Davduf

#UnPaysQuiSeTientSage soutenu par la Quinzaine des Réalisateurs, Prix Lumières meilleur documentaire 2021, nommé aux Cesar 2021, « DernièreSommation » (Grasset), punk rock & contre-filatures + https://twitch.tv/davduf

  • La Quinzaine des réalisateurs Cannes 2020 soutient « #Un_pays_qui_se_tient_sage »
    http://www.davduf.net/la-quinzaine-des-realisateurs-cannes-2020

    « Historiquement très attentive et particulièrement sensible au débat social et politique, la Quinzaine des réalisateurs souhaite apporter son soutien au film de David Dufresne, qui parvient à élever et complexifier un débat nécessaire et dramatiquement contemporain. » Le documentaire, produit par Le Bureau Films, sera distribué en France le 30 septembre par Jour2Fête. Lire la suite sur (...) Un pays qui se tient sage

    / Une, #Police, #Maintien_de_l'ordre

    https://cineuropa.org/fr/newsdetail/390016

    • C’est rigolo (en fait, pas vraiment) de lire particulièrement sensible au débat social et politique en parlant d’une organisation (la quinzaine des réalisateurs) qui revendique comme mécène officiel #bnp_paribas et comme institutions partenaires notamment #Cannes, la région #PACA, les heureux bénéficiaires de la #taxe_copie_privée ...

      Désolé @davduf , y’a des trucs que tu fais que je trouve intéressants et pertinents (comme allo place beauvau ou ce film que je n’ai pas vu) , mais le logo quinzaine des réalisateurs sur l’affiche du documentaire, il laisse un goût amer.

  • Paris, 16.9.20, rencontre avec Paul Rocher à la Librairie Le Monte-en-l’air
    http://www.davduf.net/paris-16-9-20-rencontre-avec-paul-rocher-a-la

    David Dufresne et Paul Rocher à la Librairie Le Monte-en-l’air le 16 septembre La librairie Le Monte-en-l’air accueillera une discussion croisée entre David Dufresne et Paul Rocher, autour des ouvrages Gazer, mutiler, soumettre et Police, le mercredi 16 septembre à 19h30. Librairie Le Monte-en- l’air 2 rue de la mare 75020 Paris #Agenda

  • Toulouse, 14.9.20 : débat signatures avec Paul Rocher, librairie Terra Nova
    http://www.davduf.net/toulouse-14-9-20-debat-signatures-avec-paul

    Lundi 14 Septembre 2020 à 17h30 #Police ! En partenariat avec le festival Fifigrot, et à l’occasion de la sortie du livre Police, rencontre avec David Dufresne co-auteur du livre et Paul Rocher auteur du livre Gazer, mutiler, soumettre, paru aux éditions La fabrique. On pense qu’elle a toujours existé et qu’elle existera toujours, mais non : la police telle que nous la connaissons est récente et les événements actuels mettent mondialement son existence même « en question ». On trouvera dans ce livre (...) #Agenda

    / #Maintien_de_l'ordre, Police

  • Rétrospective interactive au Busan International Short Film
    http://www.davduf.net/retrospective-interactive-au-busan-international

    Prison Valley (2010), Fort McMoney (2013) et Dada Data (2016) projetés au 37e Busan International Short Film Festival (BISFF), en Corée. Du 27 au 31 août 2020, dans le cadre de ses premiers Interactive Shorts. Interactive films feature the innovative concept of allowing the viewer to actively participate, making choices and changing the outcome of a film. The “Interactive Shorts” program is a new program designed to allow the viewer to actively participate for a novel experience, rather than (...) #Nouvelles_narrations

    / Une, #Akufen, #Arte, #ONF, #Toxa, #Upian

  • Toulouse, 15.9.20 : débat signatures avec Paul Rocher, librairie Terra Nova
    http://www.davduf.net/toulouse-15-9-20-debat-signatures-avec-paul

    Lundi 14 Septembre 2020 à 17h30 #Police ! En partenariat avec le festival Fifigrot, et à l’occasion de la sortie du livre Police, rencontre avec David Dufresne co-auteur du livre et Paul Rocher auteur du livre Gazer, mutiler, soumettre, paru aux éditions La fabrique. On pense qu’elle a toujours existé et qu’elle existera toujours, mais non : la police telle que nous la connaissons est récente et les événements actuels mettent mondialement son existence même « en question ». On trouvera dans ce livre (...) #Agenda

    / #Maintien_de_l'ordre, Police

  • Hommage à Maurice Rajsfus
    https://lundi.am/Hommage-a-Maurice-Rajsfus

    À l’initiative de sa famille, de ses amis et camarades, un hommage à #Maurice_Rajsfus aura lieu samedi 4 juillet à La Parole Errante à Montreuil. Vous pouvez découvrir le programme ci-dessus. À cette occasion, nous reproduisons ci-dessous le dernier édito de Que fait la #police ? le journal qu’il tint de 1994 à 2004 et dont le titre résonne tout particulièrement avec sa disparition et le climat policier actuel : Aurons-nous des successeurs ?

  • Un syndicat policier s’offusque du financement public reçu par David Dufresne, un « antiflics primaire »
    https://www.lefigaro.fr/cinema/un-syndicat-policier-s-offusque-du-financement-public-recu-par-david-dufres

    « Le film s’appellera Un pays qui se tient sage. Il sortira le 30 septembre et a obtenu le soutien de la Quinzaine des réalisateurs. C’est un film fait pour débattre et réfléchir mais on ne débat pas sous les insultes, a réagi auprès de l’AFP David Dufresne. Je m’étonne qu’un syndicat de police réclame la tête d’un film qu’il n’a pas vu ».

    Le conseil régional d’Île-de-France a estimé que les critiques d’Unité-SGP relevaient d’un « faux procès fait à la Région, qui s’est toujours tenu aux côtés des forces de l’ordre y compris pendant la crise Covid ».

    « La Région a engagé depuis 2015 le bouclier de sécurité qui permet de financer des équipements pour les forces de l’ordre, poursuit cette même source. Les films et documentaires financés par la région sont choisis par un comité de sélection composé notamment de professionnels du cinéma. La ligne éditoriale des documentaires ou films choisis n’engage en rien la région. (...) Si des propos diffamatoires vis-à-vis de l’institution policière étaient tenus, dans ce documentaire, la Région se réserve le droit de suspendre la subvention ».

    La réponse courageuse de « la Région » est admirable : c’est pas nous qu’on choisit les films financés, et si ça nous plaît pas (si les flics gueulent trop fort) on « se réserve la droit de suspendre la subvention ».

  • « Il est urgent d’ouvrir le débat sur les finalités de la police »
    https://usbeketrica.com/article/il-est-urgent-d-ouvrir-le-debat-sur-les-finalites-de-la-police

    Vous avancez l’idée que cette #violence croissante de la #police marque aussi l’avancée du #néolibéralisme. Quel lien peut-on établir entre entre le néolibéralisme et les violences policières ?

    Il est important de montrer le mécanisme précis qui lie l’un à l’autre. Le fonctionnement des États modernes repose sur deux piliers : le #consentement et la #force. Il y a toujours un mélange et un équilibre entre les deux, qui permet en quelque sorte à l’État de se reproduire en dépit des changements de gouvernements. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, en France, on a d’abord eu une période où cet équilibre fonctionnait : c’est ce qu’on appelé les Trente Glorieuses, et il y avait alors un consentement assez fort à l’ordre établi, notamment grâce à la sécurité sociale et à un minimum qui permettait à tout le monde de vivre relativement confortablement. Vous n’aviez pas seulement un confort matériel, mais aussi la perspective concrète que, dans un futur proche, les choses allaient s’améliorer pour vous, ce qui créait un consentement fort.

    « L’arme non létale est le remède technologique parfait pour ne pas affronter le problème de manière politique »

    Cet équilibre a été bouleversé par l’avènement du néolibéralisme dans les années 1970-1980, puisque le projet de cette doctrine est d’aboutir à une nouvelle forme de répartition des richesses. Il s’agit d’un changement d’époque fondamental, qui repose sur l’idée que les riches doivent devenir plus riches : depuis, les #inégalités augmentent précisément dans ce sens. Cette nouvelle période néolibérale creuse les inégalités et affaiblit le consentement de la population, ce qui pousse l’État à intervenir de plus en plus par la force. Sauf qu’il fait face à une contradiction : s’il utilise la force, il affaiblit encore plus le consentement de la population. Cela génère donc un potentiel de #contestation encore plus important.

  • Val-de-Marne : les adieux poings levés à Maurice Rajsfus, figure de l’antifascisme - Le Parisien
    https://www.leparisien.fr/val-de-marne-94/val-de-marne-les-adieux-poings-leves-a-maurice-rajsfus-figure-de-l-antifa

    Rescapé de la Shoah, le militant antifasciste et archiviste amateur a recensé les violences policières de mai 1968 à 2014. Mort à 92 ans samedi, il a été inhumé à Cachan ce jeudi.

    • J’ai appris récemment l’étymologie du mot « informer » : « mettre en forme »… je n’y avais jamais pensé. Pour moi, informer c’était simplement donner des informations. Ça a été une révélation !

      […]

      Je pratique un journalisme pas bien rentable. À Libération, vous pouviez avoir trois semaines, un mois, deux même, pour réaliser une enquête. Aujourd’hui, à part Mediapart et Le Monde, marasme économique oblige, peu de titres s’autorisent un tel élan. Ce qui ravive cette idée de journalisme au long cours, c’est le travail collaboratif des rédactions européennes, ou, par exemple, l’enquête « Féminicides » du Monde. Ils mettent le paquet, et le résultat est sans appel, c’est fantastique. Cela fait longtemps qu’un journal n’a pas pesé autant sur un sujet.

      […]

      Entre Prison Valley et son e-mail, Hans avait monté Etamin Studio, à Clermont-Ferrand, et c’est lui et son équipe qui vont ensuite construire la moulinette de data visualisation d’Allô Place Beauvau publiée par Mediapart. Il y a @fil, un pionnier du web indépendant, initiateur de @spip et du Mini-@rezo, un vieil ami, aujourd’hui cartographe, c’est lui qui va produire les cartes. Et Karen Bastien de WeDoData, croisée à la grande époque du magazine web Transfert. C’est comme un groupe de rock : toi, tu sais faire des cartes, toi, tu sais jouer de la guitare, toi, tu sais faire du code, toi, t’es un bon batteur… On va jouer ensemble !

      […]

      Aujourd’hui, la précarité économique de la presse semble renforcer un penchant naturel du monde journalistique : une vision mortifère, cynique souvent, et suffisante parfois, une vision cassée, conservatrice. Il y a une véritable souffrance au travail chez les journalistes, à la fois terrible pour eux, et cinglante pour leurs sujets.

      […]

      Je dois vous avouer que c’est étonnant… Les deux fois où je suis primé aux Assises, pour Tarnac (prix du livre de journaliste en 2012, NDLR) et Allô Place Beauvau, ce sont les deux travaux où je suis le plus frontal contre la fabrication de l’information. Tarnac se fait quand même, en partie, contre Libération. La Une de Libération « L’ultra-gauche déraille » (12 novembre 2008), ce n’est pas possible : je raconte d’ailleurs qu’à Beauvau, ils avaient sorti le champagne… Le livre est en opposition avec cette pratique du journalisme de procès-verbal. Quant à Allô Place Beauvau, c’est vraiment pour combler un manque, contre le journalisme de préfecture. Quand je reçois le prix, je suis heureux, mais ce que je vois, en face de moi, ce sont beaucoup d’étudiants et d’apprentis, et je veux leur dire : « Vous, la prochaine génération, ne faites pas la même chose que la mienne, qui tient les rênes de la presse, et qui n’a rien foutu sur les violences policières. » C’est plutôt à eux que je m’adresse, quand je dis : « Faites votre boulot, merde ! »

      […]

      Les violences policières, c’est tellement brûlant, tellement d’actualité, tellement pesant… Chaque rencontre est l’occasion d’une telle libération de parole... Reste que parmi les gens hier soir, l’un m’a dit : « C’est la première fois que j’entre dans une librairie. » Un autre : « Votre livre, c’est le seul livre que j’ai fini de ma vie. » Et un autre : « Regardez, j’achète ce livre, c’est la première fois que j’achète un livre. » Là, on se dit que, malgré tout ce que l’on voudrait faire croire, la littérature possède encore quelques vertus. Ce qui m’amène en ville, c’est le livre. C’est lui qui m’amène dans une librairie, qui amène le débat. L’objet du délit, comme diraient les policiers, c’est le livre. Avec ce biais particulier qu’à Metz, une jeune lectrice a été contrôlée par la police, devant la gare, parce qu’elle tenait dans ses mains mon roman.

      […]

      Dans un article, vous ne pouvez quasiment pas l’écrire ou alors en ayant recours à un off hasardeux. Mais ce que ce Lynn dit dans le roman, cela m’a été dit réellement comme ça. Ou j’aurais pu l’inventer. Les intrigues de palais à la Préfecture de police de Paris que je raconte, elles sont vraies, mais dans un article, elles deviendraient suspectes. Cela peut être un jeu pour le lecteur de se demander : « Est-ce que c’est inventé ou pas ? », mais ce n’est pas comme dans un article, où, si tu as un doute sur la véracité, tout s’effondre. Dans une fiction, ce n’est pas la véracité qui compte, mais la vérité sur laquelle repose le récit, et que son dévoilement soit plausible, crédible. Le pacte avec le lecteur, c’est : vous voyagez ou pas. Ce n’est pas : cela s’est passé exactement comme ça. Cela permet d’aller au plus près de la réalité.

      […]

      À la vérité, ces chroniques, c’est un peu de votre faute ! Lors de notre premier entretien [en novembre 2019], vous aviez mis le doigt sur quelque chose qui m’avait échappé en disant que parmi mes constantes, il y aurait l’idée de la chronique — et c’est vrai que j’aime ça. Jouer avec la durée est particulièrement stimulant, et ça l’est d’autant plus quand ceux qui racontent le monde ne s’en donnent pas le temps. Les médias sont dans quelque chose d’extrêmement fermé et immédiat, ils ne sortent pas de leur angle, un reportage chasse l’autre. La beauté de la chronique, c’est que vous pouvez évoluer, avancer, reculer, revenir, vous contredire, foncer.

      […]

      C’est probablement cette attirance pour les lieux qui m’a fasciné dans les webdocumentaires. Le webdocumentaire est avant tout une déambulation, un déplacement dans l’espace, pour le réalisateur comme pour l’internaute, alors qu’un film est un déplacement dans le temps, une séquence après l’autre. Le plus important pour moi, c’est cette idée de promenade, ce que les urbanistes appellent « les chemins du désir ». Au bas d’un immeuble, il y a un chemin tracé, bétonné, et on se dit que les gens vont aller du trottoir à l’immeuble par ce chemin-là. Le chemin du désir, c’est un chemin de traverse dans l’herbe qui, à force d’être emprunté, devient un deuxième chemin. Le webdocumentaire, c’est ça : créer des chemins du désir, donner la possibilité à l’internaute de se mouvoir dans une histoire.

      https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9rive_(philosophie) ? :)

      La délinéarisation, elle, est liée au travail sur les notes, qui prennent une place considérable, comme un deuxième livre. Cela avait été peu vu. La référence, ici, c’est le livre Des os dans le désert (Passage du Nord-ouest, 2007), de Sergio González Rodríguez, sur les féminicides impunis de Ciudad Juárez, au Mexique. Un livre extraordinaire, avec un jeu entre le texte courant et les notes absolument époustouflant.

      […]

      In fine, ce qui fait œuvre, c’est l’implication de l’auteur.

      […]

      Je crois que le proprement, c’est la loyauté. Toujours avancer démasqué. C’est aussi dire clairement dans quel état d’esprit on se trouve quand on rencontre quelqu’un, quitte à changer d’avis, mais lui dire au départ, a priori je suis plutôt hostile, a priori je suis plutôt en empathie, a priori je suis plutôt neutre. Sinon c’est trop facile de faire ami-ami et de cartonner derrière, de dire : je vous adore, et puis après de démolir. Ce n’est pas sérieux, ce n’est pas courageux, ce n’est pas loyal. Et c’est tellement courant chez les journalistes.

      […]

      On est entré dans une phase de formatage, avec l’idée que la websérie domine, qu’il faut nourrir YouTube et Facebook. Je n’ai pas envie de participer à ça, aux algorithmes, ça ne m’intéresse pas. Je trouve que cette création de sous-télé est une défaite, au sens où il y a moins de moyens pour faire la même chose. Je trouve dommage de produire des modules de cinq minutes pour tout et n’importe quoi, d’avoir complètement oublié ou écarté la notion d’interactivité, d’hypertexte, de chamboulement de la place de l’auteur, de chamboulement de la place du spectateur, pour, finalement, revenir à des choses qui sont soi-disant efficaces, mais… Ce n’est pas pour rien que je reviens à ces formes que sont le film documentaire, le livre, le roman : quitte à être linéaire, autant aller là où il y a le plus de liberté.

      […]

      Ce qu’on fabrique aujourd’hui, c’est principalement de la websérie, des petites choses pour les réseaux sociaux qui ont un intérêt restreint, où l’on assiste à un effacement de la notion d’auteur, de la notion de perspective, pour laisser la place à la technique et aux faiseurs. Où l’on gomme cette espèce d’alchimie qui était, à mes yeux, fantastique quand j’ai rencontré Upian et travaillé avec des codeurs, des designers, cette espèce de moment garage band, peut-être le plus fou dans lequel j’ai joué...

      #journalisme #forme #David_Dufresne #information #enquête #littérature #vérité #réalité #dérive #web #hypertexte #roman

  • Mort de Maurice Rajsfus, « historien de la répression » policière - Libération
    https://www.liberation.fr/france/2020/06/14/mort-de-maurice-rajsfus-historien-de-la-repression-policiere_1791200

    Enfant de parents déportés après la rafle du Vél d’Hiv, le journaliste, historien et militant a consacré sa vie à documenter les crimes et délits des forces de l’ordre. Une œuvre qui résonne avec les mobilisations actuelles.

    Quand on lui demandait comment il se définissait, il répondait : « Historien de la répression. J’ai créé mon genre… » Maurice #Rajsfus aura consacré la majeure partie de sa vie à l’examen implacable des crimes et délits policiers en France. Figure libertaire, l’écrivain est mort samedi à l’âge de 92 ans des suites d’un cancer, a annoncé son fils Marc.

    Né Maurice Plocki le 9 avril 1928, l’homme a minutieusement archivé, à partir de Mai 68 et pendant plus de quarante ans, les « brutalités sans nom », cinglait-il, de la police française. C’est peu dire qu’il en voulait aux forces de l’ordre – et qu’il avait ses raisons : en juillet 1942, la police du régime de Vichy avait raflé sa famille parce que juive, les laissant sa sœur et lui orphelins dans un Paris occupé par les nazis. Décortiquant des milliers d’articles de presse, Rajsfus a analysé les politiques des ministres de l’Intérieur qui se succédaient et, expliquait-il, justifiaient l’injustifiable : le harcèlement et les violences racistes, la répression des mouvements sociaux, les « gestes que l’on enseigne en école de police » et qui brisent parfois des vies.

    La dernière fois que Libération l’avait rencontré, c’était durant l’été 2019, pour un projet d’article sur le déni institutionnel entourant l’expression même de « violences policières » – il avait alors ironiquement évoqué « une certaine retenue » de l’Etat à reconnaître la réalité. Finalement, l’idée d’un portrait s’était imposée, tant #Maurice_Rajsfus incarnait à la fois l’histoire et la contemporanéité d’un combat dont l’actualité vient régulièrement rappeler la raison d’être. « La violence policière, elle est dans l’ADN du policier », affirmait-il. A ses yeux, un fil historique courait entre la police de Vichy, celle du massacre du métro Charonne en 1962, celle de Mai 68, celle qui mutilait récemment dans les centres-villes lors des manifestations de gilets jaunes, et celle qui tue parfois encore dans les quartiers populaires.
    « Il ne devrait pas y avoir un seul raciste dans la police »

    Certaines de ses réflexions revenaient en mémoire ces dernières semaines, à l’écoute des arguments visant à déresponsabiliser les forces de l’ordre ou à minimiser leurs dérives. Ainsi de l’idée qu’il serait normal que la police compte dans ses rangs un certain nombre de racistes, car elle serait « à l’image de la société ». « J’ai été invité par Europe 1 à un débat avec des cadres de la police parisienne, il y a une dizaine d’années, nous avait-il raconté. Je ne suis pas sectaire, j’y vais. A un moment donné, je crois que c’est le numéro 2 ou 3 de la PJ [police judiciaire, ndlr] qui me dit : "Vous savez, il n’y a pas plus de racistes dans la police que dans la moyenne de la population." Alors là, je lui ai arraché le micro, je lui ai dit : "Vous avez tort de me dire ça, parce que pour entrer dans la police il faut passer un concours d’entrée. Ensuite, il y a un an d’école de police. Et à la sortie, il y a encore un concours. Donc il ne devrait pas y avoir un seul raciste dans la police." »

    Président durant plusieurs années du réseau Ras l’front, né en 1990 pour lutter contre le Front national et ses idées, cofondateur de l’Observatoire des libertés publiques et créateur du bulletin mensuel « Que fait la police ? », l’ancien journaliste a écrit près de soixante ouvrages, dont de nombreux consacrés aux forces de l’ordre. Entre autres : la Police hors-la-loi, les Mercenaires de la République ou encore Je n’aime pas la police de mon pays. Il a également examiné dans un livre le douloureux sujet de la collaboration de certains juifs avec le régime de Vichy (Des juifs dans la collaboration, paru en 1980). Samedi soir, la maison d’édition Libertalia, avec laquelle il cheminait, lui a rendu hommage : « Nous poursuivrons ses combats pour la justice et l’émancipation. Ami, ta rage n’est pas perdue ! »
    La Contemporaine, un refuge pour ses archives

    A la fin de sa vie, seul dans son appartement après la mort, en novembre 2018, de Marie-Jeanne, avec qui il avait vécu durant soixante-cinq ans, Maurice Rajsfus avait une inquiétude : que ses archives, des centaines de boîtes en plastique contenant elles-mêmes des milliers de fiches recensant les bavures policières, « partent à la benne ». A la suite de la parution en décembre 2019 de son portrait dans Libération, qui a finalement joué le rôle d’une petite annonce, un contact a été établi avec la Contemporaine (anciennement Bibliothèque de documentation internationale contemporaine) pour que son travail y soit sauvegardé. Le processus était en bonne voie : « Des gens sont venus chez lui pour faire le métrage de toutes ses archives », raconte son fils, Marc Plocki. La crise sanitaire du Covid-19 a tout suspendu, mais « ce sera fait de façon certaine », assurent les éditions Libertalia.

    Cachan, le 22 juillet 2019. Maurice Rajsfus, écrivain, journaliste, historien et militant français. Il est auteur de nombreux livres dans lesquels il a abordé les thèmes du génocide des juifs en France, de la police et des atteintes aux libertés. Il a dédié une pièce de son domicile à la conservation de milliers de fiches bristol qui recensent les violences policières pendant plus de quarante ans. Maurice Rajsfus avait dédié une pièce entière de son domicile à la conservation de milliers de fiches bristol qui recensent les violences policières de 1968 à 2014. Photo Frédéric Stucin pour Libération

    Un autre projet était en cours : un livre d’entretiens avec le journaliste David Dufresne qui, à travers ses interpellations « Allô Place Beauvau », avait repris le flambeau d’une recension systématique des faits et gestes policiers. « On s’était vus en début d’année pour préparer ce livre, où l’on voulait confronter nos expériences et nos points de vue, raconte Dufresne. Il n’était pas du tout sur les réseaux sociaux, c’était quelqu’un qui était encore stylo à la main, mais il voyait bien que quelque chose basculait en ce moment par rapport à l’observation de la police, avec toutes les vidéos. » Pour préparer ce livre, Rajsfus avait écrit récemment une cinquantaine de pages de notes. Dufresne arrivait, lui, avec un paquet de questions : « Maurice Rajsfus a montré la voie, il avait compris que c’est l’accumulation des événements qui fait sens. Un cas peut être hasardeux, mais pas une accumulation. »

    Signe de l’importance qu’avait acquise Maurice Rajsfus, l’annonce de sa mort a été suivie par de nombreux hommages, certains militants antiracistes saluant un « monument ». D’autres relevaient un évident symbole : son existence a pris fin le jour même où des dizaines de milliers de personnes défilaient dans plusieurs villes de France pour dénoncer le racisme et les violences policières, et réclamer « justice ». Le combat de sa vie est désormais celui d’une époque, porté par un mouvement sans frontières.

    Frantz Durupt , Ismaël Halissat

    #police #surveillance #sousveillance #histoire

  • Que fait la police ?, août-septembre 2012 (Relevé sur le Net...)
    http://quefaitlapolice.samizdat.net/?p=380

    Nous sommes débarrassés de Nicolas Sarkozy depuis le 6 mai 20I2. En principe, nous devrions respirer un air plus pur, et même afficher notre satisfaction. Nous étions sous la menace, de plus en plus évidente, d’un authentique Etat policier. I1 ne restait, en effet, qu’à perdre les dernières libertés fondamentales dont il était encore possible de disposer. Pourtant, il semble que l’idéologie sécuritaire a toujours droit de cité au pays des Droits de l’homme. Certes, il y a eu, dès l’entrée en fonction de François Hollande, quelques avancées positives comme (...) Source : Relevé sur le Net...

  • Allô IGPN ? Que fait (vraiment) la police des polices ? - davduf.net
    http://www.davduf.net/allo-igpn-que-fait-vraiment-la-police-des-polices

    Comment l’IGPN travaille-t-elle concrètement ? Quelles sont ses conclusions d’enquête ? Ses motifs, ou non, de classer une plainte ? Auditionne-t-elle toujours les victimes et les policiers mis en cause ? Cette compilation d’études de cas, régulièrement mise à jour et fondée sur nos signalements Allô Place Beauvau, constitue la première plongée jamais effectuée en profondeur dans les arcanes de l’institution. Allô #IGPN met au jour ce que certains appellent une « énigme » : sa capacité de (sous-)traiter les affaires liées aux accusations de violences policières.

    Plus de 65 plaintes suivies.

    Six mois d’enquête.

    Une collection proposée par @davduf, Etamin Studio, WeDoData, @fil et l’équipe de Mediapart.

  • Dix questions à l’IGPN - Page 1 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/120620/dix-questions-l-igpn?onglet=full

    À l’image de Christophe Castaner, qui nous a toujours opposé le silence depuis la création d’Allô Place Beauvau, Brigitte Jullien, cheffe de l’Inspection générale de la police nationale #IGPN, a refusé de répondre à nos questions. Les voici : il n’est jamais trop tard.

    Brigitte Jullien, cheffe de l’Inspection générale de la police nationale, a refusé de répondre à nos questions. Les voici. Puisqu’il n’est jamais trop tard.

    1. Dans la collection de rapports que nous avons analysés en profondeur, il apparaît clairement que tout est fait pour éviter d’avoir une vision juste sur le long terme de votre activité. Des indicateurs disparaissent d’une année sur l’autre, des modes de comptage diffèrent, de nouvelles catégories surgissent. Doit-on y voir un manque de transparence certain ?

    2. Pourquoi avoir supprimé les données concernant les discriminations dans l’édition 2019 ?

    3. Pourquoi depuis 2015 les données sur les « Violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique » ne sont plus indiquées en chiffres bruts mais en pourcentages, rendant opaque leur lisibilité ?

    4. Savez-vous pourquoi votre rapport 2019 a été mis sous le boisseau pendant deux mois ?

    5. Dans votre éditorial, qui ouvre le rapport 2019, vous écrivez que « l’IGPN a désormais une triple ambition » et la première d’entre elles serait : « valoriser l’institution et ses agents ». N’est-ce pas un aveu complet de votre dépendance ?

    6. Page 21 du même rapport, pour expliquer une utilisation moindre du LBD en 2019 qu’en 2018, notamment en novembre-décembre 2018, au début du mouvement des gilets jaunes, il est dit : « La médiatisation de certaines blessures et les réactions suscitées par l’utilisation de cette arme ont vraisemblablement joué un rôle inhibiteur pour les forces de l’ordre. » Cela rejoint vos déclarations, l’année dernière, selon lesquelles la police ne ferait pas l’économie d’un débat sur l’usage des LBD. Où en est ce débat ? Où sont vos analyses ?

    7. Lundi 8 juin, Christophe Castaner a appelé à « une réforme en profondeur des inspections du ministère de l’intérieur », pour plus de « transparence » et « plus de cohérence et plus d’indépendance dans leur action vis-à-vis des services ». Le ministre a expliqué souhaiter que l’Inspection générale de l’administration (IGA) dirige désormais « les enquêtes administratives les plus difficiles et les plus complexes concernant les forces de police et de gendarmerie ». Un désaveu pour votre institution ?

    8. Faut-il déconnecter la police des polices du ministère de l’intérieur, pour la placer sous l’égide de celui de la justice ?

    9. Que pensez-vous des modèles danois ou anglais (Independent Office for Police Conduct) qui intègrent des personnalités hors du champ policier dans les enquêtes sur la police ?

    10. Quel est votre motif de classement préféré choisi par les parquets à partir de vos propres enquêtes ? Infraction insuffisamment caractérisée ? Auteur non identifié ? Exploitation vidéosurveillance insuffisante ?

  • IGPN : plongée dans la fabrique de l’impunité | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/120620/igpn-plongee-dans-la-fabrique-de-l-impunite

    Pendant six mois, nous avons donc épluché des milliers de pages d’« enquêtes » pour tenter notamment de comprendre quel type de matériau et quelles conclusions étaient transmis aux procureurs.

    Aux classements sans suite, nous avons voulu en donner une. Fût-elle seulement journalistique.

    Allô IGPN est en ce sens la première plongée en profondeur jamais réalisée dans les arcanes de l’institution. À travers 65 enquêtes IGPN (et IGGN), dont toutes avaient fait l’objet d’un signalement d’Allô Place Beauvau, nous avons ainsi pu déceler des permanences dans les méthodes visant à blanchir les policiers, vu apparaître des constantes, des modes opératoires.

    Nous proposons également un certain nombre de témoignages de victimes qui ont finalement refusé de porter l’affaire en justice. Leurs raisons sont éloquentes.

    Mais ce n’est pas tout. Allô IGPN analyse également les rapports annuels émis par l’institution, pour y déceler une évidence : entre les indicateurs dont la méthodologie est modifiée d’une édition à l’autre, ceux qui sont créés au fil du temps et ceux qui disparaissent, tout semble concourir à nuire à une lecture claire de l’activité de cette institution publique.

    Notre travail ne s’arrête pas là. À l’avenir, nous continuerons à signaler les interventions policières suspectes les plus symboliques dans les manifestations, mais aussi et c’est nouveau, hors manifestations, Allô IGPN permettra de savoir quelques mois plus tard comment la police des polices a traité ces cas de violences dans ses rangs. Mais d’ores et déjà, une typologie se dégage.

    L’identification laborieuse des policiers auteurs de violences

    La non-identification de policiers à l’origine de violences est l’un des motifs fréquents des classements sans suite.

    « L’IGPN ne se donne pas réellement les moyens d’identifier les policiers qui ont commis des violences ayant entraîné des blessures ou des mutilations », déplore l’avocate rouennaise Chloé Chalot, qui depuis l’évacuation de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes travaille sur les violences policières.

    « Les enquêteurs se contentent des déclarations des policiers sans aller plus loin. Il n’y a pas d’investigations complémentaires pour les vérifier », poursuit-elle.

    Chloé Chalot revient sur l’affaire de Sébastien M., blessé à la tête lors d’une manifestation de gilets jaunes, le 12 janvier 2019 à Paris par un tir de lanceur de balles de défense (LBD), lui occasionnant 30 jours d’interruption totale de travail.

    À partir de vidéos de témoins, une brigade d’une vingtaine de policiers en civil est identifiée. Il s’agit des Détachements d’action rapide (les DAR renommés depuis les BRAV-M), des binômes à moto, résurgence des « voltigeurs » interdits depuis la mort de Malik Oussekine en 1986. Trois détenteurs de LBD sont identifiés. Auditionné par l’IGPN, le lieutenant commandant la brigade confirme les tirs, mais explique ne pas être en mesure « de donner le nombre de cartouches ».

    Et pour cause, les fiches dites TSUA, qui permettent de suivre l’usage des armes avec l’heure, le lieu et l’auteur n’ont pas été rédigées « sur instruction de la hiérarchie », selon le lieutenant , car « il y avait trop de tirs et il était inutile de faire un écrit ».

    On apprend que « les consignes initiales au début des manifestations des gilets jaunes étaient de ne pas rédiger » de fiches. « Les détenteurs de LBD donnaient le nombre de munitions tirées et l’officier faisait une synthèse. »

    C’est ainsi que la non-traçabilité des tirs des policiers était organisée par la hiérarchie, ordres contraires au règlement. Les trois policiers porteurs de LBD ont, au cours de leur audition, nié être les auteurs de tirs. L’un d’entre eux affirme « ne pas se souvenir avoir fait usage du LBD ».

    Malgré ce dispositif illégal décidé par les autorités chargées des opérations, malgré l’identification de trois suspects, l’IGPN se contente des déclarations des policiers et conclut que « les différentes investigations ne permettent pas d’identifier le policier ayant fait usage d’un lanceur de balles de défense ». Le 19 février 2020, la vice-procureure de la République de Paris, Claire Vuillet, suit les conclusions de l’IGPN et classe sans suite.

    Visage dissimulé, absence de brassard, de matricule, dans de nombreux dossiers que nous avons analysés, ces entorses au règlement (règlement général d’emploi) permettent de ne pas retrouver les auteurs des violences. Et ne sont pas retenues par l’IGPN à l’encontre des forces de l’ordre.

  • « La Brune et moi », plongée maudite du punk parigot 1979
    http://www.davduf.net/la-brune-et-moi-plongee-maudite-du-punk-parigot

    Grosse découverte et petite claque ce soir : La Brune et moi (Philippe Puicouyoul, 1979), film rare, punk et maudit. Jusqu’ici, jamais entendu parlé de ce film, tourné en en 79, retiré de l’affiche une semaine après sa sortie, avec un casting long comme un avis de décès (ils sont tous morts, ou disparus, ou presque) Pour devenir une « punk star », la jeune groupie Anouschka accepte les avances du banquier Xavier de Royan. Dès lors, la punkette entraîne son producteur-manager dans un marathon de (...) #sous-culture

    / Une

    https://www.cinematheque.fr/henri/film/56302-la-brune-et-moi-philippe-puicouyoul-1979
    https://twitter.com/Quasiment

    • Anoushka, c’était elle.


      Qu’est-elle devenue ? Patrick, lui, le sait ; il préfère garder le secret. Une chose est sûre : elle est toujours vivante.
      https://lecourrierplus.fr/les-dessous-chics/cinema/patrick-eudeline-autopsie-le-cadavre-du-punk

      Où est passée Anoushka ?

      En guise de promo, Philippe Puicouyoul et sa bande de punks décident d’organiser des projections du film dans la salle d’un cinéma porno de la rue St-Denis. « Tous les midis, les gérants arrêtaient les séances porno, le groupe Les Privés jouaient en live et on projetait le film en même temps, » se marre aujourd’hui le réalisateur. Mais plus que par ses projections dans les salles interlopes, La Brune et Moi finit finalement par décrocher un peu d’attention lorsqu’il remporte le prix spécial du jury au festival international du film musical. Et pour le simple plaisir de la provocation, Philippe Puicouyoul débarque finalement sur la scène du Grand Rex pour venir chercher sa récompense habillé en paysan : bottes en caoutchouc, chemise à carreaux et une horde de 40 canards tenus en laisse. « J’avais loué les canards le matin sur le quai des oiseaux à Paris. Ils partaient dans tous les sens sur la scène, c’était du grand n’importe quoi. Les gens s’attendaient à voir arriver un mec avec la crête et la veste en cuir, ils n’en revenaient pas. »

    • fort jolie punkette élancée,

      Anoushka, c’était elle. Mignonne punkette à la crinière de lionne. Beaucoup de charme sauvage comme en possédaient certaines filles de l’époque.

      Réduire ainsi cette personne à son corps, c’est pas très punk en fait.

    • Cinq minutes et trente secondes, c’est la durée du maxi 2 titres publié par les Toulousains de Fotomatic chez Pop Supérette, et c’est bien plus de temps qu’il n’en faut pour se coller la gueule près des enceintes avec l’envie de rejouer les titres en boucle. La concision et l’efficacité pop-punk à son climax.
      https://gonzai.com/avec-son-punk-a-la-stinky-toys-fotomatic-nest-pas-venu-pour-beurrer-des-tart

      L’accent anglais de Laura, la chanteuse, n’est pas totalement maitrisé. La section rythmique est moins démentielle que celle de l’orchestre de James Brown mais mérite un bon 7/10 sur l’échelle Marky Ramone. Mais même avec ces quelques points noirs, les refrains de Fotomatic font un bien fou ; avec cette délivrante impression que l’auditeur sera propulsé dans un long-métrage débile de Kervern et Délepine avec Benoît Poelvoorde dans le rôle du punk bras cassé de service (ce film existe, c’était Le Grand soir).
      Pour Fotomatic, ce moment n’est pas encore venu mais les deux bastos que sont Bipolarity et Take a ride suffisent largement à donner envie de refaire le tour du pâté de maison trois fois. A seulement 25 ans, ces Toulousains ne font pas tomber la chemise, ils la déchirent avec style en se foutant assez gentiment des conventions (“powerpop-punk avec attitude”, c’est marqué sur la pochette) pour un résultat sans prétention, instantané, délicieusement bancal. Alors que le port du perfecto est en passe d’être interdit par la convention de Genève et que le rock, comme le punk, tombent peu à peu dans une espèce de gros bocal à formol pour vieux grabataires, autant de liberté fait plaisir à voir, et surtout à entendre. D’autant plus que ces Fotomatic se paient le luxe de rendre hommage aux Lou’s, girls punk band parisien de la fin des années 70, sur le second titre de ce maxi brûlé.

      https://popsuperette.bandcamp.com/track/take-a-ride

      #Gonzaï #pop_punk

    • Anouschka & les Privés
      https://www.memoireneuve.fr/Records_LesPrives_FRA.php

      https://memoireneuve.bandcamp.com/track/contr-le-1979

      https://seenthis.net/messages/893101

      Début 77, Christian monte un groupe punk avec ses potes Jacques et Pierre. Suite à diverses petites annonces, André est recruté et insuffle à la formation son nom : Les Privés. André vient tout juste de quitter le groupe punk parisien Gazoline (avec qui il a enregistré le single Killer man / Radio flic) et d’acheter pour une bouchée de pain une double batterie Ludwig avec un jeu complet de cymbales à... Cerrone !

      Tous les membres du groupe viennent de la banlieue Sud Est de Paris, soit les communes de Limeil-Brévannes, Boissy-Saint-Léger et Mandres-les-Roses. La commune de Limeil-Brévannes, a toujours su fournir aux musiciens la salle de répétition indispensable à leur développement par l’intermédiaire de la Maison des Jeunes et de la Culture (MJC) municipale ; ce qu’elle avait déjà fait pour les groupes Virgule et Solitude au début des 70’s.

      Hiver 77, Les Privés commencent à répéter dans un vieux bâtiment du stade municipal de la ville, vétuste et isolé au milieu d’un terrain vague à la lisière de la ville, un endroit idéal pour pousser à fond les amplis à lampes. Vu la propension du guitariste-chanteur à collectionner les amplis et les guitares les plus rares et un certain dandysme vestimentaire du bassiste, ce lieu de répétition et de création deviendra également un lieu d’attraction pour la gent féminine et in fine le lieu du tournage de scènes live du film « La Brune et Moi ».
      Début 78, les premiers concerts ont lieu à Combs-la-Ville, puis Boissy-Saint-Léger, et ensuite à Limeil-Brévannes où le groupe dépassait déjà en nombre de spectateurs les performances d’un chanteur pop tel Bernard Lavilliers, avec plus de 600 places payantes. A la fin des concerts, en back stage, le bassiste aimait remplir et exhiber sa valise de guitare basse pleine des billets de banque de la recette du jour.

      Au cours de l’année 1978, vinrent les salles phares de Paris : Le Gibus (nombreuses dates), La Péniche, les universités de Chatou, puis de Poissy avec Téléphone, Starshooter, Jacques Higelin..., de Vincennes avec Higelin de nouveau... Au Gibus, le groupe joue tellement fort qu’il manque de se faire virer. A Poissy, lors d’un concert de soutien aux usines Pathé Marconi en grève pour restructuration, la batte de grosse caisse traverse et déchire la peau de la grosse caisse dès les premiers riffs de guitare. Devant plus de 5000 spectateurs. Le batteur improvise alors avec la complicité du bassiste un swing dans le style « Stray Cats », uniquement à la caisse claire.

      Fin 78, le réalisateur de film Philippe Puicouyoul, rencontré lors d’un concert à Paris, propose à Christian de jouer avec son groupe dans un film sur le mouvement punk en incorporant au chant Anouschka, alors petite amie de Pierre-Jean Cayatte, bassiste de Gazoline, groupe disloqué depuis peu. Les Privés se retrouveront au cœur de « La Brune et Moi » dans lequel joue Pierre Clémenti et apparaissent d’autres groupes emblématiques de l’époque : les Dogs, Edith Nylon, Ici Paris, Marquis de Sade, Taxi Girl, etc.
      Début 79, WEA remarque le groupe et lui propose l’enregistrement d’une maquette pour tester son potentiel commercial. Cette maquette de deux titres, Banlieue moderne / Haute sécurité, restera sans suite.

      Fin 79, André quitte le groupe et est remplacé par Eric Péron, le batteur de Standing.

      Le groupe se sépare définitivement peu de temps après. Durant ces trois années d’existence, une quarantaine de morceaux auront été composés et interprétés sur scène en alternance avec quelques reprises (New York Dolls, J. Kidd, The Clash).

  • Le gouvernement britannique avait apparement justifié sa décision de #confinement de la population par une #simulation effectuée par des chercheurs en #épidémiologie de l’#Imperial_College de Londres. Comme la grande majorité des articles scientifiques, le code source des programmes ayant produit les résultats publiés n’était pas disponible. Cela a, à juste titre, fait râler, et le code (ou bien une version améliorée, ce n’est pas clair) a été publié :

    https://github.com/mrc-ide/covid-sim

    (peut-être aussi en https://www.imperial.ac.uk/mrc-global-infectious-disease-analysis/covid-19/covid-19-scientific-resources )

    Il a fait l’objet de pas mal de critiques, tellement il est mal foutu et bogué. Attention : toutes les critiques ne sont pas justes, car il se mêle à ce débat des considérations politiques, complotistes (il y a un mouvement anti-confinement conspirationniste fort dans les pays anglophones), de la jalousie entre programmeurs (le code écrit par les autres est toujours jugé illisible), des positions idéologiques (l’université, ce sont forcément des amateurs) donc, prudence. L’intérêt que je vois à ce débat, c’est que des tas de gens se rendent soudainement compte que 1) des tas de décisions sont basées (ou en tout cas justifiées) par le résultat d’un programme informatique 2) que la majorité des programmes sont bâclés et ont des bogues.

    Un article du #Telegraph : https://www.telegraph.co.uk/technology/2020/05/16/coding-led-lockdown-totally-unreliable-buggy-mess-say-experts (c’est derrière un paywall mais en affichant le source de la page, on voit tout).

    Une critique très sévère (et souvent injuste, le type ne semble pas connaitre le monde réel, par exemple quand il exige que tout programme ait une suite de tests de non-régression complète) : https://lockdownsceptics.org/code-review-of-fergusons-model https://lockdownsceptics.org/second-analysis-of-fergusons-model

    Une réponse aux critiques : http://blog.khinsen.net/posts/2020/05/18/an-open-letter-to-software-engineers-criticizing-neil-ferguson-s-epide

    Opinion personnelle : oui, les chercheurs non-informaticiens (biologistes, physiciens, SHS…) écrivent du mauvais code car ils n’ont pas de formation, s’en foutent, et ça ne compte pas pour leur avancement de toute façon (les "reviewers" ne vérifient jamais le code). En prime, ils n’ont pas d’argent pour payer des programmeurs (cf. le recrutement des « ingénieurs de recherche » au CNRS). Mais ce n’est pas spécifique à cette étude. Si on regardait aussi soigneusement tous les programmes (même écrits dans le privé), on pousserait les mêmes cris d’horreur.

  • Télétravail : le rêve qui a viré au cauchemar pour de nombreux salariés confinés
    https://www.bastamag.net/teletravail-burn-out-insomnies-accord-interprofessionnel-vie-privee-heures

    Explosion de la charge de travail, absence d’horaires et de coupure entre vie professionnelle et vie privée, pressions supplémentaires, manque de pauses, insomnies, délitement du lien social… Les syndicats demandent la mise en place d’accords interprofessionnels sur le télétravail. Dans l’entreprise d’Emmanuelle*, le télétravail a toujours été « contre-culturel ». Malgré une demande croissante des salarié.es ces dernières années, le grand groupe du luxe et de la mode dans lequel elle exerce s’y est (...) #Décrypter

    / A la une, #Syndicalisme, #Transformer_le_travail, #Conditions_de_travail

    • Il y a là d’autres sujets que le télétravail :
      –le #chômage_partiel pas respecté parce qu’il ne correspond pas à une baisse des revenus ni de la charge de travail mais à un effet d’aubaine pour les entreprises aux dépens de la collectivité qui raque ;
      (Là je viens de prendre un appel d’une des bénévoles de mon asso, elle m’a demandé si je travaillais aujourd’hui, j’ai dit non, aujourd’hui je suis au chômage technique et je bosse vendredi, elle m’a dit à vendredi, c’est comme ça dans l’idéal !)
      –la montée en responsabilité et l’intensification qui s’ensuit de la charge de travail sans changement de statut ni reconnaissance du travail d’encadrement (en tout cas quand il est féminin et perçu comme « naturel » aux femmes)
      –le non-respect des horaires de travail et le #surtravail organisé (donc en partie #travail_gratuit).

      Ça, c’est « seulement » des effets d’aubaine (l’exploitation féroce des conditions actuelles) dans un mouvement à long terme de refus de payer les gens pour leur boulot.

      Ce que je trouve intéressant, c’est ce qui tient au #télétravail en tant que tel :
      –le défaut d’encadrement par la présence sur place et la responsabilité accrue de l’employé·e ;

      « Au début, il faut prouver qu’on télétravaille donc on ne prend pas de pause. On se sent coupable de simplement se faire un thé ou de discuter avec son conjoint », confie Emmanuelle.

      –l’isolement ;

      Là réside, aux yeux de Danièle Linhart, l’un des principaux risques inhérents au télétravail. Pour cette sociologue du travail et directrice de recherche émérite au CNRS, ce dernier pousse à « une sorte de déréalisation de l’activité » : « Celle-ci devient de plus en plus virtuelle, fictive, et perd par conséquent de son sens, de sa finalité. » Pour elle, le lien aux autres est une dimension essentielle du travail, aujourd’hui mise de côté

      –les conditions matérielles très différentes (la pauvre chaise vs. le fauteuil ergonomique, c’est pas très bien traité alors que ça fout en l’air les corps) ;

      « Les enfants ne comprennent pas que je sois là mais que je ne puisse pas être avec eux. J’ai fini par trouver une pièce un peu cachée pour télétravailler, qu’ils ont fini par trouver. J’avais aussi un espace dehors mais dès qu’il pleuvait ça se compliquait. Je bossais sur un coin d’herbe où je pouvais avoir le wifi, donc j’ai très mal au dos. J’en ai en fait plein le dos, littéralement. »

      –et puis la particularité du travail des #femmes #travailleuses.

      Selon l’enquête de l’Ugict-CGT, 81% des télétravailleurs qui ont des enfants ont dû les garder tout en travaillant. La fermeture des écoles s’est par ailleurs traduite pour 43% des femmes en télétravail par plus de 4 heures de tâches domestiques supplémentaires. « On ne peut pas télétravailler tout en s’occupant de ses enfants. C’est une catastrophe, notamment pour les femmes », alerte Sophie Binet, co-secrétaire de l’Ugict-CGT.

      C’est un peu en vrac, cet article, mais tout y est. #intéressant

  • État d’urgence sanitaire : les #quartiers_populaires sous pression policière

    Avec l’instauration du #confinement et de l’#état_d’urgence_sanitaire, l’accès à l’#espace_public a été considérablement restreint. Mais son contrôle, assuré par la #police et la #gendarmerie, renforce les traitements discriminatoires et racistes vis-à-vis des populations les plus pauvres.

    La crise provoquée par l’épidémie de coronavirus fait ressortir avec éclat la #gestion_policière des quartiers populaires et ses conséquences pour leurs habitants. Les mesures de confinement puis l’état d’urgence sanitaire adopté le 24 mars 2020 ont en effet profondément reconfiguré l’accès des personnes à l’espace public, notamment par la mise en place d’une restriction des déplacements, l’une des plus sévères d’Europe occidentale. Sur l’ensemble du territoire, la police et la gendarmerie se sont donc vues assigner une mission de contrôle resserré de l’espace public et de la circulation des personnes, reposant sur les désormais fameuses « #attestations dérogatoires de déplacement ».

    Depuis la mise en place de l’état d’urgence sanitaire, le volume des contrôles des déplacements réalisés par les forces de l’ordre ainsi que le nombre d’amendes infligées par ces dernières font partie des indicateurs qui, aux yeux de l’équipe gouvernementale, témoignent de la réussite de leur action. Fait inédit en matière de contrôles policiers, le ministère de l’Intérieur communique depuis la fin du mois de mars les statistiques relatives au nombre de contrôles effectués et sur les amendes pour « non-respect du confinement » auxquelles ils ont donné lieu. Le 23 avril 2020, Christophe Castaner déclarait que « 15,5 millions de contrôles ont été faits depuis le début du confinement sur l’ensemble du territoire et 915 000 procès-verbaux dressés ». Cet autosatisfecit passe sous silence d’importantes inégalités territoriales, tant dans le nombre de contrôles conduits que dans les modes d’intervention de la police.

    Bien que lacunaires, les données et informations disponibles indiquent en effet que les zones urbaines paupérisées, où réside une proportion importante de personnes racisées, concentrent non seulement la majorité des contrôles, mais aussi des faits de brutalité et de racisme policiers. En matière de police, le contrôle des déplacements et des activités mis en place dans le contexte de l’épidémie vient ainsi renforcer des dynamiques de discrimination et de violence déjà à l’œuvre depuis des décennies dans les espaces urbains les plus pauvres.
    Contrôles, contraventions, couvre-feux

    À la différence des contrôles d’identité conduits dans le cadre de l’article 78-2 du Code de procédure pénale, les contrôles des déplacements pendant l’état d’urgence sanitaire font l’objet d’un comptage statistique rendu public lors des points presse du ministère de l’Intérieur. Il n’a fallu que quelques jours pour voir émerger de fortes disparités dans le volume des contrôles et des amendes en fonction des territoires. La Seine-Saint-Denis, par exemple, n’est pas seulement « le département plus pauvre de France », il affiche qui plus est une des plus importantes surmortalités liées au virus ainsi que le taux de verbalisation le plus élevé en Île-de-France : dès la première journée de mise en place des contrôles, le département a totalisé 10 % des PV dressés sur l’ensemble du territoire français, d’après la procureure de la République de Bobigny.

    Fin avril, les chiffres fournis par le ministre de l’Intérieur indiquent un taux de verbalisation d’environ 6% à l’échelle nationale. Si, à Paris (6,3%), ce taux est légèrement supérieur à la moyenne nationale, c’est surtout dans les départements d’Île-de-France, les plus densément peuplés, qu’il explose : 8,7% dans les Hauts-de-Seine, 13,7% dans le Val-de-Marne et 17% en Seine-Saint-Denis où le taux de verbalisation frôle le triple de la moyenne nationale. Les chiffres révèlent donc une disproportion dans la distribution des contraventions au sein d’un département où réside une population pauvre, racisée et dont les relations avec la police sont, depuis des décennies, marquées par de très fortes tensions.

    Par ailleurs, aux mesures évoquées précédemment est venue s’ajouter l’instauration de couvre-feux dans un peu moins de deux-cent communes, principalement dans le sud-est et le nord de la métropole ainsi qu’en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à Mayotte et en Polynésie française. Fin mars, environ deux millions de Français étaient concernés par ce type de mesures. Destiné à empêcher la fréquentation des plages et des espaces touristiques, le couvre-feu a parfois été appliqué plus sévèrement dans certaines zones urbaines : c’est le cas par exemple à Nice où, dans les quartiers populaires, la mesure doit être respectée à partir de 20h, contre 22h dans les autres quartiers.

    En matière de police, le contrôle des déplacements et des activités mis en place dans le contexte de l’épidémie vient ainsi renforcer des dynamiques de discrimination et de violence déjà à l’œuvre depuis des décennies dans les espaces urbains les plus pauvres.

    Ce premier constat appelle trois remarques. Tout d’abord, on soulignera que l’imprécision (qu’est-ce qu’un « achat de première nécessité » ?) et la fragilité juridique des mesures de contrôle et de verbalisation (notamment concernant la réitération) mises en place depuis le début de l’épidémie renforcent le pouvoir discrétionnaire des agents de terrain. Or ce pouvoir en matière de contrôles, déjà très important en France, a été identifié comme une des causes principales des abus et des discriminations1. Ensuite, concernant les contraventions, celles-ci viennent renforcer un phénomène mis en lumière par une recherche récente de la sociologue et juriste Aline Daillère, qui montre que les policiers utilisent depuis quelques années de manière croissante leur « pouvoir de verbalisation » pour sanctionner des adolescents et des jeunes adultes des quartiers populaires2.

    Enfin, la rapidité et l’efficacité avec laquelle a été mis en place un instrument d’enregistrement statistique des contrôles des limitations des déplacements dans le cadre de l’épidémie pourrait servir d’argument à celles et ceux qui demandent que les contrôles d’identité menés dans le cadre de l’article 78-2 du Code de procédure pénale fassent eux aussi l’objet d’évaluations chiffrées. En effet, bien que les biais (notamment raciaux) sur lesquels reposent ces contrôles aient été démontrés depuis une dizaine d’années par des enquêtes de terrain et un rapport du Défenseur des droits, le ministère de l’Intérieur refuse toujours de mettre en place un système de mesure tel que celui adopté par exemple au Royaume-Uni.
    Violences, racisme, feux d’artifice

    Des cas d’abus et de brutalités policières, dont une majorité ayant eu lieu dans des quartiers de banlieue, ont été signalés sur les réseaux sociaux dès la mise en place des mesures de confinement, à partir d’enregistrements vidéo ou des témoignages de victimes et/ou témoins. Ainsi, depuis quelques années, la police n’a plus le monopole du récit et de l’information sur les faits de brutalité. Depuis le début du confinement, ces derniers se caractérisent à la fois par leur similitude avec les violences qui ont émaillé l’histoire des quartiers populaires au cours des dernières décennies, et par l’augmentation de leur fréquence.

    La régulation de l’espace public par le biais des contrôles policiers récurrents est une histoire ancienne dans les quartiers populaires et singularise le rapport de leurs habitants à la police, par rapport au reste de la population française. Le contrôle des déplacements et des populations dans le cadre du confinement est venu renforcer la spécificité de ces espaces où, par ailleurs, l’accès à l’espace public est souvent déterminant afin de pallier les difficultés liées aux conditions de vie. Sans surprise, la multiplication des contrôles réalisés dans le cadre du confinement a amplifié les problèmes déjà connus liés aux contrôles d’identité pédestres.

    Dès le 17 mars, des témoignages et des signalements sont postés sur les réseaux sociaux rapportant une forte pression policière sur les quartiers de banlieue, des contrôles nombreux et parfois accompagnés de tensions verbales et physiques. Entre le 18 mars et le 6 mai 2020, le journaliste David Dufresne recense 24 signalements concernant des faits de verbalisations abusives ou de brutalités policières : insultes, coups de poings, de pieds et de matraque, usage de gaz lacrymogène, tir de taser et techniques d’immobilisation. Le 8 avril, un homme de 34 ans décède dans un commissariat de Béziers après son interpellation pendant le couvre-feu, et vraisemblablement après avoir fait l’objet de « techniques d’immobilisation » qui ont déjà provoqué la mort de plusieurs personnes par le passé, dont Wissam El-Yamni à Clermont-Ferrand en 2011, Adama Traoré à Persan en 2016 et, plus récemment, Cédric Chouviat à Paris début 2020. Par ailleurs, certains témoignages font état d’injures racistes : ainsi par exemple la vidéo tournée dans la nuit du 25 au 26 avril sur l’Île-Saint-Denis, où l’on voit des policiers qualifier de « bicot », une insulte issue du vocabulaire colonial, un homme qu’ils viennent de repêcher dans la Seine, avant qu’on entende des bruits de coups et des cris.

    La mise en place des mesures de confinement s’est accompagnée quasi immédiatement d’une suspicion à l’égard des quartiers populaires, révélant un processus de racialisation des jugements d’indiscipline et d’incivisme.

    Les brutalités policières ont également concerné des femmes, habituellement minoritaires parmi les personnes contrôlées et les victimes de ces brutalités. Le 19 mars, à Aubervilliers, un riverain filme le contrôle d’une jeune femme noire de 19 ans envers laquelle un groupe de policier s’adonne à une véritable « cérémonie de dégradation » : insultes sexistes, coups de matraque et tir de taser. Le 4 avril, dans le quartier de la Noé, à Chanteloup-les-Vignes, les policiers qui tentaient d’interpeller un jeune homme circulant en moto se sont vus opposer la résistance d’une partie des habitants. Au cours des échauffourées, les policiers procèdent à 14 tirs de LBD et de 9 lancers de grenades. Un de ces projectiles atteint à la tête une fillette de 5 ans qui sera ensuite transférée en réanimation à l’hôpital Necker à Paris.

    Depuis le début du confinement, on peut distinguer trois périodes dont l’enchaînement traduit un crescendo dans les violences imputables aux forces de l’ordre, dans les réponses qu’elles ont suscitées au sein des quartiers populaires et dans la réaction politique. La première période, de mi-mars à début avril, voit se succéder un ensemble de faits qui ont été portés à la connaissance du public sur les réseaux sociaux mais qui n’ont pas provoqué de réaction collective au sein des quartiers où ils se sont déroulés.

    Les évènements de Chanteloup-les-Vignes préfigurent quant à eux la deuxième phase, caractérisée par une intensification du cycle de la violence à partir du 18 avril, après qu’un homme de trente ans circulant en motocross a été grièvement blessé à la jambe suite à une collision provoquée par l’ouverture d’une portière d’un véhicule de police à Villeneuve-la-Garenne. L’incident, et l’extrême rapidité de sa médiatisation sur les réseaux sociaux, ont entraîné plusieurs nuits d’échauffourées dans différentes communes de France. Si ce contentieux trouve ses racines bien en amont du confinement, le fait que ces réactions collectives aient principalement et simultanément pris la forme de tirs de feux d’artifices en direction des forces de police poursuit également une stratégie de mise en visibilité. Les images saisissantes ainsi produites sont en effet particulièrement adaptées à leur diffusion sur les réseaux sociaux tout en s’inscrivant dans une tradition émeutière de certains quartiers de banlieue au moment du réveillon (à Strasbourg par exemple) et en présentant un simulacre guerrier : on entend ainsi le bruit des balles, sans qu’aucune arme à feu ne soit utilisée.

    Enfin, et c’est la troisième phase, on a vu apparaître quelques fissures dans le mur du déni politique et policier suite aux craintes de généralisation des révoltes ainsi qu’en raison de l’émotion suscitée par l’injure raciste proférée sur l’Île-Saint-Denis. Cette multiplication des « croche-pieds à l’éthique », pour reprendre l’euphémisme utilisé par le ministre de l’Intérieur le 13 janvier dernier à l’occasion d’une des rares prises de parole politiques sur les brutalités policières, a conduit ce dernier à parler sur Twitter d’« indignation légitime » et à préciser que « le racisme n’a pas sa place dans la police républicaine ». Le Préfet de police de Paris demande quant à lui la « suspension » des agents mis en cause. Toutefois, comme souvent, on peut s’attendre à ce que la sanction de quelques agents permette de faire l’économie d’une réflexion critique approfondie du fonctionnement de l’appareil policier dans les zones urbaines paupérisées. Cette réflexion, déjà nécessaire avant le confinement, n’en sera que plus indispensable à l’issue de la crise sanitaire.
    Violences systématisées, récits médiatisés

    La mise en place des mesures de confinement s’est accompagnée quasi immédiatement d’une suspicion d’indiscipline et d’incivisme à l’égard des habitants des quartiers populaires mêlant préjugés sociaux et raciaux. Tandis que se trouvaient mis en lumière les écarts produits par les inégalités sociales et économiques dans l’expérience du confinement, ce dernier n’a pourtant été ni plus ni moins respecté en banlieue qu’ailleurs, comme l’a reconnu le préfet de Seine-Saint-Denis lui-même.

    La gestion policière des quartiers populaires et de leurs habitants pendant la pandémie s’inscrit quant à elle dans la continuité de ce qui empoisonne la vie démocratique française depuis des décennies, sans équivalent dans les pays d’Europe occidentale. Modes d’intervention hasardeux, usage disproportionné de la force, affranchissement des règles de déontologie, surcontrôle, racisme : les faits sont trop nombreux pour qu’ils ne fassent pas « système ». D’autant que l’épidémie intervient après plusieurs mois d’une répression policière et judiciaire, sans précédent dans l’histoire récente, des mouvements sociaux des « Gilets jaunes » et de la contestation de la réforme des retraites.

    Si la dynamique des violences reste habituelle (contrôles, violences, racisme, réaction collective des jeunes habitants dirigée contre la police), l’évolution majeure durant ces dernières années tient avant tout à la médiatisation des images par le biais des réseaux sociaux : la violence sort ainsi des espaces marginalisés dans lesquelles elle s’exerce la plupart du temps et la police perd le monopole de leur mise en récit. Certes, un recul critique est nécessaire pour appréhender les images (à ce sujet, voir l’analyse d’André Gunthert). Mais ce bouleversement majeur du champ médiatique contribue au désenclavement des quartiers de banlieue par la mise en visibilité du scandale démocratique que constitue la récurrence des brutalités policières, des discriminations, des expressions décomplexées de racisme de la part d’agents de l’État, du déni politique dont elle fait l’objet et que les lois d’état d’urgence ne font que conforter.

    http://icmigrations.fr/2020/05/15/defacto-019-03

    #coronavirus #covid-19 #discriminations #pauvres #Jérémie_Gauthier #France

    ping @davduf

  • A Singapour, le traçage par app dégénère en surveillance de masse - Le Temps
    https://www.letemps.ch/economie/singapour-tracage-app-degenere-surveillance-masse

    En lançant le 20 mars son application, Singapour est l’un des premiers, si ce n’est le premier Etat – Chine mise à part – à lancer un programme de traçage du virus. Le programme TraceTogether, développé par l’Etat, est proposé de manière volontaire et anonyme. Il se base sur la technologie Bluetooth pour détecter si deux individus sont restés à proximité l’un de l’autre durant plus de quinze minutes. Singapour a lancé TraceTogether après avoir fermé partiellement ses frontières et imposé des mesures de quarantaine aux voyageurs.

    La suite sera beaucoup plus compliquée. De nombreux experts pensaient que les Singapouriens, réputés pour leur discipline, leur acceptation des règles et leur utilisation importante des technologies, allaient utiliser en masse TraceTogether. Il n’en est rien : un peu plus d’un million de personnes la téléchargent, soit environ 20% des 5,6 millions habitants de la cité-Etat. On est loin des 60% espérés, un taux jugé par de nombreux scientifiques comme nécessaire pour endiguer la propagation du virus.

    Mais le 21 avril, le premier ministre, Lee Hsien Loong, insiste : « Nous devons utiliser pleinement la technologie pour retracer le parcours des personnes infectées par le virus. » Fini la base volontaire. La cité-Etat annonce une mesure drastique : l’obligation de s’enregistrer lorsque l’on pénètre dans un bâtiment public, via le système SafeEntry. Depuis le 23 avril, les Singapouriens doivent scanner, avec leur smartphone, un code QR lorsqu’ils entrent et qu’ils sortent d’un tel bâtiment. Cette obligation sera étendue aux centres commerciaux et aux entreprises dès le 12 mai. Et le gouvernement veut aussi que les gares et les parcs soient équipés de tels lecteurs de codes QR.

    Ainsi, le système central obtiendra les coordonnées complètes – du nom au numéro de téléphone – des Singapouriens qui fréquentent ces lieux. SafeEntry diffère ainsi de TraceTogether sur deux points majeurs : d’abord, son caractère obligatoire, comme on vient de le voir – même si un haut responsable de la Santé vient de demander que TraceTogether devienne obligatoire. Ensuite, la qualité des données récoltées diffère : la première application lancée fonctionne de manière anonyme – ni le nom, ni la localisation des personnes n’étant révélés. SafeEntry ne semble pas avoir suscité, pour l’heure, de critiques.

    #Singapour #StopCovid #Traçage #Surveillance #Promesses_et_réalité

  • Corona Chroniques, #Jour57 - davduf.net
    http://www.davduf.net/corona-chroniques-jour57

    LUNDI 11 MAI 2020 - PREMIER JOUR (D’APRÈS)

    MATIN. Dans la rue, il y a du monde, mais pas tant que ça, ni tellement de joies ; même la moto cale par instant ; à l’approche de la butte Montmartre, c’est la Berezina : la vieille petite Harley est infoutue de semer la Passat de police, qui barre la route au plus imprenable travelling du monde — inaccessible quête, impossible de grimper sur le toit et d’admirer Paris qui se libère. Ce #déconfinement est une libération sous conditions et sous surveillance, brisée à peine décrétée. Dans cette drôle d’ambiance, à la fois retenue, à la fois relâchée, Anita trouve les mots justes, comme toujours : il n’y a pas de victoire.

    Rue Amélie Poulain, nous sommes projetés en arrière, dans l’Avant, et le pire. Aux murs des vieilles maisons et aux devantures des antiques boutiques, ils ont placardé des affiches de terreur, Ouvriers français : c’est la relève qui commence ! Finis les mauvais jours : papa gagne de l’argent en Allemagne ! Taisez-vous, méfiez-vous : parler sans discernement c’est nuire à la France ! Une commerçante ouvre sa porte, c’est une agence digitale, elle nous explique, toutes ces ombres jaunies, ces affiches déchirées, toutes ces couches d’Histoire plaquées sur les murs, c’est un décor de cinéma, un tournage fauché au jour 1 du confinement, abandonné depuis, on rit du télescopage (« nous sommes en guerre », #Emmanuel_Macron, 16 mars 2020) ; sur sa vitrine, elle a scotché le dernier numéro du Chat noir, publication locale qui renait (en Une : « La dénonciation à la française bientôt au patrimoine de l’Unesco ? Découvrez les coulisses du projet porté par le Préfet #Lallement »). Une touriste s’approche, armée d’un t-shirt d’aéroport :

    Reality
    Is
    Perfect
    (In Fiction)

    APRÈS-MIDI. Sur Twitter, nouvelle ère, nouvel arrivage de graffitis. Un premier : « Covid-19 : une mine d’ordre pour l’État ». Un autre : « Bienvenue dans l’immonde d’après ». Un troisième : « Réveillez vous (bordel de merde) ».

    Sur télé Pin-pon, #Alain_Duhamel réclame en direct que « la police agisse plus vite » contre ces jeunes qui apérotent en plein Paris, sur le pont d’Atmosphère Atmosphère. En incrustation sur l’écran, un mégaphone disperse les fêtards, des policiers moulinent de grands gestes, un à un les déconfinés s’exécutent, plus amusés que déroutés (les joyeux bobos ne savent pas qu’ils sont les piteux gogos d’un autre film, figurants en direct live, raison de toute cette mise en scène pathético-cathodique). Ailleurs, ce sont des manifestants (contre les violences policières ou pour une justice sociale, pour des gilets ou pour des masques) qu’on déloge déjà (le déconfinement serait-il un confinement qui ne dit pas son nom ?). Comme lance #Ruth_Elkrief : « Les jeunes pensent que c’est le retour à Avant. Non, ce n’est pas le retour à Avant ! » — et il faut bien protéger les vieux rescapés. Prodigieuse métaphore de cette crise de la quarantaine : elle a propulsé le vieux monde derrière lui-même.

    Dans mon quartier, l’incroyable se produit : la caissière du Carrefour Market est de retour. Elle avait disparu au début du Pendant (cf. Corona Chroniques, jour 16) sans qu’on sache bien pourquoi. Semaine après semaine, ses collègues rassuraient, sans trop rassurer, elle allait revenir, elle allait bien, jusqu’à ce que le temps ramollisse tout et qu’on arrête de demander de ses nouvelles. Malade, dit-elle, elle était malade, mais pas du virus, s’empresse-t-elle de rire, belle comme un communiqué officiel. A l’angle de la rue, Aurélien-le-boulanger est aussi de retour, le véritable Aurélien, l’Aurélien bout-en-train. Il lève ses poings en l’air, la Tradition ça a du bon, il pète la forme, il y a du monde, c’est re-ti-par comme en…

    Mais au moment d’encaisser, il baisse la voix :
    – Et vous, vous y croyez à la fin ?

    SOIR. Appel de G., 10 ans, fier et heureux comme jamais. C’est fait, finito, son serveur Minecraft est installé, il a construit ça tout seul, akoyo, un enfant pareil à tous les autres, tellement plus démerdard que tous ces amateurs qui nous gouvernent, G. a écrit « bienvenue » à destination des nouveaux inscrits ; et il a prévu un coffre de dons, pour les nouveaux joueurs. « Papounet : ça s’appelle un serveur de survie. »

    A minuit, dernier tour des dernières nouvelles (à Wuhan, dit-on, un dépistage massif de la population serait sur les rails, après la découverte de six nouveaux cas en deux jours ; et à Washington, la Maison Blanche pourrait être cluster). Songes de sommeil qui vient. « Si vous regardez les mythes, ils commencent tous par des crises terribles. Le mythe d’Œdipe, par exemple, commence par la peste, partout, qui fait mourir les hommes » (René Char). Du Corona, quelles légendes surgiront-elles ? Quel monde à venir ? Quels mythes à détruire ? Et si tout n’était que t-shirts sales et retournements plein d’avenir ?

    La #fiction
    Était
    Parfaite
    (Dans cette réalité)

    Moral du jour : 10/10
    Ravitaillement : 10/10
    Sortie : définitive ?

    ( fin )