• Les ateliers du groupe soin volume 3
    https://infokiosques.net/spip.php?article1796

    « #A partir de septembre 2017, le groupe soin s’est (...) constitué autour d’une idée simple : tout le monde a fait l’expérience de la maladie et de la guérison, a ce titre, tout le monde a son mot a dire sur ces questions. Certain.e.s d’entre nous sont formé.e.s (en médecine allopathique ou non conventionnelle), d’autres non, et nous prenons grand soin (hehe) a ne pas hiérarchiser les savoirs, à ne pas valoriser une parole plutôt qu’une autre. Le savoir contenu dans chaque expérience singulière est aussi précieux que le savoir académique que certain.e.s d’entre nous détiennent (...). A l’origine, nous nous sommes fixés plusieurs objectifs : échanger des savoirs, se transmettre des trucs et astuces pour faire face a telle ou telle situation développer un annuaire de praticien.ne.s de confiance avoir (...)

    #Infokiosque_fantôme_partout_ #Corps,_santé
    https://infokiosques.net/IMG/pdf/Ateliers_du_groupe_soin_2019-2020_compressee_.pdf
    https://infokiosques.net/IMG/pdf/Ateliers_du_groupe_soin_2019-2020-cahier-36pA5.pdf

  • #Rwanda : un document prouve l’ordre de la France de laisser s’enfuir les génocidaires

    Juillet 1994. Les principaux membres du gouvernement responsable du #génocide des #Tutsis sont dans une zone contrôlée par l’#armée_française. Leur arrestation est possible et même réclamée. Un document inédit, émanant du cabinet du ministre des affaires étrangères de l’époque, #Alain_Juppé, prouve aujourd’hui que la #France a préféré les laisser partir. Il est signé de l’actuel patron de la DGSE.

    L’#ordre_politique de laisser s’enfuir à l’été #1994 les principaux membres du gouvernement responsable du génocide des Tutsis au Rwanda, alors que leur arrestation était possible et même demandée, a été directement pris par le #gouvernement_français, selon un document inédit émanant du ministère des affaires étrangères.

    Le massacre des Tutsis du Rwanda, dernier génocide du XXe siècle, a fait près d’un million de morts en cent jours, entre avril et juillet 1994.

    Le document, dont Mediapart a pu prendre connaissance, apparaît vingt-cinq ans après les faits comme la pièce manquante de l’un des épisodes les plus sombres de la #responsabilité française dans la tragédie rwandaise.

    Il a été obtenu par le chercheur François Graner, auteur de plusieurs livres sur le Rwanda et membre de l’association Survie, qui a récemment pu accéder à des #archives inexplorées de la présidence Mitterrand grâce à une décision du Conseil d’État. La plus haute juridiction administrative a mis fin, en juin dernier, à des années d’entraves orchestrées par les gardiens de la mémoire de l’ancien chef de l’État et de la politique de la France durant le génocide des Tutsis.

    Le document en question est un télégramme « confidentiel diplomatie » émis le 15 juillet 1994 par le cabinet du ministre des affaires étrangères de l’époque, Alain Juppé, aujourd’hui membre du Conseil constitutionnel, et adressé à l’ambassadeur #Yannick_Gérard, alors représentant du Quai d’Orsay auprès des militaires français envoyés au Rwanda dans le cadre de l’#opération_Turquoise.

    L’ambassadeur Gérard avait réclamé le jour même des « instructions claires » du gouvernement (pour lui et pour l’armée française) afin de procéder sur place à l’#arrestation des autorités qui, écrivait-il dans un télégramme, « portent une lourde responsabilité dans le génocide ». Le fait est que les principaux membres du gouvernement génocidaire, au premier rang desquels son président, #Théodore_Sindikubwabo, se trouvaient alors dans une zone intégralement contrôlée par l’armée française, à proximité du Zaïre (aujourd’hui République démocratique du Congo), pays frontalier du Rwanda.

    « Nous n’avons pas d’autre choix, quelles que soient les difficultés, que de les arrêter ou de les mettre immédiatement en résidence surveillée en attendant que les instances judiciaires internationales compétentes se prononcent sur leur cas », soulignait le haut fonctionnaire, conscient d’avoir des génocidaires identifiés à portée de main.

    La réponse du gouvernement français fut pourtant à l’exact opposé de la requête de l’ambassadeur Gérard. Dans le télégramme du 15 juillet, rédigé à 18 h 22 et adressé à « Yannick Gérard seul », le cabinet du ministre Juppé donne ainsi pour instruction de transmettre aux autorités génocidaires « notre souhait qu’elles quittent » la #zone_contrôlée par les forces armées françaises.

    Le message à transmettre semble si délicat que le cabinet Juppé demande à son ambassadeur de ne pas s’entremettre personnellement avec les génocidaires. « Vous pouvez en revanche utiliser tous les canaux indirects et notamment vos contacts africains, en ne vous exposant pas directement », peut-on lire dans le télégramme, qui a d’ailleurs pour titre : « Le département vous autorise à passer notre message de manière indirecte ».

    « Vous soulignerez que la communauté internationale et en particulier les Nations unies devraient très prochainement déterminer la conduite à suivre à l’égard de ces soi-disantes autorités », précise encore le télégramme, qui, insistant de la sorte sur une décision à venir de la communauté internationale, offre un #sauf-conduit au gouvernement génocidaire pour quitter sans la moindre anicroche le territoire sous contrôle français. Et passer au #Zaïre.

    Le document porte la signature « #EMIE ». Il s’agit de #Bernard_Émié, l’actuel directeur de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), l’un des principaux #services_secrets français, qui était à l’époque conseiller d’Alain Juppé au ministère des affaires étrangères, avant de rejoindre l’Élysée sous la présidence de Jacques Chirac.

    Sollicité par Mediapart, Alain Juppé a fait savoir qu’il ne souhaitait pas répondre à nos questions. Également sollicité, Bernard Émié n’a, pour sa part, pas donné suite.

    Un quart de siècle après la tragédie rwandaise, il n’y a aujourd’hui pas de doute sur le fait que la France savait qui étaient les organisateurs et commanditaires du génocide, et où ils se trouvaient. C’est donc en toute connaissance de cause que le gouvernement et l’Élysée les ont laissés filer.

    D’innombrables documents et témoignages, obtenus depuis des années par des historiens, des journalistes ou des juges, ont déjà largement permis de documenter que la France avait connaissance d’un génocide en préparation avant que celui-ci n’ait lieu et qu’elle a maintenu un soutien indéfectible aux autorités en cause quand le pire a commencé.

    Cela est si vrai que le gouvernement génocidaire, constitué au lendemain d’un attentat ayant tué le président #Habyarimana, jugé trop modéré par la frange la plus radicale du pouvoir hutu, a été formé, le 8 avril 1994, dans les locaux mêmes de l’#ambassade de France à Kigali, sous le nom de « #gouvernement_intérimaire_du_Rwanda » (#GIR).

    C’est un certain Théodore #Sindikubwabo, ancien président de l’Assemblée nationale, qui sera choisi pour diriger le pays avant que celui-ci ne s’enfonce dans les ténèbres. Pédiatre de formation, Sindikubwabo est considéré comme l’un des commanditaires du génocide, soupçonné d’avoir personnellement incité aux #massacres – notamment à l’occasion d’un discours retransmis le 19 avril sur Radio Rwanda – et d’avoir démis de leurs fonctions les préfets et autorités qui ne tuaient pas assez.

    Sindikubwabo fait partie des responsables politiques du génocide qui ont pu rallier le Zaïre en juillet 1994 avec l’aval du gouvernement français. Il est mort en 1998 dans des circonstances mal connues et sans jamais avoir été inquiété pour ses crimes.

    L’ordre de Juppé, l’ombre de Védrine

    Il existe dans les archives disponibles la trace d’un contact, en mai 1994, entre Sindikubwabo et le général #Christian_Quesnot, le chef d’état-major particulier du président de la République. Dans une note du 6 mai écrite à l’attention de #François_Mitterrand, après son échange avec le nouveau chef de l’État génocidaire – les massacres ont débuté un mois plus tôt –, le militaire indique que le dignitaire rwandais le « remercie » pour tout ce qu’il a « fait pour le Rwanda ».

    Dans ses commentaires personnels à la fin du document, le général Quesnot préconise alors d’appuyer, même au prix d’une « #stratégie_indirecte », le pouvoir rwandais face aux forces armées tutsies. Le général Quesnot dit, en effet, craindre l’établissement d’un « #Tutsiland » (sic), le tout « avec l’aide anglo-saxonne et la complicité objective de nos faux intellectuels remarquables relais d’un lobby tutsi auquel est également sensible une partie de notre appareil d’État ». Le document est annoté de la main du secrétaire général de la présidence de la République, #Hubert_Védrine, d’un mot : « Signalé ».

    Pourtant, sur le terrain, la diplomatie et les services de renseignements français ne cessent d’accumuler des éléments sur la responsabilité du gouvernement intérimaire dans le génocide.

    Un télégramme « confidentiel diplomatie » daté du 10 juillet 1994 de l’ambassadeur Gérard, également découvert par le chercheur François Graner grâce à la décision du Conseil d’État de juin dernier, évoque même « un témoignage digne de foi qui confirme la responsabilité collective et personnelle des autorités de #Gisenyi [le gouvernement génocidaire – ndlr] dans les massacres ». Le diplomate ajoute que, selon d’autres témoignages « directs et concordants », le président Sindikubwabo a personnellement appelé à plusieurs reprises à « l’élimination totale des Tutsis » et que l’une de ses ministres a, en particulier, réclamé le massacre « des femmes et des enfants ».

    Cinq jours plus tard, c’est donc en parfaite connaissance de cause que l’ambassadeur Gérard demande des « instructions claires » au gouvernement pour pouvoir mettre aux arrêts ou, au moins, en résidence surveillée les génocidaires.

    En vain.

    À Paris, la question de l’arrestation des membres du gouvernement génocidaire a pourtant été source de confusion au sommet de l’État, comme le prouvent plusieurs autres documents.

    Dans les archives de l’Élysée figure notamment la copie d’une dépêche émise depuis Paris, le 15 juillet en fin de matinée, par l’agence de presse Reuters sous un titre éloquent : « Paris prêt à arrêter les membres du gouvernement ». « Les membres du gouvernement intérimaire rwandais […] seront mis aux arrêts s’ils tombent aux mains de soldats de français dans la #zone_humanitaire_protégée par l’opération Turquoise », indiquait l’agence de presse internationale, qui disait tenir ses informations d’une « source autorisée à Paris ».

    Seulement voilà : une annotation manuscrite, inscrite par Hubert Védrine dans la marge de la dépêche imprimée par les services de l’Élysée, montre qu’il n’en était, en réalité, rien. « Lecture du Président : ce n’est pas ce qui a été dit chez le Premier ministre », peut-on lire sous la plume du secrétaire général de l’Élysée.

    Le document du cabinet Juppé sur l’ordre de laisser filer les génocidaires, daté lui aussi du 15 juillet, vient aujourd’hui conforter le soupçon d’un ministre des affaires étrangères, Alain #Juppé, en accord avec la politique élyséenne, bien qu’appartenant à un gouvernement de cohabitation dirigé par #Édouard_Balladur. Ce dernier fera d’ailleurs savoir à ce sujet, en 1998, qu’il « n’était pas question » aux yeux de Mitterrand « de châtier les auteurs hutus du génocide ». « Et il n’était pas question aux miens, ajoutait-il, de permettre à ceux-ci d’aller se mettre à l’abri au Zaïre ».

    C’est pourtant exactement ce qui s’est passé, et ce, sur ordre de son propre ministre Alain Juppé. Sur le terrain, l’#exfiltration est pilotée par le lieutenant-colonel #Jacques_Hogard, qui commande le groupement Sud-Turquoise au Rwanda, formé de troupes de la #Légion_étrangère.

    Dans un supplément spécial consacré aux opérations au Rwanda, la revue militaire Képi blanc a résumé des années plus tard la situation dans un style d’une raideur militaire qui ne fait guère dans la contorsion : « L’#EMT [#état-major_tactique] provoque et organise l’#évacuation du gouvernement de transition rwandais vers le Zaïre. »

    Le lieutenant-colonel #Hogard confirmera lui-même à plusieurs occasions les faits, notamment au journaliste David Servenay et à l’universitaire Gabriel Périès, auteurs du livre Une guerre noire (La Découverte). Dans cet ouvrage, le militaire raconte être allé voir en ces termes son homologue zaïrois pour lui parler des génocidaires qu’il s’apprêtait à laisser partir : « Vous ne fermez pas les #frontières, vous les laissez poreuses, je ne veux pas que vous empêchiez ces gens-là de partir, le Zaïre est grand, ils n’ont que ça pour partir. »

    Dès le 16 juillet, c’est-à-dire au lendemain du télégramme envoyé par le cabinet Juppé, le lieutenant-colonel Hogard rencontre le chef de l’État du Rwanda pour lui faire savoir que lui et ses hommes doivent – et peuvent – partir dans les vingt-quatre heures. Et c’est ainsi que la France escorte du Rwanda à la frontière zaïroise parmi les principaux responsables politiques du génocide.

    Un militaire de l’opération Turquoise, Guillaume Ancel, a raconté des années plus tard dans un livre (Rwanda, la fin du silence, éditions Belles Lettres) avoir vu le lieutenant-colonel Hogard quelque temps après cette scène. « Certes, il est convaincu que ce n’est pas notre rôle de rendre justice, mais escorter poliment des décideurs qui ont de terribles responsabilités dans les massacres et “du sang jusqu’au cou” le tourmente. Il aurait pu les arrêter, il aurait même pu les neutraliser, mais ses ordres ne lui laissaient pas le choix », a-t-il témoigné.

    Un document déclassifié de l’état-major de l’armée française confirme que les membres du gouvernement génocidaire « ont franchi la frontière rwando-zaïroise » le 17 juillet en fin de journée, « l’option clairement avouée étant de replier également le reste des #FAR [#forces_armées_du_gouvernement – ndlr] avec leur armement au Zaïre, afin de poursuivre la #résistance depuis ce pays ».

    En un mot : que les génocidaires soient à l’abri pour que le sang, lui, continue de couler.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/140221/rwanda-un-document-prouve-l-ordre-de-la-france-de-laisser-s-enfuir-les-gen
    #génocide #Quesnot #Balladur #Edouard_Balladur

    signalé par @arno : je mets ici le texte complet

    • Une guerre noire. Enquête sur les origines du génocide rwandais (1959-1994)

      Au printemps 1994, au Rwanda, près d’un million de personnes ont été exterminées en quelques semaines. À un rythme trois fois plus élevé que le génocide des juifs d’Europe. Comment un tel crime de masse a-t-il été rendu possible ? Quelle est la responsabilité des grandes puissances occidentales et de la France, surtout, si proche des génocidaires ? Après quatre ans d’enquête, dans les archives du monde entier, sur le terrain, auprès des militaires français, rwandais et belges, à interroger diplomates et politiques, Gabriel Périès et David Servenay tentent de répondre à ces questions. À l’aide de témoignages inédits et de documents confidentiels, ils lèvent le voile sur l’une des origines secrètes du génocide rwandais : la doctrine française de la « guerre révolutionnaire ». Des opérations clandestines menées dans le « pré carré » au moment de la décolonisation, en passant par le trouble jeu du général De Gaulle, ils établissent la généalogie de ce qui fut pendant des décennies un véritable savoir-faire de l’armée française. Formalisé pendant la guerre d’Indochine et appliqué en Algérie, il a largement inspiré les dispositifs répressifs mis en place dans un grand nombre d’États africains… dont le Rwanda des années 1960. Et ce n’est pas le fruit du hasard si l’un des meilleurs élèves africains de la « guerre révolutionnaire » perpétra, plus de trois décennies plus tard, le dernier génocide du XXe siècle : hiérarchies politico-militaires parallèles, gardes présidentielles transformées en escadrons de la mort, action psychologique, quadrillage administratif et militaire des populations formèrent un système efficace susceptible de mobiliser toute une société au service du projet exterminateur de ses dirigeants. Cette histoire inconnue éclaire d’un jour nouveau la responsabilité de l’État français dans le génocide rwandais.

      https://www.editionsladecouverte.fr/une_guerre_noire-9782707149145

      #livre #Gabriel_PÉRIÈS #David_SERVENAY

    • Rwanda, la fin du silence. #Témoignage d’un officier français

      Au lourd secret qui entoure le véritable rôle de la France et de son armée lors du génocide des Tutsi au Rwanda, #Guillaume_Ancel oppose la vérité de ses carnets de terrain, témoignage des missions auxquelles il a participé durant l’opération Turquoise. La fin du silence est aussi le récit du combat mené par cet ancien officier pour faire savoir ce qui s’est réellement passé durant cet été 1994 et « rendre hommage, dignement, aux centaines de milliers de victimes rwandaises que nous n’avons pas su empêcher. »
      Officier de la Force d’action rapide, détaché au sein d’une unité de la Légion étrangère, le capitaine Ancel mène avec ses hommes des opérations d’extraction de personnes menacées. Sous couvert d’une opération humanitaire destinée à mettre fin aux massacres, cet officier comprend vite que la France soutient le gouvernement génocidaire rwandais dont elle a formé l’armée. Il décrit les errements de l’armée française, ballotée au gré de décisions politiques dont les motivations sont toujours tenues secrètes, les archives officielles restant inaccessibles. Ce témoignage dévoile également certains épisodes méconnus de cette opération « #humanitaire » durant laquelle l’armée française a tué. Parfois pour défendre, parfois pour des raisons moins avouables.

      https://www.lesbelleslettres.com/livre/3565-rwanda-la-fin-du-silence
      #opération_humanitaire

  • A propos d’autonomie, d’amitié sexuelle et d’hétérosexualité, partie 3 – Corinne Monnet – Tarage – Anarcha-féminisme
    https://tarage.noblogs.org/post/2020/05/08/a-propos-dautonomie-damitie-sexuelle-et-dheterosexualite-partie-3-co

    lesbianisme Annotations :

    Une des difficultés qui se pose aux femmes pour prendre conscience de leur oppression, en regard par exemple des oppressions racistes et classistes, se trouve dans le fait que la plupart du temps, les femmes cohabitent avec des hommes, que ceux-ci soient leur père, leur(s) frère(s), leur(s) copain(s), leurs collègues de travail, leur conjoint ou leur(s) fils. Cette promiscuité avec les hommes est ce qui rend très difficile la projection d’une image ennemie sur des personnes que l’on côtoie quotidiennement, avec qui on peut avoir des relations très intimes et que l’on aime. Elle m’a aussi permis de voir que de nombreuses femmes étaient (...)

    #.brochure #:Corinne_Monnet #féminismes #anarchaféminisme #hétérosexualité #amour #dominations #lesbianisme

  • En Afrique, l’ampleur de l’épidémie de Covid-19 reste une grande inconnue
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/02/14/en-afrique-l-ampleur-de-l-epidemie-de-covid-19-reste-une-grande-inconnue_606

    « Les chiffres s’emballent. D’un point de vue européen, où le nombre de contaminations se compte en centaines de milliers, ils peuvent paraître encore faibles. Pourtant, ils ne reflètent la réalité que de manière très limitée. Seuls 1 000 à 2 000 tests sont réalisés chaque jour dans des pays de plusieurs millions d’habitants, soit 300 fois moins qu’en Europe. Et une partie concerne surtout les voyageurs », a alerté fin janvier l’ONG Alima, présente en Afrique de l’Ouest.En dehors des capitales, les moyens de dépistage s’avèrent le plus souvent inexistants. « Il n’existe qu’un laboratoire national à Bamako pour analyser des prélèvements transportés par vols humanitaires depuis Tombouctou, Mopti ou Gao. Seuls les malades présentant des symptômes sont testés. Il est dans ce contexte très difficile d’évaluer la circulation du virus », admet Aimé Makimere Tamberi, chef de mission d’Alima au Mali. Sur l’ensemble du continent, moins d’un million de tests ont été réalisés au cours de la semaine écoulée, soit deux fois moins qu’en France. Et pour une écrasante majorité, seule une poignée de pays (Afrique du Sud, Maroc, Egypte…) en ont bénéficié.
    Chaque jour, l’OMS et le Centre de contrôle et de prévention des maladies de l’Union africaine (CDC-Afrique) publient les chiffres des nouvelles contaminations et des décès sur la base des statistiques hospitalières fournies par les Etats.La Tanzanie, dont le président John Magufuli nie la gravité de l’épidémie, a cessé de transmettre des chiffres fin avril 2020. Le pays comptait alors 509 cas et 21 décès. La présence du variant sud-africain a pu y être repérée dans les tests positifs pratiqués cette semaine sur deux ressortissants tanzaniens en voyage au Royaume-Uni. Or ce variant, déjà identifié dans sept pays, inquiète au plus haut point les épidémiologistes. Plus contagieux, il serait également, selon une étude menée par l’Université de Witwatersrand (Johannesburg), résistant au vaccin développé par AstraZeneca. Des résultats qui ont conduit le gouvernement sud-africain à suspendre, à peine lancée, sa campagne de vaccinations.
    « Nous ne testons pas tout le monde, mais nous n’avons pas observé de mortalité massive en dehors des cas répertoriés [par les centres de santé] », répond le docteur John Nkengasong, directeur du CDC-Afrique, lorsqu’il est questionné sur la sous-évaluation de l’épidémie. Plusieurs enquêtes conduisent toutefois à s’interroger sur cette réalité.
    En Zambie, une étude menée à Lusaka a révélé que 19 % des cadavres reçus par la plus grande morgue de la capitale entre juin et septembre 2020 étaient positifs au SARS-CoV-2. « 364 personnes ont été testées et dix-neuf sont apparues positives ; 70 % étaient des hommes, avec un âge médian de 49 ans, mais il y avait aussi sept enfants. La majorité des décès étaient survenus dans les communautés. Personne n’avait été testé avant de mourir, même si des symptômes du Covid-19 étaient dans certains cas visibles », écrivent Lawrence Mwananyanda et Christopher Gill, chercheurs à l’école de santé publique de l’Université de Boston (Etats-Unis) et auteurs principaux de l’article publié fin décembre 2020 sur la plateforme en ligne MedRxiv. En Afrique du Sud, l’équipe conduite par Debbie Bradshaw, du South African Medical Research Council (SAMRC), a annoncé, le 10 février, que selon ses calculs menés en prenant pour référence des tendances de mortalité antérieures à la pandémie, les décès supplémentaires enregistrés dans le pays entre mai 2020 et février avoisinent les 137 000, soit plus de trois fois le chiffre déclaré à l’OMS.

    #Covid-19#migrant#migration#afrique#afriquedusud#mali#zambie#circulation#variant#depistage#morbidite#mortalite#sante

  • Les pénuries de médicaments s’aggravent au Liban
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/02/13/les-penuries-de-medicaments-s-aggravent-au-liban_6069844_3210.html

    Aller d’une pharmacie à une autre, s’entendre dire qu’antibiotiques ou sérums médicaux sont indisponibles, poursuivre avec opiniâtreté et inquiétude : Habib Battah passe souvent des journées entières avant de trouver les remèdes pour son père en fin de vie, soigné à domicile faute de place dans les hôpitaux, saturés par les malades du Covid-19. Au Liban, avec l’aggravation de la crise financière, les pénuries chroniques de médicaments se multiplient. « C’est comme chercher une aiguille dans une botte de foin. C’est très angoissant, très chronophage aussi. Mais je n’ai pas d’alternative. On est contraints de s’adapter », dit le jeune quadragénaire, journaliste indépendant et fondateur du site Beirut Report.
    Dans une pharmacie située dans la banlieue est de Beyrouth, une cliente est invitée à revenir une semaine plus tard pour son médicament. « Ne pas pouvoir répondre aux besoins détruit la relation de confiance, se désole Joanna Francis, la pharmacienne. Que peut-on répondre à un parent qui demande “comment vais-je nourrir mon bébé ?”, parce qu’il n’y a pas de lait infantile disponible ? » Sur les étagères, seules quelques rares boîtes de lait sont disposées.
    Se procurer des médicaments, dont plus de 80 % sont importés, est devenu un casse-tête pour de nombreux Libanais. Même le sacro-saint Panadol, un antidouleur très utilisé, est difficile à trouver. Apparues à l’automne 2020, un an après l’éclatement de la crise financière, les pénuries s’aggravent. Face à l’effondrement des réserves en devises de la Banque centrale, ses subventions sur les produits de première nécessité comme les médicaments sont menacées à court terme. Les quantités distribuées aux pharmacies sont rationnées. Un marché noir s’est mis en place. Un cercle vicieux s’est en outre installé. Des fournisseurs ou des pharmacies sont accusés de cacher leurs stocks dans l’optique de réaliser de juteuses marges une fois les subventions levées. Des clients paniqués ont acheté en quantité, accentuant la pression sur le secteur pharmaceutique. Un trafic de contrebande s’est instauré, dont l’échelle est inconnue. « Mais le problème principal est d’ordre financier », assure une source au ministère de la santé.
    Cherchant à anticiper le scénario noir d’une fin ou d’une révision des subventions sans amortisseur, qui frapperait les plus pauvres, un comité a planché sur une rationalisation du système. Mais ses recommandations sont dans les tiroirs du Parlement. « Si les subventions prennent fin brutalement, ce sera un désastre », prédit le docteur Firas Abiad, qui dirige l’hôpital public Rafic-Hariri, à Beyrouth. Bien que celui-ci reçoive des donations internationales, notamment pour la lutte contre le Covid-19 – qui a fait plus de 3 800 morts dans le pays –, il est confronté aux pénuries intermittentes : « Quand un manque apparaît, on le colmate, puis un autre surgit. Il est très difficile de prévoir les pénuries. » Pour poursuivre leur traitement, des Libanais s’appuient sur la solidarité, leurs relations ou les réseaux sociaux. Shaden Fakih, jeune comédienne de stand-up, a ainsi rendu publiques ses difficultés d’approvisionnement sur son compte Instagram. Cela, et des boîtes rapportées d’Europe par un ami, lui a permis de sécuriser pour un temps les médicaments dont elle a besoin, souffrant d’une maladie auto-immune ainsi que de troubles obsessionnels compulsifs. « Trouver les anticoagulants est une priorité absolue. Mais je sais ce que signifie une crise d’angoisse, et j’ai besoin de l’autre médicament aussi. Je me sens toutefois privilégiée, j’appartiens à la classe moyenne, et je suis entourée. »
    D’autres se tournent vers le secteur associatif, qui doit répondre à des besoins grandissants : la société se paupérise à toute vitesse. « Le nombre de nos bénéficiaires a doublé, dit Malak Khiami, pharmacienne à l’ONG Amel, dédiée à la santé. Parmi eux, certains viennent dans nos centres faute de trouver des médicaments ailleurs. Nous avons sécurisé des stocks jusqu’à l’été, en mettant l’accent sur les maladies chroniques et la pédiatrie. Et nous sommes très attentifs à ce que nous prescrivons. »
    Le docteur Jamal Al-Husseini (à gauche) tend une ordonnance à son assistant dans sa clinique, dans le camp de Chatila, Beyrouth, le 9 février 2021.En périphérie de Beyrouth, dans le camp de Chatila, lieu historique des réfugiés palestiniens, où les Syriens sont devenus les plus nombreux, les visages sont fatigués. Pour ceux qui sont aux marges de la société, la crise économique est un rouleau compresseur. Imane, Syrienne, a compté : il ne reste plus que quelques comprimés du traitement de son fils épileptique de 13 ans. « Après, je n’ose imaginer ce qui se passera, dit-elle. Pourvu qu’un médecin puisse trouver un substitut ! » Elle aussi fait le tour des pharmacies, y compris loin du camp aux ruelles étroites.
    Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le Liban précipité dans l’abîme
    Des médicaments venus de Syrie, moins coûteux, y sont devenus plus nombreux. Ils parviennent au Liban hors du circuit officiel. « Si leur nombre augmente, et pas seulement dans les camps, c’est faute d’alternative », déplore le docteur palestinien Jamal Al-Husseini, en plaçant sous oxygène un malade du coronavirus. Ces bouteilles proviennent de dons de la diaspora palestinienne. « Jusqu’à présent, on arrive encore à soigner les gens. Mais cela va devenir de plus en plus difficile », redoute-t-il.

    #Covid-19#migrant#migration#liban#syrie#refugie#camp#chatila#palestien#sante#crise#medicament#circulationthérapeutique#diaspora

  • Vaccin anti-Covid : « Une majorité des bénéficiaires est issue des classes les plus aisées et ne représente pas la population la plus vulnérable »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/02/12/vaccin-anti-covid-une-majorite-des-beneficiaires-est-issue-des-classes-les-p

    Lors d’une crise, si nous ne pouvons agir sur les inégalités elles-mêmes, au moins devons-nous les intégrer dans l’accès aux moyens de protection disponibles. Cette approche est bien connue des médecins généralistes qui connaissent les conditions de vie de leurs patients, leurs facteurs de risque et leurs comorbidités. Ils réclament aujourd’hui de pouvoir protéger au plus vite leurs patients les plus défavorisés et les plus vulnérables.Des vaccins ont pu être développés en un temps record grâce aux formidables compétences des équipes de recherche des laboratoires et à la mobilisation inédite de fonds tant privés que publics. Comment imaginer que la réponse à une pandémie puisse avoir pour seule réponse une approche réservée aux pays les plus riches ? Ce serait une faillite à la fois éthique et sanitaire.
    Si nous laissons la maladie proliférer en dehors de nos frontières, nous nous exposons pour demain à des reprises de l’épidémie sur notre propre territoire. Or, on estime que neuf personnes sur dix dans les pays à faible revenu ne pourront pas être vaccinées en 2021 car ces pays ne peuvent pas passer des commandes par manque de moyens. Face à l’énormité de la pandémie qui a déjà fait plus de deux millions de morts dans le monde et dont les impacts économiques et sociaux sont terribles, comment ne pas acter que l’intérêt général doit primer sur l’intérêt particulier ? L’accès au vaccin doit être considéré comme un bien commun universel.

    #Covid-19#migrant#migration#monde#inegalite#sante#vaccination#frontiere#pandemie

  • Un besoin « vital » de porter plainte contre son père : Coline Berry s’exprime pour la première fois
    https://www.nouvelobs.com/societe/20210215.OBS40242/un-besoin-vital-de-porter-plainte-contre-son-pere-coline-berry-s-exprime-

    « C’était vital. Peut-être, oui, que ça va lui faire du mal. Encore que j’estime que j’apporte de la réparation dans la famille, et pour les générations futures. Mais c’est surtout que le mal que moi ça m’a fait est devenu plus fort que celui que j’avais peur de lui infliger. »

    (...)

    « J’ai besoin de la reconnaissance des faits. […] Cela ne m’apporterait rien qu’il soit condamné. J’ai simplement besoin que la réalité, la vérité, soient mises en face, que la loi soit mise en face de ce que j’ai vécu. "

  • #Toulouse : l’histoire de gens qui cherchent une maison
    https://fr.squat.net/2021/02/15/toulouse-lhistoire-de-gens-qui-cherchent-une-maison

    C’est l’histoire de personnes qui n’ont pas de maison. Elles en trouvent une, vide depuis au moins deux ans. La maison est belle et grande. Alors elles emménagent histoire d’en avoir une, de maison. Des maisons vides, il y en a plein. Des gens sans maison, tout autant. Alors autant en profiter ! C’est aussi […]

    #83_avenue_de_Fronton #affaire_Roland #fachos #médias #Minimes

  • #Marseille : appel à témoignages sur les nouvelles méthodes de l’état pour expulser les squats
    https://fr.squat.net/2021/02/15/marseille-appel-a-temoignages-sur-les-nouvelles-methodes-de-letat

    Actuellement, le gouvernement fait passer une nouvelle loi anti-squat « ASAP » qui facilite les expulsions, réduit les possibilités d’occuper des logements vides et criminalise ces occupations. Mais avant même l’application de cette loi, il semblerait que des ordres ont déjà été donnés aux préfets pour réprimer davantage les squats. Voici quelques exemples de ce […]

    #expulsion

  • Montelíbano (Colombie) : une opération de destruction de cultures illicites se termine en #émeutes
    https://fr.squat.net/2021/02/15/montelibano-colombie-une-operation-de-destruction-de-cultures-illicites-se

    En fin d’après-midi le samedi 6 février 2021, des affrontements ont opposé au moins une cinquantaine de paysan·ne·s aux forces de l’ordre à Montelíbano, au sud du département de #Córdoba, quand les autorités publiques ont commencé à détruire de force des cultures illicites de coca, moyen principal de survie des gens vivant là. L’Association des […]

    #Amériques #Colombie #potager

  • « Après l’affaire Duhamel, le Me Too de l’inceste »
    https://www.youtube.com/watch?v=FHwr3HDXw00


    Émission du 09/02/2021
    https://qg.media/emission/apres-laffaire-duhamel-le-me-too-de-linceste
    Aude Lancelin a reçu la psychiatre Muriel Salmona, présidente de l’association « Mémoire traumatique et victimologie », pour parler de la libération de la parole sur l’inceste depuis la publication de la Familia Grande de Camille Kouchner
    (pas encore vu)
    #inceste

  • Pandémie de Covid-19 : le virus circulait sans doute en France dès novembre 2019
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/02/10/le-sars-cov-2-circulait-sans-doute-en-france-des-novembre-2019_6069431_3244.

    Interpellés par plusieurs cas cliniques ayant précédé l’épidémie de Covid-19, des médecins de l’hôpital Albert-Schweitzer de Colmar (Haut-Rhin) réanalysaient, en mai, plusieurs centaines de scanners thoraciques de patients admis dans leur établissement dès octobre 2019, pour des pneumopathies sévères. Un de ces malades, hospitalisé le 16 novembre, était porteur de lésions évocatrices du Covid-19. Une présence du nouveau coronavirus sur le territoire français était dès lors suspectée à cette date, mais sans analyse de prélèvements biologiques, l’hypothèse demeurait fragile. Des travaux de chercheurs français publiés samedi 6 février dans la revue European Journal of Epidemiology viennent appuyer ces observations : ils indiquent, avec un haut niveau de preuve, que le SARS-CoV-2 circulait déjà en France en novembre 2019.
    Les chercheurs, conduits par le professeur Fabrice Carrat, directeur de l’Institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique (Inserm, Sorbonne Université), ont procédé avec un soin particulier. Ils ont analysé 9 144 échantillons sanguins collectés sur des participants à la cohorte « Constances » – la plus grande cohorte épidémiologique suivie en France, forte de plus de 200 000 individus, lancée en 2012 grâce au programme des investissements d’avenir. Ils les ont d’abord passés au crible d’un test rapide détectant des immunoglobulines de type G (IgG) anti-SARS-CoV-2. Ce test étant réputé générer des « faux positifs », les auteurs ont confirmé ou infirmé la mesure grâce à un second test, très spécifique, mais plus délicat à mettre en œuvre.
    Résultats : sur les 9 144 échantillons analysés, treize prélevés entre novembre et janvier se sont révélés positifs aux deux tests, dont dix prélevés en novembre ou décembre. « Nous avons commencé par analyser des échantillons prélevés en janvier et février, et nous en avons trouvé bien plus de positifs que ce à quoi nous nous attendions, explique l’épidémiologiste Marie Zins (Inserm, université de Paris), principale investigatrice de la cohorte “Constances”. Nous avons donc cherché à voir si nous en trouvions dès l’automne. » Pour M. Carrat, « ces résultats suggèrent que dès les mois de novembre et décembre, le taux de contamination dans la population française est déjà de l’ordre d’un cas pour mille ». « Ces résultats ne montrent pas de surreprésentation de la maladie dans certaines régions, ajoute M. Carrat. On semble trouver des cas de manière sporadique, un peu partout sur le territoire. »
    Jusqu’à présent, le premier cas français de Covid-19 confirmé par test PCR est un patient hospitalisé pour une pneumopathie sévère, fin décembre 2019, en Seine-Saint-Denis, et dont les prélèvements, congelés, avaient été réanalysés en avril 2020 à l’initiative des professeurs Yves Cohen et Jean-Ralph Zahar (hôpital Avicenne, à Bobigny). Parmi les treize cas positifs entre novembre et janvier, onze ont en outre répondu à un questionnaire adressé par Santé publique France – qui a cofinancé ces travaux – pour mettre en évidence des facteurs de risque ou une éventuelle association avec des symptômes caractéristiques du Covid-19, chez l’intéressé ou l’un de ses proches. Une femme d’une trentaine d’années, positive en novembre, a expliqué que son partenaire avait souffert d’une toux intense en octobre. Une autre, ayant voyagé en Espagne début novembre, a été en contact avec un membre de sa famille ayant souffert d’une pneumonie d’origine inconnue entre octobre et décembre.
    « Dans plus de la moitié des cas, on a affaire à des gens qui ont voyagé ou qui ont été en contact avec des personnes ayant été malades, dit M. Carrat. L’un des cas avait voyagé deux mois en Asie et est revenu début décembre en France… un autre est médecin, ce qui est aussi un facteur de risque. » Un grand nombre d’échantillons sanguins étant collectés de manière routinière, depuis 2018, sur les membres de la cohorte « Constances », les chercheurs pourraient tenter de remonter plus loin encore dans le temps. « La question que nous nous posons désormais, c’est de savoir si le virus était déjà en France en septembre et pourquoi pas en août, explique Mme Zins. Nous cherchons les financements pour mener les analyses nécessaires. » En attendant, ces résultats confortent d’autres travaux italiens suggérant que les premiers cas d’infections par le nouveau coronavirus remontaient, en Italie, au mois d’octobre 2019. Ces travaux avaient été publiés en novembre 2020 dans le Tumori Journal, mais la méthodologie mise en œuvre avait été jugée fragile par plusieurs spécialistes, alors interrogés par Le Monde. Ces indices d’une circulation déjà soutenue du nouveau coronavirus en Europe dès les mois de novembre, voire d’octobre, mettent à mal l’hypothèse d’un départ de l’épidémie sur le marché de Huanan, à Wuhan, en Chine, au début du mois de décembre 2019. Toutefois, ils ne permettent pas de remettre en cause les connaissances acquises sur la phylogénie du virus – les souches du SARS-CoV-2 circulant actuellement dans le monde dérivant toutes d’un virus apparu vers septembre-otobre 2019, dans la province chinoise du Hubei.

    #Covid-19#migrant#migration#france#chine#sante#souche#coronavirus#circulation#frontiere

  • #Nestor_Makhno et la question juive - L’année 1918
    https://www.partage-noir.fr/nestor-makhno-et-la-question-juive-l-annee-1918

    Il faut constater avec regret que la troupe de choc dans ce coup qui conduisit en fin de compte à la perte de tout ce que le peuple avait acquis sur le plan révolutionnaire, à la restauration des pratiques bourgeoises et à la dictature des gros propriétaires fonciers, fut celle des Juifs, composée de trois cents combattants et commandée par deux militants juifs : Taranovsky et Charovsky. Nestor Makhno et la question juive

    / Nestor Makhno

    #Nestor_Makhno_et_la_question_juive_

  • Comment Britney Spears a été humiliée et détruite par une société misogyne
    https://www.parismatch.com/People/Comment-Britney-Spears-a-ete-humiliee-et-detruite-par-une-societe-misogy

    « Framing #Britney_Spears », nouveau #documentaire choc produit par le « New York Times », a analysé comment le père de la chanteuse a fini par contrôler sa carrière et la bataille que celle-ci mène depuis quelques années pour retrouver son autonomie.

  • #Toulouse : variation de mise sous pression
    https://fr.squat.net/2021/02/11/toulouse-variation-de-mise-sous-pression

    En septembre, une maison inhabitée du quartier des #Minimes à Toulouse est squattée et suite à la procédure judiciaire, les occupant.es bénéficient de la trêve hivernale (récemment prolongée du 31mars au 1er juin dans le cadre de la crise sanitaire). Ces deux seuls mois de prolongation déclenchent une réactualisation de la vague médiatique et politique […]

    #83_avenue_de_Fronton #affaire_Roland #fachos #médias

  • « Je vais retrouver la dignité d’être légale » : la Colombie s’apprête à régulariser un million de migrants vénézuéliens
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/02/11/je-vais-retrouver-la-dignite-d-etre-legale-la-colombie-s-apprete-a-regularis

    D’aucuns soupçonnent Ivan Duque de vouloir redorer son blason sur la scène internationale par la régularisation des migrants. « [Cette décision] permet au gouvernement de déplacer le débat avec ses différents interlocuteurs internationaux et de récupérer une certaine marge de manœuvre pour faire face aux critiques concernant sa gestion de l’accord de paix », considère Mme Borda. En décembre, le président Ivan Duque déclarait que les Vénézuéliens en situation irrégulière ne seraient pas vaccinés contre le Covid-19, soulevant un tollé chez les défenseurs des droits de l’homme et les épidémiologistes. Le SPT contredit le propos : les Vénézuéliens pourront bénéficier à terme de la politique de vaccination, qui devrait commencer le 20 février.
    « Nous craignions que l’annonce de la régularisation des migrants ne déclenche un pic de xénophobie mais il n’en a rien été », constate le Vénézuélien Alejandro Daly. Venu faire ses études en Colombie, il est un des fondateurs du « baromètre de la xénophobie », une plate-forme technologique qui permet aux chercheurs d’« écouter Twitter » et de mesurer en temps réel le nombre de messages qui associent la migration et les migrants à des termes péjoratifs.
    « Le nombre de réactions positives à l’annonce de la régularisation des migrants a été supérieur au nombre de messages négatifs », confirme la chercheuse Irene Cabrera. « Nous avons enregistré deux gros pics de xénophobie en 2020, décrit Alejandro Daly. L’un après une déclaration de la maire de Bogota, Claudia Lopez, associant les Vénézuéliens à la délinquance. L’autre est celui qui a suivi la déclaration d’Ivan Duque sur la non-vaccination des migrants. » C’est dire que les discours des responsables politiques pèsent lourd dans la balance de la xénophobie. M. Daly conclut : « Les mesures en faveur des migrants sont beaucoup mieux accueillies qu’on pourrait le croire. »

    #Covid-19#migrant#migration#colombie#venezuela#regularisation#vaccination#sante#inclusion#integration#politique#droit

  • Traque du coronavirus : la bonne solution attend toujours… un feu vert - France - Le Télégramme
    https://www.letelegramme.fr/france/traque-du-coronavirus-la-bonne-solution-attend-toujours-un-feu-vert-11-


    En décembre dernier, à Marseille, les marins-pompiers détectent la contamination à la covid-19 des eaux usées. Le variant anglais, 50 % plus contagieux que la souche actuelle, pourrait devenir majoritaire en France d’ici à quinze jours. Le réseau Obépine permettrait de détecter les foyers et d’agir en conséquence, avant que l’épidémie ne flambe… début mars.
    Photo d’archives Valérie Virel/La Provence/PhotoPQR/MaxPPP

    Face à la menace des variants, pourquoi l’outil du dépistage dans les eaux usées n’est-il pas davantage sollicité ? Permettant de détecter plus tôt le Sars-CoV-2, il pourrait aussi éviter une troisième vague massive et un confinement généralisé. L’absence de décision sidère les scientifiques.

    Quand la note de la Direction générale de la santé (DGS), estampillée « urgent », sur la « stratégie de freinage de la propagation » des variants du coronavirus est tombée, le 7 février dernier, le Pr Yves Buisson a poussé un long soupir. « On refait les mêmes erreurs », se désole le président de la cellule covid-19 de l’Académie de médecine.

    Un gros atout, surtout face aux variants plus contagieux
    Désormais, tout test covid positif doit faire l’objet d’un second test dans les 36 heures, stipule la note. Le but ? Déterminer s’il s’agit d’une contamination par un variant (anglais, sud-africain ou brésilien, beaucoup plus contagieux, NDLR). « Ce n’est pas la bonne méthode, tranche le Pr Buisson. Quand on a cette info, il est déjà trop tard. Cela veut dire que le virus circule déjà depuis plusieurs jours ou semaines… ».

    Si le Pr Buisson est dépité, c’est parce qu’à ses yeux, il existe un moyen « très fiable » de ne pas se faire distancer : le dépistage du virus dans les eaux usées. Le principe est simple : toute personne contaminée, en allant aux toilettes, et avant même qu’elle ne développe éventuellement des symptômes, va excréter du virus dégradé, qui se retrouvera dans les eaux usées… où une équipe de chercheurs français, créée dès le 5 mars 2020 et fédérée en réseau (Obépine pour Observatoire épidémiologique dans les eaux usées), sait le déceler.

    Deuxième vague détectée avec deux mois d’avance
    L’intérêt de cette méthode est double. Un : c’est un détecteur précoce (y compris des cas asymptomatiques). « En Ile-de-France, nous avons repéré les prémices de la 2e vague dès juillet, avec deux mois d’avance, alors que les autres indicateurs (taux d’hospitalisation, appels au 15 et à SOS médecins, etc.) ne révélaient rien », explique Vincent Maréchal, enseignant-chercheur en virologie (Sorbonne et Centre de recherche Saint-Antoine) et l’un des cofondateurs d’Obépine. 

    Deux : c’est beaucoup plus souple et simple à mettre en œuvre, et « _pour un coût dérisoir_e » par rapport à un testing de la population (pour l’instant, 250 euros par prélèvement et par site). La ponction de 10 ml à 30 ml d’eaux usées suffit pour mesurer la contamination au sein de bassins de milliers à plusieurs centaines de milliers d’habitants, selon la taille de la station.

    Frappe chirurgicale ou napalm ?
    Tout est presque prêt, et le réseau n’attend qu’un feu vert, et un financement, pour intégrer la coûteuse identification (le séquençage) des variants. « C’est le meilleur marqueur prédictif. Il permettrait de prendre rapidement les mesures les plus adaptées à une situation locale, et d’en mesurer très rapidement les effets. À terme, il permettrait de déceler les dernières poches de transmission et de connaître l’impact de la vaccination », plaide le Pr Buisson, qui ne comprend pas davantage pourquoi cette piste est « négligée ». Pourquoi hésiter entre la microchirurgie préventive et la chimiothérapie lourde ? Tir ciblé ou napalm ?

    Après un communiqué de l’Académie de médecine, le 7 juillet 2020, le ministère de la Recherche a réagi, et dégagé 3,5 millions d’euros pour démontrer l’efficacité du procédé. Il a également validé l’objectif d’un maillage territorial avec 150 stations de traitement des eaux usées. « L’efficacité, c’est fait, et on affine l’outil prédictif. Mais il n’y a aucune avancée pour le séquençage. J’ai l’impression de revivre le mois de mars 2020… », s’étrangle Vincent Maréchal. Qui pointe les groupes privés ayant flairé le bon filon, et qui commencent à proposer aux collectivités locales ce service, « sans la même garantie d’expertise »… à un coût plus de huit fois plus élevé.

    Promesse d’un règlement rapide
    Alors pourquoi ça bloque ? « C’est d’abord un problème de culture médicale. Les médecins ne sont pas formés à prendre en compte des indicateurs autres qu’humains », avance Vincent Maréchal. Le virologue désigne aussi un « problème lié au système qui ne sait pas réagir et s’adapter à l’urgence et à l’inconnu ». « Les pouvoirs publics sont très intéressés mais on a perdu beaucoup de temps à naviguer dans les méandres des administrations. Les variants, eux, n’attendent pas. Il est urgent d’agir vite désormais », insiste Vincent Maréchal, évoquant également « des tensions sur la disponibilité des réactifs » nécessaires aux analyses. Ce mercredi, après la sollicitation du Télégramme auprès de la Direction générale de la Santé, Vincent Maréchal a reçu l’assurance d’un « règlement favorable et rapide ».

    • dans les commentaires, cette explication :

      Le 20 janvier Covid Tracker organisait une visio conférence avec les porteurs du projet Obépine. Il en ressort que la technique est validée, mais très difficile à mettre en oeuvre car demande une normalisation du procédé de prélèvement et d’analyse, artisanalement possible dans un projet scientifique mais pas automatisable sans des travaux assez conséquents d’apprentissage par une intelligence artificielle par exemple. En effet la concentration de matériel génétique des différents variants de virus dépend de l’heure, de la quantité de population présente, de son lieu de résidence, de la pluviométrie, du laboratoire qui fait le test, etc... En l’état actuel c’est une alerte au cas par cas à condition d’avoir un historique assez long mais qui ne permet pas de faire des cartes en valeur absolue. Je n’ignore pas que l’administration est lente quand il s’agit d’innovation (voire même de déploiement vaccinal), mais il ne faut pas faire croire aux lecteurs et auditeurs qu’une technologie prometteuse est LA solution imparable qui serait bloquée par un complot conformiste. Les journalistes doivent acquérir la culture scientifique nécessaire à expliquer que le développement des technologies peuvent et doivent être accélérées mais prennent un temps qui peut se chiffrer en mois ou en années.

    • Dépistage dans les eaux usées : en Bretagne, premiers résultats imminents - Bretagne - Le Télégramme
      https://www.letelegramme.fr/bretagne/depistage-dans-les-eaux-usees-en-bretagne-premiers-resultats-imminents-

      Le réseau Obépine (Observatoire épidémiologique dans les eaux usées) rassemble 158 des quelque 22 000 stations de traitement des eaux usées du territoire national. « Nous en avons sélectionné au moins une par département, en fonction aussi de certains critères : structure des villes, densité des mouvements de population, etc. », explique Nicolas Cluzel, ingénieur en modélisation mathématique à Sorbonne Université et au sein du réseau.

      Pour l’Ouest, huit agglomérations ont été approchées : Rennes, Nantes, Saint-Malo, Saint-Brieuc, Brest, Quimper, Lorient et Vannes. Six ont rejoint le réseau et ont démarré les analyses ou sont sur le point de les lancer. Les premiers rapports seront d’ailleurs communiqués, cette semaine. Vannes Agglo et Brest Métropole s’apprêtent à adhérer. 

      Permet d’agir localement
      « Avant l’été dernier, les collectivités approchées étaient hésitantes. La semaine dernière, nous en étions à 94 adhérentes avec un suivi enclenché, sur 150 contactées. D’autres nous sollicitent pour nous rejoindre, mais nous ne pouvons pas les intégrer pour le moment, faute de moyens », informe Vincent Maréchal, enseignant-chercheur et cofondateur du réseau. Le virologue s’étonne de certaines réticences : « Pour celles que nous avons sélectionnées, tout est gratuit et permet d’avoir une connaissance très fine et localisée de l’évolution épidémiologique sur leur territoire ». Et d’évoquer le cas de l’Ile d’Yeu « qui se sert de cet outil en temps réel, et informe ses administrés via une radio locale ». Quand une hausse est observée, les municipalités concernées peuvent actionner plusieurs leviers : sensibiliser à un meilleur respect des gestes barrières, déclencher un testing plus ciblé de la population, ou décider de mesures plus restrictives de circulation, par exemple.

  • Sciences-Po Bordeaux : « J’ai été violée et l’administration a répondu par de la violence supplémentaire » – Libération
    https://www.liberation.fr/societe/sciences-po-bordeaux-jai-ete-violee-et-ladministration-a-repondu-par-de-l

    « Libération » a pu s’entretenir avec une dizaine d’étudiantes de l’institut d’études politiques victimes d’agressions sexuelles ou de viols, le plus souvent lors de séjours académiques à l’étranger. Dans certains cas, ils auraient été perpétrés par leurs camarades. Toutes questionnent la prise en charge par l’institution.

    Elle n’oubliera jamais la couleur bleue du mur. Le sentiment de « tétanie ». « L’humiliation. » Puis « l’anéantissement ». Ce mois de septembre 2016, Brune (1) le garde gravé au fer rouge dans sa mémoire. La jeune étudiante de Sciences-Po Bordeaux explique avoir été violée à plusieurs reprises par un étudiant d’un autre institut d’études politiques (IEP) français, durant son année de mobilité dans un pays européen, lorsqu’elle était à peine majeure. Quatre années plus tard, le 23 janvier, Brune a choisi de briser le silence sur un groupe Facebook privé des étudiants de l’institut bordelais, galvanisée par la publication d’un autre témoignage. Libérée d’un poids, elle pointe en revanche la responsabilité de l’établissement dans l’aggravation de son mal-être : « J’ai été violée et l’administration a répondu par de la violence supplémentaire. […] Je me suis sentie abandonnée et niée dans ma chair et dans ma souffrance. »

    #sciencesporcs sur touiteur accompagne de nombreux témoignages dans divers #IEP. La complicité de directions d’instituts ("pas de vagues") y est régulièrement invoquée.
    #paywall #viol #culture_du_viol

    • Sciences-Po SCIENCES-PO BORDEAUX « J’ai été violée et l’administration a répondu par de la violence supplémentaire » « Libération » a pu s’entretenir avec une dizaine d’étudiantes de l’institut d’études politiques victimes d’#agressions_sexuelles ou de #viols, le plus souvent lors de séjours académiques à l’étranger. Toutes questionnent la prise en charge par l’institution.

      Elle n’oubliera jamais la couleur bleue du mur. Le sentiment de « #tétanie ». « L’#humiliation. » Puis « l’#anéantissement ». Ce mois de septembre 2016, Brune (1) le garde gravé au fer rouge dans sa mémoire. La jeune étudiante de #Sciences-Po #Bordeaux explique avoir été violée à plusieurs reprises par un étudiant d’un autre institut d’études politiques (IEP) français, durant son année de mobilité dans un pays européen, lorsqu’elle était à peine majeure.

      Quatre années plus tard, le 23 janvier, Brune a choisi de briser le silence sur un groupe Facebook privé des étudiants de l’institut bordelais, galvanisée par la publication d’un autre témoignage. Libérée d’un poids, elle pointe en revanche la de l’établissement dans l’aggravation de son mal-être : « J’ai été violée et l’administration a répondu par de la #violence supplémentaire. [ ] Je me suis sentie abandonnée et niée dans ma chair et dans ma souffrance. » Créé il y a deux semaines, ce groupe Facebook privé dédié à des étudiants de l’école accueille désormais près de 200 #témoignages de victimes de #violences_sexuelles, avec cette phrase en étendard : « La honte change de camp. » Y sont relatés des viols, des agressions sexuelles, des affaires d’inceste, de revenge porn, de zones grises ou encore de stealthing (le retrait du préservatif sans l’accord du ou de la partenaire) Seize étudiants mis en cause étaient scolarisés dans un IEP français au moment des faits, et certains le sont toujours. Seule une petite minorité de victimes a porté plainte. Au-delà des faits rapportés, c’est un système défaillant qui est mis au jour. Comment accueillir la parole des #victimes ? Comment détecter leurs souffrances ? Ou, plus simplement : comment leur venir en aide ? Libération a pu s’entretenir avec une dizaine de jeunes femmes, actuellement étudiantes ou récemment diplômées de l’institut bordelais, pour tenter de comprendre les dysfonctionnements dans la prévention et la prise en charge des violences sexuelles. Toutes, anonymement, réclament a minima davantage d’« empathie », d’« écoute », d’« aménagements scolaires », et dénoncent un climat « peu propice à la prise de parole ».

      « NE PAS "SALIR" L’IMAGE DE SCIENCES-PO » « Nous sommes stupéfaits par l’ampleur du phénomène. Encore plus face à cette nouvelle vague de témoignages », a réagi la direction de l’établissement auprès de Libération. Mardi, après une rencontre avec l’association féministe de l’institut, #Sexprimons-nous, très mobilisée sur le sujet, le directeur, Yves Déloye, a tenu à saluer « le courage de toutes celles et tous ceux qui ont choisi de témoigner de ces actes odieux ». Il a condamné fermement ces faits et leurs auteurs. Plusieurs dispositifs ont été déployés ces dernières années (cellule de veille, affichages, discours ), a-t-il rappelé, tout en ajoutant qu’il fallait « en poursuivre le développement, en ajouter de nouveaux et les adapter pour saisir tous les cas avérés ». « Il faut une prise de conscience à la hauteur des drames », a-t-il martelé.

      Les témoignages sont glaçants. Il y a celui d’Anouk, qui a fait une énorme crise de panique pendant un cours après son agression sexuelle lors d’un échange académique à l’étranger. Elle a tenté de s’ouvrir à une professeure qui, raconte-t-elle, n’a pas su quoi lui dire et a même eu un mouvement de recul en le mot « traumatisme ». L’étudiante est restée dans son mutisme. Il y a aussi Marie, violée à plusieurs reprises par un proche durant son année de mobilité à Sciences-Po, qui s’est sentie « démunie » à l’autre bout du monde, sans savoir vers qui se tourner - « j’aurais aimé que l’école nous arme mieux avant de nous envoyer si jeunes et si vulnérables ». Alice, agressée sexuellement, a préféré garder le silence : « Avec le recul, je sais que je n’ai pas parlé car on nous avait martelé en cours, lors des discours de rentrée, dans les couloirs, qu’il ne fallait surtout pas "salir" l’image de la maison Sciences-Po. » Chloé, violée par un camarade pendant une soirée, n’a pas parlé ni porté plainte, notamment par peur de « créer un esclandre ». Ou de se « voir coller une étiquette de victime qui [la] définirait pour le reste de sa scolarité ». Depuis la parution, le 7 janvier, du livre de Camille Kouchner la Familia grande, dans lequel elle accuse son beau-père Olivier Duhamel -qui était entre autres président de la Fondation nationale des sciences politiques- de viols répétés sur son frère jumeau, alors adolescent, une onde de choc secoue Sciences-Po Paris. Les étudiants appellent à une « réforme des structures de gouvernance » ainsi qu’à la démission de leur directeur, Frédéric Mion, alerté il y a quelques années.

      POLÉMIQUE VIRILISTE Sur le groupe Facebook privé des étudiants de Sciences-Po Bordeaux, ce sont désormais des dizaines de victimes de violences sexuelles qui ont, elles aussi, décidé de prendre la parole. Toutes racontent la déflagration entraînée parle viol, l’impact sur leur #santé_mentale, leurs études. Beaucoup remettent en cause la mauvaise gestion de l’administration de l’école et l’absence totale de prévention. Une libération de la parole d’autant plus salutaire que l’IEP a souffert, il y a quelques années, d’une vive polémique aux relents virilistes. En février 2013, dix étudiants passaient en conseil de discipline pour avoir créé une page Facebook sexiste et homophobe intitulée « Osez le masculinisme », utilisant le nom et le logo de l’école. Défendu par l’ex-avocat Pierre Hurmic - désormais maire écologiste de la ville -, Sciences-Po Bordeaux déposait également une plainte en diffamation contre X visant le Collectif féministe bordelais contre les violences sexistes dans l’enseignement supérieur, mobilisé contre cette page.

      Sarah, l’une des femmes ayant témoigné sur le groupe Facebook, pointe du doigt les « #micro-violences » de l’administration. Agée de 23 ans, la jeune femme, diplômée de l’IEP l’an dernier, nous raconte avoir été violée pendant l’été 2017 par « un jeune homme croisé en soirée qu’[elle] ne connaissait pas ». Elle n’a pas porté plainte. A cette époque, elle part pour la seconde fois étudier à Madrid lors d’un échange. Alors qu’elle tarde à faire une démarche administrative (sans rapport avec l’affaire),

      Sciences-Po Bordeaux lui demande des explications. Encore très affectée, elle leur fait part, dans un mail envoyé le 1er octobre 2018, de sa « grande anxiété » et raconte être très « éprouvée sur le plan psychologique », sans toutefois mentionner ce viol. L’étudiante explique aussi avoir des difficultés à trouver un suivi sur place. Côté administration, la réponse est laconique : on se dit « désolé » et on lui indique avoir prévenu sa professeure référente. « Elle pensait certainement bien faire, mais elle ne m’a pas demandé mon autorisation pour en parler à une tierce personne », regrette aujourd’hui Sarah.

      Personne ne reviendra vers elle par la suite. Du moins jusqu’à ce jour d’avril 2019, lors d’un entretien de sélection en vue d’une année d’étude à l’université colombienne de Bogotá : « C’est une ville difficile, et je ne pense pas que tu sois prête, tu es trop fragile psychologiquement », aurait estimé sa professeure référente. Des propos douloureux qui blessent l’étudiante : « Elle n’est pas médecin, ce n’était pas à elle de juger de ça. » Ce manque d’attention, Victoria l’a aussi vécu durant sa scolarité. Eté 2016, l’étudiante alors âgée de 19 ans est en deuxième année en échange à l’étranger. « Un étudiant m’a violée pendant une soirée », confie-t-elle. A l’époque, elle n’en parle à personne, ni à la police ni à son école - « je n’avais pas la force, pas l’argent ». Aujourd’hui, elle témoigne pour communiquer sa « rage » et sa « colère » contre un système « déficient qui perpétue les agressions ». Deux ans plus tard, un événement l’a particulièrement heurtée, ravivant ses souvenirs alors qu’elle étudiait dans un autre pays. Elle a appris que deux élèves avaient déposé plainte après avoir été droguées à leur insu et violées par un étudiant étranger. « Sa garde à vue levée, il est revenu à l’université. J’étais très angoissée, je restais prostrée dans ma chambre », se souvient-elle. Le 24 septembre 2018, elle en informe par mail le service des relations internationales de Sciences-Po Bordeaux et l’enjoint de contacter l’université de l’agresseur pour « prendre des mesures et garantir la sécurité des étudiants ». Une nouvelle fois, la réponse est succincte : l’administration de Sciences-Po Bordeaux informera la faculté concernée « le moment venu ». A aucun moment, ils ne reviendront vers elle à ce sujet.

      De plus en plus conscient du #sexisme et des violences sexuelles qui gangrènent la société, et n’épargnent pas l’institut de Bordeaux, l’établissement crée en décembre 2018 une cellule de veille et d’écoute. Depuis sa création, celle-ci a été saisie une vingtaine de fois. Deux cas ont abouti au licenciement d’un agent pour #harcèlement_sexuel et à une procédure judiciaire contre un étudiant. Mais des failles ont perduré.

      En janvier 2019, après plus de deux années de « terreurs » entrecoupées de « flashs », de phases de « dépression » et de « troubles alimentaires » liées à son viol par un camarade, Brune a elle aussi cherché de l’aide auprès de Sciences-Po Bordeaux, encore « trop fragile psychologiquement » pour porter plainte au commissariat. L’étudiante veut « connaître ses droits » et savoir s’il est possible d’« avertir » l’IEP où celui qu’elle accuse d’être son agresseur est scolarisé. Elle obtient un premier rendez-vous avec la chargée de mission égalité femmes-hommes de son école.

      Puis un deuxième. Dans un échange de mails du 6 mars 2019 que Libération a pu consulter, Brune explique s’être sentie « peu considérée et soutenue ». Surtout, l’étudiante regrette que son interlocutrice ait « insisté » pour qu’elle porte plainte et qu’elle ait « pointé du doigt [ses] émotions pour remettre en cause [sa] lucidité et la pertinence de [sa] démarche ».

      « MA DOULEUR ÉTAIT PIÉTINÉE » Dans un nouveau mail, la chargée de mission s’excuse de l’avoir blessée « sans le vouloir ». Elle nie en revanche avoir « questionné la légitimité de sa demande », puis précise : « Oui, je me suis permis de partager avec vous ce que je ferais personnellement. [ ] Je pense que cela ne doit sans doute pas être à moi de vous recevoir par rapport à votre situation douloureuse mais à un·e professionnel·le, formé·e dans ces questions. » Son conseil : contacter la nouvelle cellule de veille et d’écoute.

      Malgré cette mauvaise expérience, qui la « fragilise davantage », Brune s’exécute.

      Elle contacte une première fois la cellule le 7 mars. Un échange qu’elle juge a posteriori « traumatisant ». « On m’a demandé de tout raconter en détail, de donner un nom. On m’a expliqué que la cellule était dans l’obligation légale de prévenir le procureur, qu’une enquête allait peut-être être ouverte, que je serais peut-être amenée à témoigner, que ça ne serait plus de leur ressort. Tout est allé trop vite, j’ai paniqué. En sortant, j’avais l’impression que ma volonté, mon courage et ma douleur étaient piétinés. » Sur ce point, la direction s’appuie sur l’article 40 du code de procédure pénale, qui oblige « les autorités à saisir la #justice en cas de crime ou délit quand elles ont pu en avoir connaissance ». Le dossier de Brune a-t-il créé un précédent ? Toujours est-il qu’aujourd’hui, l’administration concède à Libération « être plus souple » et faire « du cas par cas » avec les élèves.

      Dans un mail du 17 mars, Brune demande un nouveau rendez-vous avec la cellule car elle a d’autres interrogations. Le lendemain, pour insister sur le caractère urgent de sa demande, elle précise dans un mail avoir été prise de « crises de tétanie ». Un message qui restera sans réponse. Il faudra attendre plus d’un mois, le 29 avril, pour qu’on lui propose une rencontre. Sur ce délai, la direction reconnaît « une malheureuse erreur » - la cellule n’aurait pas vu le mail à temps. A bout de force, Brune finira par abandonner Sciences-Po quelques jours plus tard. Le 5 mai, l’administration « accuse réception de sa décision » dans un courrier et lui souhaite « bonne continuation ».

      « [La direction] pensait certainement bien faire, mais elle ne m’a pas demandé mon autorisation pour en parler à une tierce personne. » Sarah

    • Sexprimons-Nous
      https://www.sciencespobordeaux.fr/_shared-resources-images/all/Logos%20associations/SEXPRIMONS%20NOUS_max150x150.JPG

      Sexprimons-Nous est l’association féministe mixte à vocation intersectionnelle en faveur de l’égalité des genres et des sexualités à Sciences Po Bordeaux et sur le campus de Pessac. Fondée en 2015 à Sciences Po Bordeaux, Sexprimons-Nous veille à promouvoir les valeurs de l’égalité et du respect entre les genres et les sexualités sur le campus. Notre démarche est mixte, pro-choix et à vocation intersectionnelle. Nous organisons divers événements dans l’année : rencontres, conférences, projections, lectures, échanges entre membres, organisation de la journée du 8 mars, et autres.

      Mais nous sommes aussi actif·ve·s sur Facebook et Instagram, où nous partageons des avis, des articles et de la documentation sur les luttes contre les inégalités. Nous soutenons au quotidien les étudiant·e·s afin de lutter à notre échelle contre le sexisme sous toutes ses formes dans la bienveillance et le respect des personnes. Pour nous rejoindre ou pour plus d’infos, n’hésitez pas à nous contacter et nous suivre !

      https://www.sciencespobordeaux.fr/fr/vie-etudiante/vie-associative/les-associations-de-sciences-po-bordeaux/sexprimons-nous.html

    • Bien vu par Willem, ce qui touche de plein fouet Sciences Po, et qui est au cœur du récit de Camille Kouchner, c’est la destruction de la respectabilité bourgeoise, confrontée à la révélation de ses violences cachées…

      Mon propos n’est en rien celui d’une spécificité de classe des violences sexuelles. Mais ce dont bénéficie la bourgeoisie, à l’inverse des classes pop., c’est d’une protection institutionnelle a priori, qui la met à l’abri des mises en cause. D’où l’intérêt du dévoilement actuel .

      https://twitter.com/gunthert/status/1359759773076516864

  • HCR - Le HCR et l’OIM se félicitent de la décision de la Colombie de régulariser les réfugiés et migrants vénézuéliens
    https://www.unhcr.org/fr/news/press/2021/2/60215fa3a/hcr-loim-felicitent-decision-colombie-regulariser-refugies-migrants-venezueli

    Le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et l’OIM, l’Organisation internationale pour les migrations, ont salué aujourd’hui l’initiative de la Colombie d’accorder un statut de protection temporaire, pour une durée de dix ans, aux Vénézuéliens présents dans le pays. – Le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et l’OIM, l’Organisation internationale pour les migrations, ont salué aujourd’hui l’initiative de la Colombie d’accorder un statut de protection temporaire, pour une durée de dix ans, aux Vénézuéliens présents dans le pays.La Colombie accueille 1,7 million de Vénézuéliens, ce qui représente plus de 37 pour cent des 4,6 millions de réfugiés et migrants vénézuéliens qui se trouveraient en Amérique latine et dans les Caraïbes. Plus de la moitié des Vénézuéliens en Colombie sont en situation irrégulière, ce qui affecte leur capacité à accéder aux services essentiels, à la protection et à l’assistance. (...)
    Du fait de la pandémie de Covid-19 qui accroît les besoins dans toute la région, de nombreux réfugiés et migrants vénézuéliens, ainsi que les communautés locales, luttent pour survivre alors qu’ils sont confrontés à une aggravation de la pauvreté, aux pertes d’emploi, aux expulsions, à la faim, et à un manque de nourriture et d’accès aux traitements médicaux.
    Le statut de protection temporaire leur donnera également accès aux services essentiels, notamment au système national de santé et aux plans de vaccination contre le Covid-19. La régularisation est également essentielle pour les solutions à long terme, notamment l’accès au marché du travail, ce qui permet de réduire la dépendance à l’aide humanitaire tout en contribuant à la relance socio-économique du pays après la pandémie de Covid-19. « La régularisation des réfugiés et des migrants vénézuéliens en Colombie par le biais de l’octroi d’un statut de protection temporaire généreux est primordiale pour faciliter leur intégration socio-économique, ainsi que leur accès au système de santé national et aux campagnes de vaccination contre le Covid-19 », a déclaré le directeur général de l’OIM, António Vitorino.

    #Covid-19#migrant#migration#colombie#venezuela#regularisation#sante#inclusion#vaccination#migrationirreguliere#protection#droit#integration

  • Levée de boucliers contre les tee-shirts jugés sexistes de Brut Butcher
    https://www.ouest-france.fr/societe/sexisme/levee-de-boucliers-contre-les-tee-shirts-juges-sexistes-de-brut-butcher

    Des salariés de l’enseigne stéphanoise de restauration rapide Brut Butcher dénoncent les tee-shirts aux inscriptions sexistes, jugées dégradantes, que la direction leur impose de porter, a-t-on appris ce mardi 9 février de sources concordantes.

    Face au refus de la direction de mettre fin à cette pratique en place depuis plus de trois ans dans la vingtaine de restaurants Brut Butcher en France, une manifestation est prévue samedi à Saint-Étienne devant l’un des établissements.

    L’enseigne (propriété de l’industriel de la viande Despi) fonctionne actuellement en mode commande à emporter et livraison à domicile en raison de la crise sanitaire du Covid-19.

    Parmi les inscriptions sur ces vêtements de travail figurent « Un restau très cochon », « Il est cho Rizo », ou « À poêle les dindes »…

    Un wrap « La cagole »

    « Les salariés subissent régulièrement des remarques obscènes et salaces de la part de certains clients », explique Frédéric Leschiera, responsable régional commerce et services du syndicat Sud. Une employée contactée par l’AFP témoigne en avoir été victime alors qu’elle arborait un tee-shirt « Il faut se la farcir ».

    Depuis l’an dernier, ces restaurants de burgers proposent aussi un wrap baptisé « La cagole ».

  • En #France, les recherches sur la #question_raciale restent marginales

    Avec des relents de maccarthysme, une violente campagne politico-médiatique s’est abattue sur les chercheurs travaillant sur les questions raciales ou l’#intersectionnalité en France, les accusant de nourrir le « #séparatisme ». Dans les faits, ces recherches sont pourtant dramatiquement marginalisées.

    « L’université est une matrice intellectuelle, aujourd’hui traversée par des mouvements puissants et destructeurs qui s’appellent le #décolonialisme, le #racialisme, l’#indigénisme, l’intersectionnalité. » Lors de l’examen du projet de loi dit « séparatisme », à l’instar de la députée Les Républicains (LR) #Annie_Genevard, beaucoup d’élus se sont émus de cette nouvelle #menace pesant sur le monde académique.

    Que se passe-t-il donc à l’université ? Alors que des étudiants font aujourd’hui la queue pour obtenir des denrées alimentaires et que certains se défenestrent de désespoir, la classe politique a longuement débattu la semaine dernière de « l’#entrisme » de ces courants intellectuels aux contours pour le moins flous.

    Après les déclarations du ministre de l’éducation nationale Jean-Michel #Blanquer en novembre dernier – au lendemain de l’assassinat de #Samuel_Paty, il avait dénoncé pêle-mêle les « #thèses_intersectionnelles » et « l’#islamo-gauchisme » qui auraient fourni, selon lui, « le terreau d’une fragmentation de notre société et d’une vision du monde qui converge avec les intérêts des islamistes » –, Emmanuel #Macron a lui-même tancé, dans son discours des Mureaux (Yvelines), le discours « postcolonial », coupable, selon lui, de nourrir la haine de la République et le « séparatisme ».

    À l’Assemblée, Annie Genevard a invité à se référer aux « travaux » du tout récent #Observatoire_du_décolonialisme qui a publié son manifeste dans un dossier spécial du Point, le 14 janvier. Appelant à la « riposte », les signataires – des universitaires pour l’essentiel très éloignés du champ qu’ils évoquent et pour une grande partie à la retraite – décrivent ainsi le péril qui pèserait sur le monde académique français. « Un #mouvement_militant entend y imposer une critique radicale des sociétés démocratiques, au nom d’un prétendu “#décolonialisme” et d’une “intersectionnalité” qui croit combattre les #inégalités en assignant chaque personne à des identités de “#race” et de #religion, de #sexe et de “#genre”. » « Nous appelons à mettre un terme à l’#embrigadement de la recherche et de la #transmission_des_savoirs », affirment-ils.

    À Mediapart, une des figures de cette riposte, la sociologue de l’art #Nathalie_Heinich, explique ainsi que « nous assistons à la collusion des militants et des chercheurs autour d’une #conception_communautariste de la société ». Ces derniers mois, différents appels ont été publiés en ce sens, auxquels ont répondu d’autres appels. S’armant de son courage, Le Point a même, pour son dossier intitulé « Classe, race et genre à l’université », « infiltré une formation en sciences sociales à la Sorbonne, pour tenter de comprendre cette mutation ».

    Derrière le bruit et la fureur de ces débats, de quoi parle-t-on ? Quelle est la place réelle des recherches sur les questions raciales ou mobilisant les concepts d’intersectionnalité à l’université française ? La première difficulté réside dans un certain flou de l’objet incriminé – les critiques mélangent ainsi dans un grand maelström #études_de_genre, #postcolonialisme, etc.

    Pour ce qui est des recherches portant principalement sur les questions raciales, elles sont quantitativement très limitées. Lors d’un colloque qui s’est tenu à Sciences-Po le 6 mai 2020, Patrick Simon et Juliette Galonnier ont présenté les premiers résultats d’une étude ciblant une quinzaine de revues de sciences sociales. Les articles portant sur la « #race » – celle-ci étant entendue évidemment comme une construction sociale et non comme une donnée biologique, et comportant les termes habituellement utilisés par la théorie critique de la race, tels que « racisé », « #racisation », etc. – représentent de 1960 à 2020 seulement 2 % de la production.

    La tendance est certes à une nette augmentation, mais dans des proportions très limitées, montrent-ils, puisque, entre 2015 et 2020, ils comptabilisent 68 articles, soit environ 3 % de l’ensemble de la production publiée dans ces revues.

    Pour répondre à la critique souvent invoquée ces derniers temps, notamment dans le dernier livre de Gérard Noiriel et Stéphane Beaud, Race et sciences sociales (Agone), selon laquelle « race » et « genre » auraient pris le pas sur la « classe » dans les grilles d’analyses sociologiques, le sociologue #Abdellali_Hajjat a, de son côté, mené une recension des travaux de sciences sociales pour voir si la #classe était réellement détrônée au profit de la race ou du genre.

    Ce qu’il observe concernant ces deux dernières variables, c’est qu’il y a eu en France un lent rééquilibrage théorique sur ces notions, soit un timide rattrapage. « Les concepts de genre et de race n’ont pas occulté le concept de classe mais ce qui était auparavant marginalisé ou invisibilisé est en train de devenir (plus ou moins) légitime dans les revues de sciences sociales », relève-t-il.

    Plus difficile à cerner, et pourtant essentielle au débat : quelle est la place réelle des chercheurs travaillant sur la race dans le champ académique ? Dans un article publié en 2018 dans Mouvements, intitulé « Le sous-champ de la question raciale dans les sciences sociales française », la chercheuse #Inès_Bouzelmat montre, avec une importante base de données statistiques, que leur position reste très marginale et souligne qu’ils travaillent dans des laboratoires considérés comme périphériques ou moins prestigieux.

    « Les travaux sur la question minoritaire, la racialisation ou le #postcolonial demeurent des domaines de “niche”, largement circonscrits à des revues et des espaces académiques propres, considérés comme des objets scientifiques à la légitimité discutable et bénéficiant d’une faible audience dans le champ académique comme dans l’espace public – à l’exception de quelques productions vulgarisées », note-t-elle soulignant toutefois qu’ils commencent, encore très prudemment, à se frayer un chemin. « Si la question raciale ne semble pas près de devenir un champ d’étude légitime, son institutionnalisation a bel et bien commencé. »

    Un chemin vers la reconnaissance institutionnelle qu’ont déjà emprunté les études de genre dont la place – hormis par quelques groupuscules extrémistes – n’est plus vraiment contestée aujourd’hui dans le champ académique.

    Deux ans plus tard, Inès Bouzelmat observe que « les études raciales sortent de leur niche et [que] c’est une bonne chose ». « Le sommaire de certaines revues en témoigne. Aujourd’hui, de plus en plus, la variable de race est mobilisée de manière naturelle, ce qui n’était vraiment pas le cas il y a encore dix ans », dit-elle.

    Pour #Eric_Fassin, qui a beaucoup œuvré à la diffusion de ces travaux en France, « il y a une génération de chercheurs, ceux qui ont plus ou moins une quarantaine d’années, qui ne sursaute pas quand on utilise ces concepts ». « Il n’y a plus besoin, avec eux, de s’excuser pendant une demi-heure en expliquant qu’on ne parle pas de race au sens biologique. »

    #Fabrice_Dhume, un sociologue qui a longtemps été très seul sur le terrain des #discriminations_systémiques, confirme : « Il y a eu toute une époque où ces travaux-là ne trouvaient pas leur place, où il était impossible de faire carrière en travaillant sur ce sujet. » Ceux qui travaillent sur la question raciale et ceux qui ont été pionniers sur ces sujets, dans un pays si réticent à interroger la part d’ombre de son « #universalisme_républicain », l’ont souvent payé très cher.

    Les travaux de la sociologue #Colette_Guillaumin, autrice en 1972 de L’Idéologie raciste, genèse et langage actuel, et qui la première en France a étudié le #racisme_structurel et les #rapports_sociaux_de_race, ont longtemps été superbement ignorés par ses pairs.

    « Travailler sur la race n’est certainement pas la meilleure façon de faire carrière », euphémise Éric Fassin, professeur à Paris VIII. Lui n’a guère envie de s’attarder sur son propre cas, mais au lendemain de l’assassinat de Samuel Paty, il a reçu des menaces de mort par un néonazi, condamné à quatre mois de prison avec sursis en décembre dernier. Il en avait déjà reçu à son domicile. Voilà pour le climat.

    Lorsqu’on regarde les trajectoires de ceux qui se sont confrontés à ces sujets, difficile de ne pas voir les mille et un obstacles qu’ils ou elles ont souvent dû surmonter. Si la raréfaction des postes, et l’intense compétition qui en découle, invite à la prudence, comment ne pas s’étonner du fait que pratiquement toutes les carrières des chercheurs travaillant sur la race, l’intersectionnalité, soient aussi chaotiques ?

    « La panique morale de tenants de la fausse opposition entre, d’un côté, les pseudo-“décoloniaux/postcoloniaux/racialistes” et, de l’autre, les pseudo-“universalistes” renvoie à une vision conspirationniste du monde de la recherche : les premiers seraient tout-puissants alors que la recherche qui semble être ciblée par ces vagues catégories est, globalement, tenue dans les marges », affirme le sociologue #Abdellali_Hajjat.

    Le parcours de ce pionnier, avec #Marwan_Mohammed, de l’étude de l’#islamophobie comme nouvelle forme de #racisme, ne peut là aussi qu’interroger. Recruté en 2010 à l’université Paris-Nanterre, avant d’avoir commencé à travailler la question de l’islamophobie, il a fini par quitter l’université française en 2019 après avoir fait l’expérience d’un climat de plus en plus hostile à ses travaux.

    « On ne mesure pas encore les effets des attentats terroristes de 2015 sur le champ intellectuel. Depuis 2015, on n’est plus dans la #disputatio académique. On est même passés au-delà du stade des obstacles à la recherche ou des critiques classiques de tout travail de recherche. On est plutôt passés au stade de la #censure et de l’établissement de “listes” d’universitaires à bannir », explique-t-il, égrenant la #liste des colloques sur l’islamophobie, l’intersectionnalité ou le racisme annulés ou menacés d’annulation, les demandes de financements refusées, etc.

    En 2016, il fait l’objet d’une accusation d’antisémitisme sur la liste de diffusion de l’#ANCMSP (#Association_nationale_des_candidats_aux_métiers_de_la_science_politique) en étant comparé à Dieudonné et à Houria Bouteldja. Certains universitaires l’accusent, par exemple, d’avoir participé en 2015 à un colloque sur les luttes de l’immigration à l’université Paris-Diderot, où étaient aussi invités des représentants du Parti des indigènes de la République. Qu’importe que ce chercheur n’ait aucun rapport avec ce mouvement et que ce dernier l’attaque publiquement depuis 2008… « Je suis devenu un indigéniste, dit-il en souriant. Pour moi, c’est une forme de racisme puisque, sans aucun lien avec la réalité de mes travaux, cela revient à m’assigner à une identité du musulman antisémite. »

    Abdellali Hajjat travaille aujourd’hui à l’Université libre de Bruxelles. « Lorsque l’on va à l’étranger, on se rend compte que, contrairement au monde académique français, l’on n’a pas constamment à se battre sur la #légitimité du champ des études sur les questions raciales ou l’islamophobie. Sachant bien que ce n’est pas satisfaisant d’un point de vue collectif, la solution que j’ai trouvée pour poursuivre mes recherches est l’exil », raconte-t-il.

    « Moi, j’ai choisi de m’autocensurer »

    #Fabrice_Dhume, qui mène depuis plus de 15 ans des recherches aussi originales que précieuses sur les #discriminations_raciales, notamment dans le milieu scolaire, a lui aussi un parcours assez révélateur. Après des années de statut précaire, jonglant avec des financements divers, celui qui a été un temps maître de conférences associé à Paris-Diderot, c’est-à-dire pas titulaire, est aujourd’hui redevenu « free lance ».

    Malgré la grande qualité de ses travaux, la sociologue #Sarah_Mazouz, autrice de Race (Anamosa, 2020) a, elle, enchaîné les post-doctorats, avant d’être finalement recrutée comme chargée de recherche au CNRS.

    Autrice d’une thèse remarquée en 2015, intitulée Lesbiennes de l’immigration. Construction de soi et relations familiales, publiée aux éditions du Croquant en 2018, #Salima_Amari n’a toujours pas trouvé de poste en France et est aujourd’hui chargée de cours à Lausanne (Suisse). Beaucoup de chercheurs nous ont cité le cas d’étudiants prometteurs préférant quitter l’Hexagone, à l’image de #Joao_Gabriel, qui travaille sur les questions raciales et le colonialisme, et qui poursuit aujourd’hui ses études à Baltimore (États-Unis).

    Derrière ces parcours semés d’obstacles, combien surtout se sont découragés ? Inès Bouzelmat a choisi de se réorienter, raconte-t-elle, lucide sur le peu de perspectives que lui ouvraient l’université et la recherche françaises.

    Certains adoptent une autre stratégie, elle aussi coûteuse. « Moi, j’ai choisi de m’autocensurer », nous raconte une chercheuse qui ne veut pas être citée car elle est encore en recherche de poste. « Dans ma thèse, je n’utilise jamais le mot “race”, je parle “d’origines”, de personnes “issues de l’immigration”… Alors que cela m’aurait été très utile de parler des rapports sociaux de race. Même le terme “intersectionnalité” – qui consiste simplement à réfléchir ensemble classe-race et genre –, je me le suis interdit. Je préfère parler “d’imbrication des rapports sociaux”. Cela revient au même, mais c’est moins immédiatement clivant », nous confie cette sociologue. « Le pire, c’est parler de “#Blancs”… Là, c’est carrément impossible ! Alors je dis “les Franco-Français”, ce qui n’est pas satisfaisant », s’amuse-t-elle.

    « Oui, il y a eu des générations d’étudiants découragés de travailler sur ces thématiques. On leur a dit : “Tu vas te griller !”… Déjà qu’il est très dur de trouver un poste mais alors si c’est pour, en plus, être face à une institution qui ne cesse de disqualifier votre objet, cela devient compliqué ! », raconte le socio-démographe Patrick Simon, qui dirige le projet Global Race de l’Agence nationale pour la recherche (ANR).

    La #double_peine des #chercheurs_racisés

    L’accès au financement lorsqu’on traite de la « race » est particulièrement ardu, l’important projet de Patrick Simon représentant, à cet égard, une récente exception. « On m’a accusé d’être financé par la French American Fondation : c’est faux. Mes recherches ont bénéficié exclusivement de financements publics – et ils sont plutôt rares dans nos domaines », indique Éric Fassin.

    « Il est difficile d’obtenir des financements pour des travaux portant explicitement sur les rapports sociaux de race. Concernant le genre, c’est désormais beaucoup plus admis. Travailler sur les rapports sociaux de race reste clivant, et souvent moins pris au sérieux. On va soupçonner systématiquement les chercheurs de parti-pris militant », affirme la sociologue Amélie Le Renard, qui se définit comme défendant une approche féministe et postcoloniale dans sa recherche. « Nous avons aussi du mal à accéder aux grandes maisons d’édition, ce qui contribue à renforcer la hiérarchisation sociale des chercheurs », ajoute-t-elle.

    https://www.youtube.com/watch?v=spfIKVjGkEo&feature=emb_logo

    Certains se tournent donc vers des #maisons_d’édition « militantes », ce qui, dans un milieu universitaire très concurrentiel, n’a pas du tout le même prestige… Et alimente le cercle vicieux de la #marginalisation de ces travaux comme leur procès en « #militantisme ».

    Pourquoi les signataires des différentes tribunes s’inquiétant d’un raz-de-marée d’universitaires travaillant sur la race, l’intersectionnalité, se sentent-ils donc assaillis, alors que factuellement ces chercheurs sont peu nombreux et pour la plupart largement marginalisés ?

    « J’ai tendance à analyser ces débats en termes de rapports sociaux. Quel est le groupe qui n’a pas intérêt à ce qu’émergent ces questions ? Ce sont ceux qui ne sont pas exposés au racisme, me semble-t-il », avance le sociologue Fabrice Dhume, pour qui les cris d’orfraie de ceux qui s’insurgent de l’émergence – timide – de ces sujets visent à faire taire des acteurs qui risqueraient d’interroger trop frontalement le fonctionnement de l’institution elle-même et son propre rapport à la racisation. « Dans ce débat, il s’agit soit de réduire ceux qui parlent au silence, soit de noyer leur parole par le bruit », affirme-t-il.

    « Il y a aussi une hiérarchie implicite : tant que ces recherches étaient cantonnées à Paris VIII, “chez les indigènes”, cela ne faisait peur à personne, mais qu’elles commencent à en sortir… », s’agace-t-il, en référence à une université historiquement marquée à gauche et fréquentée par beaucoup d’étudiants issus de l’immigration ou étrangers.

    Dans ce paysage, les chercheurs eux-mêmes racisés et travaillant sur les discriminations raciales subissent souvent une forme de double peine. « Ils sont soupçonnés d’être trop proches de leur objet. Comme si Bourdieu n’avait pas construit tout son parcours intellectuel autour de questions qui le concernent directement, lui, le fils de paysans », souligne Patrick Simon.

    La sociologue #Rachida_Brahim, autrice de La Race tue deux fois (Syllepse, 2021), raconte comment, lors de sa soutenance de doctorat, son directeur de thèse, Laurent Mucchielli, et le président du jury, Stéphane Beaud, lui ont expliqué qu’en allant sur le terrain racial, elle était « hors sujet ». « Le fait que je sois moi-même d’origine algérienne m’aurait empêchée de prendre de la distance avec mon sujet », écrit-elle.

    Au cours de notre enquête, nous avons recueilli plusieurs témoignages en ce sens de la part de chercheurs et singulièrement de chercheuses qui, pour être restés dans l’institution, ne souhaitent pas citer nommément leur cas (voir notre Boîte noire). « Ce sont des petites remarques, une façon insistante de vous demander de vous situer par rapport à votre sujet de recherche », raconte une chercheuse.

    De la même manière que les féministes ont longtemps dû répondre à l’accusation de confondre militantisme et sciences au sein des études de genres, les chercheurs racisés osant s’aventurer sur un terrain aussi miné que le « racisme systémique » doivent constamment montrer des gages de leur #objectivité et de leur #rigueur_scientifique.

    « Le procès en militantisme est un lieu commun de la manière dont ces travaux ont été disqualifiés. C’est la façon de traiter l’objet qui définit le clivage entre ce qui est militant et ce qui est académique. Sont en réalité qualifiés de “militants” les travaux qui entrent par effraction dans un champ qui ne reconnaît pas la légitimité de l’objet », analyse Patrick Simon.

    Comme les études de genre ont massivement été portées par des femmes, les questions raciales intéressent particulièrement ceux qui ont eu à connaître de près le racisme. Ce qui n’est pas, manifestement, sans inquiéter un monde universitaire encore ultra-majoritairement blanc. « Les chercheurs assignés à des identités minoritaires sont souvent discrédités au prétexte qu’ils seraient trop proches de leur sujet d’étude ; en miroir, la figure du chercheur homme blanc est, de manière implicite, considérée comme neutre et les effets sur l’enquête et l’analyse d’une position dominante dans plusieurs rapports sociaux sont rarement interrogés », souligne de son côté Amélie Le Renard.

    « Il y a eu des générations de chercheurs qui n’ont pas réussi à trouver leur place dans l’institution. Ce qui est intéressant, c’est que certains commencent à émerger et qu’ils appartiennent à des minorités. Et c’est à ce moment-là que des universitaires s’élèvent pour dire “ça suffit, c’est déjà trop”, alors qu’ils devraient dire “enfin !” », insiste Éric Fassin.

    Depuis quelques mois, et le tragique assassinat de Samuel Paty par un islamiste, les attaques à l’encontre de ces chercheurs ont pris un tour plus violent. Ceux qui travaillent sur l’islamophobie s’y sont presque habitués, mais c’est désormais tous ceux qui travaillent sur les discriminations ethno-raciales, la #colonisation, qui sont accusés d’entretenir un #esprit_victimaire et une rancœur à l’égard de l’État français qui armerait le terrorisme.

    « Quand le ministre de l’éducation nationale vous associe à des idéologues qui outillent intellectuellement les terroristes, c’est très violent », affirme une chercheuse qui a particulièrement travaillé sur la question de l’islamophobie et a, dans certains articles, été qualifiée de « décoloniale ».

    « Les termes employés sont intéressants. Qu’est-ce qu’on sous-entend quand on dit que les “décoloniaux infiltrent l’université” ou qu’on reprend le terme d’“entrisme” ? Cela dit que je n’y ai pas ma place. Alors que je suis pourtant un pur produit de l’université », analyse cette maîtresse de conférences d’origine maghrébine, qui ne souhaite plus intervenir dans les médias pour ne pas subir une campagne de dénigrement comme elle en a déjà connu. « C’est terrible parce qu’au fond, ils arrivent à nous réduire au #silence », ajoute-t-elle en référence à ceux qui demandent que le monde académique construise des digues pour les protéger.

    Le grand paradoxe est aussi l’immense intérêt des étudiants pour ces thématiques encore peu représentées dans l’institution. En attendant, l’université semble organiser – avec le soutien explicite du sommet de l’État – sa propre cécité sur les questions raciales. Comme si la France pouvait vraiment se payer encore longtemps le luxe d’un tel #aveuglement.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/080221/en-france-les-recherches-sur-la-question-raciale-restent-marginales?onglet

    #recherche #université #auto-censure #autocensure #assignation_à_identité #neutralité #décolonial

    ping @karine4 @cede

    • La grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le boeuf

      Pendant ces dernières heures, j’ai pris le temps de tenter une approche purement « comptable » (urgh) concernant la fameuse et néanmoins ridicule polémique à propos de la supposée « gangrène islamogauchiste » qui serait à l’œuvre au sein de nos respectables universités. Ce billet de recherche sera simple, et je vais d’abord dire ce qu’il n’est pas, suite aux quelques échanges bienveillants que j’ai pu avoir avec certain.e.s collègues qui auront le plaisir de se reconnaître – et je les remercie d’ailleurs sincèrement pour leurs remarques.

      Disclaimer, donc (comme on dit en bon français) : cette mini-étude n’a pas pour vocation à consolider les arguments des pourfendeurs de l’islamogauchisme. Il part simplement de l’expression « gangrène » et tend à leur montrer, chiffres à l’appui, qu’on est très très loin d’une explosion de ces concepts qu’ils ne maîtrisent pas (comme « intersectionnalité » ou « décolonial », qui renvoient par exemple tous deux à des positionnements épistémologiques et des fondements théoriques bien précis, n’en déplaisent à ceux qui sont trop fainéants pour n’y voir qu’une bouillasse méprisable, là où se trouve un champ d’intérêt extrêmement fécond et inspirant). En gros, l’idée n’est pas de dire « ne vous alarmez pas, confrères conservateurs, c’est en fait une idéologie marginale« , mais plutôt de dire « 1. il n’y a pas d’idéologie, mais de la recherche et 2. si on s’amusait à la compter, on obtient des résultats ridicules qui n’autorisent ni vos invectives, ni votre inculture sur ces sujets ».

      Et au passage, la grenouille dans le titre (pour être clair), ce sont bien ceux qui accusent l’université de dérives idéologiques. Spoiler : tout est idéologie de toute manière puisque tout peut être politique, et tous les corps de métier sont d’ailleurs traversés par des expériences militantes – et heureusement, c’est ça la démocratie ! Il y a autant de militantisme possible à l’université que dans la culture, le milieu associatif, le journalisme et même (mais si si si) le monde de l’entreprise. Donc cessons d’agiter des fantômes pour nous faire peur, et surtout cessons les chasses aux sorcières qui visent précisément les universitaires – les régimes qui organisent cela n’ont rien de démocratique, et ma crainte principale se loge bien là, d’ailleurs. Ma démarche est donc la suivante : vous voulez du sérieux ? On va faire la base de la démarche scientifique : regarder les faits et compter. Cela ne devrait pas être si compliqué que cela, tout le monde peut suivre.

      Je l’exprime ici, en tant que chercheur : ce que des esprits mal intentionnés et peu curieux nomment « islamogauchisme » constitue un ensemble d’études interdisciplinaires que je vous encourage à aller explorer, au moins par pure curiosité intellectuelle – comme je m’évertue, autant que faire ce peut, à lire un maximum d’approches variées. C’est tout le principe de la recherche. Pour pouvoir effectuer mon étude arithmétique, j’ai choisi d’utiliser quelques mots-clé souvent réexploités pour accuser les universitaires d’islamogauchisme : « décolonial », « intersectionnel », « intersectionnalité », « racisé », « racialisé » – puis, pour la blague, « islamogauchisme » et « islamogauchiste ». Je suis donc allé voir ce que nous donnaient 4 des moteurs de recherche scientifiques les plus utilisés : theses.fr et HAL pour la partie générale, puis CAIRN et Open Edition pour la partie plus directement dédiée aux sciences humaines.

      Pourquoi les sciences humaines et pas la sociologie, arguera l’esprit pingre ? Parce que les études dites intersectionnelles ou décoloniales occupent en fait un champ interdisciplinaire très vaste : on y retrouve les études anglophones, la sociologie, la géographie, la démographie, le droit, les sciences du langage, la philosophie, l’anthropologie, les sciences de l’information et de la communication, l’économie, la psychologie, les études littéraires ou encore les arts. Bref, inutile de taper comme un sourd sur cette pauvre sociologie qui se donne pourtant beaucoup de mal (avec des moyens dérisoires) pour comprendre la société qui nous entoure. Nous autres, scientifiques des SHS, sommes donc toutes et tous coupables, rassurez-vous. Et pourquoi, comme on me l’a demandé, ne pas inclure les expressions « gender studies » ou « écriture inclusive » ? Parce que faut pas non plus exagérer : faites donc une liste de toutes les notions de sciences humaines que vous ne comprenez pas et que donc, par définition, il faudrait arrêter d’étudier, et ça sera plus simple. Et si vous ne comprenez pas pourquoi « race », « postcolonial » ou « islam » n’y figurent pas, j’ai des réponses, mais elles ne sont pas dignes d’un carnet de recherche.

      Voici donc la première partie de cette rapide étude : elle est assez simple, puisqu’elle donne des données plutôt brutes. Pour chaque portail dédié à l’archivage des publications scientifiques, il s’est agi de rentrer simplement les mots-clé pour une simple recherche, puis de les transformer en pourcentage par rapport au total de publications répertoriées. De ce point de vue, on est loin du calcul statistique complexe (je rappelle à mon lectorat que je suis linguiste, que j’ai fait un Bac L à l’époque, et que je fais ce que je peux pour ne pas sombrer). Mais comme les pourfendeurs de l’islamogauchisme brandissent souvent la neutralité de la raison face à des chercheur.e.s qui, selon eux, auraient succombé à l’idéologie et à l’émotion, alors chiche : voici des chiffres, soit les représentants les plus aboutis du mythe de la prétendue neutralité scientifique et de l’objectivité rationnelle. Mieux : des données, de la data. Et le tout dans une infographie avec des couleurs et des dessins.

      Premier à passer sur le grill d’un simple comptage, le portail HAL répertorie un ensemble plutôt impressionnant de références scientifiques déposées. Toutes disciplines confondues, on arrive à un pourcentage excessivement faible concernant les mots-clés proposés. Ironie du sort : la seule publication qui sort lorsqu’on rentre le terme « islamogauchiste » est celle de Pierre-André Taguieff, à qui l’on attribue souvent à tort la naissance de cette expression bien connue des milieux d’extrême-droite (il n’en reste pas moins qu’il a largement participé à sa popularisation et à sa normalisation médiatique, sans être lui-même d’ailleurs sympathisant des milieux d’extrême-droite – je tiens ici à le préciser, avant qu’on ne m’accuse de manœuvre diffamatoire). Il convient également de signaler qu’on retrouve également dans ces publications des travaux qui critiquent justement les études décoloniales et intersectionnelles, ce qui fait monter artificiellement les chiffres – sans compter le fait que certaines publications cumulent plusieurs de ces mots-clés. Bref, pour le dire vite : ce pourcentage de 0,038 % est donc probablement surévalué.

      Sur Theses.fr, on remarque une légère augmentation des résultats en terme de pourcentages. Il faut dire ici, de surcroît, que le portail doctoral en question répertorie à la fois les thèses soutenues et les thèses démarrées, ce qui fait que là aussi, on se retrouve avec un cumul de travaux qui n’en sont pas tous au même stade – ce qui est à la fois heureux et bien normal, quand on connaît le processus doctoral, ses exigences et ses coups du sort. Quoiqu’il arrive, vous me direz (et vous aurez raison) que c’est bien gentil de mélanger des concepts de sciences humaines à des thèses de médecine ou de biologie moléculaire, mais qu’il faut être un peu sérieux – et que si pluridisciplinarité il y a, il faut donc aller regarder plus précisément du côté des domaines de recherche concernés. Je suis entièrement d’accord, donc allons-y.

      Et là, pas de surprise : sur CAIRN comme sur Open Edition, qui totalisent tous deux une masse non négligeable de publications répertoriées et accessibles pour les adeptes des sciences dites « molles » ou « subtiles », évidemment, le pourcentage augmente. Mais vous l’aurez remarqué : le pourcentage sur le total de publications répertoriées est très très loin d’être significatif, tout au contraire : on reste aux alentours des 2%, ce qui montre la faible représentativité des études décoloniales ou intersectionnelles. Et là, autre contre-argument : mais c’est facile de prendre le nombre de publications sur le total ! Evidemment, en 1992, on n’utilisait probablement pas ces notions en France ! Tout juste : attardons-nous donc sur l’évolution de ces mots-clé depuis 2011, histoire d’avoir une représentativité plus fine sur le total de publications. Mais même là, il faut se rendre à l’évidence : on est loin d’une écrasante hégémonie des études intersectionnelles, par exemple.

      CAIRN ne figure pas dans les résultats, tout simplement parce que son moteur de recherche ne permet pas de faire émerger des résultats annuels – sinon je l’aurais fait. Mais déjà, avec HAL, Theses.fr et Open Edition, on remarque les mots-clé incriminés sont bel et bien en augmentation depuis 2011, mais qu’ils rencontrent aussi un certain tassement depuis deux ans – ce qui est à vrai dire plutôt inquiétant, car cela souligne le retard de la France sur des questions de recherche qui sont assez largement investies ailleurs dans le monde (et pas qu’aux Etats-Unis, le grand Satan des néoréacs français) – sans pour autant que cela soit d’ailleurs associé à des postures militantes. Cela étant, le tassement de ces mots-clés depuis 2011 n’a de sens que si on regarde leur pourcentage total par rapport à l’évolution de l’ensemble des publications sur les portails en question. Regardons un peu.

      Les accusateurs d’islamogauchisme pourront se réjouir et pointer du doigt une tendance à la hausse ; cela dit, on remarque une dynamique différente en fonction du portail. Là où le nombre de thèses marque une augmentation qui reste régulière, par exemple, on ne peut que constater la faiblesse des pourcentages par an. C’est sur Open Edition que ce type de courbe reste le plus intéressant à analyser : on voit une évolution croissante, bien que timide, de l’intérêt pour les sujets que permettent d’analyser les études intersectionnelles et décoloniales, quelle que soit la discipline d’ancrage. Mais attention aussi : sur Open Edition, on se bat à coups de revues scientifiques notamment, et en regardant sur ce portail, vous trouverez une évolution nette des publications scientifiques qui critiquent en fait les études décoloniales et intersectionnelles – en d’autres termes, l’augmentation de publication n’est pas tant dû à l’ancrage épistémologique dans ces champs, mais aux débats interdisciplinaires qui surgissent en raison de leurs méthodes ou de leurs concepts. En bref, cette évolution montre plus une vitalité des débats (tiens tiens) qu’une homogénéisation des épistémologies et des méthodologies.

      Que dire après tout cela ? Qu’avant de juger un terme sur de simples rumeurs colportées sur une chaîne de télé trop racoleuse ou un réseau social trop électrique, il suffit d’aller lire. Parce que lire reste encore la meilleure réponse à apporter à l’ignorance, aux idées reçues, aux raccourcis commodes, aux paresses intellectuelles ou aux ignorances légitimes. Ne pas savoir, ce n’est pas grave : nous sommes toutes et tous ignares sur bien des sujets. Ne pas savoir et prétendre que l’on a pas besoin de savoir pour se faire une idée, c’est non seulement bête à manger du foin et dommage en général, mais c’est surtout dangereux pour nos fragiles régimes démocratiques – et surtout pour l’indépendance de la recherche. Au final, on a le droit de questionner, de débattre et de discuter autour de ces questions (et encore heureux) : mais faisons-le dignement.

      PS : Au passage, ce n’est plus la peine de commander une étude au CNRS concernant l’islamogauchisme, du coup.

      PS bis : Vous avez le droit de ne pas être d’accord avec ma démarche, bien entendu. Depuis la première publication de cette mini-étude sur Twitter, j’ai eu quelques messages un peu vifs : ceux qui disent que l’islamogauchisme n’aiment pas mes chiffres et m’accusent de ne pas mesurer « l’impact » par exemple, ou encore de ne pas vouloir voir la réalité derrière les chiffres (???). Et celles et ceux qui pensent qu’il ne faut pas donner du grain à moudre avec des chiffres. J’ai envie de répondre que dans ce genre de situation, il peut y avoir une pluralité de méthodes et de démarches, et que rien ne leur empêche de concorder à des moments opportuns. En tout cas, c’est ma modeste contribution, et ma modeste démarche.

      https://sysdiscours.hypotheses.org/352

      déjà signalé par @marielle ici :
      https://seenthis.net/messages/904269