Socio.Logs

Faits sociaux en vrac

  • ESPAGNE • Comment combattre le #sexisme à la #récré ? | Courrier international
    http://www.courrierinternational.com/article/2014/05/27/comment-combattre-le-sexisme-a-la-recre

    Le programme de mixité que le gouvernement basque a lancé cette année se caractérise par une mesure novatrice : la réorganisation des espaces de jeux pendant la récréation. Avec ce projet, le ministère de l’Education veut éviter toute « répartition sexiste » des zones de loisirs. « La hiérarchie des jeux, les comportements des élèves ou le manque d’organisation spatiale font que généralement les garçons sont au centre, avec le football comme activité reine, et que les filles sont repoussées sur les côtés », souligne le projet.

    #éducation #école

    • Un horaire a été attribué à des jeux chaque jour de la semaine. De cette manière, les garçons et les filles peuvent choisir leur activité et ils savent où elle va avoir lieu. "Quand on leur laissait le champ libre, les garçons finissaient par occuper tout l’espace avec le football, souligne la directrice, Sandra Viota. Les filles avaient bien intériorisé tout cela et ne se plaignaient pas.

      Ajouter quelques contraintes peu coûteuses (ni matériellement ni psychologiquement), versus la loi de la jungle.

    • Les filles avaient bien intériorisé tout cela et ne se plaignaient pas.

      Je le note car je vois de plus en plus d’exemples sur l’incapacité « naturelle » à émettre une demande de la part des dominés, en l’occurrence, des #femmes.
      #inégalités

    • Depuis quelque temps, j’observe carrément des stratégies de soutien agressifs à l’oppression de la part des opprimés sur l’air de la source « naturelle » de la domination, du « chacun à sa place ». Beaucoup de femmes de mon âge élèvent manifestement leurs filles dans l’objectif de servir l’homme qui va les entretenir. Cela se voit notamment dans les stratégies scolaires où les filles sont invitées à ne pas couter cher (ne pas viser d’enseignement supérieur) et à vite apprendre un métier utile pour apporter un « complément » de salaire à la future maison.

      Il est vrai que dans ma génération, pour les femmes prolétaires, la libération des femmes s’est surtout traduite par celle des hommes de leurs obligations familiales qui sont entièrement retombées sur les épaules des femmes, dans un contexte où les inégalités professionnelles perdurent. Autrement dit, elles se sont majoritairement retrouvées toutes seules à assumer une famille avec des moyens ridicules et tout en étant stigmatisées par les services sociaux.

      Ici, les vignes, les abattoirs sont remplis de mères courage qui se tuent la santé pour le SMIC (le plus souvent des bouts de SMIC) et qui élèvent seules leurs enfants. La vie qu’elles ont est assez horrible, franchement.

      Mais sous la pression d’un marché du travail hyper concurrentiel où le modèle de compétence reste l’homme blanc middle age, les femmes diplômées de mon âge ont aussi été rondement éjectées des places qu’elles avaient réussi à grappiller à la première maternité et stagnent ensuite dans le précariat, alors qu’il est évident qu’elles ont dû être meilleures que les hommes pour prétendre à de moins bonnes places.

      Du coup, celles qui bénéficient encore de la protection relative d’un ménage contre la pauvreté ont cessé de lutter sur tous les fronts et plutôt que de dépenser une énergie insensée à tenter de revenir dans la course à l’échalote, adoptent un discours et des comportements réactionnaires, de nature à justifier leurs propres renoncements.

  • Oui, être une mère au travail, c’est la galère
    http://rue89.nouvelobs.com/2014/05/25/oui-etre-mere-travail-cest-galere-252423
    Effectivement, ça ne bouge absolument pas et on est toujours surprises de se rendre compte que la #maternité est une très forte variable explicative de la #discrimination des #femmes au #travail.
    Faut lire les commentaires, aussi...

    Sans être naïve – j’ai eu mon lot d’histoires de copines de copines qui se sont fait virer enceintes –, j’espérais qu’avoir un enfant n’entamerait en rien ma progression professionnelle. Raté, ma fille.

  • Descendants d’immigrés : une ségrégation professionnelle persistante | DARES

    http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2014-023.pdf

    Parmi les 40 millions de personnes âgées de 15 à 64 ans résidant dans un ménage de France métropolitaine en 2012, 3,9 millions sont descendants d’immigrés, c’est-à-dire sont nées en France d’au moins un parent immigré. Les descendants d’immigrés représentent ainsi 9,8 % de la population en âge de travailler. (...)

    Un taux de chômage inférieur à celui des immigrés, mais plus élevé que la moyenne.

    Le taux de chômage de l’ensemble des descendants d’immigrés âgés de 15 à 64 ans est de 14 % en 2012, inférieur à celui de l’ensemble des immigrés (17 %), mais nettement plus élevé que celui des personnes non issues de l’immigration (8,6 %). Cependant, origine par origine, les taux de chômage des descendants d’immigrés sont proches de ceux des immigrés. Ainsi, les descendants d’immigrés d’origine africaine ont un taux de chômage très proche de celui des immigrés de même origine (22 % en 2012). (...)

    Femmes : une participation accrue au marché du travail.

    Entre 2007 et 2012, la participation des femmes au marché du travail s’est légèrement accrue pour toutes les origines. (...) L’espérance d’activité des descendantes d’immigrés est, pour chaque origine, plus élevée que celle des femmes immigrées, surtout pour les origines non européennes : depuis 2007, l’écart est compris entre 5 et 9 années pour ces dernières alors qu’il n’est que de 2 à 3 années pour celles d’origine européenne. (...)
    La fréquence du travail à temps partiel parmi les femmes descendantes d’immigrés en emploi (28 % en 2012) est assez proche de celle des femmes non issues de l’immigration (29 %). (...) Les femmes descendantes d’immigrés travaillent moins souvent à temps partiel que les femmes immigrées (36 %), et cela quelle que soit leur origine géographique. (...)

    Contrats temporaires : les descendants d’immigrés d’origine africaine sur-exposés à la précarité.

    En 2012, 15,8 % des salariés descendants d’immigrés ont un contrat temporaire (16,0 % des hommes et 15,6 % des femmes), travaillant en intérim ou avec un contrat à durée déterminée. C’est presque autant que les immigrés (16,6 %) et sensiblement plus que les personnes non issues de l’immigration (12,8 %). (...) La situation est par ailleurs très contrastée selon la région d’origine. Les descendants d’immigrés originaires d’Europe ne sont pas plus souvent en contrat temporaire (13 % des emplois salariés pour les 15-64 ans) que les personnes non issues de l’immigration, tandis que ceux originaires d’Afrique ou d’un autre continent non européen le sont beaucoup plus souvent (respec- tivement 20 % et 25 %). (...)

    Professions exercées : des emplois globalement plus qualifiés que ceux des immigrés, mais une répartition non-uniforme et variable selon l’ascendance.

    En moyenne sur les années 2010-2012, alors que 8,3 % de l’ensemble des emplois des 15-64 ans sont occupés par des descendants d’immigrés, ces derniers représentent de 10 % à 13 % des effectifs dans 17 familles professionnelles sur 87, dont plus de 11 % dans 6 d’entre elles : agents administratifs et commerciaux des transports et du tourisme, caissiers et employés de libre-service, employés et agents de maîtrise de l’hôtellerie et de la restauration, employés de la banque et de l’assurance, employés et opérateurs de l’informatique, vendeurs. Parmi les 20 métiers où les descendants d’immigrés sont les plus présents figurent 5 métiers, où les professions intermédiaires ou indépendants sont majoritaires : professionnels de l’action culturelle, sportive et surveillants, formateurs, maîtrise des magasins et intermédiaires de commerce, techniciens de la banque et des assurances, attachés commerciaux et représentants. Les 15 autres sont des métiers comprenant majoritairement des employés ou ouvriers, qualifiés pour 12 de ces métiers et non qualifiés pour 3 d’entre eux.
    Ces caractéristiques sont assez différentes de celles des métiers exercés par les immigrés. Les 20 métiers où les immigrés sont les plus présents comprennent beaucoup plus souvent des postes non qualifiés d’employés ou d’ouvriers en majorité (10 d’entre eux, contre 3 pour les descendants d’immigrés).
    Parmi les 20 métiers où les descendants d’immigrés sont les plus présents, ceux d’origine africaine sont très surreprésentés parmi les professionnels de l’action culturelle et sportive, ainsi que parmi les employés et opérateurs de l’informatique : ils y représentent environ 50 % des descendants d’immigrés, contre 30 % dans l’emploi total. Parmi les descendants d’immigrés, ceux originaires d’Europe sont relativement nombreux à être ouvriers qualifiés de la mécanique, du second œuvre du bâtiment ou travaillant par enlèvement du métal ou par formage de métal, ainsi qu’employés de la comptabilité : ils représentent environ 70 % des descendants d’immigrés dans ces secteurs contre 63 % pour l’emploi total. Quant aux descendants d’immigrés originaires d’un autre continent hors Europe, ils représentent 15 % des descendants d’immigrés parmi les employés et agents de maîtrise de l’hôtellerie et de la restauration, soit 2 fois plus que dans l’emploi total.

    Une ségrégation professionnelle moins forte que celle des immigrés, mais encore très marquée pour les descendants d’immigrés non-européens.

    La « ségrégation professionnelle » se réfère ici à la mesure d’une distance entre les répartitions par métiers des descendants d’immigrés et des personnes non issues de l’immigration. Elle est mesurée à partir de la nomenclature des familles professionnelles (87 postes) en mobilisant l’indice de dissimilarité de Duncan et Duncan [Cet indice s’interprète comme le pourcentage de descendants d’immigrés en emploi qui devraient changer de profession pour obtenir une répartition identique à celle de la population non issue de l’immigration. Plus l’indice est proche de 100 %, plus la ségrégation professionnelle est élevée, plus il est proche de 0 %, plus la répartition des professions entre les deux populations d’actifs occupés est proche.] Plus ces répartitions sont proches, moins importante est la ségrégation. Cet indice ne doit pas être interprété en termes de discrimination mais en termes de différences de répartition par métiers.
    La ségrégation professionnelle dans les métiers entre les descendants d’immigrés et les personnes non issues de l’immigration est peu importante : sur les années 2010-2012, l’indice s’élève à 10 % (12 % pour les hommes et 10 % pour les femme. C’est une valeur très inférieure à l’indice de ségrégation entre les femmes et les hommes pour l’ensemble des personnes en emploi quelle que soit leur origine (53 %) et à celui entre immigrés et non immigrés (26 %). La structure par métier de l’emploi des descendants d’immigrés est donc beaucoup plus proche de celle des personnes non issues de l’immigration que ne l’est celle des immigrés : il suffirait que 10 % des descendants d’immigrés changent de métier pour aboutir à une répartition des descendants d’immigrés dans les métiers similaire à celle des actifs occupés non issus de l’immigration.
    L’indice de ségrégation entre descendants d’immigrés et personnes non issues de l’immigration est toutefois nettement plus faible pour les descendants d’immigrés d’origine européenne que pour ceux originaires d’Afrique, et plus encore pour ceux originaires d’un autre
    continent hors Europe, et cela pour les hommes comme pour les femmes. Ainsi, alors que seulement 10 % des descendants d’immigrés d’origine européenne devraient changer de profession pour parvenir à une répartition par métiers identique à celle des personnes non issues de l’immigration, ce serait le cas de 19 % de ceux originaires d’Afrique et de 23 % de ceux originaires d’un autre continent non européen.
    Pour les immigrés, la ségrégation professionnelle est moindre pour ceux d’origine européenne que pour les autres, avec des écarts entre origines d’ampleur plus réduite que pour les descendants d’immigrés.

    #immigration
    #inégalités
    #travail
    #intégration
    #structure_sociale
    #indice_de_dissimilarité

  • Qu’est-ce qui force au travail forcé ? | OIT

    http://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---ed_norm/---declaration/documents/publication/wcms_243391.pdf

    L’étude :

    The current analysis is based on surveys carried out in eight countries [Guatemala, Nepal, Niger, Bolivia, Côte d’Ivoire, Armenia, Georgia, Republic of Moldova], with three different target groups: all members of a household (5 years of age and above); children (5 to 17 years of age); and returned adult migrants. These three populations were chosen according to the form of forced labour that was more likely to take place in the country. The main purpose of this chapter is to study the factors that make individuals vulnerable to forced labour.

    La définition du travail forcé selon l’OIT :

    According to the ILO’s survey guidelines, an individual is considered to be working in forced labour if he or she was not freely recruited and faced some form of penalty at the time of recruitment, had to work and lives under duress and the menace of any penalty or cannot leave the employer because of the menace of a penalty (…)

    Les hommes plus exposés que les femmes :

    The counter-intuitive finding of the study is that women and girls are generally less likely to be in forced labour irrespective of their age. Being female as opposed to male reduces the probability of a household member aged 5 or older being in forced labour by 0.21 percentage points (in the Niger), to 9.89 percentage points (in Guatemala). (…)

    Un effet protecteur de l’éducation :

    With the exception of Guatemala where, surprisingly, the literate were more likely to be in forced labour (4.14 percentage points), being literate leads to a maximum 1.15 percentage point decrease in the probability of household members being in forced labour. Individuals in households with literate heads were less likely to be in forced labour. For children, what matters is the literacy and education level of the household’s decision-maker. (…)
    The education of the fathers, which impacts household income, has a negative effect on forced labour. Having an educated father reduces the probability of an employed child ending up in forced labour by 0.17 per cent in the Plurinational State of Bolivia to 2.82 per cent in Côte d’Ivoire. If a child is in a household with an educated mother, the decrease can be by about as much as 5.65 per cent. (…)

    Un fort effet des chocs de revenu et de la faim :

    Direct measures of wealth are not used in the estimation model due to the importance of credit in the measurement of forced labour. Instead, measures such as income shocks and food security are used. (…) In terms of food security, data were only available for Nepal where food security had a negative effect on the probability of household members ending up in forced labour. This effect is extremely high, about 5.57 percentage points for household members as a whole, irrespective of their age, and about 13.77 percentage points for children. (…)

    Pour les migrants revenus au pays, deux puissants facteurs de risque : être endetté...

    In the surveys that targeted returned migrants, no direct information was available on the income levels of the migrants prior to migration. The only information that could be used as proxy is whether they borrowed to finance their trip. Borrowing from third parties, even from relatives and friends as opposed to not borrowing at all, leads to an increase in the probability that an individual will end up in forced labour. While borrowing in itself has a significant impact on the individual’s vulnerability to forced labour, the amount borrowed appears not to have much impact. Those who borrowed from relatives and friends as opposed to not borrowing faced an increase in the probability of being in forced labour by about 0.35 percentage points in the Republic of Moldova to 8.43 percentage points in Armenia. (…)

    … et être un travailleur agricole :

    Skilled agricultural workers faced an increase in probability of being in forced labour across all three countries due to their occupation as opposed to being in the reference occupations. The returned migrants in the Republic of Moldova and Armenia faced between a 0.83 percentage point and a 37.54 percentage point increase in probability of being in forced labour if they were skilled agriculture workers as opposed to workers in professional occupations. In Georgia, they faced a 23.50 percentage point increase in their probability of being in forced labour if they were in skilled agriculture as opposed to professional occupations.

    (p. 29 sqq.)

    #travail
    #travail_forcé
    #exploitation

    • Je n’en suis pas sûr. Le rapport comporte trois parties.
      La première cherche à mesurer l’ampleur du travail forcé au niveau mondial. La prostitution y est prise en compte : « Dans l’étude de 2012, on estime que 22 pour cent des personnes en travail forcé sont victimes d’exploitation sexuelle et 68 pour cent sont victimes de travail forcé dans des activités économiques telles que l’agriculture, la construction, le travail domestique ou le secteur manufacturier » (résumé en français, http://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---ed_norm/---declaration/documents/publication/wcms_243425.pdf).
      La deuxième partie cherche à mesurer les profits induits par le travail forcé. La prostitution est également prise en compte : « on estime que le total des profits tirés du travail forcé dans l’économie privée mondiale s’élève à 150 milliards de dollars par an. La majeure partie des profits est générée en Asie, dont deux tiers provenant de l’exploitation sexuelle. »
      La troisième partie, celle que je cite ici, ne porte pas sur le même corpus de données globales : elle repose sur plusieurs enquêtes locales. Je ne pense pas que la prostitution ait été mise à l’écart - le rapport ne le dit pas explicitement - mais il y a sans doute un biais dans le choix des terrains (plutôt ruraux, hors Europe, Amérique du Nord et Asie du Sud-Est, etc.), qui limite le poids du travail sexuel forcé.

  • Articulation emploi / famille : une comparaison européenne | femmes.gouv.fr

    http://femmes.gouv.fr/dossiers/partage-des-responsabilites-professionnelles-et-familiales/les-fiches-synthetiques/la-situation-comparee-en-europe-en-matiere-de-partage-des-taches-profess

    Le modèle nordique Les pays nordiques, dans lesquels l’Organisation internationale du travail inclut la France, se caractérisent par une abondante législation nationale sur les congés maternité/paternité/parental, le travail à temps partiel et des dispositifs de garde d’enfants financés par l’État, ils s’appuient fortement sur le secteur public pour aider les jeunes parents à concilier les temps de vie. (...)
    Le modèle anglo-saxon Ce modèle s’applique dans les pays à faible présence du secteur public et repose principalement sur la flexibilité de leur marché du travail et sur leurs entreprises pour proposer des conditions de travail qui s’articulent avec la vie familiale. (...)
    Le modèle corporatiste. Dans des pays tels que les Pays-Bas, ce sont les partenaires sociaux qui négocient les politiques d’articulation des temps de vie. (...)
    Le modèle familialiste Des pays tels que la Pologne, les pays d’Europe du Sud confient principalement aux familles le soin de gérer la question de l’équilibre des temps de vie. (...) Ces pays disposent de généreux congés de maternité et parentaux qui affectent souvent les carrières des femmes qualifiées. Ce modèle a fait l’objet depuis 1990 de nombreuses réformes liées à des coupes budgétaires notamment au niveau du financement des services de garde d’enfants (États et entreprises). Ce contexte associé à une législation « protectrice » des femmes, a augmenté la difficulté d’équilibrer l’articulation entre travail et vie familiale en transférant de plus en plus les responsabilités sur les familles.

    Quelques données pour des pays typiques de chacun des modèles :

    Ecart temps de travail domestique femmes / hommes (en heures par semaine, en 2005) : Danemark +10,1 / RU +18,2 / Pays-Bas +22,3 / Grèce +21,7 / Moyenne UE +17,7
    Ecart temps de travail rémunéré femmes / hommes : Danemark -6,5 / RU -12 / Pays-Bas -13,7 / Grèce -9 / Moyenne UE -7,4

    #travail
    #famille
    #division_sexuelle_du_travail
    #genre

  • Evolution des pratiques contraceptives : les femmes précaires sont, de fait, moins bien protégées | INED

    http://www.ined.fr/fr/ressources_documentation/publications/pop_soc/bdd/publication/1685

    Les pilules contraceptives de 3e et 4e génération ont fait l’objet d’un débat médiatique en France à partir de décembre 2012 à propos du risque de thrombose veineuse profonde associé à leur utilisation. Elles ont cessé d’être remboursées par la Sécurité sociale depuis mars 2013. L’enquête Fécond permet d’étudier l’impact de ces événements sur les pratiques contraceptives (…).
    Aucune désaffection vis-à-vis de la contraception n’a été observée : parmi les femmes concernées par la contraception – ni stériles, ni enceintes, ayant des rapports hétérosexuels et ne voulant pas d’enfant – seules 3 % n’utilisent aucune contraception, soit la même proportion qu’en 2010. Les méthodes utilisées pour éviter une grossesse ont cependant évolué. (…) Le recours à la pilule a baissé, passant de 50 % à 41 % entre 2010 et 2013. Cette diminution prolonge celle de 5 points observée entre le milieu des années 2000 et l’année 2010. En l’espace d’une décennie, le recours à la contraception orale a ainsi reculé
    de 14 points en France. (…)
    Les femmes sans aucun diplôme ont davantage que les autres délaissé les pilules récentes au profit des méthodes les moins efficaces (dates, retrait), tandis que celles qui détiennent un CAP ou un BEP ont opté pour le préservatif, et les plus diplômées (Bac + 4) pour le DIU [stérilet].
    Les femmes cadres qui étaient auparavant les principales utilisatrices des pilules de 3e et 4e génération, ont compensé la baisse du recours à la pilule en se tournant vers le stérilet et, pour certaines, vers des méthodes dites naturelles (dates, retrait), sans doute par rejet de toute contraception à base d’hormones. À l’autre extrémité de la hiérarchie sociale, les femmes ouvrières, initialement moins enclines à recourir aux contraceptifs de nouvelle génération, n’ont pas modifié leurs pratiques contraceptives. Quant aux femmes de professions intermédiaires et techniciennes, elles ont délaissé les pilules de 3e et 4e génération pour un recours plus fréquent aux contraceptifs de 2e génération et au préservatif ; les employées se sont tournées vers le préservatif.
    Plus largement, tandis que les femmes n’ayant pas de difficultés financières ont opéré un transfert partiel des nouvelles pilules vers les contraceptifs oraux plus anciens, celles dans une situation financière difficile se sont en partie tournées vers les méthodes dites naturelles. C’est le cas notamment des femmes nées dans un pays d’Afrique subsaharienne qui ont fortement réduit leur usage des pilules (– 39 %) pour se tourner vers ces méthodes (26 % en 2013 contre 5 % en 2010).
    (…) Les effets de la crise économique sur les pratiques contraceptives, déjà notables entre 2000 et 2010 pour les 20-24 ans, semblent désormais concerner l’ensemble de la population. Les catégories sociales les plus précaires ont de fait une couverture contraceptive moins efficace aujourd’hui en raison d’un moindre recours à la pilule et d’une plus grande utilisation de méthodes dites naturelles. Certes, les pilules de 2e génération sont toutes remboursées, de même que le stérilet et l’implant, et certaines pilules de 3e génération sont aujourd’hui des produits génériques moins coûteux. Cependant, l’avance du prix d’une consultation médicale peut poser problème, notamment pour les jeunes femmes qui souhaitent que leur pratique contraceptive soit confidentielle et ne tiennent donc pas à faire apparaître une consultation médicale sur l’assurance sociale de leurs parents. Enfin, il faut rappeler que le préservatif, une des principales méthodes de contraception utilisée en début de vie sexuelle, n’est pas remboursé. L’enjeu de la gratuité de l’accès aux méthodes de contraception, un des freins de l’accès aux méthodes les plus efficaces, est donc plus que jamais d’actualité.

    #inégalités
    #sexualité
    #famille

  • Islamophobie : les données disponibles | Marwan Mohammed

    http://sociologie.revues.org/2108

    Cet ensemble de connaissances sur le rejet des musulmans s’est développé dans le sillage d’enquêtes d’opinion internationales comme le Pew Global Attitudes Project, l’Eurobarometer, l’European ou la World Values Study, menées pour certaines depuis le début des années 1980. (...) En France, ce type d’enquêtes d’opinion est piloté depuis 1990 par la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) et exploité par plusieurs politologues spécialistes des questions identitaires et électorales. Si elles ne sont pas exemptes de critiques liées à leurs commanditaires, à leurs finalités ou à la méthodologie utilisée, ces enquêtes d’opinion jouent, depuis une décennie, un rôle important dans l’objectivation de l’un des volets de l’islamophobie et sa reconnaissance comme fait social. Plusieurs tendances se dégagent de ces enquêtes. D’une part, le fait que les opinions négatives à l’égard de l’islam et des musulmans sont stables et relativement autonomes, c’est‑à‑dire peu sensibles aux variations (notamment la décrue) d’autres formes d’intolérance. Parmi les marqueurs de la religiosité musulmane, le rejet du port du foulard est particulièrement vif. Symbole du « problème musulman » depuis 1989 (année de la première controverse sur le « voile islamique »), son rejet est massif et les opinions négatives atteignent des sommets en 2003, au moment des débats qui ont précédé le vote de la loi du 15 mars 2004. Le port du foulard est le signe d’islamité le plus rejeté, ce que corroborent d’autres instruments de mesure de l’islamophobie. Mais au-delà du « foulard islamique », c’est l’ensemble de la ritualité musulmane qui est l’objet d’une hostilité croissante. Les interdits alimentaires, qui cumulaient 13 % d’opinions défavorables en 2003, suscitent le rejet d’un tiers des répondants en 2011. L’observance du ramadan indispose 26 % des sondés contre 21 % en 2003. Enfin, le sacrifice du mouton lors de la fête de l’Aïd suscite 37 % d’opinions négatives en 2011 contre 25 % en 2003.
    Depuis le début des années 2000, d’autres données sont mobilisables pour se faire une idée des manifestations d’islamophobie en France. Deux organismes enregistrent les saisines des victimes : le ministère de l’Intérieur et le Collectif Contre l’Islamophobie en France (CCIF). En tendance, les courbes du ministère de l’Intérieur et du CCIF se ressemblent et convergent pour dessiner une tendance à l’accroissement continue depuis 2008. Leurs variations se révèlent sensibles à l’agenda médiatique et politique concernant le « problème musulman ». Un pic est identifiable en 2004 et peut être associé aux travaux fort médiatisés de la commission Stasi ayant donné lieu au vote de la loi interdisant les signes religieux ostensibles à l’école publique ; la poussée de 2009 est concomitante des controverses sur l’interdiction du voile intégral et du lancement du débat sur l’identité nationale.
    De nouveaux révélateurs statistiques permettent aujourd’hui de mieux objectiver l’expérience de l’islamophobie en interrogeant l’existence de discriminations en raison de l’appartenance religieuse. Plusieurs enquêtes de victimation européennes établissent aujourd’hui un tableau assez sombre de la condition de diverses minorités, notamment musulmanes12. En France, l’essor de la thématique des discriminations (Fassin, 2002) dont l’enquête TeO est l’un des aboutissements permet de questionner l’existence d’une « pénalité musulmane » (Simon & Stavo‑Debauge, 2004 ; Lesné & Simon, 2012)13. À l’échelle nationale, le motif religieux est très peu mobilisé pour expliquer la discrimination (moins de 1 %). Sa mobilisation est corrélée à l’importance que lui accordent les individus, notamment 5 % des musulmans et près d’un juif sur six, les deux populations qui déclarent l’attachement le plus intense à la religion et à la pratique du culte. Rapporté à leur poids dans la population enquêtée (7 %), il ressort qu’un peu plus d’un enquêté sur deux déclarant avoir été discriminé pour motif religieux est musulman, notamment les femmes. En effet, au sein de cette population, ils sont 38 % à affirmer porter un signe religieux repérable, alors que cette religiosité visible (tous signes confondus) n’est déclarée que par 21 % de l’ensemble des musulmans de l’enquête.
    Une autre approche consiste à postuler une « condition » collective liée à une expérience partagée (N’diaye, 2008). L’importance que les musulmans accordent à la religion dans l’enquête TeO plaide en faveur de cette approche dont les limites sont nombreuses. L’élaboration d’une « condition musulmane » est ici une opération statistique qui ne doit en rien occulter la pluralité des modes d’appartenance ou bien la dimension cumulative des désavantages sociaux pour des populations avant tout ancrées au sein des classes populaires. En fait, l’association de la question des discriminations avec l’idée de condition collective s’opère par la jonction d’une logique d’identification avec une logique de racialisation en fonction du signe religieux (Amiraux, 2008). Au final et par effet d’accumulation, le niveau des discriminations rapportées par les musulmans est « supérieure d’environ 50 % comparativement aux personnes se déclarant sans religion ». Signalons pour finir, l’enquête par testing menée en France par Claire Adida, David Laitin et Marie‑Anne Valfort qui ont comparé le potentiel d’accès à l’emploi de deux Françaises, l’une musulmane et l’autre chrétienne, toutes deux noires de peau et originaires du Sénégal, dont les CV se distinguaient par deux marqueurs religieux. Résultat, pour 100 réponses positives obtenues par Marie Diouf, Khadija Diouf en obtient seulement 38, autrement dit, la candidate musulmane a 2,5 fois moins de réponses positives que la candidate chrétienne.
    La multiplication, la diversification et surtout la convergence des outils de mesure de l’islamophobie au cours des années 2000 tranchent toutefois avec le désintérêt relatif du monde académique et du champ politique français à l’égard de ce phénomène, notamment au regard du dynamisme des sciences sociales anglophones.

    #stigmatisation
    #minorités
    #islamophobie
    #musulmans

  • Islamophobie : la construction d’un « problème musulman » | Marwan Mohammed

    http://sociologie.revues.org/2108

    Cette notion d’islamophobie (...), nous la définissions avec Abdellali Hajjat (Hajjat & Mohammed, 2013) comme un processus complexe d’altérisation qui s’appuie sur le signe de l’appartenance réelle ou présumée à la religion musulmane. Par altérisation, nous pointons le fait de réduire l’agir social des musulmans, réels ou présumés, à un agir religieux essentialisé, en effaçant ou en atrophiant la pluralité et la complexité identitaires et communautaires de cette population. (…) Nous considérons que l’islamophobie est l’une des conséquences de la construction d’un « problème musulman » dont l’enjeu fondamental est la légitimité présentielle des musulmans, notamment ceux issus de l’immigration post‑coloniale sur le territoire national ou certains de ses espaces. (…)
    En France, depuis le début des années 1980, cette croyance en l’existence d’un « problème musulman » se décline de manière moins brutale, au gré de controverses publiques connectant de multiples enjeux : un problème « d’intégration » au regard de la reproduction intergénérationnelle d’une certaine religiosité jugée incompatible avec les conceptions majoritaires de la citoyenneté ou de l’identité nationale ; un problème de modernité en raison de présumées incompatibilités des musulmans avec la démocratie, la laïcité ou l’égalité entre les sexes ; une peur du débordement démographique articulée au « mythe de l’islamisation » (Liogier, 2012) ; un problème de sécurité centré sur la construction d’une menace terroriste de référence islamiste (Bigo, Deltombe & Bonelli, 2008). Les débats publics reposent sur une dichotomisation et une essentialisation radicales de l’islam et des musulmans. Les discours et la mise en image participent de la construction d’un « islam imaginaire », tour à tour opposé à la « République », à « l’État », à la « laïcité » ou à la « Nation » (Deltombe, 2005). Les « musulmans », quant à eux, s’ils ne sont pas opposés aux « Français », sont fréquemment divisés en deux grandes catégories : les « intégristes » (« islamistes » ou « fondamentalistes ») d’un côté et les « modérés » de l’autre (Geisser, 2003). Un binarisme et des logiques d’essentialisation, en total décalage avec la nuance ou la complexité qu’apportent les études en sciences sociales, de plus en plus nombreuses, sur le fait musulman. (…)
    Un cadrage aux effets politiques et sociaux concrets, notamment sur la vie quotidienne de millions de musulmans réels ou présumés. En effet, les solutions politiques suggérées ou apportées au « problème musulman » en Europe, au moins depuis le 11 septembre 2001, penchent nettement vers une logique de contrôle, d’exclusion ou de disciplinarisation (Fournier, 2013 ; McGoldrick, 2006). Valérie Amiraux rappelle ici que l’accumulation des controverses publiques liées à l’islam en Europe a eu pour effet de systématiser l’interdiction légale ou la réprobation publique des vêtements islamiques féminins. La sauvegarde des valeurs nationales, qui seraient fragilisées par l’irruption publique de référentiels musulmans (vestimentaires, institutionnels, cultuels, etc.) passe désormais par leur disqualification symbolique et sociale et leur encadrement juridique. En France, cela prend la forme du bannissement des filles ou des mères voilées de l’école publique, des femmes en niqab de l’espace public, et plus largement, par le déploiement d’une volonté de rejet – fortement genré (Deeb, 2010 ; Mirza, 2013) – de toute expression de l’islam dans le monde du travail, dans l’univers du « care » ou à l’université. Avec Abdelalli Hajjat, nous avons parlé de processus de discrimination légale par capillarité dans la mesure où les arguments juridiques et politiques au fondement des premières interdictions sont réinvestis dans les nouveaux espaces sociaux dans lesquels se développent de nouvelles mobilisations de type prohibitionniste. (…)

    #stigmatisation
    #minorités
    #islamophobie
    #musulmans

  • Multinationales et pays pauvres : les coûts sociaux de l’évasion fiscale et des avantages fiscaux | Oxfam

    http://www.oxfamfrance.org/rapports/justice-fiscale/reforme-fiscale-internationale-petits-arrangements-entre-amis

    Les pertes de revenus dues à l’évasion fiscale des entreprises affectent surtout les pays pauvres, les recettes tirées de l’impôt sur les sociétés représentant la plus grande part de leur revenu national. (...)
    La situation est critique dans les pays africains. D’après l’Africa Progress Panel, entre 2008 et 2010, les techniques de manipulation des prix [entre filiales, une technique d’évasion fiscale] ont représenté chaque année une perte moyenne de 38,4 milliards de dollars pour les pays africains, soit un manque à gagner fiscal de plusieurs milliards de dollars. Au Bangladesh, chaque année, l’État perd environ 310 millions de dollars de recettes fiscales. Au Pérou, un audit de l’administration fiscale sur seulement 27 cas de prix de transfert en 2013 a révélé des gains non déclarés de 350 millions de dollars, soit une évasion fiscale d’environ 105 millions de dollars.
    L’impôt sur les sociétés est primordial dans les pays en développement. Il représente une part importante des recettes fiscales totales (environ 18 %) dans les pays à bas revenus et à revenu intermédiaire faible. (...)
    Désespérés d’attirer l’investissement étranger direct et craignant de voir les contrats leur échapper, de nombreux pays en développement acceptent souvent les conditions inéquitables imposées par les puissantes multinationales lors des négociations. (...) Ces avantages fiscaux discrétionnaires contribuent aux inégalités. Ils instituent une dynamique de « deux poids, deux mesures » entre les entreprises du pays et les sociétés internationales qui n’apporte pas la moindre valeur sociale et génère moins de recettes à investir dans des services publics comme la santé et l’éducation, qui s’avèrent pourtant essentiels pour réduire les inégalités économiques.
    Prenons le cas de la Sierra Leone, théâtre d’inégalités économiques flagrantes. En 2011, l’État a plus perdu en avantages fiscaux qu’il n’a dépensé pour ses priorités de développement. En 2012, la dépense fiscale représentait 59 % du budget total de l’État, soit huit fois le budget de la santé et sept fois le budget de l’éducation.
    Si l’Éthiopie pouvait récupérer ne serait-ce que 10 % de la somme que le pays perd chaque année par l’entremise des exonérations fiscales, 1,4 million d’enfants supplémentaires pourraient être scolarisés.

    #FMN
    #IDE
    #concurrence_fiscale
    #évasion_fiscale
    #développement

  • 25 ans de participation des hommes et des femmes au travail domestique : quels facteurs d’évolutions ? | INED

    http://www.ined.fr/fichier/t_publication/1673/publi_pdf1_doc_travail_2014_203_travail_domestique_genre.pdf

    Constat : une égalisation (toute relative) du partage des tâches domestiques et parentales.

    Au cours des 25 dernières années, on constate que les hommes se sont davantage impliqués dans l’éducation des enfants, tandis que leur participation dans les autres tâches domestiques est restée stable. Les femmes ont également consacré davantage de temps aux activités parentales mais sensiblement moins à l’entretien domestique. Elles délaissent ainsi progressivement leur rôle de ménagère pour celui de mère éducatrice.

    Les tâches demeurent cependant fortement sexuées.

    (…) Au sein du travail domestique, les tâches demeurent très sexuées : les tâches plus répétitives comme le ménage, le linge et la cuisine pour les femmes, les tâches plus occasionnelles comme le bricolage et le jardinage pour les hommes (Segalen, 2013 ; Pfefferkorn, 2011). On observe cependant dans la dernière décennie une réduction de cette spécialisation des tâches (Ricroch, 2012). Elle tient principalement de la baisse du temps consacré par les femmes à la cuisine, à la couture et au linge. (…)
    Les tâches parentales sont tout aussi sexuées (De Saint Pol et Bouchardon, 2013). Près des trois- quarts des soins aux enfants, de leur suivi scolaire ou de trajet d’accompagnement sont ainsi réalisés par les mères. Seules les activités de jeux et de socialisation des enfants sont également partagées entre hommes et femmes.

    Cette évolution résulte moins d’un effet de structure que d’une transformation des normes : relâchement des exigences en matière d’entretien domestique, accroissement des exigences éducatives.

    Afin d’analyser les facteurs à l’origine des évolutions des temps domestiques et parentaux au fil du temps, et de dégager ce qui tient des changements de comortements et ce qui tient des évolutions structurelles, nous décomposons les évolutions moyennes observées entre deux dates selon la méthode d’Oaxaca. La première composante rend compte de l’évolution des caractéristiques de la population : différences de structure d’âge, de composition familiale, d’activité professionnelle, de niveau d’instruction, d’équipement domestique, de niveau d’externalisation des tâches ou de type de logement. La deuxième composante correspond à l’évolution des comportements ou pratiques, à caractéristiques observables de la population fixées.
    La majorité des évolutions du temps domestique tiennent plus aux changements des comportements qu’aux effets de composition. Ainsi, à situation familiale donnée, les pratiques ont changé : par exemple, entre 1999 et 2010, la charge domestique des femmes en union libre s’est rapprochée de celle des femmes mariées. Cela peut s’expliquer par un moindre effet de sélection des femmes vivant en union libre au fil du temps. Quand la cohabitation en était à ses débuts, ces femmes pouvaient avoir des valeurs plus modernes que les femmes mariées. Avec la diffusion de la cohabitation, ces femmes sont moins sélectionnées. Cela s’explique aussi par la diffusion des comportements plus modernes quelle que soit la situation familiale. Finalement, la majeure partie des changements n’est pas due à des évolutions de comportements au sein d’une catégorie particulière de population, mais concerne l’ensemble des femmes. Cela peut refléter un changement de normes –ou un affaiblissement des injonctions– en matière de propreté, sur ce qui est « convenable » ou « présentable ». Porter un vêtement un peu froissé, faire réchauffer un plat tout prêt, ne pas avoir un intérieur impeccablement propre et rangé, est sans doute aujourd’hui plus toléré que dans le passé. Apparaître comme libérée des contingences ménagères peut même être valorisé dans les classes supérieures. (…)
    Comme pour le temps domestique, ce sont surtout les changements de comportements qui expliquent les variations du temps parental sur le long terme. Ces changements importants de pratique montrent que pour hommes, comme pour les femmes, le temps avec les enfants est devenu un temps dans lequel on investit, qu’on souhaite conserver quitte à passer moins de temps aux tâches domestiques. Ce plus grand engagement paternel et maternel traduit la volonté des couples contemporains de s’investir dans la relation affective avec leurs enfants (Bergonnier-Dupuy et Robin, 2007). Il traduit aussi l’accroissement des devoirs parentaux et l’essor des exigences éducatives, comme en témoignent les nouvelles normes sur l’allaitement des nouveaux nés et l’implication des enfants dès leur plus jeune âge dans des activités de développement, tant physique, social qu’artistique.

    #travail
    #famille
    #normes_sociales
    #rôles_sociaux
    #division_sexuelle_des_tâches
    #genre
    #inégalités

  • Egypte : l’armée systématise les violences sexuelles | Mediapart

    http://www.mediapart.fr/journal/international/100514/egypte-larmee-systematise-les-violences-sexuelles-pour-reprimer-la-jeuness

    Viols, doigts dans l’anus, électrocution des parties génitales, attouchements, « tests de virginité », tests de grossesse, séances de déshabillages collectifs, menaces de viol sur les proches et la famille : par-delà les opposants au régime désigné par le général al-Sissi, les activistes ou les journalistes, ils sont des milliers de jeunes à être livrés en pâture à ce qui apparaît de plus en plus comme une gigantesque entreprise d’humiliation sexuelle collective. (…)
    « En Égypte, la violence sexuelle est ce qu’il y a de pire pour les gens, explique Farah Shash, chercheur au centre Nadeem, l’une des plus importantes ONG de lutte contre la torture. Cela casse l’honneur de toute la famille. Les gens sont très pauvres, ils n’ont rien, pas d’argent : ils n’ont que leur honneur. On peut faire avouer n’importe quoi à quelqu’un dont on menace de violer la femme, la sœur, ou que l’on humilie sexuellement. C’est cela leur but : te casser au point où tu ne puisses pas te relever, c’est un traumatisme inimaginable. Nous savons que des filles ont affirmé avoir été violées (notamment celles arrêtées dans les rafles d’Al-Azhar et d’Alexandrie), mais on n’a pu obtenir aucune preuve : les familles refusent de parler. » (…)
    « C’est une répression sexuelle qui touche tout le monde : islamistes et laïcs, hommes et femmes, et même enfants et adolescents, affirme Ahmed Mefreh de l’ONG suisse Karama. Mais il est très difficile que les victimes acceptent de témoigner nommément, les familles refusent de donner les noms. Nous avons trois cas de viols de femmes documentés et des indications de dizaines d’autres, deux viols d’hommes reconnus nommément, mais on a des dizaines de cas d’agressions sexuelles par semaine, de viols d’hommes et femmes pendant les interrogatoires dans les prisons secrètes dans le désert, parfois avec des bâtons en bois. » (…)
    Le phénomène jette une lumière complexe sur le fléau du harcèlement sexuel qui plombe la vie des Égyptiens et des Égyptiennes. Il suggère que la violence sexuelle en Égypte participe d’un système général de domination, rendu possible et pratiqué au premier chef par le pouvoir et les services de sécurité et qui atteint aujourd’hui un niveau sans égal.
    « Nous sommes aujourd’hui convaincus que les viols collectifs place Tahrir ont été organisés par les forces de sécurité, affirme Farah Shash, du centre Nadeem contre la torture. Les agresseurs agissent selon une méthode identique pour chaque agression, en cercles concentriques : c’est d’ailleurs très visible sur les vidéos. Ils ont une méthode très précise : des dizaines d’hommes se focalisent sur une seule fille, il peut y en avoir dix autour dans la foule mais elles ne sont pas embêtées alors qu’elles sont à côté. La femme agressée n’est jamais volée : son sac à dos et ses affaires sont intacts. L’utilisation de la violence sexuelle est une stratégie qui remonte à la montée de la contestation contre Moubarak, en 2005. »
    Abdel Fattah al-Sissi, premier défenseur des « tests de virginité » et dont le programme politique se résume pour l’instant à des protestations de virilité, incarne à lui seul, de ses meetings à ses affiches électorales, cette relation de plus en plus scabreuse tissée par leurs dirigeants avec les Égyptiens. (…) Le lancement de la campagne présidentielle coïncide d’ailleurs avec une série de raids et d’arrestations dans les milieux homosexuels, menés à grand renfort de fuites vidéo.

    #techniques_de_gouvernement
    #politiques_sexuelles
    #violence_politique
    #honte
    #honneur

  • 800 000 ans de hausse du taux de #CO2 dans l’air | Eco(lo)
    http://ecologie.blog.lemonde.fr/2014/05/09/la-hausse-du-taux-de-co2-dans-lair-depuis-800-000-ans-en-2-min

    On l’a dit : le cap symbolique des 400 parties par million (ppm) de dioxyde de carbone (CO2) atmosphérique a été atteint le 9 mai 2013. Une concentration record depuis plusieurs millions d’années. Mais un autre seuil a été franchi, cette fois en avril 2014 : pour la première fois, la concentration de CO2 a dépassé ce niveau un mois entier durant, selon les données de la station de Mauna Loa (Hawaï), qui appartient à l’agence américaine responsable de l’étude de l’océan et de l’atmosphère (NOAA). Un niveau sans précédent, comme le montre une animation réalisée par l’Institut coopératif de recherche en sciences de l’environnement, l’un des centres de la NOAA.

    http://www.youtube.com/watch?v=UatUDnFmNTY


    #pollution

  • Contrôles d’identité : la police sévèrement jugée
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2014/05/09/controles-d-identite-la-police-severement-jugee_4414062_3224.html

    Le premier sondage concerne « l’opinion sur les forces de l’ordre ». Il a été réalisé par OpinionWay en ligne auprès de 2 273 personnes représentatives de la population, selon la méthode des quotas, entre février et mars. Soixante-trois pour cent des personnes interrogées pensent que « les policiers et les gendarmes se livrent à des contrôles d’identité au faciès » et 53 % ne pensent pas que « la police et la gendarmerie traitent chaque personne de la même manière quelle que soit son origine ». Pourtant, seuls 16 % ont vu un policier et un gendarme traiter quelqu’un « de manière irrespectueuse » dans les douze derniers mois.

    Le deuxième sondage, réalisé dans les mêmes conditions auprès d’un échantillon élargi de 7 556 personnes, a isolé les 594 répondants qui ont fait l’objet d’au moins un contrôle lors des douze derniers mois. Sans surprise, les personnes d’origine maghrébine sont surreprésentées : elles constituent 7 % de la population générale, mais 12 % du nombre des personnes contrôlées. Le chiffre le plus spectaculaire concerne la fréquence des contrôles : en moyenne, les Français n’ayant pas d’ascendant étranger l’ont été 1,85 fois, contre 4,76 fois pour les personnes étrangères ou d’origine étrangère et 8,18 fois pour les personnes d’origine maghrébine.

    Heureusement qu’il y a des sondages…

    Occasion de reparler des #récépissés chers à l’ancien ministre de l’intérieur…

    Après l’élection de M. Hollande, le débat s’était cristallisé autour de la création d’un récépissé de contrôle d’identité, un modèle expérimenté à l’étranger mais jamais à l’échelle d’un pays comme la France. La mesure avait été rejetée par le ministre de l’intérieur d’alors, Manuel Valls. Trop compliqué, trop lourd, selon lui : « Je ne veux pas imposer un dispositif qui, très vite, tournerait au ridicule et serait inopérant », affirmait-il en juin 2012.
    (…)
    « Depuis deux ans, ces pratiques continuent. Le sentiment est que rien n’a été fait depuis que la gauche est au pouvoir. Il faut un outil qui permette de demander des comptes aux policiers », regrette Réda Didi, délégué général de Graines de France.

    L’article évoque l’enquête menée par l’Open Society Foundation, L’égalité trahie : l’impact des contrôles au faciès en France dont on pourra trouver le rapport en suivant ce lien http://seenthis.net/messages/179202

  • Les travailleurs des déchets : pénibilité, virilité, « bricoles », et autonomie | NRT

    http://nrt.revues.org/586

    La seconde partie du livre est centrée sur les conditions de travail des éboueurs. (…) En présentant le Ripeur comme « un travail d’aujourd’hui », [Serge Volkoff et Valérie Pueyo] insistent sur le fait que ce métier n’est pas un anachronisme, mais au contraire très représentatif des contraintes dans le travail d’aujourd’hui, telles qu’elles seront déclinées de manière très convergente dans les chapitres suivants : sollicitations physiques, gestion complexe des contraintes de rythme, préservation d’une harmonie au sein de l’équipe, prégnance des inter-actions avec les usagers. En nous décrivant sa première journée de travail en tant qu’éboueur au sein d’une entreprise privée en Belgique, F. Michel nous livre un témoignage convaincant de son extrême pénibilité. Il nous montre le rôle majeur qu’y joue la virilité – le « courage viril » – comme valeur donnant sens à cet univers professionnel. L’une des fonctions de la virilité est de protéger les jeunes recrues, en dissuadant les moins solides de s’engager dans le métier. Quant à Nadine Poussin, elle [met] au jour les conditions de l’ « élaboration collective du geste de métier ». Dans certains cas, les « bricoles » ou astuces inventées par les travailleurs pour être plus efficaces dans leur activité, notamment par reconversion des déchets comme outils de travail – les « raclettes », qui sont des pelles faites avec des cartons, ou des « barrages » utilisés lors du lavage des rues et confectionnés avec des morceaux de moquettes – font l’objet d’usages variables et de discussions entre eux. (...)
    La troisième et dernière partie du livre traite plus frontalement des identités professionnelles : « comment peut-on être travailleur des déchets », c’est-à-dire faire avec la dévalorisation sociale associée à la catégorie de déchets ? Dans la ville de Sao Polo (Angelo Soares), ce sont des migrants venus du Nord Est du pays – les nordestinos – qui occupent généralement ces emplois quand « toutes les autres portes se sont fermées ». Mais ce n’est pas un emploi situé tout en bas de l’échelle : il a le double avantage relatif d’être formel (déclaré et donnant donc droit à protection sociale) et – argument avancé par ceux qui disent l’avoir choisi – offrant une certaine liberté : absence de surveillance hiérarchique, exercice à l’air libre, ces dimensions sont avancées par des éboueurs de divers pays. L’auteur insiste aussi sur le plaisir et la souffrance qui sont spécifiquement liés à l’exercice du métier dans l’espace public. (…) Isabelle Gernet et Stéphane Le Lay s’intéressent quant à eux aux effets de la pénétration des femmes, encore très marginale (3 % des effectifs), mais significative, et des accommodements nécessaires des conduites viriles, tant du côté des hommes que du côté des femmes. Chez ces dernières, il s’agit soit de se rendre invisible en tant que femme, au risque d’être perçue par les hommes comme une lesbienne « masculine », soit de bien faire son travail, « comme dans sa cuisine », au risque d’être dépréciée par les hommes.

    #travail
    #ouvriers
    #genre

  • Social / sociétal : bullshit | Eric Fassin

    http://www.regards.fr/web/eric-fassin-il-faut-peser-plus-que,7707

    Vous récusez l’opposition classique entre social et sociétal. Pour quelles raisons ?

    Tout est social ! Il faut partir de cette proposition tautologique : la société est sociale ! Opposer classe et race ou classe et genre n’a pas de sens. Les retraites ? C’est social, nous dit-on. Mais les femmes sont les premières victimes des réformes des régimes de retraite. Les discriminations ? C’est sociétal, paraît-il. Pourtant, elles touchent d’abord des minorités visibles qui appartiennent aux classes populaires. Je récuse cette opposition, non seulement parce qu’elle est empiriquement fausse, mais aussi parce que, politiquement, c’est dangereux. Il y aurait des sujets sérieux, d’autres futiles ; des questions majeures, d’autres mineures. Mais une politique qui privilégie la classe au détriment du sexe et de la race, en pratique, c’est une politique de l’homme blanc. Il ne faut pas accepter l’alternative entre la vision de Terra Nova et celle de la Gauche populaire. Les deux s’opposent en apparence, mais se rejoignent sur un même partage du monde : d’un côté, le peuple, de l’autre, les minorités. Il faut proposer une image du peuple qui inclue les minorités, et non opposer une partie du peuple à une autre.

    #structure_sociale
    #classes_sociales
    #peuple
    #minorités

  • Comment appréhender le pouvoir « postdémocratique » des grandes entreprises
    http://multinationales.org/Comment-apprehender-le-pouvoir

    Le monde des entreprises et celui de la vie politique sont-ils vraiment aussi distincts et séparés qu’on le présuppose généralement ? Tout dans le monde d’aujourd’hui devrait nous inciter à remettre en cause l’incompatibilité de principe entre « marché » et « État », défendue à la fois par les néolibéraux et certains de leurs opposants. Une vision qui contribue à masquer la compénétration croissante de ces deux mondes et l’accumulation de pouvoir - économique et politique - des grandes entreprises sous le voile (...)

    #Invités

    / #OpenDemocracy, #Royaume-Uni, #Lobbying, #Privatisations, #Démocratie_économique, #privatisation, #influence, #oligarchie, #marchés_publics, #normes_et_régulations, #concentration, secteur (...)

    #secteur_public
    "http://www.opendemocracy.net/colin-crouch/dealing-with-corporate-political-power"
    "https://www.flickr.com/photos/proimos/4045973322/in/photostream

    Flickr
    "
    "http://www.imf.org/external/pubs/ft/wp/2009/wp09287.pdf"
    "http://www.theguardian.com/environment/2012/nov/28/nuclear-lobbyists-senior-civil-servants"
    "http://www.theguardian.com/business/2013/oct/06/energy-lobby-heat-on-labour"
    "http://www.theguardian.com/politics/2013/oct/30/hugh-muirs-diary-freedom-of-information"

    • #pouvoir #entreprises

      Les débats classiques sur l’#équilibre des pouvoirs dans les constitutions ou sur les conditions d’égalité nécessaires pour sauvegarder la démocratie se concentrent habituellement sur les #institutions politiques formelles et les organisations comme les partis politiques et les syndicats. Les questions de pouvoir - comment le limiter, le contrôler de l’obliger à se comporter de manière démocratiquement acceptable - sont posées à propos de ces institutions seulement, et les entreprises ne sont presque jamais envisagées dans ces questionnements. La seule justification de cette omission est l’argument évoqué ci-dessus, selon lequel les firmes, existant de par le #marché et sujettes aux règles de celui-ci, ne peuvent pas avoir de pouvoir. D’autant plus, selon cette ligne d’argumentation, que les politiques de libre concurrence permettront de s’assurer que ces firmes ne disposeront pas des ressources pour s’engager politiquement.

  • Stress Gives You Daughters, Sons Make You Liberal - Issue 13: Symmetry
    http://nautil.us/issue/13/symmetry/stress-gives-you-daughters-sons-make-you-liberal

    The Northwestern University economist Charles Manksi calls it the “reflection problem”: How can we know if person A is affecting person B, or the reverse? Without being in each person’s head or observing every subtle non-verbal cue in their interactions, it’s impossible to know what’s causing what, who is the leader and who is the follower. Families are especially complex: Cause and effect are hard to disentangle in the bubbling cauldron that is a household. There are the daily negotiations between husband and wife, instructions to (and rejections by) children, and interactions with people outside the family. Taken as a whole, it is a challenge for a social scientist to analyze. But there is at least one lens through which family interactions and feedback have become apparent: gender. It (...)

  • Un capitalisme de paria : le bidonville de Dharavi, à Bombay | Mediapart

    http://www.mediapart.fr/journal/international/030514/bombay-le-bidonville-de-dharavi-signe-lechec-des-politiques-de-developpeme

    L’activité économique des habitants du bidonville de Dharavi, à Bombay, relève exactement (et à la lettre) de ce « capitalisme de paria » analysé par Peraldi :

    La vieille femme est assise à même le sol poussiéreux. Devant elle, une douzaine de crabes gris et un panier de crevettes roses. Les crustacés sont constellés de mouches. Le soleil est à son zénith et le mercure dépasse les 35 degrés. L’odeur qui s’en dégage concurrence celle de la rigole d’eau croupissante remplie d’ordures et d’excréments qui serpente sur sa droite. Elle sourit doucement quand on lui demande si sa marchandise se vend bien et hausse les épaules avec l’air de dire : « Comme tous les jours, ni plus qu’hier, ni moins que demain. »
    Cette vieille femme n’est même pas pêcheuse. Tous les matins, elle se rend en transports en commun au port de Bombay, achète quelques poissons ou crustacés auprès des bateaux qui reviennent du large, et retourne chez elle, à Dharavi, quinze kilomètres plus au nord, pour vendre ces produits de la mer à ses voisins de quartier avec une petite marge. Alors, si elle est là, jour après jour, semaine après semaine, c’est que les affaires ne marchent pas si mal. En tout cas suffisamment pour lui permettre de survivre.
    À une époque, elle avait dû faire appel à une association de micro-crédit pour pouvoir emprunter l’argent nécessaire à l’achat de sa marchandise. 60 euros remboursables sur 21 semaines. Aujourd’hui, elle n’en a plus besoin et ses ventes de la journée lui permettent d’acheter les produits du lendemain matin. À son échelle, c’est une petite victoire. (...)
    Dans un pays où il n’existe aucune forme de filet de sécurité sociale, nul n’est inactif. Car il s’agit chaque jour de gagner de quoi survivre jusqu’au jour suivant. Comme le reste de l’Inde, Dharavi est une ruche bourdonnante de petits métiers où le commerce est roi. Tout le monde ou presque s’insère dans une chaîne de vente et de revente à faible marge. Comme la marchande de poisson, les vendeuses de légumes achètent au marché de gros et revendent dans la rue ; les cordonniers se procurent du cuir et confectionnent des sandales ; une femme acquiert des Tupperware et les écoule depuis sa maison de 18 m2 sur deux étages ; une autre fait la même chose avec des saris qu’elle va chercher en bus au Rajasthan, à 700 kilomètres, et qu’elle propose à ses voisines qui viennent essayer les tissus dans sa pièce unique de 10 m2 où elle vit avec son mari et ses deux filles…

    Sur le « capitalisme de paria » : http://www.ehess.fr/fr/enseignement/enseignements/2011/ue/484

    #capitalisme_de_paria

  • Inde : la « mesquinerie branchée » des classes moyennes envers les pauvres | Mediapart

    http://www.mediapart.fr/journal/international/030514/bombay-le-bidonville-de-dharavi-signe-lechec-des-politiques-de-developpeme

    En dépit de sa croissance économique record (+ 8 % par an en moyenne durant les années 2000, juste derrière celle de la Chine), de l’essor de sa classe moyenne et du dynamisme de ses multinationales, l’Inde demeure la nation qui compte le plus de gens vivant au-dessous du seuil de pauvreté sur la planète. Malgré les débats incessants dans la presse indienne entre universitaires et politiciens sur le niveau auquel il convient de fixer ce seuil, il n’en demeure pas moins que, selon les études, de 37 % à 60 % des Indiens sont considérés comme pauvres, c’est-à-dire vivant en général avec moins d’un euro par jour. (...)
    Derrière le « miracle économique indien » des années 2000, qui a favorisé l’essor d’une classe moyenne urbaine dont les modes de consommation s’alignent sur ceux de l’Occident (centres commerciaux climatisés, voitures, vacances à Goa ou au Cachemire…), derrière la progression du nombre de milliardaires, des centaines de millions de pauvres continuent de vivre au jour le jour. Dans leur récent ouvrage, An Uncertain Glory (non traduit en français), deux des économistes les plus réputés du pays, le prix Nobel Amartya Sen et Jean Drèze, écrivent : « L’histoire du développement dans le monde offre bien peu d’exemples d’une économie croissant aussi vite pendant aussi longtemps avec des résultats aussi limités en termes de réduction de la pauvreté. Alors que l’Inde a gravi très rapidement l’échelle des taux de croissance, elle a rétrogradé en terme d’indicateurs sociaux de conditions de vie. Le processus de la croissance indienne est tellement inégalitaire qu’il fait ressembler le pays à des îlots californiens perdus dans une immense mer subsaharienne. »
    Pour ces deux chercheurs, qui ont décortiqué une grande variété de statistiques et d’indicateurs sociaux, du nombre de foyers ne possédant pas d’électricité (un tiers de la population) au pourcentage d’enfants sous-alimentés (56 % en 2006), le modèle indien est celui d’une croissance sans développement : « Les ressources nouvellement créées par la croissance économique n’ont pas été utilisées de manière adéquate afin de soulager les immenses privations sociales des plus faibles. »
    Ce débat, aujourd’hui, n’est pas facile à mener en Inde, car la plupart des leaders politiques ne veulent pas l’entendre. « Quand vous analysez les programmes des deux formations politiques qui ont mené les pays depuis seize ans, c’est-à-dire le parti du Congrès censé être à gauche et le BJP (nationaliste hindou) censé être à droite, vous vous apercevez qu’ils ont mené sensiblement les mêmes politiques, en particulier en matière économique », explique l’universitaire et politologue Sudhir Kumar Panwar.
    « Elles ont conduit une politique de développement néolibérale qui a consisté à appuyer les grandes entreprises et les multinationales dans différents secteurs, notamment l’agriculture, à promouvoir les investissements étrangers et à affaiblir les mécanismes d’assistance publique. Le résultat, ce sont des politiques anti-agriculteurs, anti-petits commerçants et anti-pauvres. » « Pour la plupart des dirigeants politiques, le développement consiste à bâtir des routes et des infrastructures, pas à sortir les gens de la pauvreté », critique l’éditorialiste de New Delhi Hartosh Bal.
    Les errements des politiques économiques sont une chose, mais elles ont aussi un impact sur la manière dont les Indiens eux-mêmes regardent « leurs » pauvres. « Il y a aujourd’hui une forme de mesquinerie branchée à l’encontre de tous ceux qui ne rentrent pas dans le moule de la classe moyenne indienne moderne : les basses castes, les musulmans et les habitants des bidonvilles », critique Taran Khan. Aujourd’hui, le terme « classe moyenne » est devenu un mantra que tout le monde récite, un peu comme aux États-Unis, une manière de se caractériser positivement pour ceux qui sont, en fait, l’élite dans un pays très pauvre.
    Satya Sivaraman, un activiste engagé dans les mouvements sociaux, confirme cette attitude qui, selon lui, renvoie à une forme de néolibéralisme social : « Une grande partie de la population ne voit pas les pauvres. C’est une question d’éducation, d’habitude et de caste. Ensuite, nombre d’entre eux estiment que si les gens sont pauvres, c’est qu’ils n’ont pas fait assez d’efforts. C’est le refrain des plus riches et de ceux qui disent appartenir à la classe moyenne : "Si moi qui suis parti de peu j’y suis arrivé, tout le monde peut y arriver." » À cela, il ajoute une spécificité indienne : « Les riches et les hautes castes ne croient plus à la réincarnation pour eux-mêmes, mais ils y croient pour les autres. Selon eux, les pauvres auront de toute manière une meilleure condition dans leur prochaine vie, donc ce n’est pas un impératif de les aider dans la présente… »
    Alors, même si personne ne chôme à Dharavi, incarnant en cela une forme d’éthique bombayienne du travail, l’ascenseur social reste bloqué pour la plupart des résidents du bidonville.

    #structure_sociale
    #classes_sociales
    #classes_moyennes
    #croissance_économique
    #développement

  • Précarité du travail, précarité hors travail : une enquête sur les musiciens de variété | Laetitia Sibaud

    http://nrt.revues.org/1762

    La profession a aussi un impact sur la vie hors travail, à plusieurs niveaux. Les difficultés relatives à la consommation tout d’abord, pour contracter un emprunt ou trouver une location, par exemple. L’« imbrication de l’espace-temps » (p. 225) ensuite – où lieu de travail et lieu de vie, temps de travail et temps pour soi se confondent – révèle une colonisation de la vie par le travail. La difficulté à prévoir des vacances, à se « déconnecter » du travail et à refuser toute proposition d’emploi impromptue en est une illustration. Si cette imbrication peut être appréciée par nombre de musiciens, elle précarise cependant le lien conjugal : les taux de célibat et de séparation élevés, ainsi que la quasi-inexistence d’unions instituées, contrastent avec les chiffres de la population générale. L’effet genre est ici supplanté par l’« effet profession » (p. 269) : le « rythme de vie inversé » (p. 235), les « phases récurrentes de non-cohabitation conjugale » (p. 236), la négociation permanente et les multiples arrangements pour l’organisation de la vie quotidienne et la garde des enfants – cf. le phénomène de « rattrapage » des pères après une longue absence – s’expliquent par l’organisation de la profession décrite au cours des deux premières parties. Par exemple, les couples endogames dureraient plus longtemps que les couples mixtes, en raison de la connaissance des réalités du métier – et ce malgré la difficulté à faire coïncider les emplois du temps. Une autre illustration provient du fait que les pères enquêtés respectent le partage des tâches domestiques, mais sur de courtes périodes, le lien conjugal et l’organisation de la vie familiale devant se reconstruire après chaque absence du domicile conjugal.
    Le résultat fort de cette troisième partie et de l’ouvrage est précisé en conclusion. Les « précarités conjuguées » (p. 253) auxquelles sont confrontés les musiciens engendrent « une intégration sociale et familiale difficile » (p. 257). Nous avons vu que les ressources dont ils disposent, qu’elles soient économiques, symboliques ou sociales, relèvent d’un équilibre fragile, car peu instituées et incertaines. Ces musiciens se retrouvent au final face à un dilemme : soit la carrière professionnelle est privilégiée et le reste de la vie doit s’adapter à ses exigences – ou est parfois sacrifiée ; soit la vie hors travail devient prioritaire et se profile la question de sa compatibilité avec le travail et le mode de vie artistes entrevus, et donc celle de la possibilité de durer dans le milieu. Le fait qu’il y ait peu d’intermittents de plus de 50 ans n’est probablement pas étranger à cette réalité et nous invite à questionner l’équation liberté-précarité souvent avancée pour minimiser la précarité de ces professions : le travail peut compenser l’emploi, mais jusqu’à une certaine limite dans le temps de la trajectoire professionnelle et de vie.

    (Laetitia Sibaud, 2013)

    #travail
    #famille
    #intégration
    #précarité

  • La sociologie du genre invite à repenser la critique du travail | E. Galerand & D. Kergoat

    http://nrt.revues.org/1533

    Premier tournant : penser le travail domestique comme travail exploité.

    Nous voudrions maintenant mettre en évidence la charge critique du féminisme matérialiste pour la sociologie du travail et nous distinguerons pour cela deux moments. Le premier renvoie à la théorisation des rapports sociaux de sexe en tant que rapports de production ou d’exploitation en eux-mêmes, irréductibles au capitalisme (Delphy, 1970 ; Guillaumin, 1978). C’est le moment de la conceptualisation du travail domestique comme travail exploité qui opère une double rupture conceptuelle avec la définition dominante et tronquée du « travail » d’une part, avec celle de l’« exploitation » d’autre part. (…) [La] théorisation du travail domestique comme travail exploité engageait une véritable rupture épistémologique, à partir de laquelle il fut possible de repenser le travail, ses contours comme ce qu’il recouvre politiquement. Simultanément, le concept d’exploitation prenait lui aussi une nouvelle épaisseur. Après que Christine Delphy dénonce son usage réservé aux seuls rapports de classe, c’est Colette Guillaumin (1978) qui met en évidence l’existence de différents régimes d’exploitation, de même que les continuités entre l’esclavage et le « sexage », et montre en quoi ceux-ci passent par une appropriation des corps, réservoirs de force de travail (Guillaumin, 1978 ; Juteau & Laurin Frenette, 1988). Les recherches qui s’intéressent aux formes de servitude observables dans le secteur de la domesticité ou du travail reproductif payé en particulier (Glenn, 2009 ; Moujoud & Falquet, 2010) montrent bien l’actualité de cette réflexion sur le travail non libre comme sur les formes transitionnelles d’exploitation telles qu’elles se recomposent aujourd’hui (Galerand & Gallié, 2014). (…)

    Deuxième tournant : la division sexuelle du travail, production mutuelle (et mobile) des rapports sociaux de classe et de sexe.

    Le second tournant est celui de la théorisation du sexe du travail salarié qui ouvre sur la transversalité de la division sexuelle du travail et sur la consubstantialité des différents rapports sociaux d’exploitation (Kergoat, 2012). (…) Ce deuxième moment fut tout aussi décisif. Il révélait que la seule logique du capital était insuffisante pour saisir l’exploitation particulière de la force de travail féminine dans le rapport salarial et que ce dernier, loin d’être purement capitaliste, était également intrinsèquement sexué, structuré suivant la division sexuelle du travail. L’analyse des pratiques combatives et revendicatives des ouvrières montrait d’abord que les rapports différenciés des hommes et des femmes au travail salarié étaient indissociables des rapports différenciés qu’ils et elles entretenaient au travail domestique (Chenal & Kergoat, 1981). Par ailleurs, les ouvrières n’étaient pas seulement plus exploitées que leurs homologues masculins, mais elles l’étaient différemment et cette différence ne pouvait s’expliquer en termes de surexploitation. Car alors, comment expliquer par exemple que les ouvrières qualifiées travaillaient plus souvent à la chaîne que les ouvriers non qualifiés ? C’est bien la problématisation de la transversalité des rapports sociaux de sexe, et de leur imbrication aux autres rapports sociaux, en particulier ceux de classe, qui permettaient de répondre à ces questions et de dépasser le raisonnement selon lequel les femmes étaient exploitées suivant le mode d’exploitation domestique dans le cadre de la famille, puis simplement surexploitées sur le mode capitaliste une fois franchie la porte de l’usine. En contrepoint, la conceptualisation de la « division sexuelle du travail », permit de penser l’intrication dynamique des rapports sociaux de sexe et de classe, leur consubstantialité, le fait qu’ils se modulent et se configurent mutuellement et réciproquement (Kergoat, 2012).
    Quant au travail entendu sous le concept de division sexuelle du travail, il désigne dès lors toutes les activités humaines de production du vivre en société (Godelier, 1984 ; Hirata & Zarifian, 2000). Cette redéfinition contient, à nos yeux, un potentiel particulièrement subversif, qui vient renouveler la critique de l’économie politique, dans la lignée des recherches qui – depuis les années 1970 – démontrent l’insuffisance des compréhensions resserrées du travail conduisant à exclure l’ensemble du travail gratuit des raisonnements sur la société salariale : tâches ménagères, travail d’entretien physique des membres de la famille, de care, ou de santé (Cresson, 2006), maintien du réseau amical et familial (Chabaud-Rychter et al., 1985), production d’enfants (Vandelac, 1985 ; Tabet, 1998). (...)
    Avec et contre Marx, la problématique de la division sexuelle du travail consiste à appréhender les rapports de pouvoir qui produisent des hommes et des femmes en termes de rapports sociaux : elle ne relève ni d’une conceptualisation foucaldienne du pouvoir, ni d’une sociologie bourdieusienne de la domination et de sa reproduction, ni même d’une sociologie des systèmes d’oppression (comme c’est le cas lorsqu’on parle de patriarcat ou de capitalisme par exemple). En empruntant le concept de « rapport social », il s’agit d’envisager les catégories d’hommes et de femmes comme les produits de rapports de force proprement historiques, c’est-à-dire toujours vivants, qui se reconfigurent, se jouent et se rejouent en permanence et qui se déplacent dans l’espace et dans le temps, en fonction des pratiques concrètes et en particulier en fonction de la division du travail concret (prescrit et réel ; visible et invisible ; payé et gratuit).

    (Elsa Galerand et Danièle Kergoat)

    #genre
    #travail
    #division_sexuelle_du_travail
    #classes_sociales
    #exploitation
    #Marx

  • Sociologie des rapports sociaux de sexe, sociologie du genre, gender studies | E. Galerand & D. Kergoat

    http://nrt.revues.org/1533

    Et pourtant la sociologie, et singulièrement la sociologie du travail, a été la première discipline en France – avec l’anthropologie – à penser ce que l’on appelle maintenant le genre. (...)
    Du point de vue du rapport que les conceptualisations du genre entretiennent avec une réflexion sur le travail, il nous semble possible de distinguer trois branches de la sociologie du genre telle qu’elle s’est déployée en France depuis les années 1990 : l’une, dans une perspective féministe matérialiste, continua à privilégier les rapports sociaux (tout en utilisant le terme « genre » à l’occasion) et à donner au travail une place centrale ; la seconde estima que le terme « sociologie du genre » permettait de sortir de l’enfermement dans « les études femmes » pour penser, enfin, la différence des sexes. Ce deuxième courant est parfaitement illustré par des ouvrages comme Le travail du genre (Laufer, Marry & Maruani [dir.], 2003) ou Travail et genre dans le monde (Maruani [dir.], 2013) et par les travaux du groupement international de recherche MAGE. Enfin, un troisième courant, celui que nous appellerons les Gender Studies, n’entretient que peu de rapports avec les deux premiers. Importées des États-Unis, les Gender Studies se rattachent au postmodernisme et centrent l’analyse sur de nouveaux objets : la hiérarchisation des sexualités, les politiques de subversion des identités, les technologies du corps, etc. Elles se sont largement émancipées de la discipline sociologique (et encore plus de la sociologie du travail) et si elles sont résolument interdisciplinaires, ce n’est pas comme les deux autres courants en interaction avec les autres sciences sociales (histoire, anthropologie, économie, etc.), mais avec les études culturelles, la philosophie, la linguistique… Dans une perspective constructiviste, elles viennent renouveler la critique de l’idéologie naturaliste. En revanche, et c’est là, nous semble-t-il, que se situe l’une des lignes de tension, ces avancées se sont aussi réalisées sur fond d’occultation de la question du travail et de l’exploitation. (...)

    (Elsa Galerand et Danièle Kergoat)

    #genre
    #travail
    #champs_de_recherche

  • India has found a novel way to stop people from peeing in public
    http://www.dailydot.com/lol/public-urinator-india-firehose

    millions of men throughout the nation urinating on walls, trees, and buildings whenever they please. “It’s India," one inhabitant of the 1.2 billion strong south Asian nation told a reporter with the BBC two years ago. “This is what we do.”

    Proponents of proper hygiene have allegedly taken opposition to the act, mocking public urinators and, in some cases, drumming and blowing whistles.

    https://www.youtube.com/watch?v=aaEqZQXmx5M

    ~

    Mr. Poo, India’s anti-public pooping mascot, makes some amazing music videos
    http://www.dailydot.com/lol/india-anti-public-pooping-video

    Do yourself a favor and get educated on the importance of using dedicated toilet facilities with “Poo Party,” a hooky little song that will forever be near and dear to your colon. Then go wash your hands.

    https://www.youtube.com/watch?v=_Pj4L7C2twI

    le problème des #toilettes en #Inde vu comme une question #culturelle plutôt que d’#inégalités… voilà qui va (pas) faire avancer les choses ; mais ça permet sans doute aux riches de se moquer des pauvres qui sont si mal élevés etc