La Rotative

Site collaboratif d’informations locales - Tours et alentours

  • Petite chronique désenchantée de l’enseignement prioritaire #1
    https://larotative.info/petite-chronique-desenchantee-de-l-2378.html

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    En réalité, le classement REP correspond à une certaine configuration sociologique basée sur l’analyse de la catégorie socio-professionnelle des parents d’élèves, plus souvent que la moyenne chômeurs, non diplômés, intérimaires, ouvriers ou exerçant des métiers de services à la personne, bref, des petits revenus. On pourrait rajouter à cela que les familles nombreuses et monoparentales sont surreprésentées, tout comme celles possédant un capital culturel assez faible (faible fréquentation des musées, place marginale de la lecture à la maison, maîtrise inégale de la langue française …), et celles issues des Zones Urbaines Sensibles. Sans surprise, les taux de réussite à l’examen national du Brevet y sont bien plus faibles que la moyenne nationale et la poursuite de la scolarité dans les lycées généraux est moins fréquente, d’autant que la réputation de ces élèves les précède dans les établissements les plus huppés, ceux de centre-ville, qui fourniront les nouvelles légions d’étudiants des classes préparatoires.

    Le postulat est bête comme chou : on manque de personnel et d’argent pour encadrer les élèves, notamment dans leur travail personnel en dehors du temps scolaire, et l’on sait comme cela impacte la réussite ; il y a légion de gens gentils qui trépignent d’envie d’aider, tels que des étudiants, des retraités et des cadre sup’ qui veulent partager leur amour de la réussite ; il y a aussi et surtout tout plein d’entreprises trop généreuses qui ne rêvent que de pouvoir participer à l’effort collectif d’éducation de nos enfants, tous-ensemble-ouais. Miracle, des associations spécialisées vont vite se constituer et être reconnues d’utilité publique afin de pouvoir défiscaliser une partie des oboles des généreux donateurs, des grosses boîtes se pressent au portillon pour anoblir leur image à la sauce pédagogie, et le ministère rosit de plaisir à la signature de tous ces partenariats et conventions. Emballé, c’est pesé !

    Il y a aussi des tuteurs un peu plus âgés, en service civique, ce fourre-tout généralisé par François Hollande pour réduire les chiffres du chômage chez les jeunes sous couvert d’investissement citoyen et qui rémunère au lance-pierre (571 euros/mois) avec de l’argent de l’État des personnes généralement surdiplômées qui ne trouvent pas d’emploi après leurs études. Peu formés, ils doivent accompagner deux heures par semaine un ensemble d’élèves sélectionnés par la direction sur proposition des professeurs principaux. On cible plutôt des jeunes en difficulté mais pas trop et avec un comportement qui doit rester gérable. Rapidement, Zup de Co’ se rend compte qu’il n’y a pas assez d’élèves dans les rangs…et la direction inscrit donc quelques profils un peu plus turbulents. Parents et élèves sont convoqués à une réunion, ils signent un contrat d’engagement, reçoivent cahiers et identifiants internet et c’est parti. Plusieurs problèmes apparaissent assez vite : le ratio d’un étudiant pour six élèves s’avère un peu trop ambitieux et c’est bien vite le bazar, si bien que l’on passe assez vite à trois voire deux pour un ; les emplois du temps pour l’encadrement des devoirs changent chaque semaine et la Vie Scolaire n’est pas au courant de tout…

    #enseignement #REP #collège

  • Changer le nom du Sanitas : la violence symbolique de la politique de la ville
    https://larotative.info/changer-le-nom-du-sanitas-la-2372.html

    https://larotative.info/home/chroot_ml/ml-tours/ml-tours/public_html/local/cache-vignettes/L700xH525/arton2372-84874-6a534.jpg?1504182856

    Dans le cadre de son projet de rénovation urbaine, la mairie de Tours souhaite changer le nom du quartier du Sanitas pour le rendre plus attractif aux yeux des promoteurs. Ce processus révèle l’addiction des élus au marketing urbain et leur mépris à l’égard des classes populaires.

    C’est l’une des nouveautés de la rentrée 2017 sur le réseau Fil Bleu, le réseau de transports en commun de l’agglomération tourangelle : la station de tram Sanitas, située au coeur du quartier du même nom, devient « Saint Paul ». Ce changement, annoncée sur le site du réseau, marque la concrétisation d’un processus annoncé dans un précédent article publié en mars dernier : les élus de Tours souhaitent changer le nom du quartier, faire disparaître le Sanitas. Dans le protocole qui préfigure l’opération de rénovation du quartier, on peut lire :

    « L’ensemble des acteurs s’accorde aujourd’hui sur la nécessité de faire émerger à l’intérieur du quartier prioritaire de nouveaux noms de quartier appelés à se substituer à celui du Sanitas et devant contribuer à rendre plus attractive cette partie de la Ville. »

    Le marketing urbain, c’est ce qui transforme les villes en marques. Elles sont ainsi amenées à gérer leurs quartiers, leur patrimoine et leurs grands événements comme autant de produits dont il faudrait maximiser la valeur et qui contribueraient alors à renforcer la visibilité et le prestige de la ville. (...) En mars, un contributeur de La Rotative écrivait à ce propos que « changer le nom d’une marque pour attirer une nouvelle clientèle est une technique commerciale éprouvée. Effacer, à travers son nom, l’histoire et le visage d’un quartier populaire est plus exceptionnel » . On peut cependant donner quelques exemples d’opérations de ce type. Toutes concernent des quartiers populaires.

    #politique_de_la_ville #urbanisme #aménagement #ZUP #Sanitas

  • Pourquoi les « baisses de charges » sont un piège pour les salarié-es

    https://larotative.info/pourquoi-les-baisses-de-charges-2360.html

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    Le gouvernement a annoncé de nouveaux allégements de cotisations pour les salarié-es et les patrons. Couplée à la volonté de tailler dans les dépenses publiques, une telle mesure ferait peser un risque accru sur le financement des dispositifs d’assurances sociales.

    Ces exonérations représentent des sommes colossales. Dans le rapport annuel de l’URSSAF d’Ile-de-France [2] pour l’année 2016, on apprend que le montant des exonérations de cotisations s’élevait cette année-là à 5,1 milliards d’euros [3].

    De la même manière, le rapport de l’URSSAF du Loir-et-Cher pour l’année 2011 indique que le montant total des exonérations de cotisations consenties aux entreprises du département s’élevait à 145,7 millions d’euros [4]. Le document indique :

    « L’Etat a financé 138 millions des 145,7 millions d’exonérations consenties aux entreprises du Loir-et-Cher. 5,2 % sont restés à la charge de la Sécurité sociale comme en 2010. »

    Si, dans un certain nombre de cas, les exonérations de charges sont compensées par l’Etat, une part non négligeable reste à la charge des organismes sociaux. Pas étonnant, dans ces conditions, que les comptes de ces organismes soient régulièrement déficitaires. Le patronat et les divers gouvernements peuvent alors s’appuyer sur les déficits qu’ils ont eux-mêmes créés via ces différents mécanismes d’exonérations pour demander « une remise à plat », « une nouvelle réforme », des allongements de la durée de cotisation ou des réductions d’allocations.

    #salariat #sécurité_sociale #en_marche

  • Renouvellement urbain au Sanitas : « On veut nous balayer de la carte »

    https://larotative.info/renouvellement-urbain-au-sanitas-2344.html

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    Le 11 mai 2017, la mairie de Tours a dévoilé publiquement son projet de « rénovation urbaine » pour le quartier du Sanitas, avec dans les cartons la destruction de 430 logements sociaux. Entretien avec une habitante dont l’immeuble doit être démoli.

    Certaines personnes déclarent qu’il faudrait tout raser, que ce quartier est une « verrue ». On se sent méprisés, on a le sentiment qu’on veut nous balayer de la carte. On a l’impression qu’ils ne veulent pas vraiment de mixité sociale, mais qu’ils veulent transformer le quartier.

    C’est vrai qu’il y a du deal par endroits, que les rodéos nous empoisonnent parfois un peu la vie, mais leur solution va seulement déplacer le problème. Et s’il fallait raser des immeubles dès qu’il y a de l’insécurité, on n’en sortirait pas. Réhabiliter un quartier, ça passe aussi par de la prévention. Il faudrait donner aux habitants les moyens de vivre correctement. L’argument de la sécurité, c’est juste un prétexte.

    #urbanisme #quartiers_populaires cc @fil

  • Calais, La Chapelle, Austerlitz : tri sélectif au CAO

    http://larotative.info/calais-la-chapelle-austerlitz-tri-2285.html

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    La prochaine mise à la rue de quinze résidents du CAO de Tours illustre la manière dont l’Etat trie les exilés en fonction de l’endroit où ils ont été « ramassés ».

    Depuis, les CAO accueillent des exilés aux parcours divers, qui subissent des régimes différenciés selon qu’ils ont été « ramassés » à Calais, à La Chapelle ou à Austerlitz. En Indre-et-Loire, à force de mobilisations, le préfet a accepté de mauvaise grâce de ne pas appliquer le règlement Dublin aux exilés venant de Calais. Sur ce sujet, le représentant de l’État a sans doute été rappelé à l’ordre par le ministre, qui a réitéré sa promesse de ne pas appliquer le règlement Dublin « aux migrants mis à l’abri fin octobre dernier depuis le campement de la lande de Calais ». Pour les autres, les injonctions à quitter la France pour aller demander l’asile dans un autre pays tombent régulièrement, à Tours comme partout en France. Les premières grèves de la faim se multiplient, comme à Briançon ou à Embrun.

    C’est ainsi que début juin, quinze résidents du CAO de Grandmont ont été informés par l’Office français de l’immigration et de l’intégration qu’il était mis fin à leur accueil. Le motif invoqué ? Ne pas s’être présentés à la préfecture pour un rendez-vous qui se serait probablement traduit par une arrestation, un placement en camp de rétention et une expulsion. Ces hommes, Soudanais et Afghans, risquent de se retrouver à la rue, alors que les structures d’hébergement d’urgence de Tours sont saturées. Ils ont pourtant le même parcours d’exil, la même trajectoire que les « Calaisiens » vivant dans le centre. La seule différence, c’est le nom du camp dont ils ont été chassés pour « une mise à l’abri temporaire ».

    #exilés #CAO #migrations poke @rezo

  • Arrêté anti-mendicité : la ville de Tours condamnée une deuxième fois
    https://larotative.info/arrete-anti-mendicite-la-ville-de-2283.html

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    Pour la deuxième fois, la Cour administrative d’appel de Nantes a été amenée à se prononcer sur un arrêté anti-mendicité pris la ville de Tours. Et pour la deuxième fois, les juges ont annulé cet arrêté, estimant que « l’interdiction décidée par l’arrêté du 16 mai 2014 (...) n’est pas justifiée par la nécessité de remédier de manière proportionnée à des risques significatifs et établis de troubles à l’ordre public ».

    Comme l’a relevé la cour de Nantes, un tel arrêté « est de nature à affecter de façon spécifique la liberté d’aller et de venir de personnes, en particulier celles se trouvant en situation précaire ». L’objectif des élus locaux a toujours été clair : il s’agit de pouvoir chasser du centre ville les SDF, quand bien même ils ne commettraient aucune infraction.

    La ville a bien essayé de se justifier en produisant des extraits de main-courantes de la police municipale, relatant « la présence fréquente de personnes sans domicile fixe ou s’adonnant à la mendicité ». Mais pour les juges, « très peu d’entre eux font état de comportements agressifs de la part de personnes occupant de manière prolongée les rues du centre ville ou de réels troubles pour l’ordre public, la majorité des "incidents" relatés concernant (...) la simple présence de personnes sans domiciles fixes ». Ce que la ville reproche à ces personnes, c’est simplement d’ être là .

    (...)

    Si l’annulation de ce deuxième arrêté était attendue, cela n’a pas empêché la mairie de Tours de s’entêter, en prenant un nouvel arrêté du même type le 15 mai 2017, pour une durée de plus de quatre mois. Et cette fois-ci, le maire a imaginé de s’appuyer sur le risque d’attentats pour justifier sa décision, instrumentalisant sans vergogne l’état d’urgence (Cf https://larotative.info/le-maire-de-tours-invoque-l-etat-d-2275.html). La Ligue des Droits de l’Homme a déclaré qu’elle étudiait la possibilité d’introduire un nouveau recours.

    #etatdurgence #précarité

  • Nara Ritz  : «  Nos caravanes nous signalent comme des individus à contrôler  »

    http://larotative.info/nara-ritz-nos-caravanes-nous-2195.html

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    Le 30 mars, le nom d’Angelo Garand est venu s’ajouter à la liste des gens du voyage tués par les gendarmes, rejoignant ceux de Luigi Duquenet ou de Joseph Guerdner. Pour interroger les discriminations vécues par cette communauté, notamment dans leurs rapports avec les forces de l’ordre, nous avons échangé avec Nara Ritz, voyageur et membre du Collectif National des Associations de Citoyens Itinérants (CNACI).

    Vous subissez des contrôles au faciès, au même titre que les populations noires ou arabes  ?

    Tout à fait. Le camion et la caravane nous signalent comme des individus à contrôler. Mais aussi notre manière de parler, nos langues, et nos noms de famille que les agents relèvent lorsqu’ils procèdent à un contrôle. (...) Au bout d’un moment, on apprend à courber l’échine, à se taire, à subir. Jusqu’au jour où la multiplication de ces humiliations conduit à des réactions de colère, à des insultes, voire à des réflexes de fuite, qui nous rendront de toute manière coupable.

    Le poids des représentations historiques est très dur à déconstruire. Les stéréotypes concernant les gens du voyage les désignent comme agressifs, voleurs, dangereux, violents… C’est à cause de ces stéréotypes que le procureur de la République a pu justifier de faire intervenir le GIGN, en faisant passer Angelo Garand pour un fugitif dangereux. Faute de lutter contre ces représentations, on installe l’idée que les voyageurs seraient automatiquement dangereux. (...) C’est comparable aux interventions qui peuvent être menées dans certains quartiers. C’est comparable aussi aux démantèlements de camps de Roms, qui mobilisent des arsenaux policiers démesurés  : j’ai vu un jour intervenir des policiers armés jusqu’aux dents, équipés de boucliers, accompagnés de chiens, pour évacuer des femmes et des enfants. Dans cette situation il s’agissait de pauvres, pas de bandits. Mais la presse était là, et les autorités ont pu communiquer sur la nécessité de déployer un tel arsenal. En faisant cela, on renforce les stéréotypes qui visent ces communautés.

    #discriminations #contrôles_au_faciès #violences_policières cc @rezo

  • « Voter, c’est comme chier dans de la semoule »
    http://larotative.info/voter-c-est-comme-chier-dans-de-la-2190.html

    http://larotative.info/home/chroot_ml/ml-tours/ml-tours/public_html/local/cache-vignettes/L700xH467/arton2190-e9b47-c1afd.jpg?1492683349

    A quelques jours de l’élection, une sélection de textes critiques de l’électoralisme. Feat. Kropotkine, Mirbeau, Zo d’Axa, Libertad, Rivet, Bonanno, etc.

    Une chose m’étonne prodigieusement - j’oserai dire qu’elle me stupéfie - c’est qu’à l’heure scientifique où j’écris, après les innombrables expériences, après les scandales journaliers, il puisse exister encore dans notre chère France (comme ils disent à la Commission du budget) un électeur, un seul électeur, cet animal irrationnel, inorganique, hallucinant, qui consente à se déranger de ses affaires, de ses rêves ou de ses plaisirs, pour voter en faveur de quelqu’un ou de quelque chose.

    #élections #anarchisme

  • « Pourquoi tout ça ? » La famille d’Angelo Garand réclame vérité et justice
    https://larotative.info/pourquoi-tout-ca-la-famille-d-2178.html

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    Mercredi 5 avril, Angelo Garand a été enterré dans le cimetière de Vineuil, dans le Loir-et-Cher. Une semaine plus tôt, le 30 mars, une équipe de gendarmes et d’hommes du GIGN a fait irruption au domicile de ses parents, à Seur, et l’a abattu sans sommations. Depuis, la famille Garand vit comme hors du temps, et cherche à comprendre ce qui s’est passé.

    La pièce où Angelo a été abattu n’a pas été scellée. Sur les lattes du sommier posé contre le mur, sur le sac recyclable accroché à la poutre, sur le vélo d’enfant renversé au sol, on voit encore des traces de sang. Dans les poutres et le plafond, les balles tirées par les gendarmes ont laissé des marques. Quand ils abattent un homme, les pandores ne font pas le ménage.

    (...)

    Pendant plusieurs heures, la famille n’a pas su ce qui s’était passé, dans quel état était leur frère, leur fils. « On ne pouvait pas imaginer qu’ils le tueraient sous nos yeux », dit la mère. Ils ont été emmenés à la gendarmerie, où ils ont été auditionnés. On ne leur a pas demandé comment s’était déroulé l’assaut de la ferme. Ils n’ont pas été amenés à témoigner sur les circonstances ayant conduit aux tirs. Les questions, assorties de menaces de poursuites pour complicité, portaient sur la cavale d’Angelo, et les mois qu’il avait passés à vivre au jour le jour, dans la crainte d’un retour dans cette taule qu’il ne supportait plus.

    (...)

    Et puis, au lieu de présenter ses condoléances ou d’apporter un début d’éclaircissement sur les circonstances ayant entraîné la mort d’Angelo, il a expliqué qu’il craignait des émeutes… Une déclaration qui sonnait comme une mise en garde, et qui faisait clairement référence aux événements ayant suivi la mort de Luigi Duquenet, tué par des gendarmes en juillet 2010 pour le vol d’un billet de 20 euros et un refus d’obtempérer [1]. Cette réaction du procureur illustre le regard que portent les autorités sur la communauté des voyageurs, à laquelle appartenaient les deux hommes. Dans la foulée de l’annonce de la mort d’Angelo, le proc’ et le préfet ont déployé d’importants renforts de gendarmes mobiles dans la zone.

    (...)

    Pourquoi prétendre qu’Angelo était dangereux, alors qu’il avait bénéficié d’une permission de sortie ? Pourquoi faire intervenir le GIGN, alors qu’Angelo n’avait pas résisté lors de sa précédente interpellation, et que les rapports de la famille avec les gendarmes locaux n’étaient pas hostiles ? Pourquoi les gendarmes sont-ils entrés dans la pièce où se cachait Angelo mitraillettes en main, au lieu d’attendre qu’il sorte — la pièce ne compte qu’une issue ? Pourquoi cette violence et ces humiliations à l’égard des proches ? « Pourquoi tout ça ? », comme le répétait la sœur, Aurélie Garand, dans la vidéo mise en ligne quelques jours après le drame.

  • Retour sur trois mois de lutte au foyer Albert Thomas : « On n’aurait pas eu de solutions sans tout ça »
    https://larotative.info/retour-sur-trois-mois-de-lutte-au-2161.html

    https://larotative.info/home/chroot_ml/ml-tours/ml-tours/public_html/local/cache-vignettes/L600xH450/p1080383___-_copie_2-7aec1.jpg?1491262865

    Entretien avec X, étudiant arrivé en France à 20 ans, qui a vécu au foyer d’hébergement d’urgence Albert Thomas et a participé à la lutte menée depuis l’annonce de la liquidation de la structure le 23 décembre 2016. Le foyer a rouvert ses portes le 27 mars.

    Comment as-tu vécu les trois mois de lutte au sein du foyer ?

    Au début c’était difficile… Moi je n’ai jamais fais ça avant. Nous n’avions plus de travailleurs sociaux au-dessus de nous, il fallait qu’on s’organise et qu’on fasse tout. Mais bon, on était tous des gens grands et on savait qu’on devait s’occuper de nous. On a bien fait je pense. Pour moi c’était bien.

    Comment s’est passée l’organisation ensemble au sein du foyer ?
    On a tous fait des choses, on a partagé les tâches, on a fait comme les travailleurs (rires…). Certains se sont occupé de la machine à laver, certains de la cuisine, on a choisi certains pour parler en réunion, on faisait nos réunions tous les soirs au début, il y avait des plannings pour que ça tourne.

    Et au début tu croyais que ça allait servir à quelque chose ?

    Au début j’ai dit « mais pour quoi faire ? »… Après j’ai compris que c’est avec des manifestations qu’on peut faire des choses. Comme ça, les gens ils ont entendu ce qu’il se passe, dans le foyer, pour nous… Avec ça, avec les pétitions, c’est devenu plus grand et les gens entendaient et venaient plus. Sinon ça n’aurait pas été comme ça…

    A la fin on l’a dit aussi. On n’aurait pas eu les solutions sans tout ça. Il y avait des résidents qui ne faisaient pas beaucoup de chose, qui étaient un peu à coté, et le dernier jour on leur a dit que voilà, tout ça c’était pas pour rien, qu’on avait vraiment gagné des choses.

    #hébergement #migrations #autogestion #logement

  • Mort d’Angelo Garand : « C’est pas une bavure policière, c’est rien d’autre qu’une exécution »
    https://larotative.info/mort-d-angelo-garand-c-est-pas-une-2159.html

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    Dans une vidéo publiée le 1er avril 2017, la sœur de l’homme tué par les gendarmes dans un petit village du Loir-et-Cher remet en cause la version servie par le procureur de Blois. Angelo Garand était recherché parce qu’il n’avait pas réintégré la prison de Vivonne après avoir bénéficié d’une permission de sortie.

    « Ce n’est pas un évadé. J’appelle pas ça un évadé, j’appelle ça un déserteur. Un évadé pour moi c’est quelqu’un qui déploie des moyens... On lui a donné la permission [de sortir] ! Vous dites que c’est un individu dangereux... C’est vous qui lui avez donné la permission ! Si il était si dangereux, pourquoi vous l’avez laissé sortir ? Pourquoi tout ça ? »

    « Ils ont interpellé mes parents, mon frère, ma belle-sœur, jetés comme des chiens... Mes parents handicapés, malades, sous-oxygène, ma mère greffée, mon père... Tout. Horrible. »

    Vos hommes, c’est des commandos. Déjà, y a un problème. On envoie pas des commandos chez n’importe qui. Pas pour des individus comme lui, non, je suis désolée. (...) Pour des gens qui tuent, pour des gens qui font du mal à d’autres gens, mais il a jamais fait de mal à personne.

    « Pourquoi vous vous avez eu votre reconstitution et nous on l’a pas eue ? Pourquoi on a pas de nouvelles nous ? On apprend quoi ? Qu’il a été touché de trois balles, apparemment. On apprend ça où ? Par les pompes funèbres. C’est aux pompes funèbres de nous donner... ? »

    #violences_policières #gign cc @rezo

  • La « métropolisation » stade suprême de l’urbanisation capitaliste
    https://larotative.info/la-metropolisation-stade-supreme-2119.html

    Réflexion sur le modèle métropolitain, à l’heure où la communauté d’agglomération Tour(s)plus s’apprête à devenir une métropole, sous les applaudissements de l’ensemble du personnel politique local (à l’exception de la maire PCF de Saint-Pierre-des-Corps). Ce texte de Jean-Pierre Garnier a initialement été publié dans le journal {Avatarium} en 2013.

    Tout d’abord, le « changement d’échelle » ne met pas fin à la ségrégation socio-spatiale inhérente à l’urbanisation capitaliste. Bien au contraire. L’extension sans fin de l’urbain ne fait que renforcer la séparation socio-spatiale et le séparatisme politico-idéologique qui l’accompagnent entre les « beaux quartiers » ou les « banlieues résidentielles » réservés aux riches, et les zones de relégation où sont parqués les pauvres. Mais surtout, tandis qu’une partie de l’urbain se disperse et se dilue au large des agglomérations, l’autre se concentre et se renforce au cœur de la ville centre pour se brancher sur les réseaux de l’économie globalisée et en capter les flux par des aménagements appropriés. C’est là que se regroupent les fonctions « nobles » dites aussi « directionnelles », avec les services et les équipements afférents, ainsi que les bourgeois et les « bobos » attachés, par obligation professionnelle et/ou par inclination culturelle, à la « centralité urbaine ». Pour leur faire de la place, il faut « étendre le centre », comme le serinent les aménageurs. Aussi, des opérations de « reconquête urbaine » sont-elles menées tambour battant.

    #urbanisme #métropole

    • C’est totalement ça : la #colonisation des #territoires ruraux et leur #soumission aux seuls besoins des urbains argentés. Le maillage territorial et leur organisation saisonnière sont éloquents : #train, #avion, #autoroutes relient strictement les centres métropoles entre eux et sont privatisés avec une pure logique de rentabilité (vs. aménagement du territoire qui garantissait l’égalité républicaine).

      Sur les nouvelles voies (TGV, autoroutes), totalement privées, ce sont les collectivités locales qui paient pour être éventuellement raccordées… à l’exception des grands centres touristiques qui concernent les métropolitains. Aller à Paris depuis chez moi prend pratiquement deux fois plus de temps qu’il y a 30 ans et les possibilités de le faire se sont réduites. Pourtant, il y a des trains supplémentaires qui sont programmés pour aller dans mon coin, mais seulement de Paris vers chez moi et pour les départs en vacances. Le reste du temps, on peut crever.
      Même affaire sur les réseaux importants comme l’électricité, l’eau ou les télécommunications. Il y a un gars qui a construit il n’y a pas très longtemps dans le coin : on lui a expliqué cash qu’il ne serait raccordé à rien (y compris électricité !) sauf s’il paie de sa poche le raccordement. On est blindé de zones blanches et grises, mais quand je vais en montagne l’été, sur le domaine skiable, je peux voir que les brebis ont la 4G…

    • Peut-être, peut-être pas : les municipalités délivrent les permis de construire. Pour le téléphone fixe, on est revenu à des temps d’attente période PTT pour les nouveaux arrivants : comme tout est privé, comme toutes les lignes sont déjà saturées et peu entretenues, comme il n’y a plus que des sous-traitants de sous-traitants, avoir une nouvelle ligne de téléphone peut prendre des mois ou ne pas aboutir.
      D’ailleurs, pour la qualité de communication, on est pire qu’à l’époque PTT : friture, coupures, etc.

    • Les élus locaux ont pris le train de la gentrification en marche en mettant en œuvre des politiques souvent appelées de « renouvellement urbain », qui prennent la forme de programmes de rénovation et de réhabilitation. On restaure l’existant mais en l’adaptant pour en faire un cadre de vie adapté pour de nouveaux habitants, en réaménageant l’intérieur des logements par exemple.
      https://seenthis.net/messages/446847

      Pour la SNCF : le temps, c’est de l’argent…

      Impossible d’y échapper tant Rennes Métropole, la SPL « Destination Rennes » et la Région ne cessent de communiquer dessus. L’arrivée de la future ligne LGV Bretagne en juillet prochain permettra de rapprocher Rennes à moins d’une heure trente de Paris sur certains trajets (pas tous, einh…).

      En contrepartie, il faudra mettre la main à la poche pour rejoindre la capitale puisque le billet augmentera de 6 euros en moyenne. La directrice générale de Voyages-SNCF, Rachel Picard, n’y trouve rien à redire et explique même que « l’évolution des prix sera toujours inférieure au gain de temps ». Payer plus pour gagner plus… de temps ? Argument non recevable pour Dominique Serouin, vice-président de l’association des usagers des transports en Ille-et-Vilaine (AUTIV) dans l’édition du Télégramme de dimanche dernier : « Nous ne sommes pas contre le principe de gagner du temps mais les tarifs actuels sont déjà excessifs et inabordables pour les voyageurs aux revenus modestes et les familles ».

      Mais « qui se soucie de gagner au maximum 40 minutes sur un trajet reliant notre ville à la capitale ? » se demandaient déjà les élu⋅e⋅s du parti de gauche rennais, il y a plus d’un an. A y regarder de près, il faut craindre que ce nouveau dispositif ne soit destiné finalement qu’à quelques intérêts particuliers : cadres dynamiques, clientèle d’affaire, personnes aux revenus confortables. La SNCF ne s’en cache même pas puisqu’elle souhaite mettre en place de nouveaux services comme le wifi à bord, des files d’embarquement dédiées ou encore des salons grand voyageur rénovés afin de capter la clientèle professionnelle habituée des trajets aériens.

      Alors que le coût total de la ligne s’élève autour des 3,4 milliards d’euros, alors que le PDG de la SNCF(1) juge déjà déficitaire les deux nouvelles lignes LGV (avec celle de Paris-Bordeaux), alors que le modèle économique du LGV/TGV est à bout de souffle (faute de rentabilité, son développement absorbe une grande part des contributions publiques dédiées au ferroviaire), cette manne financière n’aurait-elle pas pu être mieux utilisée pour un projet ou une ambition utile au plus grand nombre ?

      En même temps, si le « #Rennes2030 » s’adressait aux plus modestes d’entre nous, cela se saurait, non ? Le centre des congrès, le quartier d’affaire #Eurorennes, les hôtels de luxe, la disparition de petits lieux conviviaux (comme récemment le bistrot du Chat Bavard) sont des exemples rayonnants d’une gentrification déjà bien entamée.

      http://alter1fo.com/sncf-lgv-gentrification-108617#comment-469173


      https://twitter.com/search?f=tweets&q=%23Rennes2030&src=typd

  • La préfecture lève les procédures Dublin visant les exilés de Calais
    https://larotative.info/la-prefecture-leve-les-procedures-2116.html

    https://larotative.info/home/chroot_ml/ml-tours/ml-tours/public_html/local/cache-vignettes/L700xH560/arton2116-47e8c-92050.jpg?1488885693

    Jeudi 4 mars, certains réfugiés apprenaient que la préfecture d’Indre-et-Loire levait les procédures Dublin les visant. Les comités de soutien affirment aujourd’hui que la lutte n’est pas pour autant terminée. Dans un communiqué commun, elles rappellent que leurs revendications n’ont pas changé.

    A quelques heures de la manifestation en soutien aux résidents des CAO de Saint-Pierre-des-Corps, de Grandmont et du foyer Albert Thomas, le directeur des CAO faisait connaître un courrier adressé par la préfecture d’Indre-et-Loire annonçant que ces personnes « dublinées » pourraient finalement déposer un dossier de demande d’asile en France. Ces hommes étaient menacés d’expulsion vers d’autres pays européens, dans le cadre du règlement dit "Dublin", en violation des promesses faites par les autorités lors du démantèlement de la jungle de Calais.

    Ce retournement de situation résulterait d’une instruction de la DGEF (Direction générale des Etrangers en France, qui dépend du ministère de l’Intérieur) datée d’une dizaine de jours, et qui a demandé aux préfets de mettre en œuvre la clause discrétionnaire (article 17-1) pour les dublinés évacués de Calais et hébergés dans les CAO. Il est donc clairement demandé aux préfets de leur remettre une attestation de procédure normale et un dossier OFPRA. Jusque-là, les préfets pouvaient choisir la procédure à appliquer. En Indre-et-Loire, le préfet avait choisi la solution la plus dure, à savoir l’application du règlement Dublin.

    Enfin, la générosité de la DGEF est limitée : elle ne concerne que les personnes qui avaient été évacuées de Calais. Exit les réfugiés qui ont été évacués du campement de Stalingrad, à Paris, ou ceux qui ont pris d’autres chemins. Ces derniers peuvent toujours être assignés à résidence, voire placés en rétention. Il s’agit encore une fois de traiter l’urgence (voire de libérer des places dans les CAO) alors que camps et centres se reforment dans la région de Calais ou Porte de La Chapelle à Paris [3].

    #migrants #Dublin #Calais

  • Deliveroo débarque à Tours, et ce n’est pas une bonne nouvelle
    https://larotative.info/deliveroo-debarque-a-tours-et-ce-n-2096.html

    https://larotative.info/home/chroot_ml/ml-tours/ml-tours/public_html/local/cache-vignettes/L700xH469/arton2096-2d8d8-2c37b.jpg?1488299198

    L’entreprise spécialisée dans la livraison à vélo de plats cuisinés va s’installer en Indre-et-Loire. Son fonctionnement étant basé sur l’exploitation des livreurs, il n’y a pas de quoi se réjouir.

    Contrairement au modèle traditionnel de livraison organisé par des pizzerias ou des restaurants de sushis, dont les livreurs sont salariés, le modèle Deliveroo fait appel à des travailleurs « indépendants », qui sont généralement auto-entrepreneurs. Les coursiers ne signent pas un contrat de travail, mais un contrat de prestation de services. Ce modèle, popularisé en France par l’entreprise Uber, est de plus en plus vivement critiqué. L’autoentrepreneuriat est devenu un outil utilisé par ces boîtes « pour faire bosser les gens sans gérer l’emploi, sans embaucher, sans payer de cotisations », comme l’explique la sociologue Sarah Abdelnour.

    (...)

    Dans un premier temps, les livreurs Deliveroo pouvaient espérer gagner un minimum de 7,50 euros par heure, auquel s’ajoutait le montant des « courses » réalisées pendant cette heure. Désormais, les minimums garantis ne concernent que certains créneaux horaires, et la course est payée autour de 5 euros brut. Compter donc deux courses par heure pour atteindre un salaire brut de 10 euros, sur lequel le livreur devra payer les cotisations et charges diverses liées à son statut d’auto-entrepreneur [1]. Le montant des bonus, versés en cas d’intempéries ou pour garantir une rémunération motivante certains soirs, peut varier sur décision unilatérale de Deliveroo. A une époque, Deliveroo promettait aux coursiers de « gagner jusqu’à 20€ de l’heure (sans compter les pourboires) ». Pour le recrutement de livreurs à Tours, l’entreprise annonce désormais « jusqu’à 150€ par week-end », sans préciser le nombre d’heures travaillées.

    (...)

    Depuis, de nombreux « collaborateurs » de Take Eat Easy luttent pour faire requalifier leurs contrats de prestation de service en contrats de travail. A Lyon, un collectif s’est constitué pour organiser la solidarité entre les coursiers. Dans un tract du collectif, on pouvait lire :

    « Les plateformes nous niquent depuis trop longtemps ! Nous n’avons aucun droit au chômage, aucun droit à la retraite, aucune prime de risque, aucun accompagnement en cas de blessure ! Et elles nous imposent leurs rémunérations, elles contrôlent nos horaires, elles ne payent aucune charge patronale ! Il est plus que temps de nous fédérer et de trouver des moyens de nous asseoir à la table des négociations ! »

    #Deliveroo #foodtech #uberisation #flexibilité

  • A Tours, les élus veulent effacer le nom du quartier du Sanitas pour attirer les promoteurs immobiliers
    https://larotative.info/renouvellement-urbain-les-elus-2110.html

    https://larotative.info/home/chroot_ml/ml-tours/ml-tours/public_html/local/cache-vignettes/L700xH504/arton2110-f8a51-b3cdd.jpg?1488625300

    Dans l’espoir d’attirer au Sanitas des promoteurs immobiliers et une population plus aisée, les élus veulent profiter des opérations de renouvellement urbain pour effacer le nom du quartier.

    A la page 16 du document, on peut lire :

    « L’ensemble des acteurs s’accorde aujourd’hui sur la nécessité de faire émerger à l’intérieur du quartier prioritaire de nouveaux noms de quartier appelés à se substituer à celui du Sanitas et devant contribuer à rendre plus attractive cette partie de la Ville. »

    Pour « diversifier la population du quartier », les « acteurs » prévoient de détruire environ 400 logements sociaux, et de reconstruire des logements privés pour une clientèle plus riche, avec notamment des maisons individuelles. Pour cela, il est nécessaire de séduire les promoteurs, qui ont déjà témoigné de leur intérêt pour le secteur le plus facilement valorisable : la partie nord du quartier, la plus proche de la gare et du centre ville [2]

    Or, il semble difficile d’attirer des promoteurs et des habitants plus aisés sans gommer l’image négative du quartier, construite par des années de discours politiques et médiatiques. Le Sanitas est un nom qui fait trembler la bourgeoisie tourangelle. Le plus simple est donc de le faire disparaître, en même temps qu’on fera partir une partie des habitants.

    #ANRU #effacement #urbanisme

  • La police s’équipe d’une nouvelle arme contre les manifestant-es
    https://larotative.info/la-police-s-equipe-d-une-nouvelle-2097.html

    Nantes, 25 février. Une partie des manifestant-es est obligée de se replier vers la préfecture, avant de repartir pour tenter de rejoindre l’avant du cortège. Mais l’avancée du groupe est interrompue par une charge de la BAC, casquée et masquée, qui se rue sans raison sur un manifestant et le plaque violemment au sol. Les personnes autour sont repoussées à coup de matraques et par l’envoi d’une volée de grenades assourdissantes. Forcément, elles reculent. Pour voir apparaître soudain un rayon vert qui les cible. C’est un pointeur laser, équipé sur un LBD. Le rayon balaye la foule, désignant successivement chaque personne marquée comme une victime potentielle. On était habitué-es à voir les policiers viser à hauteur de visage ; là, l’effet psychologique est décuplé.

    #violences_policières #répression #armes #terreur

  • Renouvellement urbain : comment la ville veut transformer le Sanitas (et ses habitants)
    https://larotative.info/renouvellement-urbain-comment-la-2087.html

    https://larotative.info/home/chroot_ml/ml-tours/ml-tours/public_html/local/cache-vignettes/L700xH446/arton2087-c30c2-cbcef.jpg?1487437991

    Le Sanitas, à Tours, fait partie des 200 quartiers visés par le programme national de renouvellement urbain, qui doit « transformer les quartiers en difficulté pour les rendre attractifs ». Mais le projet, qui changerait radicalement l’allure du quartier, laisse la population actuelle sur la touche.

    Quelques gamins jouent au ballon au fond de l’allée de Moncontour, entre le grillage de l’école maternelle Marie Curie, fermée pour les vacances, et l’immeuble de dix étages à la façade défraîchie. Leurs parents viennent de recevoir un courrier leur annonçant que la démolition de leurs logements était envisagée. A terme, l’école pourrait également disparaître. Le tout au nom de la mixité sociale.

    (...)

    Au Sanitas, l’agglomération veut en effet « engager une politique de diversification résidentielle ». Concrètement, cela signifie que les autorités veulent réduire la part de logements sociaux dans le quartier, à la fois via la vente du parc HLM et le développement d’une offre de logements privés. Dans les « dispositifs opérationnels » annexés au contrat de ville de l’agglomération tourangelle, on lit clairement que les autorités espèrent ainsi favoriser « l’arrivée de nouveaux habitants (familles et jeunes actifs) » et « enrayer la paupérisation du quartier » [2].

    Il s’agit donc de déployer différents mécanismes pour attirer au Sanitas une population plus aisée que celle qui y réside actuellement. Parmi les mécanismes à disposition, le contrat de ville cite en premier lieu la démolition-reconstruction. Au nom de la mixité sociale, et pour réduire le niveau de pauvreté enregistré dans le quartier, les autorités ont trouvé comme solution de faire disparaître les immeubles accueillant des populations pauvres pour construire à la place des logements privés destinés à une clientèle plus haut de gamme. Les habitants actuels seraient relogés dans des quartiers périphériques. Ce projet constitue une occasion en or de valoriser un quartier situé en centre-ville, à quelques minutes à pied de la gare, bien desservi par les transports en commun.

    #ANRU #ville #urbanisme #quartiers_populaires

  • Tour de France de quelques horreurs faites aux pauvres en période de grand froid
    https://rebellyon.info/Tour-de-France-de-quelques-horreurs-17390

    Alors que les températures extérieures descendent dans le négatif, préfets et maires de France rivalisent de dégueulasserie dans le traitement qu’ils réservent à celles et ceux qui sont privés de logement. Qu’ils ferment des lieux d’accueil, refusent d’ouvrir des lieux de mise à l’abri ou envoient plus ou moins directement leurs flics harceler celles et ceux qui dorment dehors, tous ont en commun de se comporter de manière inhumaine. Passage en revue d’horreurs révélées dans les deux dernières semaines.

    #Infos_locales

    / Une, #Logement_-_Squat

  • SNCF : point de vue oublié d’un certain type « d’usager »
    https://larotative.info/sncf-point-de-vue-oublie-d-un-1540.html

    https://larotative.info/home/chroot_ml/ml-tours/ml-tours/public_html/local/cache-vignettes/L700xH486/arton1540-37940-9dee1.jpg?1484820062

    Partout l’usager de la SNCF est présenté comme énervé par « ces salauds de grévistes ». Et pourtant, il existe des usagers qui se réjouissent de leur existence. Et même qui voudraient bien que le train aille moins vite : vitesse partout, voyage nulle part !

    Et pourtant, même si je ne prends plus le train, je rêverais de m’installer dans un wagon… L’un de ceux du Corail qui allait du point A au point B au moins cinq fois par jour, celui qui quand j’étais étudiant il y a plus de quinze ans maintenant me coûtait constamment 40 € l’aller/retour, le même qui au-delà de mon trajet A/B allait directement de Saint-Nazaire à Grenoble. Et bien celui-là ne circule plus depuis belle lurette. Il est mort et bien déraillé.

    (...)

    L’ancien trajet du point A au point B m’a toujours apporté quelques réjouissances, qu’elles soient d’ordre amicales ou géographiques. Ce Corail-là me permettait de descendre en route, à Bourges plus exactement, pour boire un verre avec un copain qui vit là-bas. Puis je reprenais le train suivant, 3 ou 4 heures plus tard. Pour les mêmes raisons, aujourd’hui je pourrais également m’arrêter à Moulins ou à Roanne, des amis vivant désormais en ces contrées. Le TGV remplaçant ce train ne s’y arrête pas. Son arrêt se joue en 3 minutes en gare de Massy TGV, à peine le temps d’en griller une pour les fumeurs. Et puis le système de réservation de la SNCF sur les TGV ne permet plus vraiment de s’arrêter en route quelques heures pour voir un ami et de reprendre le TGV suivant sans que le surcoût n’en soit palpable.

    (...)

    Vous avez très certainement entendu parler du No TAV ! (Treno ad Alta Velocità, train à grande vitesse en italien). C’est le cri de ralliement du mouvement de protestation contre la construction de la ligne à grande vitesse Lyon/Turin en Val de Suse, soit du côté italien des Alpes [3]. Ce chantier détruit et pressurise un peu plus cette vallée fort étroite déjà occupée par une autoroute et une ligne de chemin de fer. La lutte se joue essentiellement côté italien — côté français, ça frémit tout juste. Comme en témoigne l’encadré ci-dessus, l’opposition aux LGV (et aux nuisances en général) a connu de ce côté des Alpes des tentatives. Et les effets des lignes LGV y sont aujourd’hui connus : enclavement de régions entières, désertification des dernières campagnes, appauvrissement de la vie sociale, déplacement des riverains, saccage du bien général pour le profit de quelques-uns, etc.

    #train #voyage #vitesse #NoTAV

  • Travailleurs détachés : « La solution n’est pas un repli nationaliste, mais un syndicalisme transfrontalier »

    https://larotative.info/travailleurs-detaches-la-solution-2040.html

    https://larotative.info/home/chroot_ml/ml-tours/ml-tours/public_html/local/cache-vignettes/L700xH467/arton2040-062a4-996ff.jpg?1484843410

    Environ 250 000 salariés originaires de différents pays européens travaillent sur le territoire français, sans pour autant y être installés. Les droits de ces travailleurs dits « détachés » sont encadrés depuis 1996 par une directive européenne, mais les employeurs se livrent à une fraude massive. Entretien avec K., salarié dans le bâtiment et syndicaliste.

    Depuis les années 2000, il y a une massification du recours à la main-d’œuvre détachée. Normalement, même si les cotisations sociales sont payées au taux du pays d’origine, le prix du recours au travail détaché devrait être supérieur au salaire minimum français. En effet, il faut ajouter les frais de déplacement, d’hébergement, etc. Ça, c’est la théorie.

    Mais les pourvoyeurs de main-d’œuvre ont trouvé la parade assez rapidement : elle consiste à organiser du travail dissimulé. En apparence, le contrat de travail respecte le droit français, avec un taux horaire qui est globalement respectueux de la convention collective — même si les travailleurs détachés sont généralement payés au SMIC, alors qu’ils devraient être reconnus comme ouvriers qualifiés. Seulement, le temps de travail réel est largement supérieur au temps déclaré.

    Le premier parti politique à avoir mis cette question sur la table, c’est le Front~National, via un communiqué de presse signé par Marine Le~Pen et Florian Philippot. Ils dénonçaient la directive détachement et se prononçaient pour son abrogation. Mais si on abroge cette directive, on perd la protection qu’elle accorde en ce qui concerne l’application de la réglementation du pays d’accueil ! On reviendrait à la situation antérieure, dans laquelle un travailleur provenant d’un pays à faibles coûts sociaux serait payé au tarif en vigueur dans son pays. Le FN est progressivement monté en puissance sur cette question, ce qui a pris au dépourvu les autres partis, qui n’avaient pas bossé le sujet. Et depuis un an, de Mélenchon à Montebourg, tous s’alignent de fait sur la position du Front National.

    #travail #détachement #syndicalisme #nipatrienifrontières cc @rezo

  • Élections TPE : la ministre boycotte les syndicats de lutte
    http://larotative.info/elections-tpe-la-ministre-du-2018.html

    https://larotative.info/home/chroot_ml/ml-tours/ml-tours/public_html/local/cache-vignettes/L700xH525/arton2018-e82b1-e2dae.jpg?1483472560

    En déplacement pour promouvoir les élections professionnelles dans les petites boîtes, Myriam El Khomri a « oublié » d’inviter les #syndicats qui ont été les plus combatifs pendant le mouvement contre la #LoiTravail.

    Et alors que la ministre communique sur ces élections, les services de l’Etat interdisent aux maires de mettre des panneaux électoraux à disposition des organisations syndicales.

    #travail cc @rezo

  • Nouveaux visages de la justice de classe
    https://larotative.info/nouveaux-visages-de-la-justice-de-2011.html

    https://larotative.info/home/chroot_ml/ml-tours/ml-tours/public_html/local/cache-vignettes/L650xH884/15696744_578807005663258_1583724386_o-b1594.jpg?1482914139

    Il y a quelques jours, j’assistais à une séance au Tribunal Correctionnel de Paris qui gère les comparutions immédiates… c’est vraiment une expérience dont on ne sort pas indemne et qui a particulièrement résonné lorsque j’ai appris le surlendemain que Mme Christine Lagarde était dispensée de peine pour sa négligence dans l’arbitrage Tapie par une juridiction d’exception composée majoritairement de parlementaires.

    15 000 personnes passent à la 23ème chaque année, temple de la Justice en « temps réel » et rationalisée. Cette chambre est la face émergée de la Section P12, située dans le bâtiment même du Tribunal. Il s’agit d’un pool de procureurs qui gère les flags dans la capitale et qui applique depuis une vingtaine d’années le concept de « gestion des flux judiciaires » avec des substituts du procureur qui suivent en direct, sur des plateformes téléphoniques et avec un micro-oreillette, les appels des officiers de police judiciaire de toute la ville. En moyenne, chaque substitut reçoit 85 appels par jour et peut consacrer à chaque affaire un maximum de 5 minutes. Les consignes en matière de poursuite sont issues des théories de « tolérance zéro » importées du New York des années 1980 : tout délit, même minime, doit être enregistré par la police, signalé au parquet, traité le plus rapidement possible et donner lieu à une réponse pénale afin que les délinquants soient assurés que leur déviance sera sanctionnée et améliorer ainsi le sentiment de sécurité des concitoyens.

    (...)

    Première affaire 15 min

    C’est un Palestinien qui vient d’arriver en France depuis un mois, en étant passé par la Turquie, la Grèce et la route des Balkans. Il a un interprète mais le rythme de la séance ne laisse pas présager des traductions bien fidèles. Il a volé un sac et s’est fait attraper par des agents de la RATP. Il dit l’avoir fait pour manger. La procureure met en doute son histoire, pensant qu’il se dit Palestinien comme stratégie pour apitoyer et demander l’asile et qu’il est très possible qu’il utilise un alias pour que la Cour ne connaisse pas son casier judiciaire. Elle demande de la prison ferme pour faire passer le message. L’avocat, bien peu en verve, dit que son client n’a rien à voir là-dedans et plaide la relaxe.

    Avec des portraits des protagonistes de l’affaire Lagarde.

    #justice #domination cc @rezo

  • Wild Side Story : comment VINCI Autoroutes embrigade les artistes

    https://larotative.info/wild-side-story-quand-vinci-1947.html

    Le financement par Vinci Autoroutes du dernier spectacle de la Compagnie Off, célèbre compagnie d’arts de rue tourangelle, illustre la manière dont l’entreprise met l’art au service de sa communication.

    Dans le dossier de presse, la filiale du groupe Vinci est présentée en qualité de « mécène principal » : le concessionnaire de l’autoroute A10, sous laquelle était jouée pour la première fois cette création, l’aurait financée à hauteur de 35 000 euros. L’autoroute urbaine n’est plus une source de nuisances et de pollution, mais un décor, un lieu « [qui] fait la part belle à une poésie brute et urbaine, faisant intervenir des véhicules comme éléments de décor et acteurs de la pièce » [1].

    Du coup, un doute s’installe : s’agit-il bien d’un spectacle, ou d’une opération de communication s’inscrivant dans le cadre de la campagne « L’autoroute est à vous », lancée par les concessionnaires des autoroutes du pays ? On pourrait penser à un prolongement de la « fête de l’autoroute » organisée le 22 mai dernier, quand des spectacles de cirque avaient été proposés au public sur l’A85. Vinci, connu pour sa propension au bétonnage, est devenu sans qu’on s’en aperçoive un ami des arts du cirque et de la rue... [2]

    (...)

    Quatre artistes ont été mobilisés pour l’occasion. Dans leurs présentations, ce chantier autoroutier devient « un champ d’expérimentations et de recherches artistiques », une « possibilité de proposer une expérimentation artistique participative dans l’espace public », « une ouverture extraordinaire vers la rencontre entre la créativité et l’utilité ».

    Cette mobilisation des artistes au service de l’entreprise peut être rapprochée de leur mobilisation par le politique, comme dans le cas des festivités autour de Saint Martin. La culture vient alors s’intégrer à une stratégie de communication, et participe à neutraliser les discours critiques. Ainsi, le groupe Vinci n’est plus une multinationale surpuissante et omniprésente qui façonne le monde qui nous entoure [5], mais un partenaire culturel, un ami de la création qui participe à l’animation du territoire.

    #art #mécénat #VINCI #autouroute cc @rezo

  • La Brique relaxée pour absence de motivation 8 Novembre 2016 Aside
    http://labrique.net/index.php?option=com_content&view=article&id=846:la-brique-relaxee-pour-ab

    Le 22 février 2015, le journal est verbalisé par la police municipale pour avoir vendu le canard à la criée. On refuse de payer, la mairie nous intente un procès. Lors de l’audience du 4 octobre devant le tribunal de proximité, la décision de justice a été mise en délibéré au 8 novembre. Un mois pour le juge, ce n’est pas de trop pour réviser ses fondamentaux. C’est donc aujourd’hui que l’issue de ce procès rocambolesque a été dévoilée. Et heureusement,  La Brique a été relaxée.

    Si nous avons mis autant de temps à relater notre procès tragi-comique, c’est qu’au même moment d’autres accusations méritaient plus d’attention que la nôtre : celle des 8 de Goodyear, les accusés d’Amiens, et les militants du rond-point des Postes1. Pour autant, si l’amende encourue par notre palmipède peut sembler dérisoire – 61 euros – les enjeux de notre procès ne l’étaient pas. Il remettait en cause la liberté de diffusion de la presse, tout en faisant peser une menace sur l’une de nos principales sources de revenu : les criées. Le procès a été à la hauteur de l’accusation : absurde.


     
    Rappel des faits2. Un arrêté pris par Martine Aubry en 2004 prévoit que « l’accès aux marchés est interdit aux véhicules publicitaires, cortèges, vendeurs et distributeurs de journaux, tracts de toute nature et de prospectus à caractère publicitaire ». En mettant tracts, publicités et journaux dans le même sac, cet arrêté municipal est de fait contraire à l’article 1 de la loi Bichet qui dispose que « la diffusion de la presse imprimée est libre. Toute entreprise de presse est libre d’assurer elle-même la distribution de ses propres journaux et publications périodiques par les moyens qu’elle jugera les plus convenables à cet effet ». Justement, on aime "assurer" la vente de notre canard à l’ancienne, à grands coups de slogans rageux et de discussions avec nos acheteur.ses et autres badauds des marchés lillois. Pourtant, les sbires de la police municipale ont estimé notre manière de faire illégale. Résultat des courses : un P.V. que nous nous sommes empressés de ne pas payer, raison pour laquelle la mairie nous a assigné en justice. C’est donc devant la cour que s’est réglé le duel La Brique – La clique à Martine.

    Premier round
    Le 4 octobre dernier, avec la loi Bichet en poche, l’audience n’aurait dû durer que deux minutes, c’était sans compter sur le dialogue loufoque qui allait suivre. Le directeur de publication est à la barre, confiant mais un peu raide. Le juge de proximité, Jacques Cianfarani, la soixantaine, habillé façon Hervé Mariton, ne porte pas la robe. En effet, ce n’est pas un juge professionnel que nous avons devant nous mais un retraité dont la maîtrise du droit et de la jurisprudence apparait aussi vague que la date d’obtention de sa première année de licence. Il appelle notre camarade à la barre. « Monsieur, on vous reproche d’avoir enfreint l’arrêté 43 du code des marchés de Lille », citant l’article en question, « et vous avez refusé de payer l’amende ». Le juge laisse alors la parole à notre avocate, Maître Ruef, qui mène sa plaidoirie. Elle invoque l’article 1 de la loi Bichet. Rares sont les lois édictant une « liberté aussi explicite dans le texte » rappelle-t-elle. Or, un modeste arrêté municipal ne saurait contredire une loi de la République, foi d’Hans Kelsen, grand théoricien de la hiérarchie des normes, principe bien connu de tout.e étudiant.e en droit. Le juge, finaud, demande à l’accusé : « Je suppose que vous avez la même position que votre avocate ? » . Devine !
     

    La Brique n’est pas un tract
    On ne sait pas quel terme cet homme n’a pas compris, si c’est l’idée de « liberté », de « diffusion » ou de « presse » ? La comparution dure une bonne quarantaine de minutes et tourne au procès kafkaïen. Faussement candide, le juge remet en cause ces notions, niant à La Brique la qualité de journal. Le prévenu rétorque : « Le journal La Brique existe depuis bientôt dix ans. Nous vendons le journal dans le mois qui suit sa parution sur les marchés de Lille, comme n’importe quel autre journal, à l’ancienne. Nous ne sommes pas ici par gaieté de cœur. Nous sommes bénévoles et consacrons du temps pour la rédaction, les dessins et la vente du journal. Et nous assurons malheureusement ce genre de service après-vente dont on se serait bien passé. L’affaire s’est déroulée en février 2015, c’est drôle, parce que les policiers, un mois plus tôt, nous tapaient dans le dos suite aux attentats de Charlie ». 

    L’affaire prend une tournure comique quand le juge, à l’aise et indécrottable dans son fauteuil moelleux, prend un air inspiré pour comparer notre vente à la criée à une autre affaire : « J’ai déjà jugé une affaire de ce type, c’était pour des distributeurs de tracts pour la secte raëlienne ». « Je doute de la mission d’information d’un tel bulletin » répond ironiquement l’accusé. Notre avocate enchaîne : « Nous ne contestons pas l’interdiction des tracts et objets publicitaires, nous disons que pour les vendeurs de journaux, cet arrêté est illégal, et que ce sont les lois sur le régime de la presse qui s’appliquent ». 
    Le juge semble irrité et balaie la plaidoirie d’un revers de manche : « Nous comprenons bien, Maître, mais vous n’allez pas ressasser les mêmes arguments pendant l’audience ». Les yeux montent au ciel dans la salle. Ce qui devait être une audience rapide pour faire valoir nos droits tourne au vinaigre. À plusieurs reprises, le juge parle de « tract » à la place de « journal » , et de « distribution » à la place de « vente ». Notre avocate sort alors un nouvel argument : « Il existe bien une jurisprudence à ce sujet, un vendeur de l’Huma Dimanche à Paris. Il avait été reconnu que la loi Bichet avait bien été enfreinte et la mairie de Paris à l’époque s’était mise en conformité à la suite de ce jugement ». Le juge est curieux : « Ah oui ? Mais vous avez ramené les pièces de cette procédure ? Ça m’intéresse de savoir sur quel motif la mairie a été déboutée ». Le procureur, qui prend le relais, tente de nous remballer : « La précédente affaire était de 175 €, ici votre infraction est fixée à 38 €. Ce n’est pas la même affaire, ni les mêmes circonstances » . Le juge reprend la main et s’adresse à l’accusé : « On comprend bien que ce n’est pas l’amende qui vous intéresse, c’est le fond, le principe, c’est bien ça ? ». Bref éclair de lucidité.


     
    On touche le fond
    On croyait l’apogée du ridicule atteinte, c’était sans compter sur l’obstination de notre comique de proximité : « Vous distribuez votre journal sur le marché de Wazemmes [il regarde ses feuilles] à 11 h 30 quand même ! En plein boom quoi. Ça peut gêner, et le journal peut tomber par terre, les gens peuvent glisser ». Maître Ruef, indignée par la faiblesse de l’argumentaire du magistrat, lui rétorque : « Enfin, les gens achètent un journal deux euros, ce n’est pas pour aussitôt le jeter par terre ! » . Mauvaise foi ou surdité, le juge repart de plus belle : « Oui, mais c’est du papier quand même, le décret pourrait s’appliquer au nom de la salubrité ». Nos oreilles saignent. Confondre décret et arrêté3, quand on remplit cette fonction, laisse augurer du pire pour la suite. Définitivement, on se dit qu’on a affaire à un juge pour qui le droit de la presse est tout à fait étranger. Lourd sentiment d’un procès à charge, où toutes les raisons, même les plus ridicules sont bonnes pour tenter d’établir notre culpabilité.
    Le procureur continue sa saillie et envisage la possibilité que nous vendions notre journal en plein trafic routier :  « Imaginez quand même que vous vendiez au croisement rue Nationale [?] le mardi ou le jeudi, ça causerait des problèmes de circulation ». Pure science-fiction, mais ça ne l’empêche pas de poursuivre : « L’arrêté du maire, par les pouvoirs qu’il possède, peut totalement réglementer la chose. Il n’y a pas d’atteinte à la liberté de la presse puisqu’elle n’est pas définitive et totale ». Comprendre : la vente de journaux, c’est bien, mais là où il n’y a personne, c’est mieux. Le juge enfonce le clou : « La liberté de la presse n’est pas absolue. Ne peut-on pas penser à la restreindre au nom de la sécurité et de l’ordre public ? C’est à débattre », ou comment un juge et un proc’ redéfinissent tranquillement la liberté de la presse.
    Le juge questionne le représentant de La Brique : « Sur le marché, quels autres journaux sont vendus ? La Cause du peuple ? » L’accusé sourit : « Je ne suis pas certain que ce journal existe encore. [ce journal maoïste a disparu en... 1978] J’ai déjà vu Liberté hebdo, le journal des sans-abris, le journal de Lutte ouvrière et même parfois La Voix du Nord. Il y a régulièrement le Parti socialiste qui distribue ses tracts pendant les élections. Et bizarrement, c’est moi qui suis devant vous ». Le juge ne répond pas mais questionne : « Oui, mais votre journal, est-il militant ? ». « Pas plus militant que La Voix du Nord ». Dans la salle, les regards complices se croisent.

    Le proc’ requiert la condamnation du journal à 38 € d’amende, plus 23€ de frais de justice. Le juge sort un « Bon, voilà ». Il est interrompu par notre tonitruante Maître Ruef :  « Je peux quand même faire mon travail et défendre mon client ? ». Laisser le mot de la fin à l’accusation est un peu la base d’un procès équitable, mais le magistrat ne semble plus à une fantaisie près. Notre avocate reprend donc le micro et conclue : « On ne pourra plus rien faire sur les marchés, qui sont, faut-il le dire, un lieu de vie dans une ville. Les marchés sont des lieux vivants et La Brique participe à la vitalité démocratique en France et tout au moins à Lille » . Au loin résonne en sourdine la devise du Canard enchaîné : « La liberté de la presse ne s’use que quand on ne s’en sert pas ».

    Il aura donc fallu un mois pour que le juge se refasse une santé juridique à grands renforts, on n’en doute pas, de manuels de première année. Le verdict est donc tombé : la relaxe est prononcée. En revanche, on n’a toujours rien saisi aux justifications. Si le juge remet en cause l’arrêté en lui-même, il évoque seulement une "absence de motivation" concernant la vente de journaux dans l’interdiction au marché. « Motivation » qui, paraît-il, n’a pas lieu d’être dans un arrêté municipal. Nous avons donc contacté Xavier Bonnet, l’adjoint délégué au commerce - Halles et marché de plein air, pour connaître sa réaction et la date de mise en conformité de leur arrêté. On attend donc sa réponse...
     
    1. Pneus brûlés et criminalisation du mouvement social, La Brique, 26 octobre 2016 http://labrique.net/index.php/thematiques/hors-canard/835-pneus-brules-et-criminalisation-du-mouvement-social
    2. La mairie de Lille intente un procès à La Brique, La Brique, 02 septembre 2016 http://labrique.net/index.php/thematiques/repressions/819-la-mairie-de-lille-intente-un-proces-a-la-brique
    3. Un décret est un acte réglementaire pris par le président de la République et/ou le Premier ministre. Il s’applique donc à l’échelle nationale tandis que l’arrêté municipal, décision du maire ou d’un de ses mandataires, ne s’applique qu’au niveau de la commune.

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