE DE SPINOZA CONTRE LA MORALE

    Spinoza, lorsqu’il construit son Ethique, est dans la continuité de cette révolution de la théorie du droit naturel, initiée par Hobbes. Il le dit clairement : l’essence de l’homme, c’est sa puissance , il dit aussi « désir » , et « persévérance dans l’être » ou encore « dans son être » . Cela veut dire aussitôt qu’il n’y a plus d’essence de l’homme fixée à l’avance, qui prescrirait leurs devoirs aux individus, il n’y a plus d’idée générale là-dessus, il n’y a que des singularités . Il n’y a que des normes individuelles, simplement fixées par le fait que je suis dans des situations où je peux davantage, et des situations où je peux moins, des situations qui font que ma puissance est augmentée, et des situations qui font que ma puissance est diminuée. Joie ou Tristesse, qui sont les deux affects fondamentaux.

    Il en va de même pour l’arbre qui, au milieu des enchaînements de causes et d’effets, fait effort pour persévérer dans son être, se définissant par sa puissance, et se trouve affecté par des éléments extérieurs à lui (soleil, pluie, quantité de ce dont il a besoin dans le sol, variations de températures etc.). Parmi toutes ces choses qui l’affectent, il y en a qui augmentent sa puissance, et il y en a qui diminuent sa puissance, de sorte qu’on peut dire qu’il y a pour lui du bon et du mauvais , en fonction d’une norme qui lui est propre, et qui elle-même varie selon le sens et le degré de remplissement de sa puissance.

    Voilà ce qui intéresse Spinoza : explorer les façons d’être des existants, en faisant la description des directions et des degrés de remplissement de la puissance des existants. Qu’est-ce qui nous augmente et qu’est-ce qui nous diminue ? Voilà donc la différence entre la morale et l’éthique : il n’y a ni Bien ni Mal, cela veut dire qu’il n’y a que du bon et du mauvais . Et cela veut dire encore du point de vue social, puisqu’il y a aussi du bon et du mauvais dans la mesure où il y a coexistence et où les hommes se rencontrent : cherchons les meilleures conditions pour que les hommes effectuent leur puissance. Gilles Deleuze a cette formule, qui ressaisit la différence entre morale et éthique : la morale, c’est la discipline du bien et du mal, l’éthique, c’est l’art du bon et du mauvais.

    LA LIBERTE

    Maintenant : quelle liberté pour les hommes ? La liberté au sens du libre-arbitre a déjà été écartée par Spinoza et dénoncée comme illusion : le pouvoir de choisir qui ne subit aucune détermination extérieure, la volonté qui agit de sa propre initiative, cela n’existe pas. En toutes choses, et comme toutes choses, nous sommes causés. La philosophie de Spinoza n’est pas, de ce point de vue, une philosophie de la liberté, mais on peut dire, d’un autre point de vue, que c’est une philosophie de la libération , et c’est dans ce mouvement de libération que consiste l’ Ethique , lorsqu’on est capable de sortir des illusions de la morale.

    C’est que, dans le rapport qu’on a avec les causes qui nous déterminent, Spinoza dit qu’il peut y avoir plus ou moins de passivité, plus ou moins d’activité. Nous sommes déterminés, on ne peut rien y faire, mais alors, deux possibilités : soit on subit ces causes sans les comprendre, en étant dans l’illusion quant à notre condition, en étant dans le déni : dans ce cas Spinoza dit qu’on est passif, que l’on n’est pas cause de soi, que l’on n’est pas libre. Soit on est capable de transformer le rapport que l’on a avec ce qui nous détermine, pour entretenir un rapport de lucidité avec la nature et avec notre histoire, pour comprendre et intégrer en nous-mêmes les causes de nos actions et en faire peut-être de réels motifs, parce que nous savons désormais que cela nous constitue positivement : dans ce cas Spinoza dit qu’on est agissant, qu’on est cause de soi, qu’on est libre, toujours déterminé mais néanmoins aussi auteur de soi, dans une certaine mesure qui est fonction de notre degré de lucidité.

    Ce changement dans le rapport que l’on entretient avec ce qui nous détermine est donc aussi corrélatif d’un changement dans le remplissement de notre puissance d’agir. De ce point de vue, la morale se révèle tout simplement inefficace. Spinoza dénonce cette autre illusion de la morale classique, qui consiste à penser que la raison pourrait se rendre maîtresse de la partie affectée de notre être. Mais la raison est impuissante, les forces passionnelles seront toujours plus fortes que les intérêts rationnels. Il faut donc renoncer à dominer les affects au moyen de la raison. Le moyen d’atteindre la liberté, et une plus grande adéquation avec soi, consiste pour Spinoza à se détourner de nos rapports avec ce qui nous affecte dans le sens d’une diminution de notre puissance, nous dépossédant de nous-mêmes, pour leur opposer des rapports avec tout ce qui peut nous affecter dans le sens d’une augmentation de notre puissance, et qui nous rend agissants.

    C’est cela que cherche l’éthique, en conformité avec le principe de Spinoza selon lequel la raison bien comprise ne demande rien contre la nature, et contre notre propre nature : la raison au contraire ne commande rien d’autre que la recherche de ce qui nous est utile. Nous savons à quel point la morale a toujours été et continue d’être un intrument dont les pouvoirs politico-religieux ont besoin, pour que les individus renoncent à eux-mêmes et se mettent au service d’intérêts qui ne sont pas les leurs. Ce que dit Spinoza alimente cette critique, en montrant que la morale est contre-nature et que, pour cette raison, elle « attriste » les hommes, c’est-à-dire qu’elle les diminue, au lieu d’aller dans le sens de la joie, et qu’elle a besoin d’attrister les rapports entre les hommes pour se maintenir, comme tout pouvoir de type coercitif.

    Article d’@Anarchosyndicalisme ! n°152 déc 2016 - Janv 2017
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article844