@bug_in : vu de Madagascar, un RSA, c’est un truc de nantis. C’est ça la réalité qu’on a du mal à comprendre ici.
L’autre jour, sur un forum spécialisé de rédacteurs (un de mes boulots de crevards), il y a eu une annonce où, en gros, une nana vendait son taff pour 5 ou 10€ les 3 feuillets. Si je bosse à ce prix-là, je suis sous le RSA. Largement.
Donc, les autres rédacteurs lui sont tombés dessus, comme quoi à ce prix, c’est du travail de merde, limite analphabète. Sauf que non. La nana vit et bosse à Madagascar, elle maitrise parfaitement le français et à ce tarif-là, elle vit pas trop mal dans son bled. Parmi ceux qui l’insultaient, il y avait un Sénégalais. Lui, c’était il y a 3 ou 4 ans qu’on l’a accusé de casser les prix. Et maintenant, c’est la nana de Mada qui lui casse les siens.
Et pendant que les autres gueulaient, j’ai vu une entreprise roumaine qui faisait son marché : maintenant qu’on a délocalisé toutes nos imprimeries là-bas, je suppose qu’ils cherchent à grappiller plus de valeur ajoutée en intégrant à leur offre du contenu rédactionnel sous-traité à des prix imbattables.
Et ça n’a pas de fin.
J’ai un pote au Maroc qui m’a raconté qu’une grande entreprise française de bagnoles vient de construire une usine près de chez lui... probablement en en fermant une autre chez nous. Mais qu’en fait, c’est une usine où personne ne rentre ni ne sort : pratiquement 100 % automatisée. Donc absolument rien à gratter pour les gens des bleds autour.
Mais on continue à payer les bagnoles au même prix, alors qu’on nous disait que le secteur était en crise à cause du prix de la main d’œuvre (10 % sur le cout d’une bagnole construite en France, si mes souvenirs sont bons, donc peanuts, le prix d’une bonne reprise).
Et ça continue.
Mais il faut garder sans cesse une vision globale de nos petits problèmes locaux.
Et dans cette vision globale, même si ça nous fait mal au cul, les plus pouilleux d’entre nous font tout de même partie des 10% les plus riches de la planète (tout en étant à la place peu enviable des 10% les plus pauvres du cinquième pays le plus riche).
Chaque fois que j’y pense, je me dis que les mecs du reste du monde, ceux qui traversent les mers sur des radeaux et des coquilles de noix, ils doivent commencer à bien avoir la haine contre nous. Et qu’ils ne vont pas faire de tri entre nous, le jour où ils vont bien se foutre en rogne...