• Super interview de 2013 : Rachid Taha : « Liberté, égalité, fraternité, c’est devenu un slogan publicitaire »
    Rosa Moussaoui et Marie-José Sirach, L’Humanité, le 22 novembre 2013
    https://www.humanite.fr/culture/rachid-taha-liberte-egalite-fraternite-c-est-deven-553643

    Un reportage sur Carte de Séjour en 1982 :
    https://www.youtube.com/watch?v=9vDc4YuZz1k

    L’Hymne antifasciste de 1993, Voilà Voilà :
    https://www.youtube.com/watch?v=YoUk9ksOKP4

    Ya Rayah en 1997, le clip officiel :
    https://www.youtube.com/watch?v=zp1m0xbkap4

    1,2,3 Soleils, le concert du siècle en 1999, avec Ida :
    https://www.youtube.com/watch?v=vVRsnDo0qcY

    Alliance punk arabe, il était logique qu’il adapte Rock el Casbah en 2004. Il était aussi logique qu’il la chante avec Mick Jones, en 2006 :
    https://www.youtube.com/watch?v=U76JhPVIoIs

    Le dernier morceau de son dernier disque studio en 2013 était une reprise de Voilà Voila, avec Brian Eno, Agnès b., Femi Kuti, Mick Jones, Christian Olivier, Eric Cantona, Camélia Jordana, Oxmo Puccino, Rachida Brachni, Sonia Rolland et Rodolphe Burger, conscient que la lutte contre le fascisme n’était pas terminée, mais sans lui ce sera encore plus difficile :
    https://www.youtube.com/watch?v=A6WIbvwcVUg

    Aussi ici :
    https://seenthis.net/messages/721451
    https://seenthis.net/messages/721454
    https://seenthis.net/messages/721475

    Très triste, encore... après Jacques Higelin et Aretha Franklin

    #Rachid_Taha #Musique #mort_en_2018

  • Le #WWF accusé de «#colonialisme_vert» au #Congo - Page 2 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/international/200319/le-wwf-accuse-de-colonialisme-vert-au-congo?page_article=2
    #republique_du_congo
    #terres
    #conservation

    « Le système occidental de conservation se fait généralement contre les populations »
    Au moins une partie des personnes concernées manifestent depuis longtemps leur opposition au projet de parc. Fiore Longo rapporte avoir rencontré en février une douzaine de communautés locales disant toutes leur désaccord. Une situation que le WWF connaît : en 2017, une étude qu’il a financée a montré, elle aussi, qu’une partie des habitants étaient « réticents à l’idée de la présence d’un parc ». Pour l’instant, le WWF a surtout facilité des négociations entre l’État congolais et deux grosses #entreprises_forestières : le parc national tel qu’il a été envisagé couvre une petite partie de leurs concessions, à laquelle il faudrait donc qu’elles acceptent de renoncer. L’ONG au panda a aussi eu des discussions avec les autorités pour les convaincre d’annuler des permis miniers accordés dans Messok-Dja.

    Pour le journaliste allemand Wilfried Huismann, auteur d’un livre et d’un film critiques sur le WWF, il n’y a pas grand-chose à attendre de ce dernier en matière de respect des droits des populations locales : « Le WWF a toujours vu dans les #peuples_autochtones du Sud une source potentielle de danger pour la nature pure et intacte. C’est un modèle de conservation raciste qui est dans ses gènes », a-t-il dit dans un récent entretien avec Der Spiegel.

    La controverse autour de Messok-Dja a un mérite : elle remet la lumière sur l’échec de la politique de conservation introduite dans la région par la colonisation européenne. Malgré l’évolution des discours et des règles, la création de parcs et autres surfaces de protection reste associée à l’expulsion de ceux qui y vivent. Ces aires protégées couvrent aujourd’hui 9,8 % du bassin du Congo, contre 0,12 % attribuées formellement aux communautés forestières. Elles remplissent mal leur objectif de conservation : la biodiversité est en déclin dans près de 50 % des aires protégées établies dans des forêts tropicales dans le monde, selon une étude scientifique publiée en 2012 qui a pris en compte l’Afrique. Le WWF n’a pour sa part pas été en mesure de fournir à Mediapart un bilan du système de conservation dans le bassin du Congo.

    Samuel Nguiffo, qui dirige une #ONG camerounaise, le Centre pour l’environnement et le développement (CED), fait partie de ceux qui constatent depuis longtemps les limites de cette politique. « Le système occidental de conservation est conçu par des biologistes et se fait généralement contre les #populations, alors que ces dernières ne sont pas forcément opposées à l’idée de conservation, souligne-t-il. Nous avons des croyances selon lesquelles la nature est un être vivant, capable de réfléchir, d’agir et de punir. Nous avons des habitudes de conservation, avec des forêts sacrées, des interdits sur des animaux qu’on ne tue pas à certains endroits et certains moments, etc. La conservation aurait pu être construite sur ces fondements. Quand ils se voient imposer, sans explication suffisante, des restrictions d’usage et d’accès, les gens ne comprennent pas. »

    Aujourd’hui, les traditions ne permettent pas de protéger l’environnement à grande échelle, en particulier là où la démographie et la pression sur les ressources augmentent. « Il est donc important de trouver un mécanisme de protection. Mais avec un impératif : les communautés locales doivent avoir une responsabilité dans la gestion. Il faut avant tout répondre à leurs besoins de développement local, créer une relation de confiance, et avec elles faire de l’aménagement du territoire », insiste Samuel Nguiffo.

    Dans l’immédiat, le WWF et ses bailleurs de fonds doivent gérer le feu déclenché par Buzzfeed, qui fait se multiplier les réactions. L’ONG britannique Rainforest Foundation UK (RFUK) a demandé par exemple à la Commission européenne de prendre ses responsabilités en ordonnant une enquête indépendante sur les financements qu’elle a donnés aux aires protégées du bassin du Congo – soit au moins 258 millions d’euros en vingt-sept ans. En 2016, cette organisation avait elle-même rassemblé de nombreuses preuves de violations des droits de l’homme commises dans au moins neuf de ces zones protégées bénéficiant du soutien de l’UE. La Commission européenne a jusqu’ici ignoré ses données, tout comme celles de Survival.

  • Pourquoi les filles ont délaissé l’informatique
    http://theconversation.com/pourquoi-les-filles-ont-delaisse-linformatique-110940

    C’est un fait qui saute aux yeux de tout organisateur de salon d’orientation post-bac ou de journées portes ouvertes en école d’ingénieurs : les garçons sont largement plus nombreux que les filles à se presser autour des stands dédiés aux métiers du numérique. On pourrait croire qu’il en a toujours été ainsi. D’ailleurs, cet état des lieux est ancré dans les mentalités, la figure du « geek » se déclinant encore souvent au masculin.

    Cela ferait presque oublier qu’aux débuts de ce qu’on appelait l’« informatique », de nombreuses mathématiciennes ont joué un rôle clé. Parmi ces grandes figures, on peut citer Grace Hopper, qui a imaginé la notion de compilateur et en a fait le premier prototype en 1952. C’est une femme, Mary Keller, qui a soutenu la première thèse en informatique, en 1965.

    On peut citer aussi Kathleen Booth, pionnière de la reconnaissance de caractères et de la traduction automatique. Ou Barbara Liskov, qui programme en 1968 un des premiers jeux d’échecs, et devient professeure en intelligence artificielle au MIT.

    #femmes #genre #sexisme #culture_geek #informatique

  • La collapsologie ou la critique scientiste du capitalisme - Perspectives Printanières
    https://perspectives-printanieres.info/index.php/2019/03/17/la-collapsologie-ou-la-critique-scientiste-du-capitalism

    Comme un écho aux « alertes » de nombreux-ses scientifiques concernant l’extinction de la biodiversité, les dérèglements climatiques ou la raréfaction de l’eau potable à la surface du globe (entre autres), les théories de l’effondrement se diffusent rapidement dans la société, notamment grâce à un important relais médiatique où est prodigué le discours persuasif qui caractérise ce mouvement. Une communauté « effondriste » s’est progressivement constituée autour de ces théories, notamment en France après la parution d’un livre qui a fait date : Comment tout peut s’effondrer. Petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes de Pablo Servigne – ingénieur agronome et docteur en biologie – et Raphaël Stevens – éco-conseiller. Les collapsologistes – ou collapsologues comme iels s’autodésignent, nous discuterons d’ailleurs du nom qu’il nous faut leur donner – semblent se poser en héritier-ères du mouvement pour la décroissance, dont iels reprennent nombre d’analyses et de travers. La collapsologie, la nouvelle « discipline » qu’iels pratiquent, s’avère également être une traduction politique parmi d’autres du concept d’Anthropocène, en reprenant là-aussi ses défauts et son absence de raisonnement politique critique.

    • A rajouter à la liste des articles qui critiquent un aspect de la collapsologie, mais dont j’ai parfois l’impression qu’ils jettent le bébé avec l’eau du bain. Sous prétexte que Pablo Servigne ne parle pas assez de capitalisme, on en vient presque à défendre que le monde ne va pas si mal que ça...

      Jusqu’ici, ce billet était plutôt vindicatif vis-à-vis de la collapsologie puisqu’il visait à détricoter et critiquer certaines analyses formulées (ou non-formulées) au sein de cette mouvance. Cependant, malgré un manque évident d’analyse politique et sociale, un grand nombre de bilans que dresse la collapsologie sont tout à fait dignes d’intérêt. En effet, qu’ils concernent le(s) changement(s) climatique(s), l’extinction massive de la biodiversité ou encore l’appauvrissement accéléré des sols, des constats scientifiques sont repris et les traduire dans la sphère politique est intéressant. Cependant, il semble nécessaire d’assumer le discours politique qui découle de la collapsologie. A première vue, ce travail s’avère plutôt compliqué puisque les collapsologistes semblent « rejeter les idéologies » (sic) dont iels ont des visions souvent caricaturales. Quoiqu’on pense de ce mouvement, il faut également rester prudent-es quant aux récupérations de la collapsologie par certaines personnalités politiques.

      La prédiction d’un effondrement inévitable d’ici quelques années procède d’une logique proprement historiciste, qui n’est pas sans rappeler la rhétorique marxiste d’il y a quelques décennies qui annonçait l’effondrement du système capitaliste sous le poids de ses propres contradictions ou encore qui véhiculait une marche en avant du progrès social (attention, le propos n’est pas de faire du marxisme dans son ensemble un historicisme, simplement ces idées-ci). Au moins deux aspects de l’analyse collapsologiste illustrent cet écueil.

      #effondrement #collapsologie #catastrophe #fin_du_monde #it_has_begun #Anthropocène #capitalocène
      quand même pour la troisième compilation :
      https://seenthis.net/messages/680147

  • The State of War – Foreign Policy
    https://foreignpolicy.com/2019/03/18/the-state-of-war

    The world is more peaceful than ever, except when it comes to state violence against citizens.

    The world is less violent today than at virtually any other time in human history. Hard as it is to believe, deaths from armed conflicts between states have declined dramatically since the 1950s. And although civil-war deaths have ticked up in recent years, they have still fallen dramatically since the end of the Cold War. After increasing over the past decade, even terrorist-related killings have started to fall. Homicides, too, are on the decline in most parts of the world.

    All this is cause for celebration, but it is not the whole story. Although the world has done a good job at reducing certain forms of violence, others are on the rise, particularly state violence against citizens and criminal violence from mafias, drug cartels, and gangs. Complicating matters, state and criminal killings are often intertwined. Politicians, police, and other officials may be in cahoots with criminal bosses, which makes their crimes harder to uncover and address.

  • En cinquante ans, l’extraction de ressources a plus que triplé dans le monde
    https://www.liberation.fr/planete/2019/03/21/en-cinquante-ans-l-extraction-de-ressources-a-plus-que-triple-dans-le-mon

    Aujourd’hui, l’économie mondiale extrait 92 milliards de tonnes de #ressources_naturelles par an pour fonctionner, alors que ce chiffre n’était « que » de 27 milliards de tonnes en 1970. Nous utilisons ainsi 3,4 fois plus de matières qu’il y a cinquante ans à l’échelle du globe.

    Dans un rapport, le Groupe international d’experts sur les ressources (un groupe de scientifiques organisés sous l’égide de l’ONU Environnement pour travailler sur l’utilisation des ressources naturelles dans le monde) expose ces chiffres et met en garde.

    [...] Au total en 2017, le monde prélevait près de 44 milliards de tonnes de minéraux non métalliques (de sable, de gravier, d’argile), 24 milliards de tonnes de biomasse (notamment par l’agriculture), 15 milliards de tonnes de combustibles fossiles (pétrole, charbon, gaz naturel, pourtant principale cause du changement climatique) et 9 milliards de tonnes de métaux pour satisfaire aux besoins de la production. Une répartition qui, selon les auteurs du rapport, témoigne de la place des #infrastructures dans le monde et de leur croissance dans les pays émergents.

  • Mathilde Larrère : « Les féministes actuelles devraient se revendiquer de la Commune »
    https://www.liberation.fr/debats/2019/03/22/mathilde-larrere-les-feministes-actuelles-devraient-se-revendiquer-de-la-

    L’enseignante-chercheuse à l’université Paris-Est-Marne-la-Vallée déplore un manque d’intérêt, de la part des militantes d’aujourd’hui, pour les révolutions du XIXe siècle. Elle rappelle en quoi l’insurrection de 1871 a été un moment majeur de l’histoire des femmes. Source : Libération

    • Parce que semi #paywall :

      Mathilde Larrère : « Les féministes actuelles devraient se revendiquer de la Commune »
      Gabriel Pornet, Libération, le 22 mars 2019

      Pour l’historienne Mathilde Larrère (1), limiter le féminisme et la citoyenneté à la question du droit de vote est une erreur, conduisant à effacer des mémoires une partie essentielle de notre passé politique. Elle souligne l’importance des communardes et l’implication constante des femmes dans les révoltes populaires.

      Quelle est la différence entre le rôle joué par les femmes durant la Commune et durant les autres révolutions ?

      Ce qui progresse, avec la Commune, c’est qu’on les accepte plus comme combattantes. En 1830, il y avait quelques femmes sur les barricades, pas beaucoup, et certaines y allaient déguisées en hommes. C’était pareil en 1848 : elles préparaient les cartouches, jouaient un rôle à l’arrière. En 1871, elles réussissent à faire des bataillons de femmes et tiennent même quelques barricades. La plus célèbre est celle de la place Blanche, même si son existence est discutée.

      Certaines femmes portent un uniforme pendant la Commune ?

      Oui. Durant les procès, on leur reproche par exemple d’avoir été arrêtées avec un pantalon… Elles ne font pas partie de la garde nationale, mais le réclament, et certaines mettent un semblant d’uniforme, un pantalon, comme une revendication – sans compter que c’était effectivement plus pratique pour combattre.

      Selon Jacques Rougerie, sous la Commune, les préoccupations ne sont pas à proprement parler « féministes »… (2)

      Jacques Rougerie a fait l’erreur classique, à savoir réduire le féminisme à la question du droit de vote. Au XIXe siècle, le fait qu’on le leur refuse n’est pas le premier problème des femmes. La revendication n’est pas absente, mais elle n’est pas prioritaire. Elles se battent beaucoup plus pour le droit au travail, pour la suppression des dispositions inégalitaires du code civil et surtout pour la fin de l’incapacité civile des femmes mariées, mais aussi pour le droit à l’instruction, pour le droit d’avoir des armes… Si on prend ça en compte, alors on peut considérer qu’il y a des demandes féministes clairement formulées au cœur de la Commune. Simplement, elles ne réduisent pas le citoyen et le pouvoir politique au seul bulletin et demandent bien plus que l’accès aux urnes.

      Qu’obtiennent-elles concrètement ?

      Elles obtiennent une forme d’engagement, de la part de la Commune, à établir l’égalité salariale (difficile de savoir si ça a été mis en place ; cela semble avoir été le cas dans quelques ateliers associatifs). Elles acquièrent aussi, ce qui est très important dans leur esprit, la reconnaissance des concubines et des enfants illégitimes : les pensions pour les femmes de gardes nationaux tués doivent désormais être également versées aux femmes non mariées. C’est fondamental, surtout que dans le milieu ouvrier, on se marie très peu. Elles obtiennent aussi l’interdiction de la prostitution, un combat important contre la domination masculine : il y a de beaux textes de Louise Michel à ce sujet. Les femmes sont aussi très mobilisées dans le domaine de l’instruction. Elles créent notamment des écoles de filles et envisagent également une éducation beaucoup plus mixte.

      On connaît bien Louise Michel, mais qui sont les autres militantes sous la Commune ?

      Nathalie Le Mel, Elisabeth Dmitrieff, André Léo, Blanche Lefebvre, Victorine Brocher, Marguerite Tinayre, Aglaé Jarry… et toutes les militantes de l’Union pour la défense de Paris et les soins aux blessés, qui pour beaucoup n’ont laissé que leur nom au bas de deux affiches et dont on sait peu de choses. Sociologiquement, Dmitrieff, aristocrate russe immigrée, est une exception : s’il y a quelques institutrices, comme Louise Michel, la plupart sont des femmes du peuple, exercent des petits métiers, souvent dans le textile ou les « métiers de bouche » : blanchisseuses, couturières, chapelières, chocolatières, confiseuses…

      Les communardes ont-elles conscience d’être dominées, à l’intérieur même du mouvement, par les hommes ?

      Oui, en tout cas pour certaines, c’est clair. André Léo, par exemple, en a parfaitement conscience (3). Les hommes communards sont les produits d’une époque où l’on envisage difficilement, depuis un siècle, de donner la parole aux femmes.

      Le socialisme, sous la Commune, est moins tourné vers les femmes que ne l’étaient le saint-simonisme et le fouriérisme au début du siècle ?

      Pierre-Joseph Proudhon est passé par là… Même si c’est compliqué : on retient une phrase atroce de lui alors qu’avant, il a eu des propos beaucoup plus favorables à l’égalité. De toute façon, le mouvement ouvrier, en tout cas à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, est objectivement machiste. Au lieu de demander l’égalité, ils considèrent que les femmes sont responsables de la baisse des salaires, que ce sont des travailleuses concurrentielles, des briseuses de grève.

      Comment les communardes sont-elles traitées par les versaillais lors de la répression ?

      Dans les combats, elles sont tuées comme les hommes. Mais durant les procès, on commence par leur poser des questions différentes. On leur demande toujours, par exemple, si elles ont combattu parce qu’elles étaient amoureuses d’un homme. Impossible d’imaginer qu’elles aient pu se battre parce qu’elles en avaient envie. « Quelle était votre relation » sous-entendue sexuelle, « avec tel ou tel communard ? » etc. S’agissant des punitions prononcées par les conseils de guerre, la peine de mort reste une exception pour les femmes, et les rares peines capitales prononcées à leur encontre ont été commuées en travaux forcés. D’autre part, ce qui n’apparaît pas dans les archives des procès et qui est pourtant très présent dans la manière dont la population les voit, c’est la légende des « pétroleuses » : elles auraient provoqué les incendies à Paris, alors qu’aucune n’est inculpée pour ça.

      D’où vient cette image des « pétroleuses » ?

      Ça vient de la presse, beaucoup. Je pense qu’il y a un tel refus de la femme en politique, et pire, de la femme révolutionnaire, qu’on la rend responsable de tout. C’est une façon de leur refuser à nouveau le statut de combattante. Dans l’esprit des versaillais, ce sont les lâches qui allument les incendies. Pourtant, même Maxime Du Camp, qui est un anticommunard de première, ne reprend pas le mythe des « pétroleuses ». En revanche, c’est très présent dans l’iconographie. Ça fait aussi penser au vieux symbole de la « sorcière », d’une certaine manière. Ça fait longtemps qu’il y a cette association entre les « mauvaises femmes » et le « feu ». Surtout, les communardes sont considérées par les versaillais comme des prostituées, des femmes aux mœurs légères.

      Les féministes actuelles se revendiquent-elles de la Commune ?

      Non, mais elles devraient. Dans les milieux féministes, et même parmi les chercheuses en histoire de femmes, on s’intéresse plus à ce qui se passe après, à partir d’Hubertine Auclert : un féminisme plus bourgeois, tourné vers le droit de vote. Parmi les militantes d’aujourd’hui, pour schématiser, on garde Olympe de Gouges, et on oublie tout ce qu’il y a au milieu, toutes les femmes populaires et socialistes de 1830, de 1848 et de la Commune. Bon, il y a Louise Michel, mais enfin, c’est la seule, et encore… Pourtant, chaque révolution ouvre des possibles pour les femmes et elles s’en sont toujours saisi, notamment en s’organisant de manière non mixte, en écrivant, en prenant la parole… Les grandes revendications sociales du XIXe siècle ont été portées par les femmes autant que par les hommes, et on ne le dit pas assez. Quand les révolutions meurent, elles sont les premières victimes : il y a toujours un double retour à l’ordre, politique et sexiste.

      (1) Auteure de l’Histoire comme émancipation (avec Laurence De Cock et Guillaume Mazeau, Agone, 2019) et Des intrus en politique – Femmes et minorités : dominations et résistances (avec Aude Lorriaux, Editions du Détour, 2017).

      (2) Jacques Rougerie, Paris insurgé, la Commune de 1871, 1995, dans la Commune et les Communards, Gallimard, 2018, p.73.

      (3) André Léo dans la Sociale du 8 mai (via Jacques Rougerie, op.cit.) : « Beaucoup de républicains n’ont détrôné l’Empereur et le bon Dieu que pour se mettre à leur place. La femme […] doit demeurer neutre et passive sous la direction de l’homme : elle n’aura fait que changer de confesseur. »

    • C’est fatiguant ces « les féministes devraient faire comme ci ou comme ca ». Les féministes ne sont pas un troupeau d’ignorantes de l’histoire et les féministes font le travail d’historicisation. C’est aux non féministes de se mettre au boulot, chercheur·euses, enseignant·es, bibliothécaires.... En particulier aux spécialistes de la Commune qui en efface la portée féministe et méprise cet aspect de la période. C’est à ses collègues qu’elles devraient prodigué ses bons conseils, pas au féministes. C’est pas comme si les historiennes féministes n’avaient pas été l’objet de décrédibilisation, comme si c’était les féministes qui caricaturaient les luttes pour en évincé les femmes et en faire une réduction au suffragisme vis à vis de la Commune. D’ailleurs la période de la commune est bien connue aussi pour sa lutte sur l’éducation des filles et j’ai pas l’impression qu’on réduise cette période au suffragisme. Au XIXeme il y a aussi la lutte des pionnières dans les professions interdites aux femmes, médecines, avocates, jugesses, peintureuses... Celleux qui s’en tape et qui effacent l’histoire des femmes, est-ce vraiment les féministes ?

    • Les Louises - Femmes de la Commune
      https://macommunedeparis.com/2019/03/08/louises-les-femmes-de-la-commune-par-eloi-valat
      https://www.eloivalat.com

      Alphonsine, Rosine, Louise, Rosalie, Séraphine, Eulalie, Paule... couturière, ouvrière mécani­cienne, institutrice, lavandière, giletière, écrivaine... et ambulancière, cantinière, pointeuse d’artillerie, combattante... fusillée, emprisonnée, déportée... et salie, humiliée, oubliée...

      Les femmes de la Commune ont élevé le cœur de l’idéal des hommes de la Commune. Dès le 18 mars, premier jour de la révolution parisienne, au son du tocsin, les femmes et les enfants de Montmartre s’opposent vivement à l’enlèvement des canons de la butte par la troupe, obtiennent des soldats (“vous ne tirerez pas sur le peuple !”) la fraternisation avec la foule, entourent les soldats, arrêtent les chevaux, coupent les harnais…
      Privées du droit de vote et de représentation, elles ne participeront pas aux délibérations de la Commune. Organisées dans les comités d’arrondissement, les clubs, l’Union des femmes pour la dé­fense de Paris et les soins aux blessés, elles vont bousculer le paternalisme gouailleur de leurs compagnons révolutionnaires en réclamant la fin de l’exploitation, la part égale à travail égal, l’affranchissement de tous...

      Ce livre, chronique poétique en images, rend hommage aux Louises, citoyennes de la Commune qui ont voulu « considérer les douleurs générales de l’humanité comme rentrant dans la cause commune des déshérités » (Louise Michel)

  • johnirons: Anna Bijns (1493-1575) ’Refereyn’ in English
    http://johnirons.blogspot.com/2018/08/anna-bijns-1493-1575-refereyn-in-english.html

    Ballade
    To be a woman’s fine, a man far better.
    You maids, you widows keep this to the letter:
    Don’t haste or fret to see yourselves soon wed.
    It’s said that manless you are honour’s debtor;
    If finding food and clothes though does not fetter,
    Let no man master both your house and bed.
    Take my advice: Be wary where you tread
    It seems to me, where’er I cast my gaze,
    That if a woman choose – though nobly bred
    And rich in goods – to wed she all her days
    Will spend short-tethered; if alone she stays
    Instead both pure and chaste she’ll, I profess,
    Be mistress of a life excelling praise.
    With marriage I’ve no quarrel, nonetheless
    Not tied by husbands women prosper best.
    […]
    Princess

    Though women may have wealth none can deny,
    They’re viewed as slaves by men both low and high.
    Should they with fine words ply, then stop them short
    And tell them to push off if they should try;
    In number good men with white ravens vie.
    Away from all gifts shy that they have brought,
    As soon as in their mesh the woman’s caught,
    Love is as nought, ’tis seen repeatedly.
    In marriage man’s deception’s grimly taught,
    With sorrows fraught, she suffers constantly;
    He squanders all her wealth, won’t let her be.
    No game for free, but heavy curse no less.
    Oft money rules not love when you can see
    Such men run till their lungs burst out their chest.
    Not tied by husbands women prosper best.

    • Anna Bijns — Wikipédia
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Anna_Bijns

      Anna Bijns, née le 5 mars 1493 à Anvers où elle est enterrée le 10 avril 1575, est une femme de lettres brabançonne, écrivant en langue néerlandaise.

      Prolégomènes
      Anna Bijns est une des rares femmes à avoir fait partie de la corporation des instituteurs. Les franciscains l’ont incité à publier ses œuvres. Les chambres de rhétorique, bien que réservées aux hommes, l’apprécient et elle est reconnue par les humanistes. Elle aurait été l’auteur de langue néerlandaise le plus vendu au xvie siècle.

      (la notice WP semble largement écrite par des hommes…)

    • l’original en néerlandais (pas forcément facile à trouver…

      Anna Bijns - Het is goet vrouwe syn
      http://users.telenet.be/gaston.d.haese/anna_bijns_wyff_sonder_man.html

      XIII Het is goet vrouwe syn, veel beter heere

      Het is goet vrouwe syn, veel beter heere;
      ghy maechden, ghy wyfkens, onthout dees leere.
      Niemant hem te seere // om houwen en spoeye;
      Men seyt: daer gheen man en is, daeren is geen eere;
      maer die gecrygen can cost & cleere,
      niet haest haer en keere // onder eens mans roeye.
      Dits mynen raet, want soo ic vermoeye,
      dagelycx vernoeye //, men siet dat gemeene.
      Al is een vrouwe noch soo ryck van goeye,
      sy crycht haest een boeye // aen haer beene,
      ist dat sy trout; maer blyft sy alleene,
      & sy haer reene // & suyver gehouwen can,
      sy is heere & vrouwe: beter leven geene.
      Ic en acht niet cleene // thouwelyck; nochtan:
      ongebonden best, weldich wyff sonder man.
      […]
      Prinche.
      Al is een vrouwe noch soo ryck van haven,
      veel mans die achtense als hare slaven.
      Siet toe als sy u laven // met schoone prologen,
      en gelooftse soo saen niet, maer laetse draven;
      want, my dunckt, de goede mans syn nu witte raven;
      acht niet wat gaven // sy u brengen voer oogen:
      als sy een vrouwe hebben int net getogen,
      is lieffde vervlogen //; dit sien wy wel.
      Int houwen wort menige vrouwe bedrogen,
      die moet gedragen // groot swaer gequel:
      haer goet wort gequist, de man valt haer fel;
      ten is vry gheen spel //, maer noyt swaerder ban.
      Tis somtyts om tgelleken & niet om tvel,
      dat de sulcke soo snel //, seer liep & ran:
      ongebonden best, weldich wyff sonder man.

      quelques autres ballades sur le même site
      http://users.telenet.be/gaston.d.haese/anna_bijns.html

  • Malaise dans l’#agriculture française - La Vie des idées
    http://www.laviedesidees.fr/Malaise-dans-l-agriculture-francaise.html

    Comme le note Thibault Le Texier, l’agriculture est devenue « un continent lointain » dans les sociétés occidentales. Les consommateurs sont habitués à des denrées agricoles prévisibles, de qualité et consommables toute l’année – soit tout le contraire de ce qu’est réellement l’agriculture : saisonnière, fragile, imprévisible (Le Texier, 2017). Il faut une année pour récolter un quintal de blé. Entre les semis et la moisson tout peut arriver : sécheresse, inondation, contamination, prolifération des adventices, effondrement des cours... En dépit des très nombreux aléas qui caractérisent l’activité agricole, la prouesse de nos sociétés est d’avoir réussi à banaliser l’accès à l’#alimentation, mais au prix d’une marginalisation des agriculteurs et d’un fossé culturel creusé entre ceux qui mangent et ceux qui donnent à manger. L’accessibilité de l’alimentation a banalisé l’agriculture qui apparaît désormais comme un secteur périphérique et sans intérêt pour beaucoup de nos concitoyens. C’est le premier élément de la spirale dépréciative qui caractérise nos sociétés contemporaines : plus les #agriculteurs sont productifs, moins ils sont considérés par la société.

    #communs #communautés_de_pratiques

  • « Ceci n’est pas un atlas ! » : comment contre-cartographier le monde - Nigra - Visionscarto
    https://visionscarto.net/recension-this-is-not-an-atlas

    Sous le signe des « trois c : critique, contre et cartographie » a paru en septembre 2018 chez Transcript Verlag l’impressionnant ouvrage This is Not an Atlas. Sur 346 pages, le collectif ORANGOTANGO+ et 41 autrices et auteurs ou groupes de tous pays nous montrent ce qu’est la contre-cartographie et de quelle façon elle peut contribuer à l’action politique envisagée par la base.

    Une recension proposée par Nigra

    Cet article est paru en allemand dans la revue Gai Dao, n°98 de février 2019
    Traduction de @nepthys

    #livre #cartographie_radicale #cartographie_critique #contre-cartographie

    • « La cartographie est morte, vive la #contre-cartographie ! »

      C’est à partir de la célèbre formule de Magritte : « Ceci n’est pas une pipe », que le collectif Orangotango baptise son ouvrage : This Is Not an Atlas : A Global Collection of Counter-Cartographies, publié en 2018 ( Figure 1 ci-dessus : couverture de This Is Not an Atlas (source : https://notanatlas.org/book).

      Tels des surréalistes, les activistes et géographes d’Orangotango « tirent sur une foule de cartographes » – pour paraphraser André Breton – au moyen d’une série de productions et textes volontairement critiques. Critiques, les auteurs de cet anti-atlas le sont par leur projet politique et leur posture théorique.

      En effet, la contre-cartographie désigne un ensemble d’initiatives destiné à déconstruire les conventions cartographiques et les systèmes sociotechniques qui les produisent (Wood et al., 2020). Sur les ruines de l’ancienne cartographie, « morte » selon Wood (2003), les contre-cartographes fondent une approche résolument alternative. À l’inverse des cartes qui s’attachent à une description fidèle et pseudo-objective du monde – caractéristiques des atlas « traditionnels » –, les productions exposées dans This Is Not an Atlas ne prétendent pas à la neutralité. L’occasion de rappeler le rapport de la carte à son producteur, donc d’en célébrer la créativité. Une subjectivité que l’on retrouve dans l’usage des données, et leur mode de constitution.

      La pratique des contre-cartographes ne s’arrête pas là. Dans le sillage d’auteurs post-modernes et marxistes, dont Brian Harley, ils se mettent au service de la justice sociale, donc basculent du côté de la praxis. Si « longtemps, les cartes ont été réservées aux puissants » (Bord, 2003), et ont servi leurs intérêts propres (Branch, 2011 ; Desbois, 2015), pour nos auteurs, il s’agit de dégager la production cartographique du cadre institutionnel, académique et étatique dans lequel elle est produite. De la sorte, nul renouvellement de la fonction de la carte : celle-ci reste un discours sur le réel et donc un instrument de transformation du monde, mais cet usage est ici pleinement assumé et mis au service de l’émancipation des femmes et des hommes.

      Ni une somme de savoirs géographiques, ni un outil d’institutionnalisation d’un État (Morel, 1993), cet ouvrage n’est, à proprement parler, pas un atlas. Il s’agit bien plutôt d’une « collection » : des dizaines de cartes, et tout autant de luttes politiques et de mondes possibles.

      En dépit d’une structuration en chapitres, les éditeurs réfutent toute cohérence linéaire à l’atlas, ce qui en facilite l’exploration. Nous, lecteurs, naviguons alors entre cartes autochtones, l’œuvre de Fahlström, cartes mentales et images satellites, réunies selon qu’elles servent une action politique (chapitre 1), qu’elles aident à coordonner un collectif (chapitre 2), ou encore qu’elles participent au dévoilement du réel, à l’instar des travaux de Philippe Rekacewicz sur les aéroports (chapitre 6). En se basant sur sa propre expérience, le cartographe du Monde diplomatique a illustré comment les autorités de l’aéroport, de collusion avec les compagnies commerciales, structurent l’espace du bâtiment pour organiser la mobilité des voyageurs. D’entrée, les voyageurs sont désorientés (signalétique, magasins identiques), avant d’être poussés à la consommation dans des lieux dédiés. À Oslo, à mesure que l’espace des magasins (en rouge) progresse, l’espace public (en bleu) diminue (figures 2, 3 et 4). À Copenhague, le retrait de places assises de cet espace le prive de tout aspect fonctionnel et attractif. Rekacewicz parle d’une forme subtile, quasi « invisible », de totalitarisme.


      À la composante « pratique » du projet d’Orangotango est accoudée une entreprise théorique critique. En sciences humaines, les travaux qui se revendiquent d’une démarche semblable foisonnent, tant et si bien qu’on ne sait comment distinguer ce qui est critique de ce qui ne l’est pas (Blomley, 2006). En un mot, la critique en cartographie revient à une déconstruction des discours latents à la carte et à sa production. Rationnelle et scientifique, elle est aussi rejet des postulats positivistes et déterministes. Ainsi la critique a de quoi nous prémunir contre une pratique trop innocente de la géographie. Dans le dernier chapitre de l’atlas, elle passe au crible les bases de données spatiales – de quoi intéresser le géomaticien. En premier lieu, Mark Graham insiste sur les inégalités d’accès au digital dans le monde (figure 5).


      L’Amérique du Nord, l’Europe de l’Ouest et le Japon – la « Triade » dans la vulgate économique – présentent, avec l’Australie, la Corée du Sud ou encore le Qatar, les taux les plus forts de citoyens en ligne (> 80 %), loin devant l’Inde, l’Amérique centrale ou l’Afrique australe (< 20 %). L’absence d’une partie de l’humanité sur le web a pour corrélat l’incomplétude de bases de données collaboratives (OpenStreetMap, Wikipedia) (figure 6), qu’elles se veulent exhaustives (Geonames), ou non. On notera, d’ailleurs, le souci chez Graham de faire varier les projections (projection de Fuller, polyhédrale, pour la figure 6).

      En définitive, qu’est-ce que la contre-cartographie ? C’est employer la cartographie comme une arme politique, un vecteur pédagogique, ou encore un moyen d’introspection. C’est innover par la forme (sémiologie, matériaux, dimensions, projection, etc.), cartographier « pour une cause », seul ou à plusieurs, encourager une ontologie de la diversité, se montrer sceptique, multiplier les explorations. Enfin, c’est aider à la diffusion des cartes, notamment par voie numérique. Rien d’étonnant, donc, à ce que This Is Not an Atlas soit en accès libre sur internet : https://notanatlas.org/book.

      Pour celles et ceux qui souhaiteraient aller plus loin, je vous invite à lire les billets de visioncarto (https://visionscarto.net/recension-this-is-not-an-atlas) et de Françoise Bahoken (https://neocarto.hypotheses.org/5922), et à feuilleter l’atlas, évidemment !

      Bibliographie :
      Blomley, N. (2006). Uncritical critical geography ? Progress in Human Geography, 30(1), 87‑94. https://doi.org/10.1191/0309132506ph593pr
      Bord, J.-P. (2003). Cartographie, géographie et propagande. Vingtieme Siecle. Revue d’histoire, no 80(4), 15‑24.
      Branch, J. (2011). Mapping the Sovereign State  : Technology, Authority, and Systemic Change. International Organization, 65(1), 1‑36. https://doi.org/10.1017/S0020818310000299
      Desbois, H. (2015). Les mesures du territoire. Aspects techniques, politiques et culturels des mutations de la carte topographique. ENSSIB.
      Morel, P. (1993). L’État médicéen au XVIe siècle  : De l’allégorie à la cartographie. Mélanges de l’école française de Rome, 105(1), 93‑131. https://doi.org/10.3406/mefr.1993.4252
      Wood, D. (2003). Cartography is Dead (Thank God !). Cartographic Perspectives, 45, 4‑7. https://doi.org/10.14714/CP45.497
      Wood, D., Krygier, J., E Thatcher, J., & Dalton, C. (2020). Critical Cartography. In International Encyclopedia of Human Geography (p. 25‑29). Elsevier. https://doi.org/10.1016/B978-0-08-102295-5.10529-3

      https://mastergeonum.org/2020/10/07/la-cartographie-est-morte-vive-la-contre-cartographie

      via @reka

  • Bernard Charbonneau : Précurseur de l’écologie politique - Daniel Cérézuelle
    https://www.youtube.com/watch?v=j_Z92b_Iu_M

    Bernard Charbonneau (1910-1996) a eu dès sa jeunesse la conviction que son siècle serait en même temps et pour les mêmes raisons celui du totalitarisme et du saccage de la nature. Pas de liberté sans puissance d’agir ; mais dans un monde fini le développement indéfini de la puissance matérielle et de l’organisation sociale risque d’anéantir la liberté de l’homme. A partir des années trente et jusqu’à sa mort, Charbonneau a réfléchi sur les dangers qui résultent, pour la nature et pour la liberté de ce qu’il appelait la Grande mue, c’est-à-dire de la montée en puissance de plus en plus rapide du progrès technique, scientifique et industriel. Mais on se fourvoierait en réduisant l’œuvre de Charbonneau à une réflexion sur l’écologie politique. Il ne s’est pas intéressé seulement à la question écologique ; son œuvre nous propose une analyse plus vaste des coûts de la modernisation et des contradictions du monde moderne. Pendant longtemps cette préoccupation a fait de lui un marginal dans le monde intellectuel. Cependant, Charbonneau voyait juste lorsqu’il annonçait la crise écologique, l’aggravation de la bureaucratisation de l’existence et la technocratisation de la vie sociale. Plus le temps passe et plus son œuvre s’avère pertinente et actuelle.
    _________________________

    Une conférence présentée par Daniel Cérézuelle, dans le cadre de notre cycle Ecologie(s) critique(s).

    #Bernard_Charbonneau #écologie #écologie_politique #liberté #philosophie #personnalisme #université_populaire #UPB

    • Et pour rappel, ce texte paru dans @vacarme en juin 2016

      Migrants et réfugiés : quand dire, c’est faire la politique migratoire

      À partir de la polémique soulevée par Barry Malone sur la chaîne Al Jazeera visant à substituer au terme générique de migrants celui de réfugiés, « plus approprié pour nommer des personnes qui fuient la guerre et arrivent en masse en Europe », Cécile Canut propose une traversée des transformations et reformulations des mots utilisés pour qualifier la migration qui mettent à jour le durcissement des positions et les soubassements des choix politiques à l’œuvre, lesquels barrent toujours plus l’accès à la complexité des subjectivités individuelles, des trajectoires et de leurs causes pour construire des catégories d’êtres humains homogènes déterminées par « le même ». Nommer c’est toujours faire exister rappelle-t-elle, d’où l’importance de cette attention à la bataille des mots et aux questionnements profonds qu’ils ouvrent.

      Le 20 août 2015, la chaîne Al Jazeera, par le biais d’un de ses collaborateurs, Barry Malone, lançait une petite bombe médiatico-communicationnelle en publiant sur son blog un article intitulé « Why Al Jazeera will not say Mediterranean “migrants” ? », article mis en mots et en images le lendemain, à travers un débat télévisuel proposé par la même chaîne : « Migrants or refugees ? Thousands fleeing conflict in desperation have been undermined by language used by the media to describe their plight » [1]. Ce texte, tweeté et retweeté, a circulé sur les réseaux sociaux avant de faire une entrée fracassante dans les espaces médiatiques européens les jours qui ont suivi, suscitant de multiples débats jusqu’au début du mois de septembre.

      La polémique visait à substituer au terme générique de « migrants » celui de « réfugiés », plus « approprié » pour nommer des personnes qui fuient la guerre et arrivent en masse en Europe. L’accusation portée contre les gouvernements européens, le parti pris affiché pour les réfugiés et la dimension prescriptive impliquée par la décision du directeur des informations d’Al Jazeera de ne plus utiliser le terme « migrants », ont non seulement engagé une querelle nommée « sémantique » mais ont surtout eu un effet performatif immédiat : tous les médias ou presque ont modifié leurs pratiques langagières en privilégiant le terme « réfugiés ». Contrairement à d’autres, cette polémique ne s’est donc pas limitée à une querelle byzantine au sein du microcosme médiatique.
      Un soudain souci de « sémantique »

      Cet événement de parole est tout d’abord le révélateur d’un questionnement profond sur le processus de catégorisation des êtres humains dans nos sociétés, questionnement qui s’inscrit dans une longue histoire du sens, et dont bien des auteurs ont rendu compte, depuis les penseurs grecs jusqu’aux plus récents philosophes. Le langage n’est pas le filtre transparent d’un réel immédiat, les mots et les énoncés cristallisent bien au contraire un ensemble de connotations, de positionnements subjectifs et d’orientations sociales et politiques dont les locuteurs sont toujours responsables, même lorsque qu’à leur insu ils reprennent les significations et les catégorisations imposées par d’autres, ce que l’on attribue en analyse du discours à l’interdiscours ou encore au dialogisme [2]. Si le coup de force d’Al Jazeera a été de rappeler cette évidence au grand public, sa décision de ne plus employer le terme « migrants » renvoie pourtant à une approche supposée objective du langage : l’argument central de la démonstration de Barry Malone repose en effet sur l’idée que le terme « réfugiés » est mieux en rapport avec le réel ; il est plus juste en ce qu’il rend compte de ce que vivent des millions de personnes fuyant la guerre : des personnes demandant refuge et devant être traitées comme des victimes. En imposant un des sens du terme « réfugiés », ou plus exactement en revenant à une signification oblitérée en Europe, la chaîne vient contrer un autre sens, celui-ci plus récent et plus restrictif, issu de la Convention de Genève (1951), elle-même ratifiée par cent-quarante-cinq états membres des Nations unies, et visant à définir le « réfugié » non seulement en considération de son état de victime de régimes politiques, mais en vertu d’un statut obtenu suite à une « demande d’asile ».

      Si la définition est valable dans les deux cas, la condition pour acquérir le statut de réfugié est d’apporter la preuve de ces persécutions ou menaces par le biais d’une demande administrative très souvent longue et laborieuse. Ainsi que le rappelle Karen Akoka [3], le passage d’une approche collective visant la situation politique des États jusqu’aux années 1970, à une mise en cause individuelle de ceux que l’on va alors nommer les « demandeurs d’asile », montre à quel point le lien permanent aux conditions politiques de gestion de la migration, c’est-à-dire à sa mise en œuvre pratique, par l’Ofpra notamment, conduit sans cesse à de nouvelles catégories et de nouvelles définitions de ces mêmes catégories.

      Al Jazeera s’engage ainsi de manière frontale dans la lutte des significations, et par conséquent dans la lutte politique des questions migratoires européennes ; par le biais de cette injonction, elle rappelle à l’Europe ses obligations : celles d’accueillir toute personne persécutée sans conditions mises à cette humanité. La fin de l’article de Barry Malone indique que ce choix est bien évidemment lui-même orienté, puisqu’il a pour but de défendre et de parler au nom de ces personnes démunies, notamment dénuées du pouvoir de dire qui elles sont et ce qu’elles font, c’est-à-dire privées d’un vrai pouvoir de parole : At this network, we try hard through our journalism to be the voice of those people in our world who, for whatever reason, find themselves without one. Migrant is a word that strips suffering people of voice. Substituting refugee for it is — in the smallest way — an attempt to give some back [4]. Redonner une voix aux sans-voix, telle est l’ambition affichée.

      En cette fin d’été 2015, un léger vent de panique s’est répandu sur les médias français. Quel mot utiliser ? Comment se positionner face à cette décision partout adoptée au prétexte de sa bienveillance vis-à-vis des victimes de la guerre ? Les journalistes français entraînés malgré eux dans le débat se sont tournés immédiatement vers les chercheurs susceptibles, en tant qu’experts supposés, de détenir la clé du problème. Sans délai, les principaux quotidiens de l’Hexagone ont donc pris part aux débats par le biais d’articles donnant largement la parole auxdits spécialistes. Toutefois, les problèmes « sémantiques » étaient loin de se régler, ils se compliquaient même, cette polémique mettant finalement en cause les pratiques des chercheurs. Ainsi, un jeune journaliste du Nouvel Observateur, après une série de questions sur les mots de la migration, en est venu à la question qu’il brûlait de me poser : quel est le mot qu’il faut utiliser ? Autrement dit : quel est le meilleur mot ? Alors que toute utilisation d’un terme dépend de son contexte, des interlocuteurs en présence, de ses conditions de production sociale, politique voire subjective, la réponse à une telle question est bien entendu impossible. Pour autant, le journaliste ne renonçait pas à cet impératif en intitulant son article : « Doit-on les appeler “migrants” ou “réfugiés” ? ». L’injonction à une supposée fidélité à la vérité objective persistait même si, au cours du texte, la fluctuation des significations et l’instrumentalisation politique des catégories étaient évoquées.

      Au-delà de cet épisode médiatique, dont on aura pu observer les soubresauts ici ou là au cours de l’année 2015 et encore en ce début 2016, il importe ici de revenir sur la circulation des significations données par les uns et les autres, à différents niveaux d’instances de parole, afin de comprendre comment se reconstruit à un moment donné l’hétérogénéité du sens et de ses interprétations. La question n’est pas seulement de savoir pourquoi le terme « réfugié » s’est imposé dans les discours médiatiques, en parallèle ou au détriment du terme « migrants », mais de comprendre ce que font les locuteurs (quels qu’ils soient : politiques, journalistes, chercheurs ou simples citoyens) quand ils commentent leurs mots et leurs discours pour, notamment, justifier leurs pratiques. Dans le cadre de la politique migratoire européenne en particulier, que font les locuteurs quand ils choisissent de discourir sur les catégories de migrants, réfugiés, exilés, sans-papiers, clandestins, etc. ? Pourquoi cet empressement à choisir un seul terme englobant qui viendrait dire un réel bien complexe ou au contraire en exclure d’autres trop embarrassants ?

      Au bout de cette traversée des transformations et reformulations, de la migration, il convient d’observer que l’ensemble de ces débats a finalement entériné une opposition politique déjà à l’œuvre depuis bien longtemps [5], mais qui s’exporte dans les média au début de l’année 2015 entre « migrants économiques » et « réfugiés politiques », les premiers rejetés automatiquement de l’espace Schengen, les autres finalement accueillis en Europe (au moins durant l’année 2015).

      Rappelons tout d’abord que le mot « réfugiés » a désigné au départ les protestants chassés de France après la révocation de l’édit de Nantes. Toutefois, le terme de plus en plus controversé au XIXe siècle a pris de l’ampleur au début du XXe siècle alors que les conflits austro-prussiens jetaient des milliers de civils sur les routes, particulièrement les populations juives de l’Est. Poussés par le marasme économique, les pogroms et les discriminations subis ensuite en Russie, 2,5 millions de Juifs s’exilèrent à l’Ouest, jusqu’aux heures sombres d’une Europe voyant Juifs et Tsiganes fuir le nazisme dès les années 1930 non seulement vers l’Europe mais vers le continent américain. La politisation de la question des réfugiés s’est élaborée après la guerre au niveau international, par le biais des Nations unies, avec notamment la Convention de Genève en 1951 qui fixe alors institutionnellement le sens du terme « réfugié ».

      Si pendant les années d’après-guerre, la France a accueilli des Espagnols, des Italiens, des Polonais, des Portugais, si elle est même allée chercher des travailleurs dans ses anciennes colonies pour des raisons économiques, la catégorisation visant à dissocier ces derniers des travailleurs français a commencé autour des années 1970. La cristallisation de ce changement politique a pris forme avec l’utilisation d’un terme nouveau : « immigrés ». Faisant référence dans un premier temps au champ du travail (« travailleurs immigrés [6] »), ce terme s’est imposé dans les débats publics, politiques, juridiques et médiatiques afin de dissocier l’ensemble homogénéisé des « immigrés » et celui des « étrangers » puis des « Français de souche », expression importée de l’extrême droite [7] dès la fin des années 1970. La politique migratoire, à partir des années 1980, a opéré une différenciation entre les critères de définition : alors que la notion d’« étranger » est juridique, celle d’« immigré » renvoie à une entité socio-culturelle qui aboutit progressivement à une ethnicisation des étrangers venus du Maghreb et d’Afrique en général. Bien souvent de nationalité française, « l’immigré » fait l’objet de discours et de mesures spécifiques de par son origine questionnant de fait son appartenance réelle à la France. Dès 1986, la modification législative de l’entrée de séjour par le ministère de l’Intérieur a engagé cette nouvelle catégorie dans le champ policier. Suspectés, les « immigrés » ont dès lors constitué une catégorie générique appréhendée comme douteuse pour la nation, ce que les termes « clandestins » ou « illégaux » sont venus renforcer.

      Il n’est plus possible d’envisager les individus dans leur devenir, selon leurs trajectoires et leurs subjectivités, et encore moins selon une approche sociale telle qu’elle existait jusqu’alors dans les milieux professionnels.

      Parallèlement à ce glissement des critères, les travailleurs concernés ont vu leur demande de régularisation entravée. Dans les années 1972-1973, ils ont commencé à se mobiliser en se nommant eux-mêmes « travailleurs sans-papiers ». Cette expression est apparue lors des premières protestations aux circulaires Marcelin-Fontanet (1972) qui mettaient fin aux régularisations automatiques. Véritable « label militant », cette dénomination s’est opposée à la catégorie « travailleurs immigrés », faisant référence à l’ensemble des étrangers, impliquant même les déboutés du droit d’asile. Du côté des médias, des marqueurs identitaires (couleurs de la peau, origine géographique, religion, culture…) ont de plus en plus déterminé les catégorisations légitimées par les discours politiques du Front national, repris à droite puis à gauche (« clandestins », « immigrés illégaux », « Arabes », « Maghrébins », « Africains », « musulmans ») et ont constitué un facteur de sélection des candidats à l’immigration : les visas d’entrée ont dès lors été distribués de manière variable selon les pays concernés de sorte qu’en France, comme dans l’ensemble de l’Europe, on en vienne à une prise en charge de cette question par les ministères de l’Intérieur et de la Justice au détriment des ministères des Affaires sociales ou de l’Emploi, et que soit attesté un changement de régime discursif et de pratiques politiques. Au-delà de l’essentialisation des étrangers, assignés à leur différence — ce que les expressions « deuxième génération », « troisième génération », etc. font perdurer —, le processus d’homogénéisation par le biais de ces catégories est croissant : il n’est plus possible d’envisager les individus dans leur devenir, selon leurs trajectoires et leurs subjectivités, et encore moins selon une approche sociale telle qu’elle existait jusqu’alors dans les milieux professionnels. Au contraire, il s’agit de lui substituer des catégories de pensée visant à construire des groupes homogènes uniquement déterminés par le même, une origine ethnique et un héritage culturel, pour toute identité. Ce nouvel ordre du discours assure en fait un régime d’existence uniquement fondé sur l’appartenance, valable pour tous (« Français de souche », « Français d’ailleurs », « immigrés », « clandestins », etc.), associé à une série d’euphémisations : « gens venus d’ailleurs », « gens d’origine étrangère », « gens d’autres cultures »… On bascule ainsi d’une appréhension des citoyens, définis en fonction de leur appartenance à un régime de droits, à une stigmatisation fondée sur des critères d’appartenance telle que définie par le pays dit « d’accueil ». Qu’ils soient Français ou non importe peu : ils ne le seront jamais vraiment.

      L’année 1996 a vu naître le rapport parlementaire sur « l’immigration clandestine » qui s’est concrétisé en octobre par le projet de loi « Jean-Louis Debré » imposant notamment les certificats d’hébergement. Puis le durcissement des lois a abouti, malgré les protestations, à la loi Chevènement définitivement adoptée en mars 1998. Les années 2000, quant à elles, ont infléchi les oppositions en fonction des nécessités économiques du pays selon une logique ultralibérale : en parallèle à la construction des centres de rétention et à la multiplication des reconduites à la frontière, le gouvernement Sarkozy a engagé de manière explicite une action de tri des populations pour favoriser ce qu’il a cru bon de nommer une « immigration choisie » supposément réparatrice des torts de l’« immigration subie ». Il ne s’est plus agi d’accueillir des personnes désireuses de venir en France mais d’endiguer les « flux migratoires à la source », par le biais d’un ensemble de mesures dissuasives de surveillance aux frontières de l’Europe. Le tout-puissant dispositif géré par Frontex — agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne — s’est doté d’un nombre considérable de nouvelles expressions (« contrôle de l’immigration illégale », « force de réaction rapide [RABITs] », « directive de retour », « centre de rétention », etc.) et de nouveaux outils de contrôle et de coercition (Eurosur, Eurodac, Système d’Information Schengen [SIS], Visa Information System [VIS], Système d’entrée-sortie, European Initiative on Integrates Return Management [EURINT], etc.).

      C’est dans ce contexte socio-discursif rapidement tracé que l’arrivée de Syriens, d’Irakiens et d’Afghans, mais aussi d’Érythréens et de Soudanais en grand nombre constitue pour les gouvernants une « crise migratoire ». Ajoutés à tous ceux qui, bloqués aux frontières, attendent souvent depuis longtemps l’entrée dans la « forteresse Europe », ces derniers font l’objet de violences et de réactions de rejet avant d’être finalement acceptés. Pour Al Jazeera comme pour le HCR (Haut Comité aux Réfugiés), il importe alors de faire une distinction entre ces futurs demandeurs d’asile, fuyant la guerre et les persécutions, et les « immigrés économiques ».
      La politique des catégories performatives

      La nécessité de questionner les mots pour comprendre les réalités migratoires ne date pas de l’été 2015. La supposée alternative entre « migrants » et « réfugiés » s’est pourtant progressivement constituée comme sujet de débat avec l’arrivée des personnes fuyant la guerre par la « route des Balkans ». Ainsi, France Info s’interrogeait dès le 29 mai 2015 : « Migrants ou réfugiés : où est la frontière ? ». Carine Fouteau, spécialisée dans les questions migratoires à Mediapart, faisait paraître le 12 août 2015 un article intitulé « Réfugiés, intrusion, hotspots : le nouveau lexique des migrations ». En rappelant qu’aucun mot n’est neutre mais toujours investi « de significations singulières liées au contexte actuel », la journaliste mettait en garde quant au poids des médias et des politiques dans le façonnage et les représentations des opinions publiques. Elle faisait état de ce qui devient un enjeu politique majeur, le changement de connotation pris par le terme « migrants », longtemps utilisé par les chercheurs comme un terme « générique », englobant (« tout individu se déplaçant d’un lieu à un autre »), devenu un moyen pour « disqualifier les personnes ne relevant a priori pas de l’asile ». En accentuant cette opposition, les responsables politiques mettent ainsi en compétition les demandeurs d’asile et les « migrants économiques », ces derniers « perçus comme indésirables » étant « destinés à être renvoyés dans leur pays d’origine ». Une constellation de termes négatifs (« intrusion », « effraction », « flux », « vagues », « flots de migration », « traite », « passeurs », « trafiquants », « mafieux ») décrivent les migrants qui deviennent alors l’objet d’une gestion managériale (« points de fixation », « hot spots », « clef de répartition », « quotas », « centres de tri », « centres d’attente »…) performant une logique de sélection. Il s’agit de mettre en œuvre le partage engagé aux frontières tel qu’annoncé dès le 17 juin par le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, au conseil des ministres.

      La polémique lancée par Al Jazeera, si elle prend acte de la charge « péjorative » attribuée au terme « migrants » devenu synonyme de « nuisance », ne dénonce pas cette logique de tri déjà en place aux frontières. Le texte semble même s’en accommoder : Barry Malone cite les nationalités (Afghans, Syriens, Irakiens, Libyens, Érythréens, Somaliens) pour lesquelles il faut utiliser « réfugiés » afin de ne pas les confondre avec des « migrants économiques ». S’il ne dit rien des autres nationalités, les « migrants économiques », il entérine une distinction que personne ne va plus questionner, excepté quelques chercheurs.

      L’emballement compassionnel qui s’est emparé de tous les médias et réseaux sociaux au cours de l’été 2015 et plus particulièrement début septembre lors de la diffusion de la photo du petit Alan Kurdi, explique en partie l’adoption du terme « réfugiés » contre celui de « migrants ». Il s’est agi dans un premier temps de s’opposer aux discours « de haine » prononcés en Europe, notamment par le ministre anglais des Affaires étrangères Philip Hammond ou David Cameron lui-même [8], et des pratiques de violence à l’égard des personnes dans les Balkans. C’est contre les « discours infamants » et une politique européenne inhumaine que s’insurgent alors les journalistes d’Al Jazeera ainsi qu’ils le décrivent dans la présentation de l’émission du 21 août 2015.

      Au-delà de l’empathie suscitée par cette accusation, le découpage implicite entre les « bons » et les « mauvais » arrivants et la possibilité de chasser les uns (plus noirs, peu qualifiés…) au profit des autres (plus blancs, plus compétitifs…) se sont révélés efficaces pour entériner la politique du tri déjà effective : il suffisait donc de mettre les mots sur les choses, de nommer plus clairement ce qui existait pour le rendre acceptable, et pourquoi pas souhaitable.

      Des journaux comme Le Monde [9], Le Figaro ou Libération, des radios comme France Culture ou Europe 1 se sont focalisés sur les usages linguistiques, certains rappelant la difficulté de diluer le sens juridique de « réfugiés », d’autres insistant sur le sens péjoratif du participe présent « migrant » réduisant les personnes « à une errance ». Sollicités, les spécialistes des questions migratoires ont été parfois bien ennuyés puisqu’ils utilisent, comme les militants, le terme « migrants » depuis longtemps dans leurs travaux [10]. L’injonction à n’utiliser qu’un seul terme a toutefois été remise en cause par Claire Rodier rappelant que le terme « migrants » s’était imposé pour éviter de hiérarchiser les « exilés », afin de ne pas enfermer « les gens dans des cases ». Plus encore, Danièle Lochak a mis en garde : « Nous avons toujours refusé de les distinguer. »

      Les nuances apportées par les chercheurs n’y ont rien fait, la préconisation d’Al Jazeera a été relayée par Libération (« Ne plus dire migrants mais réfugiés [11] ») comme par Le Figaro. Ce dernier est même allé plus loin en criminalisant les « migrants » par le biais d’une réorientation du débat : « Réfugiés ou clandestins », éditorial d’Yves Thréard. L’objectif était bien clair : « La générosité envers les réfugiés politiques n’est concevable que si la plus grande fermeté est opposée aux clandestins économiques », énoncé repris par France 24. Chez chacun, la multiplicité des usages des « termes imparfaits » est symptomatique d’une recherche d’objectivité visant à contourner les partis pris idéologiques déterminant les choix. La plupart de ces glossaires s’appuient en fait sur la Charte de Rome, document élaboré par la Fédération internationale des journalistes avec le HCR, dans lequel les définitions sont orientées vers une valorisation des « réfugiés ». Les « migrants » y sont systématiquement appréhendés par la négative : « des personnes qui se déplacent pour des motifs qui ne sont pas inclus dans la définition légale de ce qu’est un réfugié », ou qui « choisissent de s’en aller non pas en raison d’une menace directe de persécution ou de mort, mais surtout afin d’améliorer leur vie en trouvant du travail… » « Point de vue du HCR : “réfugié” ou “migrant” ? Quel est le mot juste ? », l’organisme hiérarchise définitivement l’opposition entre les arrivants, et use de son statut d’organisation internationale pour infléchir les catégories de pensée. Le poids de ce discours dans l’espace politique et médiatique est sans précédent, ce que les chercheurs Jurgen Carling [12] et Judith Vonberg [13] dénoncent avec virulence, tout comme Olivier Adam s’insurge contre le « tri sélectif » qui entraîne une « diabolisation mécanique » des migrants. L’opposition ainsi tracée entre deux catégories qui regroupent grosso modo les Syriens, Irakiens et Afghans d’un côté et les Africains de l’autre, n’est donc pas sans liens avec l’élaboration des politiques migratoires et son imposition dans l’espace social. Ce débat sémantique occulte au fond un partage entre les êtres humains qui ne comptent pour rien, les « sans-part » (Rancière) : ceux qui peuvent encore prétendre à la vie parce qu’ils sont bons à recycler dans les économies du capitalisme tardif, et ceux dont la mort n’importe décidément plus, et que l’on n’hésite pas à abandonner au sort funeste qui est le leur aux portes de l’Europe, selon une logique du tri [14] devenue impitoyable.
      Façonner les esprits, diriger les conduites

      Tout au long de cette bataille pour les mots, jamais la parole n’est donnée aux exilés/migrants/demandeurs d’asiles eux-mêmes, qui peuvent dans certains cas préférer d’autres termes, comme « exilés », « voyageurs » ou « aventuriers [15] ». Au contraire, le monopole de la nomination est toujours assuré par ceux qui détiennent le monopole de la domination institutionnelle et médiatique et parlent au nom des autres.

      La réalité vécue est toujours très complexe, et il n’existe aucune possibilité de différencier les personnes en fonction d’un critère unique : « C’est toujours un ensemble de choses qui poussent les gens à partir sur la route. »

      Les rhétoriques affichées comme objectives, et élaborées sur des oppositions binaires, dissimulent habilement des partis pris politiques dont les effets sur les intéressés sont d’une rare efficacité. La définition sur le modèle du dictionnaire supposé neutre est une des formes de dissimulation privilégiée. Toutefois, plus que d’espérer, comme le souhaite Jørgen Carling, que le terme « migrants » puisse encore faire office de terme générique englobant, ce qui supposerait de sortir le langage des relations de pouvoir, il convient plutôt de suivre attentivement les méandres des significations et resignifications des énoncés en fonction des instances énonciatrices afin de comprendre les enjeux politiques qui innervent nos sociétés. Aucun mot ne viendra dire le réel, construit justement par les discours : nommer c’est toujours faire exister, dire c’est toujours faire. En ce sens, la moralisation qui s’instaure actuellement dans l’appréhension des personnes arrivant en Europe est symptomatique d’un changement de conception mais reste tributaire des exigences utilitaristes de l’économie libérale. Comme le rappelle Virginie Guiraudon, « rien ne dit qu’un jour prochain les indésirables soient les réfugiés, et les migrants économiques les étrangers “utiles”. C’est donc bien le débat qui est mal posé, puisque pour le patronat allemand par exemple, « les réfugiés actuels sont une chance pour l’économie allemande [et] pour qui le mot-valise “réfugié économique” signifie force de travail motivée et à forte valeur ajoutée » [16].

      La réalité vécue est toujours très complexe, et il n’existe aucune possibilité de différencier les personnes en fonction d’un critère unique : « C’est toujours un ensemble de choses qui poussent les gens à partir sur la route [17]. » À rebours de cette exigence, les médias et les politiques n’envisagent nullement de restituer cette complexité : les catégories visent au contraire à orienter la lecture de ce qui est en train d’arriver, à donner à interpréter selon des grilles, des angles de vue, des perspectives. La bataille n’est pas sémantique au sens où des définitions existeraient en dehors des enjeux politiques et sociaux : c’est une bataille discursive où le discours s’élabore selon un certain « ordre » (Foucault). Faire la généalogie de ces discours est le seul moyen de comprendre comment le sens fait advenir le réel, alors qu’il le construit socialement et politiquement. Il ne s’agit donc ni de langue, ni de linguistique et encore moins de définition de dictionnaire : il s’agit de lieux et de moments de parole qui entrent en lutte les uns avec les autres. C’est ainsi que, concernant cette séquence médiatique, le HCR a clairement imposé son point de vue au détriment par exemple de la définition générique des Nations unies.

      Si les personnes qui arrivent en France ne sont ni des réfugiés, ni des migrants, puisque chaque situation est spécifique, les catégories réifiées et binaires ne nous sont d’aucun secours. Choisir les mots pertinents en fonction des situations, des devenirs, des histoires de vie, des trajectoires, des subjectivités relève toutefois de la gageure. L’historicisation de ces phénomènes devient alors primordiale afin de reconstituer les interdiscours. Si, en 1905, l’Angleterre adoptait les Aliens Acts instituant déjà la différence entre « réfugiés politiques » et « migrants économiques », les derniers glossaires institutionnels des mots de la migration sont actuellement en train d’escamoter le terme « intégration ». Ainsi, alors que la mise en catégorie des étrangers est une vieille histoire européenne, il semble aujourd’hui que l’impératif de réciprocité et le souci d’hospitalité, malgré tout présents dans le projet d’intégration, soient même portés à s’effacer de nos pratiques sociales : sombre présage qui ferait d’un étranger un individu ayant vocation à s’identifier, à s’oublier… ou bien à disparaître.

      https://vacarme.org/article2901.html

  • Vivre de la terre (3/4) : Redistribuer la terre : une utopie ?
    https://www.franceculture.fr/emissions/cultures-monde/vivre-de-la-terre-34-redistribuer-la-terre-une-utopie


    Championne des inégalités agraires selon un rapport d’Oxfam, l’Amérique latine se distingue par l’ultra-concentration de ses terres. Le XXe siècle a connu de nombreuses tentatives infructueuses de réformes agraires. Pourquoi semble-t-il impossible d’y concevoir une répartition équitable des terres ?

    Intervenants
    Michel Merlet
    ingénieur agronome, directeur de l’association AGTER.

    Jacobo Grajales
    maître de conférences en science politique à l’Université de Lille et membre du CERAPS.

    Nancy Andrew
    chercheuse associée au LAM, socioliogue du développement rural et spécialiste de la question foncière en Afrique australe.

  • Vivre de la terre (1/4) : L’Europe aux racines du malaise paysan
    https://www.franceculture.fr/emissions/cultures-monde/vivre-de-la-terre-14-leurope-aux-racines-du-malaise-paysan


    Entrée en vigueur en 1962, les discussions européennes vont bon train autour d’une nouvelle version de la Politique agricole commune et le mal-être des agriculteurs apparaît comme un enjeu important. Comment expliquer les ressorts de la souffrance sociale du monde paysan ? Faut-il parler de crise ?

    #pac
    http://rf.proxycast.org/1538202319047368704/11701-18.02.2019-ITEMA_21985513-0.mp3

    Vivre de la terre (2/4)
    Protéger la terre : la bataille des modèles
    https://www.franceculture.fr/emissions/cultures-monde/vivre-de-la-terre-24-proteger-la-terre-la-bataille-des-modeles


    http://rf.proxycast.org/1538573714038202368/11701-19.02.2019-ITEMA_21986614-1.mp3
    #agriculture

  • #Edgardo_Lander: Ante la crisis de #Venezuela la #izquierda carece de crítica
    https://www.aporrea.org/actualidad/n330938.html

    ¿Qué sucedió con los procesos de participación social que promovieron los gobiernos bolivarianos?

    –Hoy en Venezuela hay una desarticulación del tejido de la sociedad. Después de una experiencia extraordinariamente rica de organización social, de organización de base, de movimientos en relación a la salud, a las telecomunicaciones, a la tenencia de la tierra urbana, a la alfabetización, que involucró a millones de personas y generó una cultura de confianza, de solidaridad, de tener la capacidad de incidir sobre el propio futuro, uno suponía que en momentos de crisis habría capacidad colectiva de responder, y resulta que no. Por supuesto, hablo en términos muy gruesos, hay lugares donde hay mayor capacidad de autonomía y autogobierno. Pero en términos generales se puede decir que la reacción que se vive hoy es más en términos competitivos, individualistas. De todos modos, creo que quedó una reserva que en algún momento puede salir a flote.

    –¿Por qué no pudo mantenerse esa corriente de #participación y organización?

    –El proceso estuvo atravesado desde el principio por una contradicción muy seria, que es la contradicción entre entender la organización de base como procesos de #autogestión y de autonomía, de construcción de tejido social de abajo hacia arriba, y el hecho de que la mayor parte de estas organizaciones fueron producto de políticas públicas, de promoción desde arriba, desde el Estado. Y esa contradicción se jugó de manera diferente en cada experiencia. Donde había experiencia organizativa previa, donde había dirigentes comunales, había una capacidad de confrontar al Estado; no para rechazarlo, sino para negociar. Además, a partir de 2005 hay una transición del proceso bolivariano desde algo muy abierto, desde un proceso de búsqueda de un modelo de sociedad diferente al soviético y al capitalismo liberal, a tomar ya la decisión de que el modelo es socialista, y a una interpretación del socialismo como estatismo. Hubo mucha influencia político-ideológica cubana en esta conversión. Entonces estas organizaciones ya empiezan a ser pensadas en términos de instrumentos dirigidos desde arriba, y empieza a consolidarse una cultura estalinista en relación a la organización popular. Y eso le ha dado obviamente mucha precariedad.

    #chavismo #Maduro #Guaino #bolivarianismo

  • Rebel Cities 20: With #Hip-Hop As Sound Track, Young Senegalese Say Enough Is Enough | Occupy.com
    https://www.occupy.com/article/rebel-cities-20-with-hip-hop-sound-track-young-senegalese-say-enough-enough

    “The leaders hang on to the power

    In spite of the opposition of the population.

    Politicians are all the same, no difference.

    Only broken promises and lies.

    We are fed up of your nonsense,

    We really need change.”

    These are the lyrics of #Senegal hip hop artist Keur Gui in the 2014 song “Diogoufi,” which means “Nothing has changed.” The group is active in political organizing, walking the talk of their lyrics. In 2011, its leading vocalists were at the forefront of the Senegal #Y’en_A_Marre ("We Are Fed Up"), founded in the capital #Dakar alongside other artists, academics and activists.

    #Politic #democracy #municipalism

  • Silvia Rivera Cusicanqui: “Tenemos que producir pensamiento a partir de lo cotidiano” - Edición General - El Salto

    https://www.elsaltodiario.com/feminismo-poscolonial/silvia-rivera-cusicanqui-producir-pensamiento-cotidiano-pensamiento-i

    Desde tiempos coloniales se han dado procesos de lucha #anticolonial; en cambio, lo #decolonial es una moda muy reciente que, de algún modo, usufructúa y reinterpreta esos procesos de lucha, pero creo que los despolitiza, puesto que lo decolonial es un estado o una situación pero no es una actividad, no implica una agencia, ni una participación consciente. Llevo la lucha anticolonial a la práctica en los hechos, de algún modo, deslegitimizando todas las formas de cosificación y del uso ornamental de lo indígena que hace el Estado. Todo eso son procesos de colonización simbólica.

    #bolivia #decolonialismo #postcolonialismo #mundoch'ixi

  • #Carto_ZAD

    Des cartes de la zone et/ou du projet

    La Zad est un endroit multiple qui évolue constamment, il y a donc de nombreuses façons de l’appréhender, le comprendre et le défendre. Les cartes ne sont qu’une des manière de le représenter, la meilleurs façon de le connaître étant de venir y passer quelques temps.

    Ici le territoire change perpétuellement. Il est différent en temps calme et lors de risque d’expulsion, il change au grès des apparitions, transformations et parfois disparitions de lieux de vie et de constructions plus ou moins défensives ainsi qu’en fonction des cultures et qu’on y trouve.

    Voici donc quelques cartes qui peuvent aider à découvrir la Zad, s’y déplacer, la défendre, l’imaginer et mieux comprendre se qui se passe ici et ce qui s’y est passé.

    Certaines des cartes en plus d’être téléchargeables en format jpeg pour impression sont aussi récupérable à des format éditables (PDF ou SVG) pour ceux qui voudraient les modifier. De plus une carte éditable au format SVG et son tutoriel sont téléchargeables afin de permettre à ceux qui le souhaitent de faire leur propre carte ou fond de carte de la Zad avec des logiciels comme inkscape.

    Si vous avez des cartes qui ne sont pas présente dans cette rubrique et que vous souhaitez les mettre en ligne, ou pour toute autre question, demande de carte, remarque ou autre n’hésitez pas à nous écrire à l’adresse indiquée plus bas.

    https://zad.nadir.org/spip.php?rubrique70
    #CartoZAD #ZAD #NDDL #cartographie
    ping @reka

  • Intersectionnalité
    http://mouvements.info/intersectionnalite

    À l’automne 2018, l’historien Gérard Noiriel a publié sur son blog personnel1 un long texte particulièrement relayé et discuté parmi les chercheur.e.s en #sciences_sociales sur les réseaux sociaux. Il y commente la controverse entre Mark Lilla et Eric Fassin au sujet du concept de « #gauche_identitaire » et élargit son propos à l’écriture de l’histoire des #classes_populaires. Il reprend notamment une idée développée dans l’introduction de son nouveau livre, Une histoire populaire de la France : « la crise du mouvement ouvrier a considérablement affaibli les #luttes_sociales au profit des conflits identitaires. Le projet d’écrire une #histoire_populaire du point de vue des vaincus a été accaparé par les porte-parole des #minorités (religieuses, raciales, sexuelles) pour alimenter des histoires féministes, multiculturalistes ou postcoloniales, qui ont contribué à marginaliser l’histoire des classes populaires. Il suffit de consulter la bibliographie des articles et ouvrages publiés en histoire ces dernières années ou de regarder les recrutements sur des postes universitaires pour être convaincu de cette remarque »2. L’accueil enthousiaste de ce texte auprès de certain.e.s chercheur.e.s en sciences sociales nous a étonné.e.s et interpellé.e.s. En tant que chercheur.e.s travaillant sur ces questions, il nous était difficile de rester silencieux/euses, pour au moins deux raisons.

    Dossier #intersectionnalité (lu que l’intro) #genre #minorités