• Pénurie de main-d’œuvre oblige, des enfants de 11 ans sont déjà au travail au Québec Radio-Canada / Alexis Gacon
    https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1886852/travail-enfant-quebec-loi-convention-normes-adolescence

    Si certains jeunes s’épanouissent, d’autres voient leurs droits bafoués.

    Le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale dit ne pas disposer des données nécessaires pour établir un décompte des travailleurs âgés de 14 ans et moins.


    À la cantine La Grande Gueule, à Saint-Alphonse-de-Granby, sept employés sur 32 sont âgés de 11 à 15 ans. - Photo : Radio-Canada / Alexis Gacon

    Au Québec, un nombre croissant de préadolescents occupent des postes laissés vacants par la pénurie de main-d’œuvre, notamment dans les épiceries et dans le secteur de la restauration rapide. Face à ce nouveau contexte et compte tenu du risque de décrochage scolaire, plusieurs experts réclament des changements pour mieux encadrer le travail des enfants.

    “Qu’est-ce que vous souhaitez commander ?” C’est Amanda, 11 ans, une petite blonde aux yeux bleus pétillants, qui pose cette question. Sa tête dépasse à peine le comptoir.

    Amanda, c’est la petite nouvelle de la cantine La Grande Gueule, à Saint-Alphonse-de-Granby. Derrière elle, les friteuses fonctionnent à plein régime. Amanda travaille en cuisine entre 12 et 18 heures par semaine. Ici, près du quart des 32 employés sont âgés de 11 à 15 ans.

    Au départ, le patron d’Amanda, Pascal Lamarche, n’était pas sûr de pouvoir embaucher des employés si jeunes. “Des gens m’avaient dit : "As-tu le droit ?" J’ai eu un doute. [...] Mon comptable m’a envoyé l’information de la CNESST”
    “ : il n’y a pas d’âge !”

    Au Québec, contrairement à la plupart des provinces canadiennes, il n’existe pas d’âge minimum pour travailler. En Colombie-Britannique, par exemple, cet âge est passé de 12 à 16 ans l’an dernier. Mais ici, seule une autorisation parentale écrite doit être demandée par l’employeur si la jeune personne que celui-ci veut embaucher a moins de 14 ans. Or, plusieurs interlocuteurs à qui nous avons parlé soutiennent que les employeurs ne la demandent pas toujours.

    “Elle a été gérée comme une adulte”
    Dans la cuisine du restaurant, Amanda semble insensible à la pression. “Je sais ce que c’est que les rushs . Souvent, le midi ou à l’heure du souper, on a beaucoup de commandes […]. J’aime l’ambiance.” Pourquoi a-t-elle commencé si jeune ? “Parce que j’aime travailler et je trouvais que c’était une bonne place.”

    La jeune équipe semble en effet se serrer les coudes et travailler dans la bonne humeur. Il en faut, car les tâches ne sont pas si simples et le rythme est soutenu. “Le plus difficile, c’est de supporter la chaleur et de blanchir les frites. Si tu peux blanchir un après-midi par semaine, tu vas être capable de tout faire dans la cantine, parce que les paniers sont pesants et il fait chaud”, explique Pascal Lamarche.

    Au restaurant, Amanda est une employée comme les autres, dit son patron. “Pour l’instant, elle fait des journées de six heures, car je ne connais pas encore sa capacité à travailler. Ses parents me disent qu’elle serait capable de faire des journées pleines. On analyse ses points forts, ses points faibles, l’endurance qu’elle va avoir. […] Tant qu’elle veut travailler, on le fait !”

    Même si elle est très jeune, Amanda n’a pas reçu un encadrement adapté à son âge, détaille le propriétaire. Même constat chez Marianne, qui a commencé à 12 ans à servir dans un restaurant à Saint-Jean-sur-Richelieu l’année dernière : “On m’a montré les bases et on m’a dit : "vas-y !"”

    C’est elle qui a demandé à travailler, explique son père, Sylvain. “Elle a de bonnes notes, on sait qu’elle adore apprendre. Si les notes en pâtissent, elle arrête. Mais là, elles n’ont pas baissé.” Elle avoue sa joie de gagner en autonomie et d’apprendre de nouvelles choses. Elle a aussi appris à faire abstraction des remarques de certains clients qui n’hésitent pas à commenter son air juvénile ou sa taille. “Il y a un client qui m’a dit que la table était trop haute pour moi !”

    Cette expérience lui semble bénéfique, même si le stress peut la gagner, raconte son père, comme cette fois où elle a échappé un plateau en verre par terre. “Elle a pleuré. Le patron lui a dit : "Si tu pleures trop, tu t’en retournes à la maison !" Elle a été gérée comme une adulte, puis on l’a vue, elle a bien répondu, elle a essuyé ses larmes et […] elle y est retournée.”

    “Sans jeunes, je ne suis pas capable d’avancer”
    Dans son restaurant, Pascal Lamarche évoque le “fort potentiel” d’Amanda. Ce potentiel sied aussi à un contexte : celui de la pénurie de main-d’œuvre. Actuellement, le chômage est sous la barre des 4 % au Québec. “Sans les jeunes, je ne suis pas capable d’avancer, car les adultes qui veulent travailler les week-ends, c’est difficile à trouver maintenant”, explique le patron du restaurant.


    Roxane Larouche, représentante nationale aux TUAC, section du Québec - Photo : Radio-Canada / Alexis Gacon

    Roxane Larouche, représentante nationale au syndicat des Travailleurs unis de l’alimentation et du commerce (TUAC Canada), se rend bien compte que l’âge ne compte plus au moment de recruter dans le secteur de l’alimentation. “Notre plus jeune membre a 11 ans. Le représentant de service a été très surpris.”

    Elle observe que les jeunes adolescents sont de plus en plus nombreux à travailler dans les épiceries de la province. C’est une tendance que semble confirmer la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), qui a vu le nombre de blessures subies par des moins de 16 ans au travail plus que doubler entre 2018 et 2021, passant de 85 à 203.

    « On voit plus de jeunes, donc le risque de blessures existe et ça pose plein d’autres défis. C’est une toute nouvelle réalité. On pensait avoir des textes de conventions qui pouvaient répondre à toutes sortes de situations, mais force est de constater que non. […] Comment encadrer ces jeunes-là ? Il faut trouver des solutions maintenant, car le problème, c’est maintenant qu’il arrive ! […] On est dans une situation de jamais vu. »

    Cependant, le nombre de travailleurs de 14 ans et moins est difficile à mesurer. Le ministère du Travail du Québec ne fait pas le décompte de ces employés. En effet, le décompte, basé sur les informations de Statistique Canada, commence à l’âge de 15 ans.

    D’après l’Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2016-2017, 22 % des jeunes du secondaire avaient un employeur qui les rémunérait. Cette proportion passe de 6 % en première année du secondaire à 47 % en cinquième secondaire.

    “Est-ce que tu penses que l’école, ça va être son plan A ou D ?”
    Roxane Larouche s’inquiète du risque de décrochage quand elle observe la concurrence des entreprises qui s’arrachent les services des très jeunes, particulièrement à l’extérieur de Montréal.

    « Un employeur qui a engagé un jeune d’environ 12 ou 13 ans se l’est fait voler par la scierie qui l’a embauché pour balayer à 26 dollars de l’heure. […] La question qu’on se pose, c’est : est-ce qu’on a ouvert la voie à un décrochage ? [...] Ces questions doivent être analysées, car c’est un problème de société. »
    Une citation de Roxane Larouche, représentante nationale au syndicat des Travailleurs unis de l’alimentation et du commerce

    Mme Larouche fait observer que certains parents envoient leur enfant travailler dans une épicerie comme si c’était “un camp de jour” qui ne “coûte rien”.

    À l’école Amos, à Montréal, l’enseignante Marie-Betty Desrouillères questionne ses élèves, âgés de 16 à 20 ans, sur le sujet du travail des jeunes. Beaucoup sont entrés sur le marché du travail dès le début de leur adolescence.

    “Le jeune qui commence à travailler à 11 ans […], est-ce que tu penses que l’école, ça va être son plan A ou D ?” Un des élèves s’exclame : “Son plan C !”

    Parmi ceux qui l’écoutent, certains travaillent de nuit et arrivent en classe sans avoir dormi, comme Assitan, 19 ans, tressée et cernée. Elle occupe un emploi depuis déjà six ans.

    Ces jours-ci, elle finit son quart dans un dépanneur à 7 h, puis elle marche une demi-heure pour se rendre à l’école. Elle n’a pas commencé à travailler par choix ; elle l’a fait pour aider sa mère. “On est quatre enfants, elle est toute seule. Il y a des choses à acheter, mais elle n’a pas assez [d’argent].”

    Au Québec, jusqu’à l’âge de 16 ans, les employeurs doivent veiller à ce que l’école passe avant le travail. Ils ne peuvent pas demander à leurs employés de manquer l’école pour travailler et doivent s’assurer que les jeunes puissent être à leur domicile de 23 h à 6 h, sauf quelques exceptions (le gardiennage, notamment).

    Toutefois, Assitan, depuis qu’elle a commencé à travailler, n’a pas souvent senti beaucoup de compréhension de la part de ses différents patrons. “Les employeurs vont te manipuler. Ils vont te faire sentir à l’aise. Il n’y avait pas un jour où mon téléphone ne sonnait pas. Ils vont dire "on t’aime" juste pour que tu fasses plus d’heures.”

    Jemima, une autre élève de l’école Amos, travaille depuis ses 14 ans et déplore le manque de considération des gérants d’établissements de restauration rapide où elle a été employée. “Tout ce qui est fast food, les boss ne sont pas compréhensifs. Moi, quand je disais que je ne pouvais pas rentrer au travail et que je devais étudier, ils me coupaient tous mes autres quarts. Je n’avais pas de quarts la semaine suivante.”

    “On ne peut pas laisser aux enfants la responsabilité de leur propre bien-être”
    Selon Sarah Denenne, une avocate spécialisée en droits des enfants, il est temps que le Québec revoie sa copie dans le domaine. “Il doit y avoir place à une réforme. Là, en ce moment, l’état du droit actuel, c’est qu’on doit déléguer la responsabilité de la protection au bon jugement de l’employeur et de l’enfant lui-même. [...] Dans la loi, il est écrit qu’il ne doit pas avoir un travail disproportionné qui nuise à son développement ; c’est très vague. Et ça, c’est une chose à laquelle il faut s’attaquer.”

    Le Québec est lié à la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant, ratifiée par le Canada en 1991. Celle-ci stipule qu’il faut fixer un âge minimum pour travailler https://www.ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/convention-rights-child. Selon Sarah Dennene, le Québec est en retard sur cette question.
    « On est dans un système pensé pour l’adulte et l’enfant a des besoins spécifiques : il faut protéger le développement spécifique de l’enfant. Qu’est-ce qui va être dans son intérêt ? Dans le contexte actuel, est-ce que l’impératif économique ne va pas prendre le dessus sur la protection de l’enfant ? […] On ne peut pas laisser aux enfants la responsabilité de leur propre bien être. […] Ils ne peuvent pas tenir tête à leurs employeurs. Plus on est jeune, plus c’est difficile. »
    Une citation de Sarah Denenne, avocate spécialisée en droits des enfants

    D’après l’Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2016-2017 https://statistique.quebec.ca/fr/fichier/enquete-quebecoise-sur-la-sante-des-jeunes-du-secondaire-2016-201 , parmi les élèves qui occupent un emploi durant l’année scolaire, ceux qui travaillent de 11 à 15 heures par semaine ou 16 heures et plus étaient proportionnellement plus nombreux à présenter un niveau élevé de détresse psychologique que ceux qui consacraient moins de 11 heures par semaine à leur emploi (34 % et 37 % contre 29 %).

    Le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale a décliné nos demandes d’entrevue. Dans un courriel, les communications du ministère soutiennent que les lois du travail au Québec encadrent déjà le travail des adolescents.

    #enfants #travail #exploitation #enfance #inégalités #Quebec #droits_des_enfants #préadolescents #préadolescentes #statistiques

  • Trafic de déchets : comment de fausses sociétés de tri gèrent l’un des filons les plus juteux du grand banditisme français franceinfo - Stéphane Pair
    https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-choix-franceinfo/trafic-de-dechets-comment-de-fausses-societes-de-tri-gerent-l-un-des-fi

    Un peu partout en France, des communes voient apparaître de monstrueuses décharges à ciel ouvert ou cachées dans des hangars. Ces déchets ne seront jamais recyclés mais ils enrichissent par millions des escrocs particulièrement prudents. 

    Sur les hauteurs de la ville de Saint-Chamas, dans les Bouches-du-Rhône, dans ce qu’il reste de la société de tri Recyclage Concept 13, 30 000 mètres cubes de plastiques, de matériaux BTP à moitié calcinés, sont entassés là, en toute illégalité. C’est trente fois plus que ce qui était autorisé à cet endroit. 

    Cette montagne de déchets a partiellement brûlé en décembre dernier pendant près d’un mois https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/incendie/saint-chamas-depuis-un-mois-un-incendie-dans-un-centre-de-dechets-empoi , avec, au passage, une pollution mesurée par Atmosud équivalente à celle de Pékin les mauvais jours. Cet incendie a eu lieu juste avant un contrôle de conformité et les registres ont brûlé. Le patron de cette société vient d’être mis en examen pour trafic de déchets.

    https://www.francetvinfo.fr/pictures/8EJFENp2gaq0kWzbPNZCzkx2iqU/0x2:1023x576/944x531/filters:format(webp)/2022/05/25/php2v6J2E.jpg
    La montage de déchets de Saint-Chamas, dans les Bouches-du-Rhône, en mai 2022. (STEPHANE PAIR / FRANCEINFO)

    Fabrice et Isabelle, un couple de voisins, a vu monter chaque jour cette montagne au fil des rotations des camions bennes. « Les déchets arrivaient et ça se remplissait toujours plus... Une fois que le bâtiment était plein, des déchets se retrouvaient à l’extérieur. Cela faisait plus penser à une énorme poubelle qu’à une usine de traitement », décrit Fabrice. « Fatalement, nous sommes en colère car ce n’est pas la seule. Il y en a eu un peu partout, jamais sous le même nom, mais on se doute bien que ça vient de la même mafia » , poursuit Isabelle. 

    La réalité, c’est que ce trafic en bande organisée imite totalement les méthodes de la mafia, raconte Jean Sansonne, qui dirige Sos Corruption dans les Bouches-du-Rhône :  "La camorra napolitaine contrôle le trafic de déchets avec des trains complets de déchets qui arrivent de toute l’Europe, en particulier de l’Europe du Nord. C’est documenté par des enquêtes des carabiniers italiens. Or depuis trois ans dans la région de Naples, s’est développé l’incendie de dépôts de déchets à recycler. Or chez nous en France on constate que les incendies de déchetterie se multiplient également. Ici à Saint Chamas mais aussi tout récemment à Saint-Martin-de-Crau et dans d’autres communes du Sud-Est. Tout porte à croire qu’il s’agit d’une procédure qui est copiée sur celle des mafias napolitaines."

    Des millions d’euros de surfacturations et des sociétés complices
     Comment ces escrocs génèrent-ils de l’argent ? Ils créent une société avec un capital dérisoire. Ils se déclarent comme trieur-recycleur, respectent en apparence la réglementation sur les déchets dits non polluants et facturent à prix cassé – moins de 180 euros la tonne – la levée et le faux recyclage des déchets industriels pour les enterrer ou s’en débarrasser parfois à l’international. Ce sont alors des millions d’euros à la clé qui s’évaporent avec des montages plus ou moins complexes de surfacturations via des sociétés complices.

    Richard Hardouin, le président de France Nature Environnement dans les Bouches-du-Rhône (FNE 13), décrit le système : « On ne crée pas une société de recyclage avec un capital de 7 500 euros. Lorsqu’une entreprise dit faire du recyclage en louant un simple hangar, sans avoir de réceptacle pour gérer les eaux usées, et que cette entreprise change de nom tous les deux ans, la conclusion s’impose d’elle-même. » Richard Hardouin travaille avec des élus locaux à une proposition de loi pour mieux contrôler les installations de stockage de déchets dits non dangereux.

    De son côté, le maire de Saint-Chamas nous a révélé avoir été menacé. Didier Khelfa n’en avait jamais parlé avant. Pousser à la mise en conformité de la société qui a pollué sa commune lui a valu des pressions directes. 

    « Cela m’a valu quelques menaces. J’ai été suivi, j’ai été intimidé. Est-ce que c’est la mafia ? Je ne sais pas, je n’ai jamais été confronté à elle auparavant. » 
    Didier Khelfa, maire de Saint-Chamas à franceinfo

    Il raconte avoir rencontré à deux reprises les exploitants de l’entreprise : « La première fois, j’ai rencontré une jeune femme me disant qu’elle était en autoentreprise et qu’elle était gérante du site. Quelques mois après, elle est revenue avec son père, assurant ne m’avoir jamais dit ça en expliquant que c’est son père qui était le gérant. Ces gens-là sont au mieux, des irresponsables, au pire des voyous et des criminels contre l’environnement. » 

    Les déchets, deuxième source de revenus du banditisme en Europe
    Du côté de la gendarmerie nationale, c‘est l’OCLAESP, l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique, qui surveille et chasse ces escrocs. L’entreprise Recyclage Concept 13 de Saint Chamas faisait partie de ses cibles lors du dernier coup de filet réalisé contre ce milieu. Début mai, sous la direction de la JIRS de Marseille, une juridiction spécialisée, une opération a mis sous les verrous deux pointures présumées de ce trafic dont une figure du banditisme régional, le Gardois Richard Perez surnommé « le roi des poubelles ». Il aurait livré plus de 6 000 tonnes de déchets à Saint-Chamas. Dans cette opération dont l’instruction est toujours en cours, trois autres escrocs présumés et six sociétés ont été mis en examen pour le transport, l’exploitation irrégulière et l’incendie de déchetteries.

    Le trafic international de déchets est la deuxième source de revenus du banditisme en Europe, après la drogue. « Les groupes criminels qui sont impliqués dans les trafics de déchets utilisent les modes opératoires du banditisme, assure le patron de l’OCLAESP, Sylvain Noyau. Des téléphones anonymisés, des messageries cryptées, des détecteurs de balises, l’utilisation de fausse documentation, la corruption... De notre côté, nous utilisons absolument les mêmes techniques que celles que nous utilisons contre le banditisme traditionnel, avec des infiltrations des réseaux ou des mises en place de micros dans les espaces privés. »

     #déchets #poubelles #décharges #pollution #recyclage #environnement #écologie #plastique #france #santé #pollutions #eau #mafia #corruption #violence #mafia_du_co2 #déchetterie #banditisme #trafics #voyous

  • La cité côté jardin - Agnès Stienne - Visionscarto
    https://visionscarto.net/la-cite-cote-jardin

    Selon l’indicateur du WWF, le 5 mai 2022 est, pour la France, le Jour du dépassement, ce qui signifie que le pays a consommé en quatre mois les ressources naturelles qu’il génère en une année. Pendant ce temps, le changement climatique pèse de plus en plus sur nos existences, la sécheresse sévit, les campagnes ont soif. Deux situations pour une même cause : des politiques libérales qui mènent à l’épuisement de la Terre. Dans un exercice très personnel et subjectif, l’autrice montre en sept cartes comment des systèmes politiques peuvent façonner les paysages.

  • Duval Philippe
    @p_duval 7 févr. 2022
    https://twitter.com/p_duval/status/1490598163102810112

    Comme promis l’intégrale de la saison 1 « McKinsey, ton univers impitoyable »

    Je vous présente un nouvel ami Aamir Malik, vice président de Pfizer et ancien collègue de Victor chez McKinsey.

    Mais que va décider le conseil constitutionnel...
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    Hier je vous ai présenté le vice président de Pfizer, anciennement McKinsey.

    Aujourd’hui mon nouvel ami est Stephen Hoge. Le président de Moderna. Et devinez où il travaillait avant ?
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    Dans la famille McKinsey, je demande la fille !

    Marguerite Cazeneuve, directrice de l’assurance maladie, fille de la dirco du laboratoire Lilly (anticorps monoclonaux) et d’un député LREM, femme d’Aurélien Rousseau, membre du conseil d’état, ex directeur ARS Ile de France.
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    L’argument ultime contre ceux qui posent des questions : « Non mais le COVID c’est mondial ! »
    Alors aujourd’hui on voyage.. direction l’Afrique du Sud, berceau d’Omicron,à la rencontre de Boitumelo Semete-Makokotlela, directrice de l’agence du médicament du pays et ex McKinsey
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    Intéressons nous à Maël de Calan. Maël c’est le meilleur poto d’Alain, membre du conseil constitutionnel.
    Alain a tout fait pour que Maël devienne président des LR, sans succès.
    Alors Maël a trouvé du boulot chez McKinsey d’où il a pu aider Olivier à organiser la vaccination
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    David von der Leyen aime bien jouer sur son mobile mais ca énerve sa maman Ursula."Va bosser chez McKinsey !Je les connais bien,je leur ai donné des millions d’argent public"
    En 2019 Ursula sera viré de son ministère après le scandale Ophoz/McKinsey et rejoindra la commission
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    Ian E. L. Davis est le patriarche chez McKinsey 31 ans ! Il terminera directeur général.
    Une retraite bien méritée ?Non il deviendra directeur non exécutif de Johnson & Johnson (vaccin Janssen).
    Ses collègues chez McKinsey ?le vice président de Pfizer et le président de Moderna
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    Karim Tadjeddine c’est le directeur le plus généreux.
    En 2016,Manu,un petit jeune souhaite devenir Président de la République.Karim et quelques consultants McKinsey se mettront à sa disposition avec les moyens de l’entreprise pour rédiger le programme. Et tout ca bénévolement
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    Thierry Lambert,c’est le délégué interministériel qui passe des millions d’€ de commande auprès des cabinets de conseil dont McKinsey.
    Quelle ne fut pas sa surprise de découvrir que son fils a fait un stage cet été chez McKinsey puis a été embauché dès le mois de septembre
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    Alors Macron et Pécresse cela n’a rien à voir, mais alors rien à voir !

    Manu pour mener sa campagne, il a choisi Paul Midy, un ex McKinsey, alors que Valoche elle, elle a choisi Alexandra Dublanche une ex McKinsey.
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    Bernard Arnault,3ème fortune du monde, rejoindra McKinsey comme stagiaire après ses études où il fera la rencontre de Laurent Fabius, stagiaire également.
    C’est une tradition dans la famille Arnault le passage obligé des enfants chez McKinsey : Alexandre, Delphine, Frédéric 11/n Image

    Mathieu Maucort, avec ses collègues de McKinsey Karim et Paul vont s’investir à fond dans En Marche et la campagne de Macron.
    Mathieu sera responsable « argumentaire ».
    Une fois la mission remplie, Manu ne sera pas ingrat. Mathieu deviendra directeur de cabinet de M. Mahjoubi
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    Entre 1999 et 2018,scandale de l’OxyContin aux US. 500000 américains sont morts des suites d’un usage abusif. McKinsey conseillait les labos. Il faut exfiltrer le DG Dominique Barton. J. Trudeau lui donne un passeport diplomatique en le nommant ambassadeur du Canada en Chine
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    La fondation B. Gates, il faut s’imaginer une armée de consultants en costume cravate, lobbyistes dans les lieux de pouvoir. Entre 2006 et 2017 la fondation a dépensé 184 M de $ de consultants McKinsey. Bill sera même témoin de moralité lors du procès de Rajat Gupta ex DG.
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    É.Labaye c’est le visiteur du soir du futur président Macron au sein de la commission Attali. 2018 il sera nommé par l’Etat président de polytechnique,ce qui provoquera la colère de l’école. 1ère nomination d’un président n’ayant jamais pratiqué de recherche ou d’ingénierie
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    « L’État en mode start-up » : Le livre programme préfacé par E. Macron a été copublié en 2016 par Thomas Cazenave.
    Le directeur de McKinsey, K. Tadjeddine, participera à l’écriture.
    Thomas deviendra ensuite en charge des commandes de l’Etat auprès des cabinets de conseil.
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    En 2008, Douste-Blazy lance depuis l’ONU avec l’aide de McKinsey un programme humanitaire de micro-contributions, MassiveGood. Objectif,lever 1 milliards de $. Echec, ils récolteront 14000€ ! Malgré cela, McKinsey exige d’être payé.
    Cout total pour le contribuable
    12 M $
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    Toutes les semaines la DREES nous donne les chiffres du COVID. C’est la Direction de la recherche,des études, de l’évaluation et des statistiques.
    Leur boulot, faire des études. Mais pourquoi en 2021 ne pas commander à McKinsey une étude sur leurs études ? Facture 500 000€.
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    Saison 2 !
    En 2007, Sarkozy lance une grande réforme, la RGPP. Éric Woerth, ministre du budget fait appel à François-Daniel Migeon qu’il débauche de McKinsey.

    Le cabinet McKinsey sera retenu pour accompagner la réforme avec Accenture. Coût de la prestation 39 millions € 19/n. Image

    En 2018, Macron lance la « Tech For Good ». Il faut MORALISER les géants du digital.
    Et quoi de mieux quand on parle de morale, que de confier l’organisation et la réflexion à 4 directeurs seniors de McKinsey. Autant dire, les Beatles des consultants. Kevin,Pal,Homayoun, Eric.
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    Arthur et Guillaume, 2 anciens collègues de McKinsey décident de se lancer dans un business d’organisation de campagne. Il dirigeront la campagne de Hollande en 2012 puis la « grande marche » de Macron en 2016. Désormais ils aident le privé à obtenir des marchés publics.
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    En 2015, l’Arabie Saoudite commande à McKinsey un rapport sur la perception du peuple face aux mesures d’austérité. Le rapport identifie 3 comptes twitter d’opposants.
    Le régime saoudien se servira de ce rapport pour faire arrêter 2 des opposants ainsi que leur famille.
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    L’Amérique voit toujours plus grand. On compte pas moins d’une vingtaine de McKinsey ou d’ex McKinsey dans l’administration Biden ou son équipe de campagne.
    Nous ne sommes que des petits joueurs en France.
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    En 2018,The New York Times révèle que McKinsey a été payé pour redorer l’image d’un candidat présidentiel ukrainienne en disgrâce,Viktor F. Ianoukovitch.
    Ce dernier, pro Russe, détournera des centaines de millions de dollars, ce qui déclenchera des années de chaos en Ukraine
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    Connaissez vous Oleksandr Danylyuk ? C’est lui à côté du président Ukrainien Zelenskiy.

    Mais que faisait il avant de devenir Secrétaire du conseil national de sécurité ukrainien puis ministre des finances ?

    Ancien directeur de McKinsey. 25/n Image
    En Italie,M Draghi fait appel à McKinsey pour le conseiller sur l’utilisation des fonds européens. McKinsey propose de le faire bénévolement !?
    Mais comment est ce possible et pourquoi ?Finalement ce sera 25000€.Vittorio Colao ministre de l’innovation italien est ex McKinsey
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    En septembre 2013, Lazar Krstić est nommé ministre des finances de la Serbie.
    Ce gouvernement nommera le même mois Dominique Strauss Kahn comme conseiller économique.
    Ils proposeront une diminution de 20% des retraites et des salaires.
    L. Krstić est un ex associé McKinsey.
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  • Rencontres #anti-olympiques internationales | Terrestres
    https://www.terrestres.org/2022/02/14/rencontres-anti-olympiques-internationales

    À maintes reprises, sous la bannière de l’accueil des Jeux Olympiques, nous voyons la destruction de l’espace public, la destruction des espaces verts, la destruction des maisons, la destruction de la communauté.

    Des camarades du monde entier viendront à Paris parce que notre indignation est trop lourde à porter seul·es dans chaque ville. Certain·es d’entre nous ont perdu leur maison, leurs moyens de subsistance, leur communauté, leurs droits. Nous nous réunissons à Paris parce que nous avons besoin d’écouter l’expérience des autres pour être mieux armé·es pour l’avenir. Le Comité international olympique (CIO) et les promoteurs de l’olympisme sont organisés à un niveau international, il nous incombe donc de faire de même pour les arrêter. La stratégie habituelle de la classe capitaliste est de nous isoler dans nos luttes et de nous convaincre de nous battre seul·es. Nous savons que la plus grande menace pour eux est lorsque nous choisissons de nous battre les un·es aux côtés des autres. Quelle machine pouvons-nous construire ensemble qui résistera aux Jeux Olympiques de manière significative et puissante, non seulement dans chaque ville mais aussi en faisant bloc ?

  • “Vous aurez cet enfant à vos risques et périls’’ : grossesses en prison, la double peine | Eva-Luna Tholance
    https://www.neonmag.fr/enquete-vous-aurez-cet-enfant-a-vos-risques-et-perils-grossesses-en-prison-l

    Du test positif aux premiers mois du bébé, vivre une grossesse en prison est ressenti par les personnes incarcérées comme un parcours du combattant extrêmement violent pour elles. Enquête sur ce qui est souvent vécu comme une double peine. Source : Neon

  • Okuda Hiroko, la Japonaise qui se cache derrière la création du rythme révolutionnaire du reggae « Sleng Teng »
    https://www.nippon.com/fr/japan-topics/g02027

    Au milieu des années 1980, le Sleng Teng fut qualifié de « monster riddim » pour avoir amené le Reggae à effectuer sa révolution électronique. À l’origine de ce morceau à l’immense succès, un clavier électronique Casio et une Japonaise, Okuda Hiroko. Nous l’avons retrouvée, et voici notre entretien avec la créatrice de cette séquence musicale mythique.


    #reggae #casio #riddim

  • Dans l’armée française, un imaginaire colonial omniprésent | Rémi Carayol
    https://afriquexxi.info/article4906.html

    Des militaires français qui ont combattu au Sahel ces dernières années ont couché par écrit ce qu’ils ont vécu sur le terrain. Cette guerre, la plupart d’entre eux la décrivent avec les mots de soldats biberonnés depuis leur enfance aux « exploits » de la conquête coloniale. Au-delà de leur expérience personnelle, ces témoignages mettent en lumière le poids de l’héritage colonial au sein de l’armée française. Source : Afrique XXI

  • Fauteuils roulants : la réforme qui fait reculer les droits des personnes handicapées - Faire Face - Toute l’actualité du handicap
    https://www.faire-face.fr/2021/10/28/fauteuils-roulants-reforme-fait-reculer-droits-handicapees

    Un projet de décret remet en cause certains principes fondamentaux de prise en charge des fauteuils roulants par la Sécurité sociale. Le texte obligerait les assurés à rendre leur ancien modèle. Ils devraient attendre cinq ans avant tout renouvellement. Entre autres…

    • On est en plein dans le management - Unternehmensführung tel que le décrit Chapoutot.
      Et non seulement c’est une proposition de loi complétement d’inspiration nazie, mais en plus c’est littéralement du vol et du racket en bande organisé :

      Vous n’avez plus besoin de votre fauteuil ? Parce que vous allez en changer ou que vos besoins ont évolué. Dès lors qu’il a été financé, même partiellement, par l’Assurance maladie, vous devrez alors le restituer à un centre homologué. « L’assuré signe un engagement de restitution lors de l’achat de son véhicule », précise même le texte.

      « Je ne vois pas pourquoi je devrais rendre un fauteuil roulant que j’ai acheté avec 20 % de prise en charge Assurance maladie et la participation de ma mutuelle (à laquelle je cotise) et un apport personnel important », témoigne cet utilisateur, cité par APF France handicap. De plus, de nombreuses personnes utilisent leur ancien fauteuil en appoint. Ou pour avoir une solution de repli en cas de panne.

    • C’est pas une proposition de loi en fait c’est un décret qui sera assurément voté par les marcheurs blancs.

      Le ministre de l’économie, des finances et de la relance (Bruno Le Maire) et le ministre des solidarités et de la santé (Olivier Véran) font connaître leur intention dans le titre I et IV de la liste des produits et prestations prévue à l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale :
      1) De remplacer à compter du 1er juillet 2022, le « Titre IV. - Véhicules pour handicapés physiques » relatif à la prise en charge des véhicules pour personnes en situation de handicap (VPH) comme suit :

      https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044092439

  • L’appel de la cagette - Agnès Stienne - Visionscarto
    https://visionscarto.net/l-appel-de-la-cagette

    Et moi je regardais les cagettes. Avec soudain un regard nouveau. Quelle industrie peut bien se cacher derrière cet emballage anodin qu’on jette d’un geste négligé ou que l’on brûle après un unique usage ? Et les palettes ? Et les allumettes ?

    J’allais faire de ces cagettes, si pratiques mais si maltraitées, des boîtes précieuses enrichies de graines récoltées à l’automne dernier, des écrins, des œuvres d’art. Puis vint le temps de se pencher sur leur production.

    #peuplier #arbre #recyclage #emballage #écologie #environnement #art #cagette_qui_en_jette :)

  • « Le Jeu de la dame » : Netflix a imaginé une femme championne d’échecs, l’URSS en comptait des dizaines | Sopiko Japaridze
    https://www.contretemps.eu/jeu-dame-netflix-urss-echecs-socialisme

    La grande championne d’échecs soviétique Nona Gaprindashvili a annoncé qu’elle poursuivait Netflix pour avoir déprécié ses exploits dans Le Jeu de la Dame (The Queen’s Gambit). Sa carrière prouve que nous n’avons pas besoin d’histoires fictives d’ascension sociale individuelle mais de programmes sociaux pour nous permettre de nous accomplir. Source : Contretemps

  • Chaque jour cent fleurs | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/marie-cosnay/blog/220721/chaque-jour-cent-fleurs

    Merci à Marie Cosnay pour ce très beau texte d’amitié avec Philippe Aigrain, ses combats et sa volonté.

    Philippe Aigrain (15 juillet 1949-11 juillet 2021). D’Interdemos, de peuple à peuple, à Lucrèce, en passant par #JALE, J’accueille l’étranger. Notre chagrin immense.

    L’ordinateur restait fermé. Impossible de faire autrement. Quand je pourrais, j’irais y chercher, pour continuer la conversation avec lui, les documents rédigés avec Philippe Aigrain. Ceux en attente, sur Framapad. Déjà anciens, dont nous n’avions rien fait de précis, où nous prolongions la réflexion : peut-être, rétrospectivement, dans cette mise en attente, verrons-nous la preuve que la machine à maltraiter, comme l’écrivait Philippe dans un de ses billets de blog sur Mediapart, nous n’avons pas su l’enrayer à temps. C’est ce que nous pensions, ces derniers mois. Sans que le découragement nous empêche de faire, de faire autrement, là où nous étions, auprès des jeunes gens que nous connaissions, suivant leurs parcours, nous réjouissant de leurs succès.

    Dans ce billet de blog que je cite, à plusieurs titres Philippe est visionnaire. Il l’a écrit il y a trois ans. En juin 2018. Quelque temps après que nous eûmes lancé, avec Mireille, Jane, Louise, tant d’autres, le collectif JALE, qui nous avait donné l’espoir d’affirmer ce qui disparaissait, tranquillement mais sûrement, des discours publics. Bien avant la crise sanitaire et la fermeture des frontières nationales à l’intérieur de l’espace Schengen. Pragmatique, Philippe cherchait où les possibilités de soulèvement étaient possibles. Il partait de l’ahurissant règlement Dublin III, de l’imposition faite aux demandeurs d’asile de rester dans les premiers pays d’arrivée, et de ce corollaire : l’impossibilité de passer les frontières intérieures quand on n’était pas un ressortissant de l’espace Schengen, alors que la liberté de circulation était au coeur de l’idée européenne. Ici, une possibilité de soulèvement. Du corps et de l’esprit, écrivait Philippe. Bien sûr, c’était une étape, visant à nous réunir, nous rassembler, afin que nous construisions un mouvement fort capable de « réinstaller dans les textes juridiques et dans les faits les droits à l’accueil des étrangers, de tous ceux qui pour ceux qui, poussés par les circonstances, recherchent légitimement une protection dans l’Union ». Il n’était pas question, Philippe l’explique très clairement, et nous en avions parlé, des heures, avenue Ledru Rollin, il n’était pas question de ne regarder que ce qui se passait à l’intérieur de l’UE, pas question de justifier l’externalisation des frontières, les accords avec les pays de départ, tout ce qui permettait exploitations et tortures des personnes en déplacement. Mais il nous fallait partir de ce point ahurissant de transformation de l’idée européenne. On ne pouvait qu’être suivis.

    Trois ans plus tard, Philippe, les frontières Schengen étaient fermées pour tout le monde. Nous avions, au téléphone, en 2020, plaisanté quelques fois, pour supporter l’insupportable : seuls les gens qui n’ont pas de papiers, pas de titres de séjour, pas de visa, passent nos frontières condamnées. Ce n’était pas complètement vrai, nous le savions tous les deux. Récemment, je te l’avais dit, Yaya Karamoko, jeune homme ivoirien de 28 ans, avait traversé la Bidassoa, à Irun, et s’y était noyé. Je n’ai pas eu le temps de te raconter la suite.

    Ce que je ne t’ai pas dit pèse lourd.

    Je t’ai dit que l’attentat de Nice, par un jeune homme passé par Lampedusa, a été suivi, directement, immédiatement, alors même que les îles Canaries, espagnoles, s’ouvraient, résistaient à l’Europe, par cette annonce : on garderait, virus ou pas, les frontières fermées, et à Irun des unités mobiles arrivaient, gardant chacun des ponts et chacun des abri bus menant à Bayonne et vers le nord. Les gendarmes et policiers ramenaient en Espagne, de l’autre côté de la frontière, les personnes contrôlées en fonction de la couleur de leur peau. Je te l’ai dit ? Je te l’ai dit. Parlant au téléphone, longeant l’Adour, pendant l’heure de sortie de confinement. Tu étais à Argelès. Tu marchais, et jardinais, et écrivais.

    Nous choisissions de parler de Lucrèce, dont tu lisais ma traduction, tu te demandais comment concilier cette nature des choses, où chaque chose choisissait son lieu (et puis ça recommençait, en une pluie d’atomes), avec le sentiment d’impermanence, de flux des formes, de passage d’une espèce à une autre, que tu relisais chez Ovide.

    Ce qui n’était pas très loin de nos autres questions.
    Ce qui serait tout près de la mienne, ce 11 juillet 2021 : Philippe, mais où es-tu donc passé ?

    Comment allons-nous faire, maintenant ?

    11 juillet 2021, c’est le moment où je fais tout, et j’ai hâte de te le raconter, avec le président de la communauté musulmane d’Irun, pour tenter, malgré les nombreux obstacles, d’enterrer Yaya Karamoko. Je veux te dire : comme on traite les vivants, on maltraite les morts. Je veux te dire : tu te souviens de ce que tu disais de l’invisibilité ? Je veux te dire : faire pour un, au cas par cas. Jusqu’au bout. C’est au moment où les corps de plus de cent personnes sans papiers s’exposent, en grève de la faim, pour obtenir de la Belgique la seule réponse possible, la régularisation (nous travaillons ici, nous vivons ici, nous restons ici, et il n’y a pas de raisons pour que nous y restions esclaves), c’est à ce moment que j’apprends, le dimanche dans l’après midi, que tu as trébuché sur une pierre, dans la montagne que tu aimes. Je veux absolument donner du sens à la pierre, celle d’achoppement, je sais que c’est inutile et que ça fourvoie, je relis ce que tu m’avais dit être seulement capable d’écrire en ces moments, le carnet de confinement en Angleterre, auprès de tes enfants et petits enfants, comme tout y est précis et intelligent, je veux donner du sens, je veux chercher du sens, pour ce faire c’est à toi que je veux parler, à toi. Je te dirai cette conjonction : toi, la pierre, la montagne, la Belgique, les corps soulevés, exposés, le corps en jeu, jusqu’au bout, le corps disparu, même après la mort, on ne ne peut pas enterrer Yaya, toi, la pierre, la montagne.

    Je veux te le dire, à toi.

    Sur un de nos documents Framapad, où nous faisions des projets, des plans, tu écrivais, en une sorte de petit encart : « le monde que nous croyions encore nôtre bascule dans un autre qui ne nous laisse que le choix entre pleurer et nous soulever, et qui semble nous avoir privés de tous les instruments d’un soulèvement ». Tu le disais en vrai.

    Pleurer ou nous soulever.

    Tu nous laisses pleurer.

    Je voulais t’offrir bientôt Des îles, à paraître, texte auquel tu avais participé, en quelque sorte : tu l’avais lu, tu avais commenté, tu savais ce que j’y avais développé. Quand j’étais revenue de Lesbos, fatiguée, tu étais à l’aéroport, m’attendant, personne encore n’était masqué - je sais exactement ce qu’avec Mireille, le soir, à table, nous racontions, le camp de Moria, la honte de l’Europe, notre défaite, les résistances malgré tout, et cette maladie qui semblait ne pas vouloir rester en Chine, qu’est-ce que cela allait donner, tu développerais, après, sur ton autre blog, de débats, des analyses qui m’ont guidée plus que toutes les autres.

    Notre découragement, qui n’empêchait pas de faire pour un, un autre, encore ceci, ici, là, qui empêchait pas de penser, je le lis dans notre long document Framapad. Notre tristesse, je dirais. Que Lucrèce, ses atomes en constructions, le monde entier, nous a donné de consoler un peu. « L’immense tristesse et la révolte encore impuissante qui a saisi tant d’entre nous ces dernières semaines vient de la révélation que la corruption des systèmes politiques et l’incapacité où ils sont de traiter les défis écologiques, sociaux et culturels de notre époque est telle qu’ils ne reculeront devant rien pour agiter les peurs, créer des ennemis à combattre et maltraiter ceux qui sont ainsi dépouillés de leurs droits humains élémentaires. ».

    Voilà, tu le savais, Philippe. Et tu avais raison.

    Tu m’écrivais, à propos de Lucrèce : « (…) Ce n’est pas que l’idée même de métamorphose soit étrangère à Lucrèce. Il écrit ainsi, en proposant une définition de la vie comme commun (Livre III, 989-998, trad. Lefèvre, 1899) :

    Grande et forte leçon ! Tout est métamorphoses ;
    Toujours un flot nouveau chasse les vieilles choses ;
    Et l’échange éternel rajeunit l’univers.
    Rien ne roule au Tartare, au gouffre des enfers.
    Pour les peuples à naître il faut de la matière ;
    Ils vivront à leur tour et verront la lumière.
    Les uns nous précédaient, les autres nous suivront.
    C’est un cercle éternel que nul effort ne rompt ;
    Et la vie à jamais se transmet d’âge en âge :
    Elle n’est à personne, et tous en ont l’usage.

    Mais les métamorphoses dont il s’agit ici ne sont que celles permises par l’infinie recombinaison des éléments primordiaux en de nouvelles formes qu’il a décrit au livre I. Tout au plus fondent-elles une forme de métempsychose, mais pas la transformation d’un corps en celui d’une autre espèce, une autre sorte d’existant.

    Plus haut (Livre III, 807-816, trad. Marie Cosnay), Lucrèce a écrit :

    Enfin, dans le ciel, pas un arbre, en haute mer pas de nuages, pas de poissons dans les champs,
    ni de sang dans les bois, ni de jus dans la roche.
    Est certaine et ordonnée, chaque chose qui est et croît.

    Comment pourrait-elle donc se muer dans une autre enveloppe physique alors qu’elle serait prisonnière de sa constitution ? »

    Tu cherchais l’autre forme, Philippe.
    Une autre enveloppe physique.
    Les passages, la liberté de devenir la fleur.
    L’animal, le caillou.

    Je te répondais, le 20 novembre 2020, par mail :
    « La traduction de Lefèvre est vraiment libre ! Les vers que tu cites arrivent après la prosopopée de la nature. Tout le passage engage à la mort, comme tranquillité. Vois ma traduction de la suite :

    Une chose d’autre chose ne cesse jamais de naître,
    la vie n’est pas donnée à un acheteur, mais à tous, pour usage.
    Regarde : ce n’est rien, pour nous, l’ancienneté passée
    du temps éternel, avant notre naissance.
    C’est un miroir du temps futur que la nature nous
    expose à la fin, celui d’après notre mort.
    Y a-t-il quelque chose d’horrible qui paraît, quelque chose
    de triste ? N’est-ce pas plus tranquille que le sommeil ? »

    Aujourd’hui, 22 juillet, les phrases de Lucrèce, que nous avions échangées, dont nous avions commenté les traductions, afin de comprendre comment le philosophe antique pensait le changement, devrait, sinon me consoler de l’atroce manque, m’apaiser ? Plus tranquille que le sommeil ? Ton futur, miroir de nos passés ? Du temps éternel d’avant nos naissances ?

    Le 10 juillet 2021, la veille de la pierre sur le sommet, tu as fait une photo, jaune, de fleurs d’onagres (je ne connaissais ni le nom de la fleur ni la fleur). Tu cherchais l’autre forme, la beauté. Tu pensais l’autre forme, la beauté, tu n’étais qu’au début de le penser, et cela me remplit de chagrin.

    "Chaque jour cent fleurs" : le 10 juillet, on en avait, des jours et des fleurs devant nous.

    2017, à l’hiver. Ici, nous rencontrions Saâ. Il arrivait à Paris et grâce à lui nous apprenions, toi et moi, et Vincent, et Mireille, et Jane, et Michèle, et Sarah, et Nouho, nous apprenions tous combien les adolescents étrangers étaient maltraités. C’était le début d’une prise de conscience. "Ce n’est pas pour rien que Philippe est venu me chercher à gare d’Austerlitz", a dit Saâ vendredi, le jour où à Argelès on essayait de te dire au revoir. Pas pour rien que Philippe a lu le code civil guinéen, proposant des interprétations de certains articles, ce qui permettait une belle jurisprudence, mettant en échec, ponctuellement bien sur, les départements jugeant que les extraits d’acte de naissance des jeunes n’étaient pas conformes. Pas pour rien. Le dernier message que j’ai reçu de Philippe, par Signal, c’est la photo du mariage de Trésor. Trésor Bomenga, qu’il continuait à aider, depuis qu’en 2014 celui-ci avait réussi à échapper à la rétention administrative, prolongée qui, avant Tsipras, sévissait dans les centres grecs. J’avais rencontré Trésor en 2014, à Corinthe. Philippe à peine un peu plus tard, à Paris. Je ne sais pas si des formes remplacent les formes mais je sais la force des liens. Grèce, 2015, et ce que nous mettions en place, Philippe en tête, avec Mireille, Sophie, Laure, Michel, Catherine, Dimitris, en place, Interdemos. Entre les peuples. De peuple à peuple. Il faudra y revenir.

    Le chagrin est immense

    #Philippe_Aigrain #Marie_Cosnay

  • Peut-on “exister” à l’École ? | Pierre Coutil
    http://cqma.friches.net/spip.php?article13

    Au-delà de la petite phrase du Président de la République, ce qui inquiète c’est ce qu’elle révèle de son projet politique. La vision de l’Autorité portée par ce projet est en contradiction avec la perspective d’une École, lieu de vie et de construction de soi, et s’oppose aux modalités avec lesquelles l’Institution scolaire et les enseignant·es doivent faire autorité pour être dans la création d’un acte émancipateur. « Tout ce qui vous renvoie à une identité, une volonté de choquer ou d’exister n’a pas sa place à l’école. » [1] (E. Macron, 01.07.21) » A vrai dire, je pense exactement l’inverse et cette phrase m’emplit d’effroi. Source : (...)

  • « Seuls les partisans libéraux du revenu universel sont cohérents » – Entretien avec Denis Bayon
    https://lvsl.fr/seuls-les-partisans-liberaux-du-revenu-universel-sont-coherents-entretien-avec-

    En définitive, certains fantasment sur un monde où nous n’aurions plus à travailler tandis que d’autres semblent résignés à penser qu’on n’arrêtera pas le progrès technique et promeuvent l’idée de s’adapter via la RTT et le revenu inconditionnel.

    #revenu #travail

  • L’inquiétante augmentation des abandons en mer de marins, malgré la mobilisation des syndicats et ONG | Annick Berger
    https://www.equaltimes.org/l-inquietante-augmentation-des?lang=en

    « Je ne pensais pas que le destin serait si dur avec moi ». Sahabaj Khan, marin indien, n’aurait jamais cru vivre cette situation. Avec trois autres travailleurs de la mer, ils sont restés coincés près de deux ans sur deux bateaux d’une compagnie indienne, sans électricité, sur un bâtiment infesté de cafards, à quelques kilomètres du port de Mumbai. Source : Equal Times

  • À la frontière gréco-turque, l’Europe installe un mur d’acier et un camion blindé assourdissant contre les réfugiés
    https://www.infomigrants.net/fr/post/32687/l-europe-renforce-son-dispositif-de-surveillance-de-la-frontiere-greco

    L’Union européenne va ériger d’ici la fin de l’année un mur d’acier entre la Grèce et la Turquie. Un camion blindé équipé d’un canon sonore tirant des rafales de bruits assourdissants, comparables au volume d’un moteur à réaction, sera également déployé à la frontière gréco-turque pour empêcher les migrants d’atteindre le territoire européen. Source : InfoMigrants

  • Sylvia Leigh, la peinture après la fin de la peinture | Annabela Tournon
    https://pantherepremiere.org/texte/la-peinture-apres-la-fin-de-la-peinture

    Il aura fallu attendre la deuxième vague du mouvement féministe dans les années 1960 et 1970 pour qu’un travail de déconstruction du « grand récit » de la peinture et de son histoire soit entrepris, et avec lui, que soient interrogés les soubassements sexistes de la figure de l’artiste, du modèle, du regardeur, du collectionneur, et du monde de l’art en général. Source : Panthère Première

  • En Gironde, les professeurs des écoles invités à repasser un entretien d’embauche
    http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2021/03/17032021Article637515612845960315.aspx?actId=ebwp0YMB8s1_OGEGSsDRkN

    « Pour bâtir l’école de la confiance, le choix a été fait de combattre la difficulté scolaire dès les premières années de l’école en soutenant les élèves les plus fragiles. Cela se traduit par le dédoublement des classes de Grande Section en REP et en REP+ », annonce l’inspection académique de Gironde. Les enseignants en poste doivent donc se porter candidats pour garder leur propre poste à la rentrée 2021 !

    #école #Blanquer