Lyes Benyoussef

J’écris sur l’Algérie, le Monde arabe, l’Islam.

  • Un point de vue intéressant sur les agressions de Cologne. Toutefois, je n’adhère pas à ce que Madame Tamzali affirme comme explications des évènements tragiques vécues par ces femmes. L’explication correcte est loin d’être telle ; on peut expliquer ce qui s’est passé en recourant à un peu d’anthropologie et de psychanalyse.
    Reste que ce qui est le plus intéressant dans cet entretien est qu’elle affirme qu’on (qui est ce ’on’ ?) lui a demandé de dire des choses.
    http://www.liberte-algerie.com/entretiens/jamais-on-ne-me-fera-peur-avec-lislam-247072

    (...)
    Évidemment, j’ai reçu une très forte pression des radios et des journaux pour dénoncer l’islam, pour entrer dans le concert des dénonciations. Je me suis disputée avec un présentateur, et à la fin, je lui ai dit : que voulez-vous que je vous dise, que je suis mieux à Paris qu’à Alger ? J’ai dit à mes amis de prendre un hélicoptère et de voir ce que sont devenus l’Irak, la Syrie et la Libye, de voir le monde arabe détruit. J’ai des amies féministes avec qui j’ai pris mes distances, car elles ont tellement appuyé les discours dans lesquels on crachait sur les Arabes. Pourtant, ce sont des femmes intelligentes qui savent très bien que ce n’est pas comme ça qu’on parle. Quand on fait l’analyse de la situation, on ne peut pas dire que c’est la religion, celle-ci ne peut ni violer ni parler.
    (...)

    #islam #islamophobie #Cologne #Algérie #femme #féminisme #France #médias

  • On peut désormais parler de « preuves » s’agissant de la corruption de Chakib Khelil. Après l’article d’Algérie patriotique, donnant des informations détaillées sur les comptes bancaires des membres de la familles Khelil, c’est Maghreb Emergent qui contribue pour sa part :

    http://www.maghrebemergent.info/actualite/maghrebine/58969-comment-l-ex-drs-compte-renvoyer-chakib-khelil-a-son-statut-

    (...)
    Maghreb Emergent a pu consulter une partie des documents qui ont fondé l’enquête publiée ce mardi 11 mai par le site Algérie Patriotique édité par l’un des fils du général à la retraite Khaled Nezzar. Si les informations se recoupent, les sources ne se sont forcément les mêmes. Elles sont proches de l’appareil judiciaire dans le cas de Maghreb Emergent. Leurs informations sont étayées par des vérifications effectuées depuis un mois aux Etats Unis et en France. Elles ne sont pas démenties par d’autres sources informées des contenus de l’enquête du DRS qui a abouti à la chute de Chakib Khelil au printemps 2011. Najat Khelil née Arafat détenait un sous-compte sur le principal compte d’affaires de la filière du scandale Saipem. Il s’agit d’un compte de la Bank Audi Saradar à Beyrouth sur lequel Pearl Partners de Farid Bedjaoui a redistribué 34,3 millions de dollars de commissions Saipem. Titulaire principal de ce compte : Omar Habour, l’ami de 50 ans de Chakib Khelil, son hologramme bancaire et gestionnaire de patrimoine. Le nom de Najat Khelil née Arafat qui figure comme détenant ce sous compte au Liban apparait dans le rapport d’une commission rogatoire internationale en 2011. Cette information est l’une des plus précises qui a fondé l’inculpation de Chakib Khelil par le tribunal de Sidi M’hamed et l’émission d’un mandat d’arrêt international contre lui son épouse et ses deux fils le 12 août 2013 par le procureur général près du tribunal d’Alger, Belkacem Zeghmati. Elle apportait la preuve tangible dans le scandale de Saipem que c’est les Khelil qui se tenaient au bout de la chaine de flux de paiement transitant par Farid Bedjaoui, puis principalement par Omar Habour.

    Un système de camouflage éventé

    L’épouse de Chakib Khelil a donc eu accès à un compte bancaire disposant d’une provision de 34,3 millions de dollars provenant quasi directement des activités de Saipem en Algérie entre fin 2007 et fin 2010. Cela ne diminue en rien de l’importance des informations révélées par Algérie Patriotique, même si elles impliquent des montants inférieures. Une source algérienne résidente aux Etats-Unis nous a expliqué que connaissant le système fiscal local et la surveillance des flux suspects, les Khelil ont choisi de ne pas rapatrier beaucoup de cash vers les Etats Unis. Les opérations enregistrées sur le compte Sun Trust Bank de Mme Najat Khelil font état d’une entrée de 1 421 000 dollars provenant, comme rapporté par Algérie Patriotique, d’un compte détenu par Omar Habour. Le couple Khelil a cumulé entre 2004 et 2011 un avoir de 1,4 million de dollars sur un autre compte détenu en commun. C’est le système de camouflage des flux qui a nécessité une multiplication des intermédiaires, des sociétés-écrans (révélées dans le Panama Papers) et les comptes bancaires. L’ancien ministre de l’énergie en détenait trois aux Etats Unis en dehors de cinq comptes en Suisse. Un avocat a engagé une bataille judiciaire en janvier 2014 pour empêcher la levée du secret bancaire sur les comptes de Chakib Khelil en Suisse, une bataille qui a tourné contre le prévenu en février 2015 mais qui a été abandonnée par le ministère public algérien. Alger ne veut plus savoir de combien ont été provisionnés les comptes suisses de Chakib Khelil. La compagnie Pearl Partners de Farid Bedjaoui a signé un contrat avec Saipem le 27 octobre 2007 au terme duquel la filiale du pétrolier italien ENI lui reverserait 3% du chiffre d’affaires réalisé en contrats en Algérie au delà de cette date. Saipem a engrangé près de 6,9 milliards de dollars en trois ans et Pearl Partners a reçu 197 milliards de dollars sur ses comptes à Hong Kong et Singapour.

    Une stratégie attentiste qui a semé le doute

    La parution de l’enquête de Algérie Patriotique apparaît comme le coup d’envoi d’une contre attaque des secteurs de l’armée, l’ancien DRS en particulier qui a subi le retour et la tentative de réhabilitation de Chakib Khelil comme une humiliation. Les anciens du DRS, leur chef historique en premier, avaient été pris de vitesse par les évènements de ces dernières semaines. Le scénario d’un Chakib Khelil faisant le tour des zaouias dans le pays et campant le personnage de la victime persécutée sur les plateaux de télévision était un scénario politiquement impensable encore au début de cette année. La réaction a beaucoup tardé. Le général à la retraite Toufik, patron du service de renseignement algérien durant 25 ans, est connu pour sa prudence opérationnelle. L’enquête qui a confondu Chakib Khelil est en grande partie celle de ses éléments. Sa réhabilitation en cours les a fait basculer subitement dans le rôle des bourreaux. Le général Toufik a pris le pari de laisser le clan Bouteflika rattraper le délire de Chakib Khelil et l’inviter à jouir discrètement de l’impunité dont il bénéficie pour l’heure. Cette démarche attentiste tablait secrètement aussi sur l’auto-affaissement de l’opération « revamping » Khelil sous le poids des faux pas qu’il accumule dans sa frénésie d’apparitions publiques. Mais cette posture du « laisser dire » a atteint ses limites lorsqu’il s’est confirmé que le clan Bouteflika a perdu sa boussole politique avec l’aggravation de l’incapacité du président et que personne, surtout pas Said Bouteflika, ne ramènerait Khelil à la raison. Des secteurs de l’ancien réseau clientéliste du DRS ont été saisis par le doute sur la capacité des militaires déchu du Bouteflikisme à rester des acteurs qui comptent dans la vie publique. Ce doute s’est accompagné d’un autre sur la culpabilité réelle de Khelil dans l’opinion publique matraquée par le forcing de Ennahar TV pour le « laver plus blanc que blanc ». Des pressions se sont, en conséquences, faites plus inquiètes ces derniers jours pour que les informations précises sur, notamment, l’enrichissement personnel de Chakib Khelil et de sa famille durant l’exercice de ses fonctions ministérielles, trouvent un accès vers les Algériens. Maghreb Emergent a bénéficié de la fuite sur le compte secondaire de Mme Najat Khelil au Liban et de son importance décisive (34, 3 millions de dollars) il y a près d’un mois. Le journal a choisi de prendre le temps de la vérifier. Mais aussi de comprendre qu’elle était la stratégie des acteurs de ce film surréaliste.
    (...)

    #Algérie #corruption #ChakibKhelil #DRS

  • Discuter avec un salafiste ?
    http://analysedz.blogspot.com/2016/05/pourquoi-le-regime-algerien-tolere-ou.html

    (...)
    –Lyes : « Les thèmes importants en Algérie actuellement sont nombreux, mais à leur tête il y a la maladie de Bouteflika, qui gouverne réellement et qui lui succèdera, serait-il le corrompu Chakib Khelil ? »
    –Salafiste : « Écoute mon frère, ce qui est illicite en religion, nous n’en parlons pas. Et la question de Bouteflika et de qui gouverne, c’est en religion illicite (la yadjouzou char‘ane) d’en parler et le devoir est l’obéissance de préférence. »
    [Voyant clairement une excommunication implicite, je ne réponds pas pour qu’elle ne devienne pas explicite. Et le salafiste continue :]
    (...)

    #Algérie #islam #islamisme #salafisme #djihadisme #terrorisme #démocratie #laicité #Bouteflika

  • Salafisme et régimes arabes autoritaire font bon ménage
    http://analysedz.blogspot.com/2016/05/pourquoi-le-regime-algerien-tolere-ou.html


    (...)
    En Algérie, le poids de la religion n’échappe à aucun observateur. L’historien Mohammed Harbi écrit dans un article paru en 1994 : « l’islam est inscrit dans les profondeurs de la réalité algérienne. Il n’est pas une structure religieuse autonome et circonscrite dans une société aux pratiques sécularisées. Il a façonné l’espace symbolique où s’est inscrit le politique. Et l’action de l’État en place depuis 1962 n’a en rien modifié cela parce que jamais n’a été entreprise l’institution d’un nouvel espace national qui aurait opposé sa ferveur civique au poids du religieux. »
    Si tel est le cas de l’Algérie, il faut aussi parler avec Edward Said des islams. Par rigueur. Car, on le sait, il y a à peu près autant d’islams que de musulmans, autant de corans que de lectures de coran et autant de lectures que de lecteurs, etc.
    (...)

    #Algérie #islam #islamisme #salafisme #djihadisme #terrorisme #démocratie #laicité

  • « Comment devenir ministrable en Algérie ? L’approche biographique est la plus indiquée, en sociologie, pour y répondre. Examinons un cas. »
    http://analysedz.blogspot.com/2016/05/hamid-grine-selon-un-journaliste.html

    (...)
    Les mœurs du régime algérien étant ce qu’elles sont, pourquoi choisir un journaliste et écrivain à ce poste ? Hamid Grine était aussi autre chose. Longtemps, il était le chargé de communication de Djezzy. Devenir ministre de la communication après avoir été le chargé de communication d’une grande entreprise peut sembler une promotion.
    (...)
    Après avoir résumé une mésaventure avec Hadda Hazzam du quotidien arabophone Al-Fajr, Mahmoud Belhimer parle du sieur Grine.
    Voici son témoignage :
    (…) J’ai vécu aussi un autre problème lié à la pression qu’exerce sur la presse les pouvoirs financiers. Ces derniers menacent notre presse jusqu’à sa mise à genoux. Vous connaissez tous un certain Hamid Grine, directeur de la communication de Djezzy. Ce monsieur, fort de sa position de distributeur de la manne publicitaire : pages de pub, puces, voyages, a ‘‘colonisé’’ tous les journaux (TAHANHOUM). Il est le vrai rédacteur en chef ; il peut même licencier des journalistes, les affecter et choisir ceux qui couvrent les activités de Djezzy. La presse a fait de lui un grand romancier dépassant les écrivains connus comme Rachid Boudjedra et…le grand Balzac ! Le malheur est que toute la presse a accepté de sacrifier sa liberté contre quelques téléphones mobiles, pages de pub offertes par Grine. Les patrons des journaux acceptent TEHIN et ERROUKHSS. La presse algérienne peut critiquer Toufik, l’homme fort du DRS, mais jamais Djezzy, comme l’écrivait un jour mon ami Hassane Moali d’El Watan !
    Hamid Grine a créé beaucoup de problèmes à des journalistes honnêtes qui refusent de collaborer avec lui dans ce jeu de bandits et de rentiers, comme mon ami Faycel M’djahed de Liberté, qui a dû quitter son journal à cause de lui. Et bien sûr, moi aussi il essayait de me créer des problèmes lorsque j’étais rédacteur en chef adjoint à El Khabar. Il a demandé à mes responsables de me licencier sinon Djezzy cesserait de donner la pub à El Khabar. Une menace de l’asphyxier financièrement puisque les revenus de la pub de Djezzy à El Khabar dépassent les 2 milliards de centimes par mois ! Heureusement que les responsables du journal étaient à mes côtés.
    Je vais partager avec vous ces SMS que j’ai eu à échanger avec ce ‘‘Grand écrivain romancier’’ que je garde pour l’histoire de notre presse.
    Hamid Grine, chargé de la communication à Djezzy, m’envoie un message le lundi 13 mars 2006 à 22h 30mn, voici le texte : ‘‘Tu censure nos communiqués, j’en informe Ali’’ (Ali est le PDG d’El Khabar). Ma réponse par SMS : ‘‘Réponse : 1. c’est moi qui ai insisté pour que le communiqué sortira demain. 2. Daz Maahoum Anta waali djerri Taak 3. Je suis responsable à El Khabar et je ne serais jamais un esclave de Djezzy. 4. et fin, je ne vais jamais être acheté par une puce, portable, dîner, ou même un voyage à l’étranger. Mahmoud Belhimer’’. Hamid Grine, envoie ce message à mes responsables à El Khabar et m’envoie un autre SMS : ‘‘C’est un message de voyou, je ne m’abaisserai pas à ton niveau, On ne joue pas dans la même division, je demanderai des sanctions à Ali que tu insultes’’.
    Ma réponse par SMS : ‘‘1. le voyou c’est celui qui menace un journaliste pour publier un communiqué. 2. le niveau ? Oui, un Huntington de Djezzy qui se croit le seul détenteur du monopole du savoir ! 3. Ta division, c’est les Zéro. 4. et fin. Encore une fois, Daz Maahoum 200 pour 100. Mr Belhimer’’. Himid Grine continue dans la provocation et l’insulte par SMS toujours, et envoi ceci. ‘‘Nedjma te paye combien’’. (J’ai un numéro Nedjma) J’ai décidé de ne pas répondre après insistance de mes responsables.
    Voilà mes amis une histoire parmi d’autres (…)

    #Algérie #corruption #Monde_arabe #Maghreb #Grine #journalisme

  • Pourquoi le système politique algérien ne se réformera jamais ?
    La première partie évoquait l’inculture des dirigeants (avec des généraux dont le niveau, comme le plus haut gradé du pays, Ahmed Gaïd Salah, est primaire), la mentalité élitiste (paradoxalement compte tenu du niveau bas), et la corruption massive.
    Extraits de la deuxième partie.

    http://analysedz.blogspot.com/2016/04/pourquoi-le-regime-algerien-est.html

    4. La hiérarchie militaire
    Même dans l’armée, ce qu’on appelle les « jeunes officiers » sont fascinés par des supérieurs richissimes et omnipotents, dont certains devenus mythiques à leurs yeux. Chacun des généraux analphabètes fonde une dynastie. Les « jeunes officiers » ne rêvent que de les remplacer avec toujours les privilèges auto-octroyés, l’inculture et l’anti-démocratie. C’est pourquoi l’exemple portugais (c’est-à-dire les capitaines démocrates révolutionnaires) ne sera pas réédité en Algérie. Ahmed Rouadjia écrit : « La jeune génération d’officiers plus instruits et mieux formés que leurs aînés dans les grandes écoles soviétiques, occidentales et nationales, après l’indépendance, s’est trouvée complètement inféodée, bridée puis maintenue en laisse par la gérontocratie de militaires hauts gradés, comme le général de corps d’armée, Ahmed Gaïd Salah, et d’autres généraux du même acabit. Usés jusqu’à la corde par le pouvoir, gangrenés par la corruption, contaminés par le goût de la licence et de la luxure, certains officiers hauts gradés ont une conception d’autant plus étroite et étriquée du monde qu’ils n’ont pas d’autres projets grandioses que ceux de dépouiller l’État de ses prérogatives régaliennes en vidant le trésor public à la faveur de l’économie rentière. » Loin de répugner les jeunes, ils les fascinent. Il n’y aura jamais de militaire sauveur en Algérie.

    5. Le soutien de l’Occident
    Le soutien effectif et officiel de l’Occident, tout particulièrement les États-Unis et la France, au système politique algérien est un élément fondamental. S’agissant de la France, elle n’a plus le choix, l’État français étant le complice d’abord volontaire du système politique algérien. Rappelant l’impunité de l’assassinat de l’opposant algérien Ali André Mécili à Paris début avril 1987.
    La droite française comme la gauche, mais surtout la gauche, sont totalement corrompues depuis 1962 (voir Nicolas Beau, Paris, capitale arabe, éd. du Seuil) à tel point que seule l’extrême-droite française est hostile au système politique algérien — mais cette hostilité de l’extrême-droite est celle envers toute l’Algérie, peuple et histoire.
    Par son acceptation de la division internationale du travail, par la dévastation des forces productives intérieure, le régime algérien arrange les Américains qui ne demanderaient pas mieux, sauf peut-être Chakib Khelil comme président...

    6. Les crimes de la décennie 1990
    Les décideurs coupables d’effroyables crimes (et leurs clientèles) durant la décennie 1990 feront absolument tout pour dissuader leurs « camarades » moins impliqués, si tant est que l’idée démocratique effleure l’esprit de ceux-ci. En effet, pour les coupables, même fuir à l’étranger est impensable depuis le Printemps arabe. L’Algérie — et l’Algérie dans le statuquo — est leur otage.
    (...)

    7. La rente pétrolière
    In fine, la rente des hydrocarbures qui permet de financier tout ce merdier.
    (...)

    #Algérie #France #USA #extrême-droite #gauche #Pétrole #crime #Occident #Bouteflika

  • http://analysedz.blogspot.com/2016/04/les-causes-de-lechec-doccupy-wall.html

    Après avoir suscité un immense espoir partout dans le monde et non seulement aux États-Unis, le mouvement Occupy Wall Street s’est essoufflé peu à peu pour s’éteindre définitivement — au moins comme mouvement populaire d’envergure. Cet échec, si décevant, appelle l’analyse. D’autant plus qu’actuellement, en France, Nuit Debout semble reproduire certaines de ses erreurs fatales.

    Occupy et Nuit Debout
    Si la protestation en France commence contre la loi El Khomri, elle ne tarde pas à voir cette revendication diluer, pour ne pas dire disparaître. Et puis se pose la question des porte-paroles sérieusement. Frédéric Lordon, fin analyse du capitalisme contemporain certes, est-il pour autant pertinent dans ses interventions à Nuit Debout et, par ailleurs, le représente-t-il ?
    « Pas de leader, pas de revendication, pas de thématique affichée dans le mouvement Nuit Debout : est-ce une force ou une faiblesse ? », s’interroge Le Monde. Une faiblesse sans doute. Et elle avait déjà caractérisé Occupy. D’où, à mon avis, l’intérêt particulier de l’analyse que propose le journaliste américain Thomas Frank sur cette « contestation amoureuse d’elle-même », publié en janvier 2013 par Le Monde diplomatique. En effet, il n’a jamais suffi d’avoir raison et d’être animé par de bonnes intentions pour réussir, notamment pour un mouvement social.

    (...)
    La question à laquelle les thuriféraires d’OWS consacrent des cogitations passionnées est la suivante : quelle est la formule magique qui a permis au mouvement de rencontrer un tel succès ? Or c’est la question diamétralement inverse qu’ils devraient se poser : pourquoi un tel échec ? Comment les efforts les plus louables en sont-ils venus à s’embourber dans le marécage de la glose académique et des postures antihiérarchiques ?
    Les choses avaient pourtant commencé très fort. Dès les premiers jours d’occupation de Zuccotti Park, la cause d’OWS était devenue incroyablement populaire. De fait, comme le souligne Todd Gitlin (5), jamais depuis les années 1930 un thème progressiste n’avait autant fédéré la société américaine que la détestation de Wall Street. (...)
    Ce qui se tramait à Wall Street, pendant ce temps-là, a suscité un intérêt moins vif. Dans Occupying Wall Street, un recueil de textes rédigés par des écrivains ayant participé au mouvement (6), la question des prêts bancaires usuraires n’apparaît qu’à titre de citation dans la bouche d’un policier. Et n’espérez pas découvrir comment les militants de Zuccotti comptaient contrarier le pouvoir des banques. Non parce que ce serait mission impossible, mais parce que la manière dont la campagne d’OWS est présentée dans ces ouvrages donne l’impression qu’elle n’avait rien d’autre à proposer que la construction de « communautés » dans l’espace public et l’exemple donné au genre humain par le noble refus d’élire des porte-parole.
    (...)

    #Occupy #NuitDebout #Protestataion #Manifestation #France #USA #Amérique

  • Les attentats de Bruxelles et les stéréotypes de Pierre Vermeren
    http://contre-attaques.org/magazine/article/les-attentats

    Dans son analyse des profils des terroristes venus de #Belgique, l’historien Pierre Vermeren fait le lien entre djihadime et leur origine Rifaine, du nord du Maroc. Une vision essentialisante selon Khalid Mouna, anthropologue à l’université de Meknès, qui renvoie plutôt les terroristes à leur nationalité Belge. Pourquoi le jihadisme a-t-il frappé Bruxelles ? C’est une question posée aujourd’hui par les médias, les chercheurs, les observateurs, mais aussi les simples citoyens. Lors de deux entretiens (...)

    #Magazine

    / #carousel, Actualités, #Europe, #Immigration, Belgique

  • Why Is America So Bad at Promoting Democracy in Other Countries?
    There’s no quick, cheap, or military-based way to bring peace to places like Afghanistan, Yemen, and Iraq. It’s time we changed our approach, and we can start at home.
    Stephen Walt - Foreign Policy / 25.04.16
    http://foreignpolicy.com/2016/04/25/why-is-america-so-bad-at-promoting-democracy-in-other-countries

    To believe the U.S. military could export democracy quickly and cheaply required a degree of hubris that is still breathtaking to recall.[...]
    At the risk of stating the obvious, we do know what doesn’t work, and we have a pretty good idea why. What doesn’t work is military intervention (aka “foreign-imposed regime change”). The idea that the United States could march in, depose the despot-in-chief and his henchmen, write a new constitution, hold a few elections, and produce a stable democracy — presto! — was always delusional, but an awful lot of smart people bought this idea despite the abundant evidence against it. [...]
    So if promoting democracy is desirable, but force is not the right tool, what is? Let me suggest two broad approaches.
    The first is diplomacy.[...]The United States has done this successfully on a number of occasions (e.g., South Korea, the Philippines, etc.) by being both persistent and patient and using nonmilitary tools such as economic sanctions. In these cases, the pro-democracy movement had been building for many years and enjoyed broad social support by the time it gained power. Relying on diplomacy may not be as exciting as the “shock and awe” of a military invasion, but it’s a lot less expensive and a lot more likely to succeed.[...]
    The second thing we could do is set a better example. America’s democratic ideals are more likely to be emulated by others if the United States is widely regarded as a just, prosperous, vibrant, and tolerant society, instead of one where inequality is rampant, leading politicians are loudmouthed xenophobes, the prison population is the world’s largest, and airports and other public infrastructure are visibly decaying, yet no one seems able to do much about it. When millions of qualified citizens are excluded from voting, or when a handful of billionaires and other moneyed interests exert a disproportionate and toxic effect on U.S. politics, it is hardly surprising that other societies find America’s professed ideals less appealing than they once were. Add in Guantánamo, targeted killings, Abu Ghraib, overzealous NSA surveillance, and the reluctance to hold powerful people accountable for their misdeeds, and you end up with a pretty tarnished brand.

  • Is the crackdown on the Muslim Brotherhood pushing the group toward violence? | Brookings Institution

    http://www.brookings.edu/research/papers/2016/03/muslim-brotherhood-crackdown-violence-fayed

    Editor’s note: “Islamists on Islamism Today” is a new series within Brookings’s Rethinking Political Islam project. In this series, we will hear directly from Islamist activists and leaders themselves, as they engage in debate with project authors and offer their own perspectives on the future of their movements. Islamists will have the opportunity to disagree (or agree) and challenge the assumptions and arguments of some of the leading scholars of political Islam, in the spirit of constructive dialogue.

    REPORT
    Rethinking Political Islam
    April 21, 2016
    The military coup of July 2013 forced the Muslim Brotherhood to retreat to a climate of secrecy after the group had spent just a year working openly and in power. The authorities soon designated it as a terrorist organization, and banned around 1,200 of the civil institutions affiliated with the group or its members, to say nothing of the thousands of people killed and imprisoned. The Brotherhood was left with no other option but to protest in a climate characterized by exclusion and McCarthyism.

  • L’Algérie, dans une crise générale majeure, est à la veille d’un désastre dès l’amenuisement de ses réserves constituées au temps du baril à plus de 100$. Pourtant, la société est léthargique et l’autisme du régime, à l’image d’un président longtemps mourant, semblent indiquer le contraire. Pourquoi le système politique algérien ne se réforme pas ?

    Extraits d ela première partie d’un article paru sur AnalyseDZ
    http://analysedz.blogspot.com/2016/04/pourquoi-le-systeme-politique-algerien.html

    (...)
    Bien que l’absence de projet économique et social sérieux soit manifeste, le système politique refuse toutes les leçons de l’histoire, algérienne et mondiale, en consolidant son autoritarisme comme s’il n’était pas illégitime, comme si les dirigeants étaient compétents et comme si cette attitude irrationnelle serait productive. Pourquoi donc le système politique algérien refuse-t-il de se réformer ? Esquisse d’une réponse :

    1. L’inculture
    L’impéritie et l’infériorité intellectuelle des dirigeants, tous, civils et militaires confondus, raillés à juste titre par la population et (désormais avec l’inénarrable Sellal) le monde, est un problème majeur. Les décideurs algériens, notamment les militaires, sont d’une inculture incroyablement profonde. Le sociologue Ahmed Rouadjia écrit dans une étude récente que « ce qui différencie le régime algérien des autres régimes du même acabit, c’est moins l’autoritarisme que l’inculture de la caste militaire sur laquelle il s’arcboute. En effet, le cursus, tant scolaire que militaire, de la plupart des officiers supérieurs de l’armée algérienne, sinon la majorité d’entre eux, qui ont présidé et qui continuent jusqu’à présent à présider au destin du pays, s’avère à l’examen attentif sinon affligeant, du moins assez médiocre. Beaucoup d’entre eux sont devenus en effet des généraux sous la présidence de Chadli Benjdid qui avait lui-même institué ces hautes distinctions, alors que traditionnellement ces marques distinctives sont réservées aux gens de mérite et aux soldats qui se sont illustrés aux champs de bataille, comme les généraux allemands, français, russes, ou vietnamiens, tel le fameux général Giap, le vainqueur des troupes françaises du Diên Biên Phu. Comme les officiers qu’il avait promus au grade de général, Chadli Benjdid, issu lui-même comme ses pairs de la DAF (déserteurs de l’armée française) ayant rejoint très tardivement les rangs de l’ALN et du FLN, n’avait pas ou à peine le niveau de certificat d’études primaires. »
    (...)
    En tout état de cause, si un homme comme le général Toufik, autoproclamé d’après un témoignage « dieu de l’Algérie », pouvait tirer intellectuellement des leçons, il n’y aurait pas eu la fin pitoyable ou risible (c’est selon le tempérament et l’opinion de chacun) qu’il est en train d’avoir en ce moment…

    2. Profondeur de la mentalité antidémocratique, élitisme contradictoire
    L’hostilité, par principe, des décideurs algériens à la démocratie. Dans celle-ci, c’est un élément, son « accountability » (rendement de comptes), qui les répugne. Ils partagent avec les islamistes radicaux, pour des raisons différentes, la vision selon laquelle le peuple ne peut être source de légitimité ; à leurs yeux, c’est une populace, un conglomérat de tubes digestifs à remplir de nourriture et de bras à essayer de faire travailler (et la rente pouvait garantir la nourriture et remplacer le travail). Ce qui relève du paradoxe, car la tentation de qualifier les décideurs algériens de canaille est compréhensible tant il s’agit d’un constat objectif
    (...)
    Ainsi, dans un article paru aujourd’hui sur El Watan, le politologue Rachid Tlemçani relève une confusion des laudateurs de Chakib Khelil et autres corrompus : « Le discours technocratique est mis en exergue, comme si la crise nationale n’est pas une crise de légitimité, politique, mais d’ordre technique. » Aujourd’hui comme hier, cette hostilité envers la démocratie, est enraciné dans les mentalités des dirigeants et leurs proches.

    3. La corruption
    Son ampleur parmi les groupes que sécrétés par système est effarant. En effet, Franco avait désigné le roi d’Espagne comme successeur, mais celui-ci avait consenti volontiers, sans contrainte, une monarchie constitutionnelle (voir l’étude déjà cité de Rouadjia). Dire que la culture démocratique était partagée par les élites dirigeantes d’Espagne y compris sous Franco ! Chose dont l’équivalent n’aura jamais lieu en Algérie. Comme l’écrit Rachid Tlemçani dans le même article, « pratiquement l’ensemble de la classe politique est impliquée d’une manière ou d’une autre dans des scandales financiers. » Cet universitaire estime la corruption à quelques 300 milliards de dollars. En vérité, si l’on donne au mot corruption tout sa profondeur et on ne la réduit pas aux pots-de-vin, les commissions et les rétro-commissions, l’estimation 300 milliards sera dépassée.
    (...)

    #Algérie #Bouteflika #Corruption

  • "Des élèves candidats au Bac considèrent « Kofr » l’étude de la philosophie"
    Je ne me souviens pas des termes utilisés par Karl Marx, mais il voulais dire quelque part que lorsque l’histoire se répète pour la première fois, elle est tragique. Quant à la deuxième, elle est tragi-comique. L’Algérie et l’intégrisme, on est dans la deuxième !

    http://www.algerie1.com/actualite/des-eleves-candidats-au-bac-considerent-kofr-letude-de-la-philosophie

    La Fédération des parents d’élèves d’Alger vient d’élaborer un rapport qui donne tout simplement froid dans le dos. Ce rapport pointe le danger de l’esprit fondamentaliste qui est en train de se propager chez les élèves qui font moins confiance à leurs enseignants dans les lycées qu’aux pseudos imams qui officient dans des mosquées qui échappent au contrôle du ministère des affaires religieuses.
    A en croire le rapport de la Fédération des parents d’éléves, des candidats au Baccalauréat ont rendu leurs copies blanches dans l’épreuve de philosophie, insultant leurs enseignants et critiquant l’enseignement de la philosophie considéré comme « Kofr » et contraire aux messages divins.
    Les grandes figures de la philosophie en Islam comme ibn Rochd, Ibn Khaldoune, Al Ghazali, Al Farabi, Ibn Sina, seraient ainsi des hérétiques justes bons à la flagellation ou au bûcher. Ce rapport doit interpeller les responsables de l’Education quant à la dérive intégriste et radicaliste qui menace les lycées.

    #Algérie #intégrisme #Islamisme #Philosophie

  • Nasser n’était pas, après tout, hostile par principe à Israël. En tout caas ce qui ce qui laisse entendre une note de Kissinger, déclassifié récemment, où il est question de propos tenus par Hassan II, feu le roi du Maroc.


    http://www.tsa-algerie.com/20160405/hassan-ii-appelait-etats-unis-a-proteger-houari-boumediene

    Gamal Abdel Nasser voulait déjà signer un accord avec Israël
    Autre fait marquant dans la note de Kissinger : Hassan II avait relevé une volonté du dirigeant égyptien de « conclure un accord avec Israël », indique le Secrétaire d’État. Cela dit, « Nasser craignait d’être renversé », si un tel accord venait à voir le jour. Hassan II considérait alors que « les Palestiniens – et pas Nasser – étaient la clé pour le règlement » du conflit israélo-arabe, affirme Kissinger.

    #Égypte #Israël #Nasser #Hsitoire

  • Un fascisme féministe pourrait diriger l’Europe selon le sociologue Jean Viard.
    http://www.ladepeche.fr/article/2016/04/05/2318567-sentiment-plus-perspective-politique.html

    « On est actuellement face à une grande peur de déclassement, porté par des mouvements d’extrême droite ou de fascisation comme les islamistes, qui essaient de réinstaurer leur mythe de l’âge d’or. Il est très possible qu’on passe par une période de fascisme, on n’en est pas loin, avec des extrême droites modernes en Europe, dirigées par des femmes. »

    #France #NuitDebout #féminisme #Fascisme

  • La Tunisie, de tous les pays du Printemps arabe, est celui qui s’en sort le mieux. Mais la situation est très fragile. Suivant un article paru dans Mondeafrique, c’est Alger qui alimente cette tentation de contre-révolution en Tunisie. Je ne sais pas si c’est plausible. Les services secrets algérien, actuellement dans la tourmente, disposeraient-ils d’assez de moyens et de liberté de manœuvres pour s’y aventurer de la sorte ? Difficile de trancher. Il est certes dans l’intérêt du système algérien que Tunis patauge dans l’expérience démocratique pour au moins dissuader les démocrates algériens. Mais...

    http://www.mondafrique.com/tunisie-tentation-de-contre-revolution

    Tunisie, la tentation de la contre révolution

    L’Algérie ne ménage pas ses efforts pour remettre les anciens de Ben Ali en selle. Sur fond d’anti-islamisme viscéral.
    L’incertitude politique règne en Tunisie. Les clans au pouvoir à l’époque du président Ben Ali sont de retour qui se composent d’anciens du RCD, l’ex-parti unique, et d’hommes d’affaires jadis en cour.
    Leur objectif est de multiplier les coups de boutoir contre le parti islamiste Ennahda, tout en attendant la décomposition de Nida Tounes, le mouvement du président Beji Caïd Essebsi. Orphelins d’un pouvoir qu’ils ont monopolisé depuis l’indépendance et qu’ils ont du abandonner à des gueux sans éducation, ces élites veulent récupérer la gestion de l’Etat. Leur Etat.
    Complot sahélien
    Si l’on recherche l’origine de ces revenants, on note qu’ils sont tous issus du Sahel, cette vitrine présentable et riche de la Tunisie qui va de Monastir à Sousse. A y regarder de plus près, ces Sahéliens se divisent en deux grands groupes : les destouriens de l’ex-président Bourguiba, rassemblés autour d’un puissant homme de réseaux, Kamel El Taïef bras droit de Ben Ali jusqu’à son mariage avec Leila en 1992 et revenu dans les coulisses du pouvoir depuis 2011. D’autre part, des anciens du RCD, regroupés autour de l’ancien premier ministre de Ben Ali, Mohamed Ghannouchi, resté à la tète du gouvernement après la Révolution après avoir joué un role plus qu’ambigu durant le fameux 14 janvier 2011, où le dictateur prit la poudre d’escampette.
    Malgré les antagonismes qui les opposent, ces groupes ont noué une alliance pour faire tomber Ennahda. Ils enchaînent les réunions, parfois encadrées par des agents des services secrets algériens
    Alger à la manoeuvre
    Ces nostalgiques du passé considèrent que les Etats-Unis et la France ont soutenu, depuis 2011, l’islamiste Rached Ghannouchi, qui sait tenir aux diplomates occidentaux le langage qu’ils veulent entendre. Ces émigrés de l’intérieur ne peuvent compter que sur l’appui discret d’Alger ainsi que sur l’argent des Emirats Arabes Unis animés par une haine constante pour les Frères Musulmans (contrairement au Qatar).
    La menace terroriste est toute trouvée pour alimenter la polémique. Les Algériens encouragent les anciens de Ben Ali à attaquer Ennahda devant les tribunaux pour démontrer, en gros, la connivence du parti islamiste avec le terrorisme. Cette stratégie se matérialise par l’apparition de vieux dossiers concernant les papiers d’identité délivrés à des terroristes en 2013 et 2014 alors que les islamistes du mouvement Ennahdha rêgnaient en maître sur le gouvernement tunisien.

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    Fragmentation islamiste
    Force est de constater que ces conspirationnistes disposent un boulevard devant eux compte tenu du piètre spectacle qu’offrent les deux poids lourds politiques que sont Ennahda et Nidaa Tounès. Les islamistes en effet se déchirent en vue de la succession du cheikh Ghannouchi âgé de 74 ans. Trois groupes s’affrontent en coulisses : celui du conservateur Abdelhamid Jlassi, celui de l’ancien ministre de la santé, d’inspiration salafisten Noureddine Bhiri (peu populaire) et celui des frères Ali et Amer Larayedh, respectivement ancien Premier ministre et ancien conseiller de Ghannouchiqui. Ces deux là viennent du Sud, où se trouve le gros des troupes (et des votes) islamistes.
    A l’opposé de l’échiquier politique tunisien, le parti Nidaa Tounes a été mis sens dessus dessous par la grave crise interne de début 2016 qui a provoqué de nombreuses défections et par la prise du parti, même temporaire, par le propre fils du Président Caid Essebsi, Hafedh.
    L’ancienne classe dirigeante d’avant la Révolution de 2011 compte les points, avec dans son jeu un atout majeur : la machine électorale du temps de Ben Ali, aussi bien au sein de l’appareil sécuritaire que dans le monde des affaires, qui avait soutenu Beji faute de mieux, ne demande qu’à reprendre du service.
    A condition de trouver un leader charismatique, pas trop mouillé sous Ben Ali et pas encore enlisé dans les jeux stériles de l’après Révolution. Ce ne sera pas le plus facile
    Caroline Bright

    #Algérie #Tunisie #Révolution #Contre-révolution #Ennahda

  • En Algérie, la corruption alimentée par l’argent du pétrole

    « Panama Papers » : en Algérie, l’argent du pétrole passe par l’offshore

    http://www.lemonde.fr/afrique/article/2016/04/04/panama-papers-en-algerie-l-argent-du-petrole-passe-par-l-offshore_4895493_32

    L’accueil en grande pompe, le 17 mars, de Chakib Khelil, le ministre de l’énergie algérien de 1999 à 2010, en fuite depuis trois ans et soupçonné de corruption, a été pris en Algérie comme une provocation – la preuve de l’impunité dont jouissent les proches du chef de l’Etat. Et une façon d’enterrer l’affaire Sonatrach, la compagnie pétrolière nationale, qui défraie la chronique depuis 2010. Le mandat d’arrêt international contre M. Khelil a été annulé pour vice de forme, le juge qui a instruit l’affaire muté, le procureur général limogé. Mais l’ancien ministre n’a pas été blanchi par la justice algérienne.
    C’est donc depuis son pays que l’ami d’enfance du président Abdelaziz Bouteflika pourra suivre l’audience qui devait s’ouvrir lundi 4 avril, à Milan. La justice italienne enquête depuis 2013 sur un versement de 198 millions d’euros effectué par Saipem, une filiale du groupe pétrolier italien ENI, à des intermédiaires proches de M. Khelil, en contrepartie de plus de 8 milliards d’euros de contrats signés avec Sonatrach.
    L’épisode italien fait suite à une première procédure, qui a débuté en 2010 par la spectaculaire décapitation judiciaire de l’ensemble du management du groupe pétrolier public et s’est soldée, le 2 février, par des peines plutôt légères pour l’ancien PDG de la Sonatrach et deux de ses enfants. Les douze autres accusés ont bénéficié de non-lieu ou de peines avec sursis.
    Déjà condamnée pour corruption, en 2013, au Nigeria, Saipem s’était attaché en Algérie les services de deux hommes de confiance de l’ancien ministre de l’énergie algérien, Farid Bedjaoui et Omar Habour, aujourd’hui tous deux en cavale et soupçonnés d’avoir orchestré le versement de commissions à des officiels algériens et aux dirigeants de Saipem.

    Myriade de comptes offshore
    La firme panaméenne Mossack Fonseca a d’ailleurs enregistré, au début des années 2000, une myriade de sociétés offshore pour le compte de Farid Bedjaoui, 46 ans, golden boy de nationalité algérienne, française et canadienne, dont le dernier lieu de résidence connu est Dubaï. Neveu de l’ancien ministre des affaires étrangères, il est aujourd’hui au cœur du dossier. C’est sur les comptes bancaires émiratis de l’une de ses sociétés, Pearl Partners Ltd, domiciliée à Hongkong, qu’ont été versés les 198 millions d’euros, conformément au contrat signé le 17 octobre 2007 avec Saipem – de simples honoraires, selon ses avocats.
    Une partie de cette somme a ensuite été transférée vers la société Sorung Associates Inc., une entité créée par Mossack Fonseca à la demande de la société suisse de gestion de fortune Multi Group Finance, le 28 février 2007. M. Bedjaoui a un mandat de gestion sur Sorung Associates et gère des comptes à la Banque privée Edmond de Rothschild SA à Genève. C’est dans cet établissement que l’ancien chef de cabinet du PDG de Sonatrach, Réda Hemche, neveu de M. Khelil, a disposé d’un compte approvisionné de 1,75 million de dollars entre l’été 2009 et janvier 2010.

    Dix-sept sociétés enregistrées
    « Ces sociétés offshore n’ont rien d’extraordinaire pour un homme d’affaires international, elles ont été passées à la moulinette par les autorités compétentes, et rien n’a été trouvé », assure Me Emmanuel Marsigny, avocat de M. Bedjaoui. Les autorités italiennes ont découvert que le nom du fuyard apparaît dans au moins dix-sept sociétés domiciliées au Panama, aux îles Vierges britanniques et aux Emirats arabes unis. Onze de ses sociétés ont été enregistrées entre 2004 et 2010 par Mossack Fonseca, à la demande de la société suisse Multi Group.

    Soupçons de pots-de-vin
    Lorsque le nom de M. Bedjaoui apparaît dans la presse en 2013, Mossack Fonseca panique. L’agence d’investigation financière du gouvernement des îles Vierges britanniques lui adresse un courrier, en février 2014, exigeant des détails sur ses sociétés. Notamment Minkle Consultants SA, qu’il détient avec son coaccusé, Omar Habour, domicilié à Neuilly-Sur-Seine et à Genève. Ce dernier, qui possède avec M. Khelil une propriété dans le Maryland, au nord-est des Etats-Unis, aurait reçu un virement de 34,3 millions de dollars (30 millions d’euros) sur un de ses comptes au Liban. Contacté par Le Monde, son avocat, Yam Atallah, n’a pas souhaité réagir.
    Omar Habour apparaît comme le bénéficiaire effectif de quatre sociétés enregistrées par la firme panaméenne. Interrogée par les autorités des îles Vierges sur la société Girnwood International Engineering Ltd, Mossack Fonseca se contente de répondre le 8 mars 2014 : « Le bénéficiaire effectif est M. Farid Bedjaoui. » Il ne pouvait cependant ignorer que M. Habour était également partie prenante de la société, aux côtés de Ziad Dalloul, beau-frère de M. Bedjaoui.
    « Il y a encore des zones d’ombre, et il est probable que des pots-de-vin aient été versés et que d’autres officiels algériens en aient profité, déclare Djilali Hadjadj, le porte-parole de l’Association algérienne de lutte contre la corruption. Mais la justice algérienne ne coopère pas avec le parquet italien et retient certains renseignements. » Les preuves pourraient bien se trouver dans des paradis fiscaux et les archives de Mossack Fonseca.

    #Algérie #Corruption #PanamaPapers

  • Le pétrole, la face cachée d’une prétendue fracture sunnites/chi’ites

    http://analysedz.blogspot.com/2016/03/le-petrole-la-face-cachee-dune.html

    Présentée par la monarchie saoudienne comme la cause unique des violences au Moyen-Orient, la fracture sunnites/chi’ites sert à masquer la compétition autour de la souveraineté sur les champs de pétrole ou de gaz, situés pour l’essentiel dans des zones peuplées de chiites.
    Il suffit de superposer deux cartes – celle des champs pétrolifères au Moyen-Orient et celle des peuplements chi’ites – pour s’apercevoir que, là où des majorités chi’ites habitent en surface, du pétrole se trouve en sous-sol – et, pratiquement, rien que là.
    Observons la carte des peuplements chi’ites :


    Observons maintenant la carte des champs pétrolifères (en vert : pétrole ; en rouge : gaz) :

    La monarchie wahhabite saoudienne se trouve donc confrontée à plusieurs problèmes.
    – Ses puits et réserves de pétrole sont « sous les pieds » des minorités chi’ites qui peuplent la côte est de la Péninsule (25% de la population). Or, au lieu de se sentir dans leur pays comme d’authentiques citoyens, les minorités chi’ites y font l’objet d’une suspicion qui réduit leurs droits, rejoignant ainsi le sort réservé aux sunnites démocrates, réprimés par la monarchie. Mieux : partageant souvent les mêmes rites que la majorité des Iraniens, ils sont soupçonnés de faire allégeance à l’Iran comme puissance étrangère, distante de quelques dizaines de kilomètres, de l’autre côté du Golfe, et qui a déjà, par le passé, occupé militairement sans coup férir et annexé trois îlots dans ce Golfe.
    Il convient ici de distinguer les intérêts de grande puissance de l’Iran avec ceux des chi’ites arabes. L’Iran tente certainement d’intégrer les chi’ites arabes dans son jeu (et des minorités chi’ites arabes cherchent sûrement son soutien) : il n’est pas angélique et doit être tout aussi condamné pour l’absence de démocratie de son régime.
    En effet, la question, dans tout le Moyen-Orient, n’est pas essentiellement celle d’un prétendu affrontement sunnisme/chi’isme, qui ne sert qu’à légitimer la poursuite d’intérêts de grande puissance (la souveraineté sur le pétrole), comme la reproduction d’ordres autoritaires : le problème central est d’ordre démocratique, celui de l’absence d’Etats de droit garantissant l’égalité citoyenne à tous leurs habitants.
    – La disparition, en Irak, du régime de Saddam Hussein et l’occupation américaine qui s’en est suivie ont provoqué un transfert de pouvoir des élites sunnites baathistes (les sunnites représentent 30% de la population irakienne) aux élites chi’ites, jusque-là maintenus dans un statut secondaire. Et, de ce fait, elles ont accru la sphère d’influence iranienne à l’ouest, bien que les élites chi’ites irakiennes se considèrent comme arabes et ne partagent pas la conception politique sur laquelle est fondée la République islamique (leur grand ayatollah, Ali Sistani, récuse la vision platonicienne khomeyniste de la wilayet el faqih – la « tutelle du savant »). Cela n’empêche pas que le pétrole irakien soit passé d’une souveraineté baathiste sunnite à une souveraineté chi’ite sous contrôle américain.

    Les Saoudiens soutiennent Daech comme ils ont soutenu Saddam

    La monarchie saoudienne semble très préoccupée de cela. Plusieurs sources ont prétendu qu’elle serait à l’origine du renforcement de l’Organisation de l’État islamique (OEI), dit « Daech », qui se proclame sunnite et dont le but avoué est de renverser le pouvoir chi’ite irakien. La volonté saoudienne de pérenniser un contrôle des élites sunnites sur le pétrole s’était déjà manifestée par son soutien – avec l’appui des puissances occidentales – à Saddam Hussein dans sa guerre au nouveau pouvoir à dominante cléricale chi’ite apparu à Téhéran en 1979. Cette guerre a contribué, à n’en pas douter, à la radicalisation théocratique du pouvoir iranien et à sa monopolisation par le clergé chi’ite. Le soutien aujourd’hui de la monarchie à Daech s’inscrit dans la continuité de celui accordé hier aux élites sunnites baathistes irakiennes dans leur conflit avec l’Iran.
    Ces quelques éléments laissent penser, sans analyse approfondie, que la fracture idéologique sunnites/chi’ites – que la monarchie saoudienne s’efforce de médiatiser comme cause unique de la violence qui secoue la région – ne fait, en réalité, que masquer la compétition autour de la souveraineté sur les champs de pétrole ou de gaz tout en légitimant des régimes oppressifs. Il est clair que la monarchie saoudienne considère comme une menace mortelle pour elle l’arrivée ou le maintien d’élites chi’ites au pouvoir, tant sur le plan extérieur qu’intérieur car ses propres populations chi’ites pourraient réclamer davantage de droits, et, pour une minorité d’entre eux, une sécession de la côte est du Golfe.
    En mars 2011, la monarchie n’a pas hésité à investir militairement l’île de Bahreïn pour réprimer dans le sang les manifestants issus de la majorité chi’ite qui revendiquaient des droits de citoyens et qui sont opposés au pouvoir dictatorial du prince sunnite de l’île. Sur un autre front, elle a armé l’opposition sunnite syrienne au pouvoir alaouite (et dictatorial) de Bachar el Assad, considéré comme allié du chi’isme iranien. En mars 2015, cette stratégie l’a conduite à mener une opération militaire au Yémen contre les zaydistes yéménites, qui avaient investi la capitale et qui sont opportunément présentés comme des chi’ites, alors qu’ils sont adeptes d’un rite différent de l’iranien et les alliés du président déchu Abdallah Saleh, réfugié aux États-Unis.
    La monarchie tente de convaincre les sunnites du monde entier, et les néo-conservateurs de tout bord, de se ranger à ses côtés dans ce combat contre les chi’ites. Elle y parvient et des régimes aussi différents que la dictature militaire du maréchal Sissi en Égypte et la monarchie marocaine l’ont suivie dans l’opération Tempête de la fermeté au Yémen.
    Pour les populations sunnites, l’affaire est facile et difficile. Les populations lointaines, qui ne connaissent pas la férocité de la dictature saoudienne, peuvent entendre favorablement le message anti-chi’ite. Des pogroms anti-chi’ites ont récemment eu lieu en Egypte (où ils ne sont que 2%). Par contre, une partie des sunnites du Moyen-Orient savent que ce message est purement idéologique et factice, sinon falsificateur. Nombre de sunnites libanais, par exemple, et ailleurs sont davantage enclins à soutenir la résistance du Hezbollah chi’ite libanais face à Israël qu’à voter pour les leaders sunnites financés par la monarchie saoudienne.
    La question, en effet, ne porte pas sur un clivage idéologique mais sur le caractère anti-démocratique de régimes soutenus par l’étranger et dont le seul but est de pérenniser par la force leur souveraineté vassalisée sur les puits de pétrole. Au lieu de donner des droits à leurs ressortissants chi’ites et d’en faire des égaux, les monarques saoudiens ou émiratis en font des ennemis idéologiques en s’autoproclamant défenseurs de l’orthodoxie sunnite.

    Les chiites libanais : de la marge au centre de la vie politique

    Le Liban est, à cet égard, un cas d’école. Une première éviction des chi’ites est intervenue au XIVe siècle avec l’invasion des mamelouks « sunnites » du Liban, qui les considéraient comme des « infidèles ». Sous l’Empire ottoman, les autorités religieuses ont ensuite jeté un interdit sur le chi’isme sous prétexte de guerres contre l’Iran safavide. L’éviction ensuite des derniers fermiers d’impôts chi’ites lamine un grand nombre de féodaux chi’ites. Le mandat français (1920) permet à la communauté chi’ite d’être reconnue officiellement en tant que telle (1926). Selon Georges Corm, « l’autre laminage a été celui de la pesanteur des féodaux ruraux chi’ites qui ne voulaient pas laisser leurs paysans s’émanciper et profiter de la modernisation du pays » (pour une analyse complète, consulter son ouvrage Le Liban contemporain : histoire et société, 2012).
    A l’indépendance, les élites chrétiennes et sunnites se partagent le pouvoir et en excluent les chi’ites. Déjà marginalisés sur le plan social et économique, les chi’ites sont, de ce fait, politiquement exclus. On leur attribue la présidence du Parlement, poste purement honorifique. « Certes, le président Fouad Chéhab (1958-1964), chrétien maronite, œuvrera plus tard pour faire rentrer de jeunes chi’ites diplômés à des postes de responsabilité dans l’administration publique. » Mais il faudra une guerre civile (1975-1989), faussement présentée comme un conflit entre « chrétiens réactionnaires » et « palestino-progressistes », pour que les chi’ites aient une place aux négociations qui se concluent par une modification de la Constitution libanaise (accords de Taëf). Ils obtiennent une représentation à égalité avec les sunnites et un poids plus important dans le Parlement national.
    Le Parlement était constitué, selon le Pacte national de 1943, de 99 députés, 54 étant chrétiens, et 45 musulmans : 20 sunnites, 19 chi’ites (42% des musulmans, 19% du total national) et 6 druzes.
    Les accords de Taëf (1989) stipulent que « les sièges parlementaires sont répartis selon les règles suivantes :
    a) à égalité entre chrétiens et musulmans [sunnites et chi’ites, et non plus seulement sunnites] ;
    b) proportionnellement entre les communautés des deux parties ;
    c) proportionnellement entre les régions […]. »
    Ces accords modifient donc la répartition en faveur des chi’ites. Le nombre de sièges est de 128, répartis à égalité entre chrétiens et musulmans (64-64), mais les chi’ites augmentent leurs sièges au niveau national : 27 sunnites, 27chi’ites (42% des musulmans, 21% du total national), 8 druzes et 2 alaouites. Ils obtiennent un nombre de sièges égal aux sunnites et pèsent davantage au niveau national. Georges Corm y ajoute deux éléments qui ont donné plus d’importance aux chi’ites : l’éviction des grandes familles de propriétaires fonciers au profit de la classe moyenne chi’ite, incarnée par la milice Amal, et les succès de l’action de résistance du Hezbollah contre Israël en 2000 puis en 2006.
    Comme on le voit, les conflits ne sont pas religieux mais tournent toujours autour de la question des droits citoyens. Certes, durant la guerre civile libanaise, un événement d’importance s’était produit en Iran, en 1979, et une République islamique chi’ite s’y était proclamée, renforçant les capacités revendicatives des chi’ites libanais. Une crainte fondée ou non qui, aujourd’hui, met les chi’ites des monarchies du Golfe sous surveillance et pousse le pouvoir saoudien à considérer l’Iran comme ennemi principal.
    Le cas libanais montre, cependant, que l’opposition chi’ite aux pouvoirs sunnites vient avant tout de leur statut de second ordre. Si la monarchie saoudienne veut que le pétrole de sa côte est ne lui échappe pas, il vaudrait mieux pour elle considérer ses populations chi’ites comme des citoyens de pleins droits au lieu de les pousser à chercher des soutiens étrangers. Elle ferait mieux également d’éviter de créer le chaos à l’extérieur en nourrissant des organisations se réclamant d’un sunnisme falsificateur et violent.

    #pétrole #sunnites #chiites #Arabie #Liban #Iran

  • Pourquoi le monde arabe a échoué ?
    Réponse de Burhan Ghalioun :

    (...)
    La dégradation du pouvoir national, de la qualité de ses rapports comme de ceux des élites avec la société, sont ainsi le résultat de l’effondrement du projet nationaliste lui-même, sur ses différents plans et à travers les trois étapes de la renaissance culturelle, de l’indépendance politique et du développement économique. Deux ensembles de facteurs, l’un d’origine externe, l’autre d’origine interne en sont responsables.
    Il y a tout d’abord les impacts directs du processus de trans-nationalisation, agissant comme un processus de sape et de démantèlement de toute autonomie possible des pouvoirs en place dans le Monde arabe, comme partout ailleurs dans le Tiers monde. Cette trans-nationalisation qui doit être entendue autant comme un processus politique et culturel qu’économique, a pour conséquence de priver les États de leur capacité de maîtriser leur devenir, l’environnement dans lequel ils évoluent et de l’empêcher de constituer leur historicité propre. Elle les laisse, matériellement et moralement, à découvert, comme une monnaie de singe. Dans ces conditions, ces États n’ont plus aucune pesanteur ou impact dans le tissu social.
    Cependant, la crise de l’État national n’a pas son origine seulement ni même essentiellement, dans les contradictions objectives du marché international. La ferme volonté des pays industrialisés de préserver leur supériorité absolue dans tous les domaines et de s’opposer à toute modification du schéma de la division international du travail, apparaît clairement aujourd’hui comme la source principale de l’enlisement, voire de l’asphyxie générale des économies comme des États des pays pauvres.
    Au-delà de l’économie, les politiques de corruption systématique par les entreprises des pays industrialisés des élites et classes dirigeantes du Tiers monde, sont l’une des causes principales de la faillite du développement à l’heure actuelle. Se rendant compte de leur incapacité matérielle et objective de sortir de l’impasse dans laquelle elles sont mises par les puissances industrielles, ces élites se laissent rapidement désarmer politiquement et moralement, abandonnant la partie du développement, au profit de la quête des seuls intérêts privés. Elles vont bientôt rivaliser dans la défense des politiques d’abandon et des compromissions, espérant pouvoir se réserver individuellement ou collectivement, une place, ou un rôle dans le marché international.
    Ainsi, jamais un aussi grand mouvement de transfert de capitaux des pays du Tiers monde vers les pays industrialisés n’a été organisé dans l’histoire moderne. En l’espace de deux décennies seulement, des centaines de milliards de dollars ont quitté, et continuent de quitter tranquillement, les pays pauvres. Une véritable hémorragie qui a mis à genoux toutes les économies en voie de développement et cause l’arrêt net de toute croissance. Il y a ensuite les facteurs liés aux contradictions propres aux formations socio-économiques arabes, aux caractéristiques de leur constitution historique, politique, culturelle, aux incohérences de leurs idéologies. Ainsi, la crise politique, idéologique et identitaire engendrée par l’échec se trouve accentuée par l’émergence dans son sillage des formes de solidarités traditionnelles : partielles, régionales ou claniques, comme sources de pouvoir et d’identification en concurrence directe avec celles de l’État. C’est d’ailleurs pour contourner cette dévaluation du pouvoir et de l’ordre nationalistes, que les différents groupes sociaux cherchent à organiser, en dehors de l’État ou au-delà de ses frontières et parallèlement à lui, des réseaux d’échanges culturels et matériels propres, dont dépend leur reproduction. D’où aussi la tendance à la décomposition du tissu national.
    S’articulant avec les facteurs externes qui privent l’État de sa centralité par rapport à l’étranger, et l’ouvrent aux jeux directs des forces extérieures, ces solidarités particulières parviennent parfois à noyauter totalement le pouvoir. L’État ressemble alors de plus en plus à un domaine privé, ou devient effectivement un secteur lucratif parmi tant d’autres, c’est-à-dire le siège d’un groupement d’intérêts particuliers. Il se trouve privé de toute autonomie réelle à l’égard des équipes dirigeantes dont il constitue désormais l’otage. Nous avons vu des pouvoirs qui utilisent l’État pour développer les entreprises privées de la culture des stupéfiants ou de la vente des armes. L’État n’est plus, dans ce cas, cet étalon-or, c’est-à-dire cet espace commun, universel, en fonction duquel sont évalués les rapports de pouvoir, à savoir le politique.
    (...)

    À lire ici :
    http://analysedz.blogspot.com/2012/11/le-malaise-arabe-letat-contre-la-nation.html

    #mondearabe #politique #sociologie

  • Qu’est-ce qui s’est passé vraiment à Cologne ? D’après un éminent anthropologue algérien, « un problème de langage, un déficit de communication. »

    http://analysedz.blogspot.com/2016/03/le-syndrome-de-cologne-ou-lorgie.html

    Suite au débat médiatique suscité par l’article de Kamel Daoud dans le « Monde » où l’anthropologie, voire la psychanalyse, se muent en débat idéologique jusqu’à faire intervenir publiquement le Premier ministre français, je me réveille de mon amnésie pour évoquer un ancien souvenir.
    Il ne s’agit pas pour moi d’entrer dans la surenchère de l’invective, sachant que la liberté d’expression est mon maître mot, à condition que l’on ne s’improvise pas psychanalyste, anthropologue ou sociologue à moindre frais. Je voudrais seulement rappeler un fait peu connu chez nous : celui de la fête du carnaval dont les préparatifs durent plusieurs jours jusqu’à la fête des Cendres (Mardi gras).
    Au cours de l’année académique 1966-1967 je me trouvais à Maastricht proche de Köln (Cologne) et d’Aachen (Aix-la-Chapelle), ancienne métropole de la chrétienté sous les Carolingiens (9ème siècle), pour une enquête sociologique sur les conditions de vie des mineurs maghrébins dans les charbonnages du Limbourg belgo-néerlandais ayant pour chefs-lieux respectifs Liège et Maastricht(*). Le carnaval est fêté conjointement par les citoyens de Cologne et de Maastricht, distants d’une centaine de kilomètres à peine.
    On y assiste alors à une permissivité qui contraste avec la vie austère des deux cités luthériennes, qui ont accueilli depuis l’Edit de Nantes les Huguenots, protestants condamnés à l’exil sous le règne de Louis XIV. Il n’est pas rare, en effet de rencontrer à Maastricht des noms bien français. La bibliothèque municipale y contient des ouvrages francophones datant du 16ème siècle. Quiconque a vécu à Maastricht, en tout cas à cette époque, est saisi par la grande exubérance de la population, notamment les jeunes, dans une ambiance où la bière coule à flots et où tout semble permis. Une bonne partie des gens de Maastricht continue la fête à Cologne et vice-versa. Des amis néerlandais m’avaient confié qu’un nombre anormalement élevé de naissances sous X surviennent neuf mois après les fêtes du carnaval ! …
    Encore une fois, je ne suis pas psychanalyste, je constate un fait, celui de l’orgie collective permise le temps du carnaval, une fête bien catholique malgré son soubassement païen (ce qui n’est pas propre à la religion catholique). Comment qualifier les évènements festifs encadrés par ce rituel populaire qui était bien présent à Cologne au moment des faits rapportés par la presse, précisément sur le précèdent mettant en cause des migrants maghrébins ? Je laisse le soin aux spécialistes d’investiguer sur les circonstances précises de ce fait divers. Il se peut que mon propos soit à côté du débat et des faits qui l’on suscité. Je voudrais néanmoins restituer un fait que les populations autochtones de cette région de l’Europe de l’Ouest connaissent très bien.

    En effet, au-delà de cet épisode, je rappelle sans rentrer dans les dédales de l’anthropologie historique, voire religieuse, que la Rhénanie (qui englobe le sud-ouest de l’Allemagne et la zone contiguë flamande c’est-à-dire le Limbourg belgo-néerlandais) font partie de ce qu’on appelle les sociétés agraires tout au moins pour ce qui est de leur histoire médiévale. Dans le cas d’espèce, il s’agit de producteurs traditionnels de houblon, d’où la prépondérance de la bière dans la région. Dans toute société agraire, qui tranche avec les civilisations pastorales, il existe des rituels dédiés à la fécondité : fécondité de la femme, s’inscrivant dans le cycle végétal, et ponctués par des rituels célébrant la fertilité de la terre : les Saturnales décrites par les auteurs latins ne sont pas différentes de nos « nuits de l’erreur » (leylat el gh’lat, sorte de simulation d’un coït anonyme), vieux rituel judéo-berbère dont subsistent quelques traces sur les hauteurs de l’Atlas tellien. Abdallah Hamoudi nous en a donné une excellente restitution monographique à propos de la fête de ‘Achoura dans un village marocain près de Beni Mellal (« La victime et son masque », PUF, 1987). Dans l’antique Palestine des Cananéens, Astarté faisait office de déesse de la fécondité : les Cananéens étaient agriculteurs sédentaires et comme tous les peuples de leur espèce, on y découvre un panthéon dédié à la fertilité, du sol, des femmes. Dagon était le dieu de la charrue, Baal le dieu du grain. Dans toutes ces civilisations agraires, quelles que fussent leurs latitudes géographiques et leurs appartenances (Indo-européennes, Sémito-chamitique, amérindienne etc.), il y a deux constantes :
    1. La mise en scène érotique de l’acte de production pour la survie, ce qui exclut toute interprétation normative.
    2. La fragilité du statut paysan pour des raisons logistiques évidentes : le paysan sédentaire depuis le néolithique a toujours été menacé par le pasteur nomade à la recherche de pâturages. Ibn Khaldoun à admirablement développé cette épopée de la prédation pour le Maghreb médiéval. Mais la séquence médiévale décrite par ce dernier n’est qu’un épisode dont les origines remontent à la protohistoire.

    De tout ce qui précède, il y a la symbolique du sexe, ou plutôt de l’Eros. Dans le panthéon des cultures agraires du monde, nous avons affaire à une dialectique irréductible de la sexualité et du mysticisme, du profane et du sacré. Pour revenir au « syndrome de Cologne », j’ai la faiblesse de croire que les préparatifs du carnaval (qui commencent le 11 novembre pour s’arrêter au mercredi des Cendres) donnent lieu -autant que je m’en souvienne- à une érotisation de la fête, processions masquées, ivresse physiologique, ambiance lubrique etc., j’ai vu à Maastricht des scènes d’accouplement débridés dans les recoins de rues ou à l’entrée des immeubles la nuit aidant. Je me suis toujours demandé pourquoi ce contraste flagrant entre le conformisme très puritain des jours ordinaires, et cette revanche dionysiaque à l’occasion du carnaval.
    Je n’ai pas suivi dans les comptes rendus médiatiques si le carnaval a été signalé, car la Saint-Sylvestre s’y trouve encadrée. Encore une fois, les religions canoniques laissent apparaître des pratiques païennes, ce qu’on appelle « syncrétisme » pour faire simple. Le rapport à l’Eros, donc au corps sexué, est un problème ontologique qui se passe de psychologie différentielle. Il n’y a qu’à se reporter à Freud, et plus encore à Frazer et à Robertson Smith (le découvreur du personnage totémique et de « l’assassinat du père »). Qu’il y ait une spécificité du rapport au sexe dans l’islam des musulmans n’est qu’un épiphénomène culturaliste qui n’élimine pas le fondement archétypal du rapport à l’Eros, lequel concerne l’humanité.
    Dans ce qui s’est passé à Cologne, me semble-t-il, ce n’est pas tant le caractère scandaleusement agressif des migrants, qu’un problème de langage, un déficit de communication. Jacques Lacan a fait du langage ce par quoi Eros advient. La libido est d’abord langage avant d’être corps. Plus que de la mésalliance éthique, il s’agit d’un brouillage de code. Sinon, sur le rapport au sexe, tout au moins au niveau où je situe le débat, celui de l’anthropologie générale, il n’y a rien à signaler quant à une spécificité barbare du comportement des « arabo-musulmans » ou des musulmans tout court, en dehors de ce qu’on peut appeler un fâcheux quiproquo.

    #Cologne #immigration #réfugiés #islam #arabe #viol

  • Qui se souvient d’Occupy Wall Street ? Pourquoi ce mouvement avait échoué après avoir soulevé les espoirs de toute la planète comme rarement dans l’histoire sinon jamais ? Je me souviens de cette article paru dans Le Mnode Diplomatique.

    http://www.monde-diplomatique.fr/2013/01/FRANK/48630

    (...) je visionnais une vidéo sur Internet montrant un groupe de militants d’OWS en train de débattre dans une librairie. A un moment du film, un intervenant s’interroge sur l’insistance de ses camarades à prétendre qu’ils ne s’expriment que « pour eux-mêmes », au lieu d’assumer leur appartenance à un collectif. Un autre lui réplique alors : « Chacun ne peut parler que pour soi-même, en même temps le “soi-même” pourrait bien se dissoudre dans sa propre remise en question, comme nous y invite toute pensée poststructuraliste menant à l’anarchisme. (…) “Je ne peux seulement parler que pour moi-même” : c’est le “seulement” qui compte ici, et bien sûr ce sont là autant d’espaces qui s’ouvrent. »
    En entendant ce charabia pseudo-intellectuel, j’ai compris que les carottes étaient cuites. Le philosophe Slavoj Žižek avait mis en garde les campeurs de Zuccotti Park en octobre 2011 : « Ne tombez pas amoureux de vous-mêmes. Nous passons un moment agréable ici. Mais, rappelez-vous, les carnavals ne coûtent pas cher. Ce qui compte, c’est le jour d’après, quand nous devrons reprendre nos vies ordinaires. Est-ce que quelque chose aura changé ? »
    (...)
    La question à laquelle les thuriféraires d’OWS consacrent des cogitations passionnées est la suivante : quelle est la formule magique qui a permis au mouvement de rencontrer un tel succès ? Or c’est la question diamétralement inverse qu’ils devraient se poser : pourquoi un tel échec ?
    (...)
    Ce qui se tramait à Wall Street, pendant ce temps-là, a suscité un intérêt moins vif. Dans Occupying Wall Street, un recueil de textes rédigés par des écrivains ayant participé au mouvement (6), la question des prêts bancaires usuraires n’apparaît qu’à titre de citation dans la bouche d’un policier. Et n’espérez pas découvrir comment les militants de Zuccotti comptaient contrarier le pouvoir des banques. Non parce que ce serait mission impossible, mais parce que la manière dont la campagne d’OWS est présentée dans ces ouvrages donne l’impression qu’elle n’avait rien d’autre à proposer que la construction de « communautés » dans l’espace public et l’exemple donné au genre humain par le noble refus d’élire des porte-parole.

    Culte de la participation
    Malheureusement, un tel programme ne suffit pas. Bâtir une culture de lutte démocratique est certes utile pour les cercles militants, mais ce n’est qu’un point de départ. OWS n’est jamais allé plus loin ; il n’a pas déclenché une grève, ni bloqué un centre de recrutement, ni même occupé le bureau d’un doyen d’université. Pour ses militants, la culture horizontale représente le stade suprême de la lutte : « Le processus est le message », entonnaient en chœur les protestataires.
    (...)

    Le galimatias des militants
    Dans leurs déclarations d’intention, les campeurs de Zuccotti Park célébraient haut et fort la vox populi. Dans la pratique, pourtant, leur centre de gravité penchait d’un seul côté, celui du petit monde universitaire. Les militants cités dans les livres ne dévoilent pas toujours leur identité socioprofessionnelle, mais, lorsqu’ils le font, ils se révèlent soit étudiants, soit ex-étudiants récemment diplômés, soit enseignants.
    (...)
    Les activistes anti-Wall Street n’aiment pas, c’est clair, leurs homologues du Tea Party. Dans leur esprit, apparemment, ils ne sont pas tout à fait de vraies gens, comme si d’autres principes biologiques s’appliquaient à leur espèce. La philosophe Judith Butler, professeur à l’université de Columbia, évoque avec répugnance une réunion du Tea Party au cours de laquelle des individus se seraient réjouis de la mort prochaine de plusieurs malades dépourvus d’assurance-maladie. « Sous quelles conditions économiques et politiques de telles formes de cruauté joyeuse émergent-elles ? », s’interroge-t-elle.
    C’est une bonne question. Deux paragraphes plus loin, pourtant, Butler change de sujet pour louer l’admirable décision d’OWS de ne rien réclamer, ce qui lui fournit l’occasion d’esquisser une théorie de haut vol : une foule qui proteste est spontanément et intrinsèquement libérationniste.
    (...)

    Les élections présidentielles et législatives de novembre 2012 sont maintenant terminées : M. Obama a été reconduit à la Maison Blanche, M. Ryan a conservé son siège à la Chambre des représentants, la guerre contre les travailleurs continue — dans le Michighan, notamment — et Wall Street dirige toujours le monde.

    A (re)lire.
    #Occupy #Manifestation #USA

  • Islamophobie
    Un article qui présente un maximum d’informations en un minimum d’espace sur l’islamophobie comme réalité historique. À lire absolument. Extraits.

    http://orientxxi.info/magazine/islamophobie-un-mot-un-mal-plus-que-centenaires,1155

    (...)
    le mot « islamophobie » paraît le mieux adapté. Et contrairement à une vulgate répandue, il est plus que centenaire. La première utilisation du mot retrouvée date de 1910. Elle figure sous la plume d’un certain Alain Quellien, aujourd’hui oublié. Il proposait une définition d’une surprenante modernité :

    L’islamophobie : il y a toujours eu, et il y a encore, un préjugé contre l’islam répandu chez les peuples de civilisation occidentale et chrétienne. Pour d’aucuns, le musulman est l’ennemi naturel et irréconciliable du chrétien et de l’Européen, l’islamisme2 est la négation de la civilisation, et la barbarie, la mauvaise foi et la cruauté sont tout ce qu’on peut attendre de mieux des mahométans.

    La politique musulmane dans l’Afrique occidentale française, Paris, Émile Larose.

    Ainsi, dès sa première apparition écrite, le mot « islamophobie » était accompagné de celui de « préjugé » et du concept de « choc des civilisations ». Suivait une liste impressionnante de citations venant de tous les horizons, multipliant les reproches hostiles : l’islam était assimilé à la guerre sainte, à la polygamie, au fatalisme, enfin à l’inévitable fanatisme.

    La même année, Maurice Delafosse, étudiant lui aussi l’islam, cette fois en Afrique subsaharienne, l’emploie à son tour :

    Pris en bloc, et à l’exception de quelques groupements de Mauritanie encore hostiles à la domination européenne, l’état d’esprit des musulmans de l’Afrique occidentale n’est certainement pas opposé à notre civilisation (…). Quoi qu’en disent ceux pour qui l’islamophobie est un principe d’administration indigène, la France n’a rien de plus à craindre des musulmans en Afrique occidentale que des non musulmans (…). L’islamophobie n’a donc pas de raison d’être dans l’Afrique occidentale.

    Revue du Monde musulman, vol. XI, 1910.
    (...)
    Le mot (non la chose) va ensuite disparaître du vocabulaire jusqu’aux années 1970-1980. En 2003, deux écrivaines, Caroline Fourest et Fiametta Venner, publient dans leur revue un dossier au titre évocateur, « Islamophobes… ou simplement laïques ? »6. Le titre de l’article introductif utilise le mot « islamophobie » assorti d’un prudent — et significatif — point d’interrogation. Il commence par cette formule : « Le mot “islamophobie“ a une histoire, qu’il vaut mieux connaître avant de l’utiliser à la légère ». Certes. Mais elles se fourvoient et, exposition médiatique aidant, elles ont fourvoyé depuis des dizaines d’essayistes, probablement des milliers de lecteurs. Car elles affirment que les mots « islamophobie » et « islamophobe » ont été en quelque sorte des bombes à retardement déposées par la révolution iranienne, puis repris par des obscurantistes musulmans un peu partout en Occident. Les deux essayistes affirment en effet :

    Il [le mot « islamophobie »] a été utilisé en 1979 par les mollahs iraniens qui souhaitaient faire passer les femmes qui refusaient de porter le voile pour de “mauvaises musulmanes“ en les accusant d’être “islamophobes“. Il a été réactivité au lendemain de l’affaire Rushdie, par des associations islamistes londoniennes comme Al Muhajiroun ou la Islamic Human Rights Commission dont les statuts prévoient de “recueillir les informations sur les abus des droits de Dieu“. De fait, la lutte contre l’islamophobie rentre bien dans cette catégorie puisqu’elle englobe toutes les atteintes à la morale intégriste (homosexualité, adultère, blasphème, etc.). Les premières victimes de l’islamophobie sont à leurs yeux les Talibans, tandis que les “islamophobes“ les plus souvent cités par ces groupes s’appellent Salman Rushdie ou Taslima Nasreen !

    Cette version, qui ignore totalement l’antériorité coloniale du mot, sera reprise sans distance critique en 2010 par l’équipe du Dictionnaire historique de la langue française : « Islamophobie et islamophobe, apparus dans les années 1980… », donnant ainsi à cette datation – une « simple erreur » d’un siècle — un couronnement scientifique.
    (...)

    #Islam #Islamophobie #Histoire

  • On pourrait ré-intitulé l’article “L’Arabe dans l’imaginaire israélien...”
    Ben-Gurion in 1951: Until a Jewish Soldier Is Hanged for Murdering “Arabs, Murder Won’t End
    Israel’s first prime minister argued that only the death penalty would deter Jews from gratuitous killing of Arabs.”

    http://www.haaretz.com/israel-news/.premium-1.712125

    “I’m not the justice minister, I’m not the police minister and I don’t know all criminal acts committed here, but as defense minister I know some of the crimes, and I must say the situation is frightening in two areas: 1) acts of murder and 2) acts of rape.” So declared Prime Minister and Defense Minister David Ben-Gurion in 1951 before dropping a bombshell: “People in the [General] Staff tell me, and it’s my view as well, that until a Jewish soldier is hanged for murdering Arabs, these acts of murder won’t end.”

    Ben-Gurion was speaking at a cabinet meeting on abolishing the death penalty. Jewish-Arab tensions were high following the 1948 War of Independence, and there was also a problem with infiltrators: Arab refugees seeking to return to the homes and fields they left during the war. Consequently, Jewish murders of Arabs had proliferated, and some ministers considered the death penalty necessary to solve this problem.

    The cabinet discussion of 66 years ago is particularly interesting in light of this week’s very different cabinet discussion about a soldier who killed a wounded Palestinian terrorist in Hebron after he no longer posed a threat.

    “In general, those who have guns use them,” Ben-Gurion asserted, adding that some Israelis “think Jews are people but Arabs aren’t, so you can do anything to them. And some think it’s a mitzvah to kill Arabs, and that everything the government says against murdering Arabs isn’t serious, that it’s just a pretense that killing Arabs is forbidden, but in fact, it’s a blessing because there will be fewer Arabs here. As long as they think that, the murders won’t stop.”

    Ben-Gurion said he, too, would prefer fewer Arabs, but not at the price of murder. “Abolishing the death penalty will increase bloodshed,” he warned, especially between Jews and Arabs. “Soon, we won’t be able to show our faces to the world. Jews meet an Arab and murder him.”

    The cabinet first discussed abolishing the death penalty – a legacy of the British Mandate – in July 1949, at the urging of Justice Minister Pinhas Rosen. Ben-Gurion was dubious even then. He said he would support the bill, but was almost certain the death penalty would ultimately be reinstated, because abolishing it “will lead to a proliferation of murders.” After intense debate, the cabinet agreed to abolish the death sentence except for treason during a state of emergency.
    The bill then went to the Knesset, where the Constitution Committee held lengthy deliberations. A year later, Rosen presented the cabinet with a problem: Seven prisoners were on death row, but their executions were being delayed until the Knesset made up its mind about the death penalty.

    As the cabinet discussed this issue, Ben-Gurion stunned his colleagues by saying he no longer supported abolishing the death penalty, primarily due to an increase in killings of Arabs by Jewish soldiers.

    Foreign Minister Moshe Sharett, who in 1949 had supported abolishing the death penalty on the grounds that “Human society must aspire to a moral level at which it’s forbidden to take human life,” also unexpectedly reversed himself at this meeting.

    “With great regret I’ve become convinced that abolishing the death penalty is inconceivable,” he announced, noting that even countries “which are immeasurably more humane than we are – I’ve spent years there and I live here – maintain the death penalty.”

    The main reason for his U-turn, however, was “the crimes that have happened and are happening week after week, especially in the army,” including some that weren’t public knowledge. Sociopaths might not be deterred by the death penalty, Sharett admitted, “but that Jewish chap who kills two Arabs he met on the road, I’m not willing to say, without trying it first, that he’s a killer by nature and won’t fear the death penalty.”

    Some Jews, Sharett said, think “every Arab is a dog, a wild dog that it’s a mitzvah to kill.” And “to save them from killing human beings, it’s a mitzvah to have the death penalty here. As long as we don’t have it, these murders will continue, and we’ll be held accountable, and it will create moral corruption here.

    “I’ve giving a speech of repentance and confession here,” he continued. “I’ve learned from experience that in this country, the death penalty is necessary ... We made a mistake when we stopped hanging ... If all the crimes committed in this country were reported, terror would grip the public and lynchings would start. I’d shoot a Jewish chap who wanted to shoot an Arab passerby if that were the way to save him.”

    Sharett then described one case in which three Arabs were killed and a fourth saved only because a Jew threw him into a hut, and another case in which two Indian Jews were almost killed by fellow Jews who thought they were Arabs until they shouted “Israel.”

    Minister Dov Yosef backed Ben-Gurion and Sharett. “In principle, I’ve opposed hanging as a penalty all my life, but unfortunately, in this country and today’s situation,” it’s needed, he said.

    Minister Haim-Moshe Shapira concurred, saying he was especially horrified by group killings. He cited one in which “eight soldiers were present at the time of the murder. Surely they didn’t all murder, but they were all present at the time of the crime and not one member of this group stopped the crime.”

    “There have been worse cases,” Ben-Gurion responded.

    Ministers Golda Myerson (later Meir) and David Remez, in contrast, remained opposed to the death penalty, but agreed that much more must be done to prevent crimes against Arabs.
    In the end, the death penalty was abolished – but only three years later, in 1954.

    Gidi Weitz
    Haaretz Contributor

    #Israel #Palestine #Ben-Gurion #Arabs #Jews #Killings #Murder #death #History

  • Édifiant. Quand un nazi devient un tueur du Mossad

    The Strange Case of a Nazi Who Became an Israeli Hitman
    Otto Skorzeny, one of the Mossad’s most valuable assets, was a former lieutenant colonel in Nazi Germany’s Waffen-SS and one of Adolf Hitler’s favorites.

    http://www.haaretz.com/israel-news/1.711115

    On September 11, 1962, a German scientist vanished. The basic facts were simple: Heinz Krug had been at his office, and he never came home.

    The only other salient detail known to police in Munich was that Krug commuted to Cairo frequently. He was one of dozens of Nazi rocket experts who had been hired by Egypt to develop advanced weapons for that country.

    HaBoker, a now defunct Israeli newspaper, surprisingly claimed to have the explanation: The Egyptians kidnapped Krug to prevent him from doing business with Israel.

    But that somewhat clumsy leak was an attempt by Israel to divert investigators from digging too deeply into the case — not that they ever would have found the 49-year-old scientist.

    We can now report — based on interviews with former Mossad officers and with Israelis who have access to the Mossad’s archived secrets from half a century ago — that Krug was murdered as part of an Israeli espionage plot to intimidate the German scientists working for Egypt.
    Moreover, the most astounding revelation is the Mossad agent who fired the fatal gunshots: Otto Skorzeny, one of the Israeli spy agency’s most valuable assets, was a former lieutenant colonel in Nazi Germany’s Waffen-SS and one of Adolf Hitler’s personal favorites among the party’s commando leaders. The Führer, in fact, awarded Skorzeny the army’s most prestigious medal, the Knight’s Cross of the Iron Cross, for leading the rescue operation that plucked his friend Benito Mussolini out from the hands of his captors.
    But that was then. By 1962, according to our sources — who spoke only on the promise that they not be identified — Skorzeny had a different employer. The story of how that came to be is one of the most important untold tales in the archives of the Mossad, the agency whose full name, translated from Hebrew, is “The Institute for Intelligence and Special Missions.”
    Key to understanding the story is that the Mossad had made stopping German scientists then working on Egypt’s rocket program one of its top priorities. For several months before his death, in fact, Krug, along with other Germans who were working in Egypt’s rocket-building industry, had received threatening messages. When in Germany, they got phone calls in the middle of the night, telling them to quit the Egyptian program. When in Egypt, some were sent letter bombs — and several people were injured by the explosions.

    Krug, as it happens, was near the top of the Mossad’s target list.

    During the war that ended 17 years earlier, Krug was part of a team of superstars at Peenemünde, the military test range on the coast of the Baltic Sea, where top German scientists toiled in the service of Hitler and the Third Reich. The team, led by Wernher von Braun, was proud to have engineered the rockets for the Blitz that nearly defeated England. Its wider ambitions included missiles that could fly a lot farther, with greater accuracy and more destructive power.

    According to Mossad research, a decade after the war ended, von Braun invited Krug and other former colleagues to join him in America. Von Braun, his war record practically expunged, was leading a missile development program for the United States. He even became one of the fathers of the NASA space exploration program. Krug opted for another, seemingly more lucrative option: joining other scientists from the Peenemünde group — led by the German professor Wolfgang Pilz, whom he greatly admired — in Egypt. They would set up a secret strategic missile program for that Arab country.

    In the Israelis’ view, Krug had to know that Israel, the country where so many Holocaust survivors had found refuge, was the intended target of his new masters’ military capabilities. A committed Nazi would see this as an opportunity to continue the ghastly mission of exterminating the Jewish people.

    The threatening notes and phone calls, however, were driving Krug crazy. He and his colleagues knew that the threats were from Israelis. It was obvious. In 1960, Israeli agents had kidnapped Adolf Eichmann, one of the chief administrators of the Holocaust, in far-off Argentina. The Israelis astonishingly smuggled the Nazi to Jerusalem, where he was put on trial. Eichmann was hanged on May 31, 1962.

    It was reasonable for Krug to feel that a Mossad noose might be tightening around his neck, too. That was why he summoned help: a Nazi hero who was considered the best of the best in Hitler’s heyday.
    On the day he vanished, according to our new information from reliable sources, Krug left his office to meet Skorzeny, the man he felt would be his savior.

    Skorzeny, then 54 years old, was quite simply a legend. A dashing, innovative military man who grew up in Austria — famous for a long scar on the left side of his face, the result of his overly exuberant swordplay while fencing as a youth— he rose to the rank of lieutenant colonel in Nazi Germany’s Waffen-SS. Thanks to Skorzeny’s exploits as a guerrilla commander, Hitler recognized that he had a man who would go above and beyond, and stop at nothing, to complete a mission.

    The colonel’s feats during the war inspired Germans and the grudging respect of Germany’s enemies. American and British military intelligence labeled Skorzeny “the most dangerous man in Europe.”

    Krug contacted Skorzeny in the hope that the great hero — then living in Spain — could create a strategy to keep the scientists safe.

    The two men were in Krug’s white Mercedes, driving north out of Munich, and Skorzeny said that as a first step he had arranged for three bodyguards. He said they were in a car directly behind and would accompany them to a safe place in a forest for a chat. Krug was murdered, then and there, without so much as a formal indictment or death sentence. The man who pulled the trigger was none other than the famous Nazi war hero. Israel’s espionage agency had managed to turn Otto Skorzeny into a secret agent for the Jewish state.

    After Krug was shot, the three Israelis poured acid on his body, waited awhile and then buried what was left in a hole they had dug beforehand. They covered the makeshift grave with lime, so that search dogs — and wild animals — would never pick up the scent of human remains.

    The troika that coordinated this extrajudicial execution was led by a future prime minister of Israel, Yitzhak Shamir, who was then head of the Mossad’s special operations unit. One of the others was Zvi “Peter” Malkin, who had tackled Eichmann in Argentina and in later life would enter the art world as a New York-based painter. Supervising from a distance was Yosef “Joe” Raanan, who was the secret agency’s senior officer in Germany. All three had lost large numbers of family members among the 6 million Jews murdered by the cruel, continent-wide genocide that Eichmann had managed.
    Israel’s motivation in working with a man such as Skorzeny was clear: to get as close as possible to Nazis who were helping Egypt plot a new Holocaust.

    The Mossad’s playbook for protecting Israel and the Jewish people has no preordained rules or limits. The agency’s spies have evaded the legal systems in a host of countries for the purpose of liquidating Israel’s enemies: Palestinian terrorists, Iranian scientists, and even a Canadian arms inventor named Gerald Bull, who worked for Saddam Hussein until bullets ended his career in Brussels in 1990. Mossad agents in Lillehammer, Norway, even killed a Moroccan waiter in the mistaken belief that he was the mastermind behind the 1972 Munich Olympics massacre of 11 Israeli athletes by the terrorist group known as Black September. Ahmed Bouchikhi was shot down in 1973 as he left a movie theatre with his pregnant wife. The Israeli government later paid compensation to her without officially admitting wrongdoing. The botched mission delayed further Mossad assassinations, but it did not end them.

    To get to unexpected places on these improbable missions, the Mossad has sometimes found itself working with unsavory partners. When short-term alliances could help, the Israelis were willing to dance with the proverbial devil, if that is what seemed necessary.

    But why did Skorzeny work with the Mossad?

    He was born in Vienna in June 1908, to a middle-class family proud of its military service for the Austro-Hungarian Empire. From an early age he seemed fearless, bold and talented at weaving false, complex tales that deceived people in myriad ways. These were essential requirements for a commando officer at war, and certainly valuable qualities for the Mossad.

    He joined Austria’s branch of the Nazi Party in 1931, when he was 23, served in its armed militia, the SA, and enthusiastically worshipped Hitler. The führer was elected chancellor of Germany in 1933 and then seized Austria in 1938. When Hitler invaded Poland in 1939 and World War II broke out, Skorzeny left his construction firm and volunteered — not for the regular army, the Wehrmacht, but for the Leibstandarte SS Panzer division that served as Hitler’s personal bodyguard force.

    Skorzeny, in a memoir written after the war was over, told of his years of SS service as though they were almost bloodless travels in occupied Poland, Holland and France. His activities could not have been as innocuous as his book made them seem. He took part in battles in Russia and Poland, and certainly the Israelis believed it was very likely that he was involved in exterminating Jews. The Waffen-SS, after all, was not the regular army; it was the military arm of the Nazi Party and its genocidal plan.
    His most famous and daring mission was in September 1943: leading commandos who flew engineless gliders to reach an Italian mountaintop resort to rescue Hitler’s friend and ally, the recently ousted Fascist dictator Benito Mussolini and spirit him away under harrowing conditions.

    This was the escapade that earned Skorzeny his promotion to lieutenant colonel — and operational control of Hitler’s SS Special Forces. Hitler also rewarded him with several hours of face-to-face conversation, along with the coveted Knight’s Cross. But it was far from his only coup.

    In September 1944, when Hungary’s dictator, Admiral Miklos Horthy, a Nazi ally, was on the verge of suing for peace with Russia as Axis fortunes plunged, Skorzeny led a contingent of Special Forces into Budapest to kidnap Horthy and replace his government with the more hard-line Fascist Arrow Cross regime. That regime, in turn, went on to kill or to deport to concentration camps tens of thousands of Hungarian Jews who had managed to survive the war up to that point.

    Also in 1944, Skorzeny handpicked 150 soldiers, including some who spoke fair to excellent English in a bold plan to fend off the Allies after they landed in Normandy on D-Day in June. With the Allies advancing through France, Skorzeny dressed his men in captured U.S. uniforms, and procured captured American tanks for them to use in attacking and confusing Allied troops from behind their own lines.

    The bold deception — including the act of stealing U.S. soldiers’ property — plunged Skorzeny into two years of interrogation, imprisonment and trial after the war ended. Eventually, Allied military judges acquitted him in 1947. Once again, the world’s newspapers headlined him as Europe’s most dangerous man. He enjoyed the fame, and published his memoirs in various editions and many languages, including the 1957 book “Skorzeny’s Special Missions: The Autobiography of Hitler’s Commando Ace,” published by Greenhill Books. He spun some tall-tale hyperbole in the books, and definitely downplayed his contacts with the most bloodthirsty Nazi leaders. When telling of his many conversations with Hitler, he described the dictator as a caring and attentive military strategist.

    There was much that Skorzeny did not reveal, including how he escaped from the American military authorities who held him for a third year after his acquittal. Prosecutors were considering more charges against him in the Nuremberg tribunals, but during one transfer he was able to escape — reputedly with the help of former SS soldiers wearing American military police uniforms.

    Skorzeny’s escape was also rumored to have been assisted by the CIA’s predecessor agency, the Office of Special Services, for which he did some work after the war. It is certainly notable that he was allowed to settle in Spain — a paradise for Nazi war veterans, with protection from the pro-Western Fascist, Generalissimo Francisco Franco. In the years that followed he did some advisory work for President Juan Peron in Argentina and for Egypt’s government. It was during this period that Skorzeny became friendly with the Egyptian officers who were running the missile program and employing German experts.
    In Israel, a Mossad planning team started to work on where it could be best to find and kill Skorzeny. But the head of the agency, Isser Harel, had a bolder plan: Instead of killing him, snare him.

    Mossad officials had known for some time that to target the German scientists, they needed an inside man in the target group. In effect, the Mossad needed a Nazi.

    The Israelis would never find a Nazi they could trust, but they saw a Nazi they could count on: someone thorough and determined, with a record of success in executing innovative plans, and skilled at keeping secrets. The seemingly bizarre decision to recruit Skorzeny came with some personal pain, because the task was entrusted to Raanan, who was also born in Vienna and had barely escaped the Holocaust. As an Austrian Jew, his name was originally Kurt Weisman. After the Nazis took over in 1938, he was sent — at age 16 — to British-ruled Palestine. His mother and younger brother stayed in Europe and perished.

    Like many Jews in Palestine, Kurt Weisman joined the British military looking for a chance to strike back at Germany. He served in the Royal Air Force. After the creation of Israel in 1948, he followed the trend of taking on a Hebrew name, and as Joe Raanan he was among the first pilots in the new nation’s tiny air force. The young man rapidly became an airbase commander and later the air force’s intelligence chief.

    Raanan’s unique résumé, including some work he did for the RAF in psychological warfare, attracted the attention of Harel, who signed him up for the Mossad in 1957. A few years later, Raanan was sent to Germany to direct the secret agency’s operations there — with a special focus on the German scientists in Egypt. Thus it was Raanan who had to devise and command an operation to establish contact with Skorzeny, the famous Nazi commando.

    The Israeli spy found it difficult to get over his reluctance, but when ordered, he assembled a team that traveled to Spain for “pre-action intelligence.” Its members observed Skorzeny, his home, his workplace and his daily routines. The team included a German woman in her late 20s who was not a trained, full-time Mossad agent but a “helper.” Known by the Hebrew label “saayanit” (or “saayan” if a male), this team member was like an extra in a grandly theatrical movie, playing whatever role might be required. A saayanit would often pose as the girlfriend of an undercover Mossad combatant.

    Internal Mossad reports later gave her name as Anke and described her as pretty, vivacious and truly flirtatious. That would be perfect for the job at hand — a couples game.

    One evening in the early months of 1962, the affluent and ruggedly handsome — though scarred — Skorzeny was in a luxurious bar in Madrid with his significantly younger wife, Ilse von Finckenstein. Her own Nazi credentials were impeccable; she was the niece of Hjalmar Schacht, Hitler’s talented finance minister.

    They had a few cocktails and were relaxing, when the bartender introduced them to a German-speaking couple he had been serving. The woman was pretty and in her late 20s, and her escort was a well-dressed man of around 40. They were German tourists, they said, but they also told a distressing story: that they had just survived a harrowing street robbery.

    They spoke perfect German, of course, the man with a bit of an Austrian accent, like Skorzeny’s. They gave their false names, but in reality they were, respectively, a Mossad agent whose name must still be kept secret and his “helper,” Anke.

    There were more drinks, then somewhat flamboyant flirting, and soon Skorzeny’s wife invited the young couple, who had lost everything — money, passports and luggage — to stay the night at their sumptuous villa. There was just something irresistible about the newcomers. A sense of sexual intimacy between the two couples was in the air. After the four entered the house, however, at a crucial moment when the playful flirting reached the point where it seemed time to pair off, Skorzeny — the charming host — pulled a gun on the young couple and declared: “I know who you are, and I know why you’re here. You are Mossad, and you’ve come to kill me.”

    The young couple did not even flinch. The man said: “You are half-right. We are from Mossad, but if we had come to kill you, you would have been dead weeks ago.”

    “Or maybe,” Skorzeny said, “I would rather just kill you.”

    Anke spoke up. “If you kill us, the ones who come next won’t bother to have a drink with you, You won’t even see their faces before they blow out your brains. Our offer to you is just for you to help us.”

    After a long minute that felt like an hour, Skorzeny did not lower his gun, but he asked: “What kind of help? You need something done?” The Mossad officer — who even now is not being named by colleagues — told Skorzeny that Israel needed information and would pay him handsomely.

    Hitler’s favorite commando paused for a few moments to think, and then surprised the Israeli by saying: “Money doesn’t interest me. I have enough.”

    The Mossad man was further surprised to hear Skorzeny name something that he did want: “I need for Wiesenthal to remove my name from his list.” Simon Wiesenthal, the famous Vienna-based Nazi-hunter, had Skorzeny listed as a war criminal, but now the accused was insisting he had not committed any crimes.

    The Israeli did not believe any senior Nazi officer’s claim of innocence, but recruiting an agent for an espionage mission calls for well-timed lies and deception. “Okay,” he said, “that will be done. We’ll take care of that.”

    Skorzeny finally lowered his weapon, and the two men shook hands. The Mossad man concealed his disgust.

    “I knew that the whole story about you being robbed was bogus,” Skorzeny said, with the boastful smile of a fellow intelligence professional. “Just a cover story.”

    The next step to draw him in was to bring him to Israel. His Mossad handler, Raanan, secretly arranged a flight to Tel Aviv, where Skorzeny was introduced to Harel. The Nazi was questioned and also received more specific instructions and guidelines. During this visit, Skorzeny was taken to Yad Vashem, the museum in Jerusalem dedicated to the memory of the 6 million Jewish victims of the Holocaust. The Nazi was silent and seemed respectful. There was a strange moment there when a war survivor pointed to Skorzeny and singled him out by name as “a war criminal.”

    Raanan, as skilled an actor as any spy must be, smiled at the Jewish man and softly said: “No, you’re mistaken. He’s a relative of mine and himself is a Holocaust survivor.”

    Naturally, many in Israeli intelligence wondered if the famous soldier for Germany had genuinely — and so easily — been recruited. Did he really care so much about his image that he demanded to be removed from a list of war criminals? Skorzeny indicated that being on the list meant he was a target for assassination. By cooperating with the Mossad, he was buying life insurance.

    The new agent seemed to prove his full reliability. As requested by the Israelis, he flew to Egypt and compiled a detailed list of German scientists and their addresses.

    Skorzeny also provided the names of many front companies in Europe that were procuring and shipping components for Egypt’s military projects. These included Heinz Krug’s company, Intra, in Munich.

    Raanan continued to be the project manager of the whole operation aimed against the German scientists. But he assigned the task of staying in contact with Skorzeny to two of his most effective operatives: Rafi Eitan and Avraham Ahituv.

    Eitan was one of the most amazing characters in Israeli intelligence. He earned the nickname “Mr. Kidnap” for his role in abducting Eichmann and other men wanted by Israeli security agencies. Eitan also helped Israel acquire materials for its secret nuclear program. He would go on to earn infamy in the 1980s by running Jonathan Pollard as an American Jewish spy in the United States government.

    Surprisingly flamboyant after a life in the shadows, in 2006, at age 79, Eitan became a Member of Parliament as head of a political party representing senior citizens.

    “Yes, I met and ran Skorzeny,” Eitan confirmed to us recently. Like other Mossad veterans, he refused to go on the record with more details.

    Ahituv, who was born in Germany in 1930, was similarly involved in a wide array of Israeli clandestine operations all around the globe. From 1974 to 1980 he was head of the domestic security service, Shin Bet, which also guarded many secrets and often conducted joint projects with the Mossad.

    The Mossad agents did try to persuade Wiesenthal to remove Skorzeny from his list of war criminals, but the Nazi hunter refused. The Mossad, with typical chutzpah, instead forged a letter — supposedly to Skorzeny from Wiesenthal— declaring that his name had been cleared.

    Skorzeny continued to surprise the Israelis with his level of cooperation. During a trip to Egypt, he even mailed exploding packages; one Israeli-made bomb killed five Egyptians in the military rocket site Factory 333, where German scientists worked.

    The campaign of intimidation was largely successful, with most of the Germans leaving Egypt. Israel stopped the violence and threats, however, when one team was arrested in Switzerland while putting verbal pressure on a scientist’s family. A Mossad man and an Austrian scientist who was working for Israel were put on trial. Luckily, the Swiss judge sympathized with Israel’s fear of Egypt’s rocket program. The two men were convicted of making threats, but they were immediately set free.

    Prime Minister David Ben-Gurion, however, concluded that all of this being out in public was disastrous to Israel’s image — and specifically could upset a deal he had arranged with West Germany to sell weapons to Israel.

    Harel submitted a letter of resignation, and to his shock, Ben-Gurion accepted it. The new Mossad director, commander of military intelligence Gen. Meir Amit, moved the agency away from chasing or intimidating Nazis.

    Amit did activate Skorzeny at least once more, however. The spymaster wanted to explore the possibility of secret peace negotiations, so he asked Israel’s on-the-payroll Nazi to arrange a meeting with a senior Egyptian official. Nothing ever came of it.

    Skorzeny never explained his precise reasons for helping Israel. His autobiography does not contain the word “Israel,” or even “Jew.” It is true that he sought and got the life insurance. The Mossad did not assassinate him.

    He also had a very strong streak of adventurism, and the notion of doing secret work with fascinating spies — even if they were Jewish — must have been a magnet for the man whose innovative escapades had earned him the Iron Cross medal from Hitler. Skorzeny was the kind of man who would feel most youthful and alive through killing and fear.

    It is possible that regret and atonement also played a role. The Mossad’s psychological analysts doubted it, but Skorzeny may have genuinely felt sorry for his actions during World War II.

    He may have been motivated by a combination of all these factors, and perhaps even others. But Otto Skorzeny took this secret to his grave. He died of cancer, at age 67, in Madrid in July 1975.

    He had two funerals, one in a chapel in Spain’s capital and the other to bury his cremated remains in the Skorzeny family plot in Vienna. Both services were attended by dozens of German military veterans and wives, who did not hesitate to give the one-armed Nazi salute and sing some of Hitler’s favorite songs. Fourteen of Skorzeny’s medals, many featuring a boldly black swastika, were prominently paraded in the funeral processions.

    There was one man at the service in Madrid who was known to no one in the crowd, but out of habit he still made sure to hide his face as much as he could. That was Joe Raanan, who by then had become a successful businessman in Israel.

    The Mossad did not send Raanan to Skorzeny’s funeral; he decided to attend on his own, and at his own expense. This was a personal tribute from one Austrian-born warrior to another, and from an old spy handler to the best, but most loathsome, agent he ever ran.

    Dan Raviv, a CBS News correspondent based in Washington, and Israeli journalist Yossi Melman are co-authors of five books about Israel’s espionage and security agencies, including “Spies Against Armageddon: Inside Israel’s Secret Wars” (Levant Books, 2014). Contact them at feedback@forward.com

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    The Forward

    Haaretz Contributor

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