Cour internationale de justice : l’enjeu du discours des droits humains dans les pays du sud
Une carte blanche de François Polet, sociologue, chargé d’étude au Centre tricontinental, dans Le Vif.
En demandant à Israël de tout faire pour « empêcher la commission de tous actes entrant dans le champ d’application » de la Convention sur le génocide, la Cour internationale de justice contribuera-t-elle à redonner du crédit au droit international des droits de l’homme et aux institutions qui l’incarnent ? Il importe d’avoir à l’esprit la défiance d’une bonne partie du Sud global vis-à-vis du discours des droits humains pour mesurer l’enjeu.
Pour rappel, l’imposition du registre des droits de l’homme dans les relations internationales est contemporaine de la fin de la guerre froide, durant laquelle tout ou presque était pardonné aux régimes de son propre camp (« He is a bastard but it is our bastard »). Comme Bertrand Badie l’avait bien mis en évidence au début des années 2000, cette rencontre entre la diplomatie et les droits de l’homme paraissait et paraît toujours contre-nature à bien des égards : d’un côté les États ont historiquement envisagé leurs relations externes sous le seul angle de la puissance, des intérêts, de la sécurité nationale, de l’autre les partisans des droits de l’homme raisonnent en termes de valeurs, d’universalité, de droits s’imposant à l’État souverain. Un soupçon entache donc le recours par les États au langage des droits de l’homme au-delà de leurs frontières – quelles sont donc les arrière-pensées géopolitiques de ces critiques, de ces sanctions, de ces interventions militaires déployées au nom des droits de la personne, de la femme, des minorités religieuses ou sexuelles ?
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