Mané

Critique de Sciences & doctorant en anthropo-épistémologie

  • Who’s Afraid of Peer Review ? — John Bohannon (Science)
    http://www.sciencemag.org/content/342/6154/60.full

    est-ce facile de publier dans des journaux scientifiques ? Un chercheur fabrique des articles faux (de façon flagrante), les envoie à 400 journaux, et regarde qui accepte de les publier (moyennant finances).

    Journals published by Elsevier, Wolters Kluwer, and Sage all accepted my bogus paper. (...) The Elsevier journal that accepted the paper, Drug Invention Today, is not actually owned by Elsevier, says Tom Reller, vice president for Elsevier global corporate relations: “We publish it for someone else.”

    #publication #open_access #recherche #spam #flagrant_délit

    • OPEN ACCESS : DU RÊVE AU CAUCHEMAR

      http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2013/10/open-access-du-rêve-au-cauchemar-.html

      Or, les revues en accès libre ont aussi fait l’objet d’une prédation capitaliste. Des sociétés privées ont fondé en quelques années des milliers de revues. La liste du DOAJ (annuaire des revues en open access) affiche déjà plus de 9.900 revues ; dont 1000 enregistrées en 2012. Elles ont constitué des comités éditoriaux et recruté des « reviewers » en inondant de spam des milliers de chercheurs à travers le monde. Ces revues n’ont en réalité, malgré les proclamations, aucune qualité scientifique, et peuvent publier absolument n’importe quoi : de la science non seulement médiocre, mais pathologique, mensongère, voire des purs canulars comme vient de le prouver Science. Elles singent les revues scientifiques classiques - et souvent leurs noms avec des American et des European cachant des adresses en Turquie ou au Pakistan, le plus gros paquet de revues testées se trouvant en Inde, suivi... des Etats-Unis où le profit final est souvent retrouvé - avec comité éditorial, relecteurs et la qualité scientifique en bandoulière. Or, 45% des revues de cette liste du DOAJ auxquelles le papier bidon a été envoyé l’ont accepté.

    • Open access publishing hoax: what Science magazine got wrong | Higher Education Network | Guardian Professional
      http://www.theguardian.com/higher-education-network/blog/2013/oct/04/science-hoax-peer-review-open-access

      In Norway, where I work, there is a national committee charged with sorting out bad journals – open access and traditional alike. And, yes, because of author payment, that committee sees a proliferation of illegitimate open access journals. But, again, that is because of author payment, not because the results of research are being made freely available.

  • Pourquoi je ne publie(rai) plus (jamais) dans des revues scientifiques.

    http://affordance.typepad.com//mon_weblog/2016/05/pourquoi-je-ne-publierai-plus-dans-des-revues-scientifiques.html

    Olivier Ertzscheid, enseignant-chercheur et blogueur renommé, explique pourquoi le système des revues scientifiques – depuis l’évaluation par les pairs jusqu’aux abonnements exorbitants – va à l’encontre du travail scientifique et de sa diffusion au plus grand nombre.

    #SHS #publication #peer-review

  • Rhétorique réactionnaire. Incitation à la bêtise. Sur « l’excuse sociologique », par Gérard Mauger
    http://www.cairn.info/revue-savoir-agir-2016-1-page-133.htm

    Mais l’explication sociologique est-elle aussi déterministe que celle de la biologie ? En d’autres termes, peut-elle exempter le criminel de la responsabilité de son crime, comme la science médicale exonère le malade de celle de sa maladie ? Peut-on considérer que le genre de déterminations que s’efforce de mettre en évidence la sociologie puisse valoir comme « excuse sociologique » ?

    [...]

    Si l’explication sociologique est évidemment perfectible, elle contribue néanmoins à invalider la croyance au « libre choix de la délinquance ». On peut alors se demander si ce parti pris scientifique (ou explicatif) affranchit le sociologue de tout jugement normatif. La recherche désintéressée de la vérité est-elle possible dans la pratique du métier de sociologue ?
    L’impossible « neutralité axiologique »
    L’invitation wébérienne à la « neutralité axiologique » est-elle possible ? Le sociologue peut-il vraiment « considérer les fait sociaux comme des choses » ? Ou ne s’agit-il là que de leurres imposés par la bienséance académique ? La pratique du métier de sociologue montre à l’évidence que la neutralité axiologique est pratiquement intenable. 1°) Ayant pour objet le monde social, le sociologue, qu’il le veuille ou non, est partie prenante des luttes qui ont pour objet le monopole de la représentation légitime du monde social où s’opposent tous ceux – politiques, journalistes, sociologues, etc. – qui tentent d’imposer leur point de vue. 2°) Appartenant au monde social qu’il étudie, le sociologue a nécessairement une représentation préalable, plus ou moins normative, de l’objet qu’il étudie (dans le cas présent, les délinquants, les djihadistes) : il peut, au mieux, tenter de suspendre son point de vue. En fait, cette représentation initiale et les intérêts politiques ou éthiques qui en sont solidaires décident du choix d’objet. Et c’est dans la mesure où ce rapport initial à l’objet, qui préside à son élection, oriente le regard, qu’il s’agit de l’objectiver pour tenter d’en contrôler les effets. 3°) Le sociologue ayant affaire à un objet qui parle, l’expérience, le point de vue, le vécu de ses enquêtés font partie de son objet (même s’il ne s’y réduit pas). Mais l’essai de compréhension n’implique pas plus une neutralité fictive du sociologue que le devoir d’endosser « la cause » de ses enquêtés, ni d’ailleurs l’interdiction de le faire. Quoi qu’il en soit, si contrôlé soit-il, le rapport initial du sociologue à son objet n’est évidemment pas sans effets dans la pratique de l’enquête. Dans l’adresse « Au lecteur » de La Misère du monde, Pierre Bourdieu invite à « prendre les gens comme ils sont », à « les appréhender comme nécessaires, à [les] nécessiter, en les rapportant méthodiquement aux causes et aux raisons d’être ce qu’ils sont », et, dans cette perspective, à « se situer en pensée » à la place qu’ils occupent dans l’espace social en faisant sien le principe spinoziste : « ne pas rire, ne pas pleurer, ne pas détester mais comprendre ». Si cet appel à « prendre les gens comme ils sont » ne soulève pas de difficultés particulières quand le chercheur éprouve une forme de sympathie à l’égard du groupe qu’il étudie, l’empathie que suppose la compréhension est d’autant plus problématique que l’aversion du sociologue à l’égard de ses enquêtés est plus grande. Dans les deux cas, l’impossible neutralité axiologique du sociologue porte à conséquences. La sympathie l’expose à se voir enrôlé dans le groupe qu’il étudie, à se convertir à « la cause » de l’objet étudié et à la créditer d’une forme de légitimité, le plus souvent en habilitant scientifiquement le point de vue des enquêtés ou de leur porte-parole. À l’inverse, l’antipathie sinon l’aversion du sociologue risquent de le rendre aveugle et sourd au point de vue des enquêtés. Dans les deux cas, ses efforts d’empathie, heureux ou malheureux, l’exposent à deux formes de renoncement à la sociologie : l’alignement sur le discours des enquêtés ou la substitution ethnocentrique de son propre discours à celui des enquê- tés (en toute méconnaissance de leur point de vue). De façon générale, la conversion des intérêts politiques ou éthiques initiaux en intérêt scientifique implique une tension inévitable et plus ou moins déséquilibrée entre engagement et distanciation. Mais, plutôt que de se réclamer d’une neutralité axiologique illusoire, il s’agit d’objectiver autant que faire se peut le rapport du chercheur à son objet de recherche, d’expliciter les références normatives qui guident les sympathies/antipathies du sociologue et tenter d’éviter ainsi le genre de sociologie qui en dit plus long sur le sociologue que sur son objet. 4°) On peut enfin se demander si la pratique de l’enquête et la recherche d’explications sociologiques n’influencent pas le jugement moral du sociologue sinon sur la délinquance ou le djihad, du moins sur les délinquants et les djihadistes. Tenter de rendre raison des trajectoires qui conduisent à ce type de pratiques ou à s’engager dans telle ou telle « cause », les « nécessiter » comme dit Bourdieu, infléchit, me semble-t-il, le regard porté sur elles. Si, comme le note Bernard Lahire, « juger (et punir) n’interdit pas de comprendre » (p. 37), on peut aussi se demander si « l’explication-compréhension » sociologique n’infléchit pas le jugement. Dans la mesure où une pratique réflexive de l’enquête sociologique substitue aux repré- sentations spontanées une représentation mieux informée et contrô- lée, soumet les préjugés à l’examen, contribue à rendre intelligibles des pratiques a priori incompréhensibles et parvient, au moins dans certains cas, à les « nécessiter », on peut supposer qu’elle infléchit le jugement moral porté, sinon sur les pratiques (qu’il s’agisse de délinquance ou d’attentats terroristes), du moins sur les agents. De ce point de vue, le travail sociologique s’apparente à celui des juges d’instruction ou des avocats de la défense qui, selon Bernard Lahire, « cherchent, au-delà de l’établissement des faits, à rendre raison des actes commis et à mettre en lumière la personnalité et les contextes de vie des inculpés » (p. 113). Et s’il est vrai, comme le note Bernard Lahire, que « même la justice ne peut se satisfaire pleinement des visions abstraites de l’Homme libre et maître de son destin » (p. 114) et que l’enquête de personnalité peut valoir des circonstances atténuantes, on voit mal pourquoi ce qui est accordé à l’explication psychologique ne vaudrait pas également pour l’explication sociologique.

    #sociologie_de_l’excuse #explication #compréhension #SHS #Epistémologie #Neutralité_axiologique #Engagement #Distanciation

  • L’étrange destin du logiciel libre, par Sébastien Broca
    http://www.monde-diplomatique.fr/2014/07/BROCA/50585 #st

    Collaboratif, ouvert, accessible à tous : alors qu’il a fêté ses trente ans d’existence en 2013, le mouvement du #logiciel_libre incarne plus que jamais une résistance à la #privatisation du savoir et de la culture. Des milliers de programmeurs élaborent, souvent bénévolement, des outils qui servent à tous. Pourtant, les rapports entre ce mouvement et la sphère marchande sont plus étroits qu’on pourrait le penser.

    http://zinc.mondediplo.net/messages/25780 via Le Monde diplomatique

    • Dans les faits, le capitalisme cognitif s’est accommodé de ce régime juridique alternatif qui semblait le menacer. Peu à peu, les entreprises technologiques ont compris que renoncer à l’appropriation privative de certaines ressources informatiques pouvait comporter des avantages : une réduction de leurs dépenses, par exemple. Avec OpenSSL, elles profitent d’un logiciel dont elles ne paient pas le développement. Dans le cas du noyau Linux, l’ouverture du code leur permet de mutualiser une partie de leurs investissements en recherche et développement.

    • Le mouvement du logiciel libre vise une finalité sociale plus que technique. Cela le distingue de son double, le mouvement open source, qui défend également l’ouverture du code informatique, mais pour d’autres raisons : produire des logiciels plus performants et créer des modèles d’entreprise innovants.

  • Comment les #big_data nuisent aux communautés les plus pauvres - The Atlantic
    http://alireailleurs.tumblr.com/post/142835537692

    Beaucoup a déjà été dit sur la surveillance des plus pauvres par les technologies de contrôle (voir notamment “Pourquoi les Big data nous angoissent”). Et l’article de The Atlantic signé par Kaveh Waddell n’apprendra pas grand chose à la plupart d’entre vous. Il rappelle que les communautés les plus démunies sont aussi les plus surveillées : on contrôle leur capacité à obtenir des prestations sociales, on surveille leurs comportements (enfance, délinquance, consommation de stupéfiants, visites à domiciles…)… Les plus pauvres s’inscrivent dans un cycle de surveillance où les aides qu’ils peuvent recevoir dépendent de leur acceptation de la surveillance. Dans ce cycle qui se referme sur eux, il suffit d’une défaillance (une arrestation notamment) pour que toute la machine des prestations se grippe. Si une (...)

    #pauvreté #inégalités #NosSystèmes

  • Les modes d’existence expliqués aux modernes, ou le monde pluriel selon Bruno Latour, par Jean-Pierre Delchambre et Nicolas Marquis

    http://sociologies.revues.org/4478

    Résumé :

    La parution du dernier ouvrage de Bruno Latour intitulé Enquête sur les modes d’existence marque un tournant important dans le parcours intellectuel de son auteur, qui s’y érige comme un métaphysicien assumé. Cette posture, si elle peut fasciner, n’en pose pas moins d’importantes questions tant méthodologiques qu’épistémologiques. Cet article étudie les implications de ce tournant métaphysique sur la définition et la pratique de la sociologie à trois niveaux. D’abord, à partir de la difficulté à discuter la posture de Bruno Latour ; ensuite, à propos de la difficulté à articuler un « pluralisme ontologique » avec un « empirisme radical » en faisant l’économie d’une théorie du langage ; enfin, concernant les effets de ce dispositif dans le champ contemporain des sciences sociales.

    #Latour #Epistemologie #modernité #tournant_linguistique #tournant_métaphysique #pluralisme_ontologique #institution #société

  • Foucault, la vie et la manière, à propos de : M. Foucault, Le Courage de la vérité,
    par Mathieu Potte-Bonneville, le 7 septembre 2009

    http://www.laviedesidees.fr/Foucault-la-vie-et-la-maniere.html

    La question posée par Foucault pourrait se résumer ainsi : étant donnée la vérité, quelles furent et sont les différentes manières de la dire, et de se poser soi-même comme la disant ? Que la vérité soit une n’empêche pas la variété des façons de la manifester et de s’en faire le sujet ; question que Foucault avait croisée dès sa leçon inaugurale de 1970 [2]. Forgeant ici, pour désigner l’ensemble des procédés par lesquels le vrai est amené au jour, l’étrange vocable d’aléthurgie, il reprend ce même problème et propose de distinguer entre « quatre modalités fondamentales du dire-vrai » (p.16) qu’illustrent les figures du prophète, du sage, du technicien, du « parrésiaste » enfin.
    On lira avec intérêt le détail de cette typologie, qui témoigne de ce que le dernier Foucault n’avait nullement perdu le goût des oppositions structurales : s’y illustre la fécondité de ces sortes de « distinctions de travail » qui scandent les cours au Collège de France, distinctions données comme d’autant plus vastes et transhistoriques qu’elles fonctionnent en même temps comme de simples ébauches transitoires, permettant de cheminer vers l’objet précis de la discussion, et vouées à être abandonnées lorsque celui-ci aura été rejoint. Ici, c’est en effet la quatrième des « formes aléthurgiques », la parresia grecque ou « franc-parler », qui va occuper le centre de l’analyse : cette posture, celle d’un sujet qui au sens strict « se risque » à dire le vrai, met par là à l’épreuve son rapport aux autres et se met lui-même en danger, acceptant de nouer son destin à la vérité qu’il énonce, cette parresia est une forme en somme doublement secrète, puisque la moins repérée de cette dimension du « dire vrai », dimension ordinairement occultée par l’analyse des critères et propriétés du vrai lui-même ; forme dont, du coup, Foucault entend faire un levier pour réinscrire dans l’histoire les rapports entre vérité et subjectivité.

    #Foucault #Vérité #Archéologie #Parresia #Dire_vrai

  • Chomsky et Bouveresse, adepte du Grand Partage. Il faut absolument leur répondre….
    Dialogue sur la science et la politique. NOAM CHOMSKY, dialogue avec Jacques BOUVERESSE
    http://agone.org/revueagone/agone44/enligne/6/index.html

    Noam Chomsky : On ne peut pas sérieusement penser que la vérité objective n’existe pas. Savoir jusqu’à quel point on peut l’approcher est une autre question. On sait depuis le XVIIème siècle que l’enquête empirique comporte toujours un élément de doute. On peut en principe démontrer ou réfuter le dernier théorème de Fermat, mais dans le monde empirique, le monde de la physique, de la chimie, de l’histoire et ainsi de suite, on a beau faire de son mieux, on a beau essayer de faire de son mieux pour approcher la vérité, on ne peut pas démontrer que les résultats trouvés sont corrects. C’est une évidence depuis l’effondrement du fondationnalisme cartésien. On a donc compris dans les sciences, dans la philosophie, etc., que nous devons procéder avec ce que Hume appelle un « scepticisme mitigé ». Scepticisme au sens où nous savons que nous ne pouvons pas établir des résultats définitivement, mais mitigé au sens où nous savons que nous pouvons progresser.
    Mais cela n’a pas de rapport direct avec la liberté  ; celle-ci est une question de valeur : nous choisissons de l’accepter ou de la rejeter. Voulons-nous adopter la croyance selon laquelle les êtres humains ont le droit de déterminer leur destin et leurs propres affaires  ? ou voulons-nous adopter celle selon laquelle de plus hautes autorités les guident et les contrôlent  ? La science ne répond pas à cette question, c’est une affaire de choix. Peut-être la science sera-t-elle capable un jour de confirmer ce que nous espérons être vrai, à savoir qu’un instinct de liberté fait partie de la nature humaine – cela pourrait bien être vrai, et je pense que ça l’est  ; mais il n’y a aucun domaine où les sciences soient suffisamment développées pour être en mesure d’établir un tel résultat. Peut-être en seront-elles capables un jour.
    Ainsi, dans nos vies quotidiennes – qu’elles soient des vies politiques, militantes, que nous restions passifs ou dans quelque direction que nous choisissions d’agir –, nous faisons des suppositions que nous tenons pour vraies, mais nous ne pouvons pas les établir fermement  ; et nous les utilisons en essayant de leur donner des bases plus solides au fur et à mesure que nous avançons. C’est essentiellement la même chose qui se passe dans les sciences, mais lorsqu’on réduit la sphère de l’enquête à des domaines très spécifiques, on peut évidemment aller plus loin dans l’établissement des conclusions qui nous intéressent.

    [...]

    Daniel Mermet : Pensez-vous que la science a besoin d’être défendue, comme le suggère Jacques Bouveresse  ?
    Noam Chomsky : La question est tellement absurde que je n’arrive même pas à l’envisager. Pourquoi la tentative de découvrir la vérité sur le monde aurait-elle besoin d’être défendue  ? Si quelqu’un ne se sent absolument pas concerné, il peut tenir les propos suivants : « Je me moque de ce qui arrive dans le monde, je me moque de ce qui arrive aux gens, je me moque de savoir si la lune est faite en fromage vert, je me moque de savoir si les gens souffrent et sont tués. Je m’en moque éperdument, je veux juste aller boire un verre et me sentir bien. » Mais celui qui rejette cette position – celui qui dit : « Moi, ça m’intéresse de savoir si la lune est faite en fromage vert, ça m’intéresse de savoir si les gens souffrent, ça m’intéresse de savoir si on peut faire quelque chose pour les aider » – celui-là n’a rien à défendre. Et, pour avancer dans cette voie, il va évidemment chercher à comprendre les faits, à comprendre le monde. Cette position n’a pas besoin d’être défendue.

    [...]

    Jacques Bouveresse : [...] Dans mon exposé au colloque, j’ai fait référence au livre de Bernard Williams, Vérité et véracité, où il décrit le comportement d’une catégorie de gens qu’il appelle « les négateurs [deniers] » : ceux qui nient l’intérêt de notions comme celle de vérité, qui contestent ouvertement la valeur de la vérité. Ce sont des gens, dit-il, qui ne peuvent manifestement pas penser véritablement ce qu’ils disent puisque, par exemple, quand ils disent : « les propositions des sciences ne sont jamais rien d’autre que des conventions sociales, des constructions sociales plus ou moins arbitraires qui pourraient être différentes si la société était différente », ils oublient simplement qu’ils parient quotidiennement leurs vies sur une croyance en la vérité – la vérité objective – de certaines lois de la nature, comme celle de la chute des corps, ou toutes les lois scientifiques qui permettent de faire voler des avions, rouler des trains, etc.
    Aucun d’entre nous ne met sérieusement en doute de telles vérités. Ce sont, pour tout le monde, des choses aussi vraies qu’une chose peut jamais être vraie. Le genre de discours que tiennent, sur ce point, les négateurs soulève une énorme difficulté : il laisse ceux qui ont envie de protester complètement désarmés  ; on ne peut même pas savoir, encore une fois, si les gens qui s’expriment de cette façon pensent réellement ce qu’ils disent  ; cela rend la situation encore plus inquiétante et inconfortable.

    #Chomsky #Bouveresse #épistémologie #réalité #pragmatisme #relativisme #Russel #James #Bourdieu

  • La connaissance scientifique comme contenu en calcul
    http://www.scilogs.fr/complexites/le-collectionneur-universel-partie-4

    À la condition de ne pas les considérer seules mais associées à l’univers ou à des parties de l’univers, les connaissances scientifiques sont comme les couples théorème-démonstration, c’est-à-dire de la complexité organisée. Celle-ci provient des résultats de longs calculs qui sont ceux des processus d’exploration de la recherche scientifique. Les connaissances scientifiques sont du contenu en calcul.

    [...]

    Cette façon de concevoir la connaissance scientifique comme un calcul irréductible mémorisé pourra sembler un peu simplificatrice et on pourra douter de son utilité. Elle n’évoque pas (directement) de notions comme la culture, les contextes économiques, historiques et sociaux favorables, le concept d’épistémé de Michel Foucauld, la construction hiérarchique et interdépendante des connaissances et bien d’autres notions utilisées en histoire ou en épistémologie des sciences. Il est vrai que notre façon de parler de la science est abstraite et théorique et qu’elle n’entre pas dans le détail. Cependant elle constitue une sorte de chapeau : une formulation préalable, compatible avec ce qu’un regard plus fin découvrira. Cette vision permet de penser de manière unifiée une grande partie des activités humaines, et confirme l’idée du collectionneur universel : quand l’être humain mène des travaux scientifiques, de même que lorsqu’il fait des mathématiques ou produit des œuvres d’art, il construit de nouvelles structures — par des calculs nouveaux, dont il mémorise les résultats —, il enrichit sa collection d’objets organisés, et en enrichit le monde. Il accroît la profondeur logique de Bennett de l’univers.

    #Complexité #Connaissance #Contenu_en_calcul #Jean-Paul_Delahaye_(mathématicien) #Mathématiques #Profondeur_logique_de_Bennett #Recherche_scientifique #Science #Univers #Épistémologie

  • livre : "A quoi rêvent les algorithmes" - Dominique Cardon (oct 2015)

    http://www.seuil.com/livre-9782021279962.htm

    Google, Facebook, Amazon, mais aussi les banques et les assureurs : la constitution d’énormes bases de données (les « big data ») confère une place de plus en plus centrale aux algorithmes. L’ambition de ce livre est de montrer comment ces nouvelles techniques de calcul bouleversent notre société. À travers le classement de l’information, la personnalisation publicitaire, la recommandation de produits, le ciblage des comportements ou l’orientation des déplacements, les méga-calculateurs sont en train de s’immiscer, de plus en plus intimement, dans la vie des individus. Or, loin d’être de simples outils techniques, les algorithmes véhiculent un projet politique. Comprendre leur logique, les valeurs et le type de société qu’ils promeuvent, c’est donner aux internautes les moyens de reprendre du pouvoir dans la société des calculs.

    Dominique Cardon est sociologue au Laboratoire des usages d’Orange Labs et professeur associé à l’université de Marne-la-Vallée (LATTS). Avec La Démocratie Internet (Seuil, 2010) et de nombreux articles, il s’est imposé comme l’un des meilleurs spécialistes du numérique et d’Internet.

    http://www.seuil.com/extraits/9782021279962.pdf

    #book #livre
    #big_data
    #algorithm #algorithme

  • *Y’a-t-il des "antiscience" ?”, Fabrice Flipo

    http://sciences-critiques.fr/y-a-t-il-des-antiscience

    Croire pouvoir déduire une décision politique de la seule science, sans passer par l’expertise, s’appelle le scientisme. Croire pouvoir se passer de science et affirmer que tout est politique est l’extrême opposé. L’expertise est un filtre entre le politique et le scientifique.

    #Expertise #Épistémologie #Réchauffement_climatique

    • Bon, après, ce n’est pas vraiment une critique de la science. La vision défendue par l’auteur défend une vision traditionnelle ("normale" pour reprendre le vocabulaire de l’auteur) de la science et de l’expertise en société. Son point de vue est intéressant et épistémologiquement argumenté, sans pour autant s’attaquer aux fondements de l’autorité scientifique (une science en quête de vérité, certes provisoire ou projetée à l’infini, mais vérité tout de même).

    • Il y a la Science, et les Scientifiques.

      Les scientifiques se situent avant tout dans le monde universitaire.
      Certains termes circulent, mandarins par exemple.
      Ce n’est pas, bien sur une règle absolue, mais gare à celui qui fait évoluer la science.
      Un exemple : En médecine le rejet des thèses de Semmelweis, et l’hostilité rencontrée au lavage des mains des médecins avant de pratiquer les accouchements.

      De nos jours, on essaye de faire passer l’économie pour une science.
      Un pseudo prix nobel a été créé pour cela.
      Garre aux dissidents !

  • Sociologie politique des sciences
    https://lectures.revues.org/20348

    Comment développer une nouvelle connaissance des sciences ? C’est à cette question qu’entend répondre ce nouveau numéro de la revue Politix. En 2008, une controverse sur les modalités de rapprochement entre la sociologie politique et la sociologie des sciences a été formulée dans la Revue française de science politique. Elle engageait Bruno Latour tenant d’une approche pragmatique et Pierre Favre socio-historien, autour d’enjeux de définitions et de frontières disciplinaires. Tandis que le premier justifie une description relativiste des sciences où les questions à première vue « purement techniques » sont « éminemment politiques », le second postule qu’« un usage politique des travaux est toujours possible » mais qu’« une découverte n’est pas par essence politique ». C’est pour tenter de faire dialoguer ces points de vue a priori divergents, tant au niveau théorique que méthodologique, que se développe l’argumentaire de ce présent numéro. Comment s’opère cette rencontre qui interroge les dimensions politiques des sciences et des techniques ?

    #STS #Epistémologie #Sociologie_des_sciences #Sociologie_politique

  • http://blog.mondediplo.net/2016-03-10-Quelques-pensees-radicales-a-propos-de-Sci-Hub


    Quelques pensées radicales à propos de #Sci-Hub

    Le droit d’auteur a certainement encore un rôle à jouer dans le monde académique, notamment dans l’optique de changer la manière dont se transmet le #savoir_universitaire. Mais en le considérant comme sacré et inviolable, comme s’il était descendu du mont Sinaï, nous ne prenons pas du tout ce chemin.

  • Le pouvoir est de plus en plus savant. Entretien avec Luc Boltanski
    #Sociologie_critique #Sociologie_de_la_critique #pragmatisme #Boltanski #Bourdieu

    http://www.laviedesidees.fr/Le-pouvoir-est-de-plus-en-plus.html

    De la critique, c’est un peu différent. C’est un livre théorique. C’est la première fois que j’écris un livre théorique qui ne soit pas accroché à un travail d’enquête. C’est un peu la théorie sous-jacente au Nouvel Esprit du Capitalisme. J’ai cherché à construire un cadre qui permette d’intégrer des éléments se rattachant plutôt à la sociologie critique et des éléments se rapportant plutôt à la sociologie de la critique. Si vous voulez, on pourrait dire que c’est poppérien. Je relisais ce week-end des textes de Popper pour un livre que j’écris en ce moment. Je suis loin d’être poppérien sur tous les plans, mais je suis tout à fait d’accord avec l’idée que le travail scientifique consiste à établir des modèles qui partent d’un point de vue tout en sachant que ce point de vue est local. L’important est donc de ne pas chercher à étendre ce point de vue local pour l’appliquer à tout, ce qui est une des sources du dogmatisme. Mais on peut chercher à construire des cadres plus larges dans lesquels le modèle établi précédemment reste valable, à condition que son aire de validité soit spécifiée. Pour dire vite, ce qui nous inquiétait le plus dans ce qu’était devenue la sociologie bourdieusienne, c’était l’asymétrie fantastique entre, d’un côté, le grand chercheur clairvoyant et, de l’autre, l’acteur plongé dans l’illusion. Le chercheur éclairant l’acteur. Rancière a fait les mêmes critiques.

    [...]

    Je pense que c’est très lié à un autre problème qui est au cœur de la sociologie et auquel Bourdieu était très sensible, qu’il a cherché à résoudre sans, à mon sens, vraiment y parvenir. C’est un problème qui d’ailleurs n’a pas encore de solution vraiment satisfaisante. Il est, en gros, le suivant. Vous pouvez aborder la réalité sociale depuis deux perspectives. Vous pouvez prendre le point de vue d’un nouvel arrivant dans le monde auquel vous allez décrire ce qu’est cette réalité. Cela suppose un point de vue surplombant, une histoire narrative, la référence à des entités larges, à des collectifs, qu’ils soient ou non juridiquement définis : des États, des classes sociales, des organisations, etc. Certains diront la référence à des structures. Une perspective de ce type va mettre en lumière plutôt la stabilité de la réalité sociale, la perpétuation des asymétries qu’elle contient – dans le langage de Bourdieu –, la reproduction, et la grande difficulté pour les agents de modifier leur destin social ou, plus encore, de transformer les structures. Mais vous pouvez prendre aussi une autre perspective, c’est-à-dire adopter le point de vue de quelqu’un – ce que l’on appelle en sociologie un acteur – qui agit dans le monde, qui est plongé dans des situations – personne n’agit dans des structures, tout le monde agit dans des situations déterminées. Et là, vous ne serez plus en présence d’agents qui subissent, en quelque sorte passivement, la réalité, mais face à des acteurs, c’est-à-dire des personnes inventives, qui calculent, qui ont des intuitions, qui trompent, qui sont sincères, qui ont des compétences et qui réalisent des actions susceptibles de modifier la réalité environnante. Personne, à mon sens, n’a trouvé de solution vraiment convaincante pour conjuguer ces deux approches. Or elles sont l’une et l’autre nécessaires pour donner sens à la vie sociale. On peut essayer de formuler ce problème dans les termes de la relation entre structuralisme et phénoménologie. J’ai essayé d’articuler ces deux approches dans La condition fœtale à partir de la question de l’engendrement et de l’avortement. Je ne sais pas si c’était très satisfaisant. Bourdieu a essayé de conjuguer les deux approches. Avant de découvrir les sciences sociales, il voulait se consacrer à la phénoménologie. Cette articulation prend appui, dans son cas, sur la théorie de l’habitus, par rapport à laquelle j’ai pas mal de réticences théoriques. C’est une théorie qui dérive, pour une large part, de l’anthropologie culturaliste, telle que l’ont mise en forme des anthropologues comme Ruth Benedict, Ralf Linton ou Margaret Mead. J’ai relu récemment Patterns of Culture de Ruth Benedict et c’est assez étrange, aujourd’hui, de voir la façon dont elle utilise des catégories dérivées de Nietzsche et même de Spengler. L’idée centrale est que l’on peut identifier des cultures qui ont des traits spécifiques – un caractère, si vous voulez – et que ce caractère se retrouverait dans les dispositions psychologiques – dans le caractère – des personnes qui sont plongées dans ces cultures. C’est une construction plutôt bizarre et ça entraîne une circularité qui fait que si vous connaissez les attaches culturelles – définies par le sociologue et par la statistique – des acteurs, vous connaissez leurs dispositions et vous savez à l’avance la façon dont ces acteurs vont réagir dans n’importe quelle situation. C’est donc contre ce modèle que nous avons pris position. Mais nous voulions aussi éviter de prendre appui sur un autre modèle, construit en opposition au modèle culturaliste, qui sans passer par la phénoménologie et en prenant les moyens de l’économie néo-classique, ne connaît que des individus. Dans ce modèle poppérien, connu aujourd’hui sous le nom d’individualisme méthodologique, il n’y a que des individus qui ont chacun leurs motifs et leurs choix, et c’est de l’agrégation qui s’opère, on ne sait pas trop comment, entre ces motifs différents, que dérive la causalité historique, qu’il s’agisse de la micro histoire des situations ou de la grande histoire, qu’elle soit économique ou politique. Dans ce modèle, qui ne connaît que des individus, il est exclu de conférer une intentionnalité à des entités qui ne soient pas des êtres individuels, ce qui paraît raisonnable a priori. On ne peut pas mettre des groupes sociaux – groupes politiques ou classes sociales, par exemple – en position de sujets de verbes d’action. Mais, à mon sens, un des problèmes que pose ce modèle, c’est qu’il ne rend pas compte du fait que la référence à des entités d’ordre macro sociologiques, n’est pas seulement le fait des sociologues ou des historiens mais de tout le monde. Les acteurs ne peuvent pas confectionner du social sans inventer des institutions, des entités collectives, etc. dont ils savent, d’une certaine façon, qu’il s’agit de fictions mais dont ils ont pourtant besoin pour donner sens à ce qui se passe, c’est-à-dire à l’histoire.

  • Le néolibéralisme est un fascisme | Cartes blanches - lesoir.be
    http://www.lesoir.be/1137303/article/debats/cartes-blanches/2016-03-01/neoliberalisme-est-un-fascisme

    La carte blanche de Manuela Cadelli, présidente de l’Association syndicale des magistrats.

    "Le #libéralisme était une doctrine déduite de la philosophie des Lumières, à la fois politique et économique, qui visait à imposer à l’Etat la distance nécessaire au respect des libertés et à l’avènement des émancipations démocratiques. Il a été le moteur de l’avènement et des progrès des démocraties occidentales.

    Le néolibéralisme est cet économisme total qui frappe chaque sphère de nos sociétés et chaque instant de notre époque. C’est un extrémisme.

    Le fascisme se définit comme l’assujettissement de toutes les composantes de l’État à une idéologie totalitaire et nihiliste.

    Je prétends que le néolibéralisme est un fascisme car l’économie a proprement assujetti les gouvernements des pays démocratiques mais aussi chaque (...)

    #démocratie #économie

  • Le 10 mars 2016, une journée Science et société à l’ENS Cachan sera consacrée à la question du rapport des scientifiques à l’engagement.
    Les scientifiques et l’engagement au coeur du débat

    http://www.ens-cachan.fr/servlet/com.univ.collaboratif.utils.LectureFichiergw?ID_FICHIER=581532

    http://www.ens-cachan.fr/version-francaise/recherche/seminaires-et-colloques/les-scientifiques-et-l-engagement-au-coeur-du-debat-346872.kjsp?RH=135953

    Programme :

    « Les communs de la science »
    Christian Laval (Université Paris Ouest Nanterre-La Défense)

    Petit panorama de l’(auto)-critique des sciences des années 1970
    Céline Pessis (EHESS, Centre Alexandre Koyré)

    « Comment la désillusion vient au chercheur »
    Jacques Testart (INSERM)

    « L’engagement des chercheurs dans les conflits sur les brevets de gènes et de médicaments au tournant des années 2000... »
    Maurice Cassier (CNRS)

    « Les formes d’engagement social et politique des scientifiques »
    Table ronde animée par Virginie Albe
    Intervenants :
    Fabienne Cru (Professeur des écoles, CESE)
    Marc Lipinski (CNRS)
    Roberto di Cosmo (Université Paris VII - Diderot)

    #recherche_engagée #SHS #épistémologie

  • Library Genesis / LibGen
    https://sites.google.com/site/themetalibrary/library-genesis

    Based in Russia, this is the largest currently openly available collection. They have several initiatives: i. 1 million files of mainly non-fiction ebooks, ii. 900k of mainly fiction ebooks, iii. 20 million papers from journals of science, history, art etc., iv. comics, magazines and paintings; totally amounting to at least 30 TB — easily the Library of Congress of the digital world. The Libgen movement mainly focusses on downloading whole collections that have already been posted in fora or as torrents, although a significant portion is also due to individual efforts.

    Pratique.

    #Accès_libre #Article_scientifique #Base_de_données #Contrefaçon #Culture #Datalove #Libre_accès_(édition_scientifique) #Livre_numérique #Science

  • Naturaliser la #logique
    http://www.laviedesidees.fr/Naturaliser-la-logique.html

    La philosophe anglaise Penelope Maddy tente depuis une trentaine d’années de naturaliser la logique, c’est-à-dire de fonder ses opérations sur l’expérience la plus ordinaire possible. Un parcours qui la mène de Kant à l’ethnographie, en passant par Wittgenstein.

    Livres & études

    / #naturalisme, logique

    #Livres_&_études

  • « Il y a depuis des années des débats autour de l’architecture des systèmes répartis. Par exemple, on va critiquer le fait que Facebook soit "un système centralisé" et on va chercher à faire un équivalent qui n’ait pas cette propriété. Ou bien on va se féliciter que BitTorrent soit "pair à pair". Le problème de ces débats est que les mots sont souvent utilisés de manière très laxiste, voire à contre-sens. On entend ainsi des gens critiquer le fait que le DNS soit centralisé (ce qui est faux) tout en se félicitant d’utiliser IRC (qui est, lui, réellement centralisé). Est-ce que le fait d’être réparti sur plusieurs machines fait qu’un système centralisé devient décentralisé ? (Cela a été dit pour des services comme la racine du DNS, ou comme IRC.) BitTorrent est-il vraiment pair à pair, dans l’utilisation qu’en font les gens (avec un moteur de recherche comme ThePirateBay) ? Faut-il alors se lancer dans une attaque quichottesque en tentant de redresser la terminologie, et se battre pour imposer l’usage des "bons" termes ? Ce serait fatiguant et probablement inefficace. Des termes comme "centralisé" ou "pair à pair" deviennent impossibles à utiliser, tellement il y a de polémiques autour. Je vais plutôt, dans cet exposé, essayer de définir différemment les différentes classes de systèmes répartis, selon le rôle que peut jouer une organisation particulière. »

    https://conf-ng.jres.org/2015/document_revision_1702.html?download

    #P2P #Internet #cccp

  • Pourquoi le monde n’existe pas ? approche critique de Markus Gabriel et du nouveau réalisme

    http://philitt.fr/2014/11/07/pourquoi-le-monde-nexiste-pas-approche-critique-de-markus-gabriel-et-du-nouv

    “Tout, absolument tout existe. Excepté le monde. Pour l’Allemand Markus Gabriel et l’Italien Maurizio Ferraris, porte-drapeaux du nouveau réalisme, notre planète, nos rêves, l’évolution, les chasses d’eau, la démocratie, les licornes arcs-en-ciel ou encore l’espoir ont une existence bien réelle. Or, le « monde », ce concept historique et traditionnel de la philosophie doit disparaître puisqu’il est la cause des errances malheureuses de la pensée occidentale. Plongeons-nous dans cet ouvrage en forme d’OVNI philosophique.”

    “Qu’est-ce que le Nouveau Réalisme ? Le nouveau réalisme cherche à poursuivre une interrogation de Thomas Nagel dans son livreThe View from Nowhere :
    « Ce livre parle d’un seul problème : comment combiner la perspective d’une personne particulière à l’intérieur du monde avec une vue objective de ce même monde susceptible d’inclure la personne et son point de vue. C’est un problème que rencontre tout être vivant qui possède la capacité et la tendance à transcender son point de vue particulier et à concevoir le monde comme un tout ».
    Pour y répondre, Markus Gabriel donne la définition suivante du nouveau réalisme : « Double thèse selon laquelle, premièrement, nous sommes susceptibles de connaître des choses et des faits en soi et, deuxièmement, choses et faits en soi n’appartiennent pas qu’à un seul domaine d’objets [le monde] ». Le nouveau réalisme propose de penser que tout existe, à part le monde. Seul existe ce qui est dans la multiplicité, dans le plan d’immanence, pour reprendre le vocable de Deleuze, dont s’inspirent Gabriel et Ferraris. Le monde représente l’Unité, le Tout, ce qui subsume l’ensemble de ce qui devient sous un seul concept qui est. Markus Gabriel affirme que l’on retrouve déjà à l’état brut cette idée dans un pan de la philosophie française contemporaine, chez Mehdi Belhaj Kacem, Tristan Garcia ou Jean-Clet Martin pour ne citer qu’eux, mais dans un style bien moins théorisé et systématisé, sans rejet radical de l’idée demonde. Le nouveau réalisme a su saisir une tendance qui est en passe de se généraliser dans la pensée philosophique, épistémologique, mais aussi, d’une certaine manière, politique.”

    “Dans un premier balayage du texte, il est significatif de remarquer que la destruction qu’il opère sur la philosophie traditionnelle est calquée sur la destruction à laquelle procéda Heidegger contre l’ontologie traditionnelle, démontrant que la philosophie était l’histoire de l’oubli de l’être. Markus Gabriel veut nous faire voir que l’histoire de la philosophie est fondée sur une méprise fondamentale : la croyance en l’existence du monde, d’un monde. Toutefois, la critique majeure d’où découlent toutes les autres déconstructions du constructivisme (depuis le début du XXème siècle jusqu’à nos jours) est dressée contre la phrase de Nietzsche formulée au paragraphe 481 de La Volonté de Puissance : « Il n’y a pas de faits, seulement des interprétations ». Est opéré un retournement : le nouveau réalisme défend qu’il n’y a pas d’interprétation, mais que des faits, des faits en soi.Autrement dit, l’objet perçu n’est pas une construction du sujet qui possèderait en arrière-plan une « chose-en-soi », mais l’objet tel qu’il est. Par là-même, Markus Gabriel cherche à réduire à néant l’idée kantienne que les choses ne font qu’apparaître dans le réel, et que la chose-en-soi est cachée et inatteignable ; pour parler savamment, exterminer la proposition que notre intuition sensible n’a à faire qu’à des phénomènes, jamais à des noumènes. Or, Gabriel suggère que le réel correspond à l’équation suivante : phénomène = noumène. C’est pourquoi on retrouve une critique fondamentale de la phénoménologie et de son héritage philosophique dans la philosophie continentale.

    Dans De Dieu qui vient à l’idée, Levinas définit la phénoménologie de la manière suivante : « La phénoménologie ce n’est pas ériger les phénomènes en chose-en-soi, mais c’est ramener les choses-en-soi à l’horizon de leur apparaître, de leur phénoménalité, c’est faire apparaître l’apparaître lui-même derrière ce qui apparaît ». Le nouveau réalisme ne cherche pas à trouver des « apparaîtres » cachés derrière des apparences : il n’y a rien de caché, de calfeutré, étant donné que la chose-en-soi est la chose réelle. Elle apparaît telle qu’elle est – elle appar-est. Il procède ici à quelque chose de plus radical qu’un retournement de la phénoménologie, il la refuse, il la réfute.”

    “Malheureusement, de multiples objections et corrections sont nécessaires après la lecture du Manifeste du nouveau réalisme et de Pourquoi le monde n’existe pas. Le nouveau réalisme ne satisfait pas à l’authentique originalité qu’il revendique. Le philosophe Jean-Clet Martin le montre dans son article sur Deleuze intitulé Le Dieu du labyrinthe ou le réalisme transcendantal dans lequel il explique que le néo-réalisme qui fait fureur était déjà inscrit dans les œuvres de Deleuze. Il dit qu’on retrouve, notamment avec l’expression d’ « expérience réelle », « non pas un réalisme spéculatif, mais un sensualisme en lequel le réel nous apparaît sans l’embarras de toutes les chicanes spéculatives – toutes ces prothèses idéatives étant tenues à distance par l’obstination de nos sens à explorer un boyau où l’on ne peut rentrer avec aucun instrument qui relèverait encore d’une intuition axiomatique. Et ce qui se lève dans une expérience déliée, ce sont sans doute des monstres plus que des mondes, une pluralité de singularités qui secouent les univers sensibles autant que les points réguliers du psychisme ». Markus Gabriel évite outrageusement de parler de Deleuze ; quant à Maurizio Ferraris, il parle de « tout », sauf de cette idée de multiplicité et de plan d’immanence, concepts auxquels je faisais référence et révérence quelques lignes plus haut.”

    #épistémologie #réalisme #nouveau_réalisme

  • ::::: : Présentation de la page Le New Organum ::::: :

    Le #discours_scientifique est partout présent, omniscient, omniscientifique. Si la #science nous dit la #vérité du monde, ou du moins nous est présentée comme telle, intéressons nous à la manière dont elle entend dire cette vérité, pour tenter de comprendre comment l’autorité vient au discours. On peut concevoir l’activité de #critique de très nombreuses manières. Si la critique est communément associée à la #déconstruction des rapports de domination, nous l’entendons plutôt comme une activité de #construction, de création, au principe même de l’activité scientifique. La critique est moins la négation de l’objet sur lequel elle porte, que la négation des effets d’autorité de ces objets. Il s’agit alors, dans cette perspective, de s’intéresser aux discours, mais aussi à leur mise en forme. Mettre en forme, c’est aussi mettre les formes. Si l’on se demande dans un premier temps comment le discours scientifique légitime l’action politique, il s’agit ensuite de comprendre comment la mise en forme du discours scientifique lui confère une autorité. Cette page est un espace de confrontation et d’interprétations de discours scientifiques. Elle procède par agencements, rapprochements, confrontations, mise en rapport de productions théoriques provenant de sources diverses. Nous emprunterons différentes voies, de manière à donner à voir différents points de vue sur ce paysage accidenté qu’est la production scientifique. Il s’agira de rendre ce terrain praticable, en installant des points de fixation intermédiaires, des prises communes, et ouvrant par ailleurs des voies nouvelles, transversales, et parfois sinueuses.
    Sarah Calba, Vivien Philizot et Robin Birgé

    ::::: : Les auteurs ::::: :
    Sarah Calba, chercheur-arpenteur, a récemment soutenu une thèse en #épistémologie intitulée Pourquoi sauver Willy ? Pourquoi et non comment car, dans cet écrit, il s’agit de définir la science en fonction de ses finalités : la science prétend-elle expliquer le réel, unique, en découvrant des lois naturelles ou souhaite-t-elle comprendre les réalités humaines en construisant des #représentations partagées ? Et puisque différentes finalités engagent différentes manières de faire, c’est en arpentant les voies et les voix de la #recherche_scientifique, et en particulier celles de l’écologie des communautés – discipline dédiée à l’explication de la répartition des espèces biologiques sur la planète bleue –, que Sarah argumente sa thèse. Elle distingue alors deux types de voies : celles abondamment pratiquées, simples, efficaces, aux prises évidentes, de la recherche ici nommée analytique, et celles, soucieuses de leur style, plus sinueuses car procédant par détours voire retours sur leur propre parcours, de la recherche dite synthétique... et c’est, bien sûr, la défense de cette dernière qui est la fin de cette thèse.

    Vivien Philizot est graphiste, doctorant et maître de conférences associé en #design. Il enseigne à l’Université de Strasbourg et à la Head à Genève. Il prépare une thèse qui porte sur le rôle du #design_graphique dans la #construction_sociale du champ visuel et dans la construction visuelle du champ social. Il s’agit notamment d’articuler une épistémologie des sciences avec une histoire critique du design graphique à l’époque moderne, envisagé comme manière de donner à voir et à connaître. Sont ainsi cartographiées, à vue, différentes voies par lesquelles le design graphique s’est construit, souvent envisagées par les grimpeurs modernistes comme des accès privilégiés à la vérité de l’image et du texte. Une approche #pragmatique consiste alors à considérer la pertinence de ces voies de manière locale plutôt qu’universelle, en les rapportant aux conditions historiques et climatiques dans lesquelles elles ont été posées. Le cheminement de la voie, la succession des prises, et l’inclinaison de la paroi ne sont-ils pas plus importants que la hauteur qu’ils nous permettent d’atteindre ? Peut-être faut-il garder à l’esprit que les points de vue que les théories de l’image se sont attachées à naturaliser, restent relatifs aux voies qu’elles nous conduisent à emprunter, et aux postures du corps et de l’œil qu’elles ont ainsi contribué à construire.

    Robin Birgé est doctorant en #anthropo-épistémologie. Il s’intéresse aux voies que prend la construction du savoir scientifique, et particulièrement au statut de la #connaissance quand les chemins bifurquent. Lorsque le premier de cordé arrive à un embranchement et choisi une voie plutôt qu’une autre, une théorie plutôt qu’une autre pendant une #controverse par exemple, nous pouvons (1a) considérer que finalement, ce qui compte, c’est la hauteur finale atteinte, soit l’accumulation de connaissances. Malgré le fait que les voies divergent et “fonctionnent bien d’un point de vue pratique”, il s’agit cependant du même rocher - du même réel ; on s’élève différemment mais pour parler d’une même chose en soi. Finalement, les voies finiraient par se rejoindre, et si les voies ne se rejoignent pas, le réel impitoyable du rocher finira par avoir raison de la vie de nos grimpeurs (les mauvaises théories seront alors éliminées). Une autre façon d’aborder la #philosophie de l’escalade, celle engagée ici, est que (1b) si des voies sont sans issue ou tournent en rond, il est envisageable qu’après tout relais elles prennent des versants différents et ne se rencontrent jamais : autrement dit, des visions du monde divergentes peuvent ne jamais se rencontrer.
    Plus précisément, cette thèse porte sur le statut d’un savoir particulier : celui de la figure de l’#expert en démocratie. Il s’agit notamment de dessiner les différentes façons d’articuler le réel-rocher, à sa connaissance si ce dernier existe, à sa médiation et au à la mobilisation du savoir lors de la prise de décision politique.