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  • A Mayotte, un camp de migrants africains cristallise toutes les colères de l’île
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    A Mayotte, un camp de migrants africains cristallise toutes les colères de l’île
    A Mamoudzou, des collectifs d’habitants demandent le démantèlement d’un camp informel d’environ 500 personnes originaires de la région des Grands Lacs et de Somalie.
    Par Jérôme Talpin (Saint-Denis, La Réunion, correspondant régional)
    A l’appel de plusieurs collectifs, près de 400 personnes ont manifesté sous la pluie, dimanche 21 janvier, dans le stade de Cavani, à Mayotte, pour exiger le démantèlement d’un camp d’environ 500 migrants. Séparés des protestataires par le grillage de l’enceinte sportive, les migrants originaires de la région des Grands Lacs et de Somalie, dont la moitié sont bénéficiaires de la protection internationale ou demandeurs d’asile, ont répondu en brandissant des drapeaux français et des morceaux de tissu blanc avec pour message : « Nous disons non à la xénophobie à Mayotte » ou encore « Halte au harcèlement des Africains réfugiés à Mayotte ».
    Depuis fin décembre et le rejet par le tribunal administratif d’une demande d’expulsion en urgence, la tension est vive dans ce quartier du sud de Mamoudzou. Soutenus par plusieurs collectifs de citoyens mahorais, les riverains protestent contre l’impossibilité d’utiliser les infrastructures sportives et désignent les étrangers comme les responsables de vols, d’agressions et de trafic de drogue.
    « Il existe ici une très forte stigmatisation contre eux et des violences quasi quotidiennes », observe Charline Ferrand-Pinet, directrice de Solidarité Mayotte, une association d’aide aux demandeurs d’asile dans ce département français. Des heurts ont éclaté, des véhicules ont été incendiés, des violences ont été commises contre les forces de l’ordre de la part de bandes de délinquants qui cherchent à en découdre avec les migrants.
    « Il y a la question de l’insécurité, mais ce camp pose de graves problèmes d’hygiène publique, dénonce Safina Soula, à la tête du Collectif des citoyens de Mayotte 2018. Les gens du quartier n’en peuvent plus. Mayotte est une petite île, on ne peut pas accueillir la misère de l’océan Indien [principalement des Comores et de Madagascar] et maintenant celle de l’Afrique continentale. »
    Faute de places dans les hébergements d’urgence de l’île, les migrants ont commencé, mi-mai 2023, à s’installer sur un terrain en pente surplombant la piste d’athlétisme du stade. Le nombre d’abris de fortune faits de bois, de bambous recouverts de bâches bleues, de nattes et de pagnes retenus par des cordes n’a jamais cessé de grandir. Venus de République démocratique du Congo (RDC), du Burundi, du Rwanda et de plus en plus fréquemment de Somalie, des hommes seuls ou des familles se lavent dans une canalisation à ciel ouvert qui traverse le terrain et puisent de l’eau dans une source voisine.
    Tous ont rejoint Mayotte par kwassa-kwassa, ces barques à fond plat, en partant des côtes tanzaniennes et en passant par les Comores. Un périlleux voyage que des réseaux de passeurs monnayent plusieurs centaines d’euros. Des migrants somaliens ont également fait état d’une traversée directe en bateau depuis leur pays, avant un transbordement au large des Comores.
    Dimanche 14 janvier, des habitantes du quartier ont tenté d’empêcher un groupe d’une soixantaine de Somaliens, qui venaient d’arriver, d’entrer dans le stade. « La population est très remontée et la situation est quasi insurrectionnelle, alerte la députée Estelle Youssouffa (groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires). Après celle venue des Comores, une nouvelle route migratoire s’est mise en place. Ce n’est pas possible. »
    Dans ce département le plus pauvre de France (77 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté) et épuisé par la crise de l’eau et l’insécurité, la population (310 000 personnes, dont la moitié ont moins de 18 ans) croît de 3,8 %, avec sept naissances sur dix de mère comorienne. En avril, les autorités françaises ont lancé l’opération « Wuambushu » contre l’habitat illégal insalubre, l’insécurité et l’immigration clandestine, lors de laquelle des centaines de Comoriens ont été renvoyés de force sur leur archipel.
    « Mayotte ne sera pas le Lampedusa de l’océan Indien, ni la place Stalingrad de Paris ! », a écrit le 16 janvier le député Mansour Kamardine (Les Républicains) à Gérald Darmanin, le ministre de l’intérieur et des outre-mer : « Je demande le déguerpissement sans délai des squatteurs, l’expulsion immédiate dans leur pays d’origine ou les pays de transit des déboutés du droit d’asile. »
    En déplacement à La Réunion pour constater les dégâts du cyclone Belal, M. Darmanin a indiqué, le lendemain, avoir « donné instruction au préfet [de Mayotte] de démanteler ce camp ». « Il n’y a pas de faillite de l’Etat », a-t-il assuré. Le numéro 3 du gouvernement de Gabriel Attal a également annoncé que « 40 personnes ayant obtenu le droit d’asile seront rapatriées dans l’Hexagone ».« Il est temps que le gouvernement agisse », tonne la députée Estelle Youssouffa, rappelant que l’ancien ministre délégué chargé des outre-mer, Philippe Vigier, a visité le camp le 2 novembre lors de son dernier déplacement à Mayotte. « On se moque de nous, s’exaspère Mansour Kamardine. Je ne peux pas imaginer que la France n’ait pas les moyens de lutter contre ces réseaux de trafiquants. Les Mahorais ont l’impression d’être dépossédés de la terre de leurs ancêtres. »
    Pour « faire réagir les élus locaux », plusieurs collectifs de citoyens ont cadenassé les services de quasiment toutes les mairies de l’île, du Conseil départemental de Mayotte, propriétaire du stade, et de plusieurs services de la préfecture.« Il faut pourtant qu’on travaille », réagit le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla. Avec ses agents communaux, il a lui-même commencé un sit-in quotidien, le 6 décembre, face au stade pour s’opposer à ce camp et à d’éventuelles autres installations. « Cette situation n’est pas acceptable, observe l’élu. L’Etat doit assumer. Il n’est pas possible d’accorder une protection à ces personnes et de les laisser dans cette situation d’insalubrité, sous le soleil ou sous la pluie. »Joint par téléphone, Amani (son prénom a été changé), un demandeur d’asile congolais de 29 ans, considère que « [s]a vie est en danger à Mayotte ». « Il y a des attaques tous les soirs contre les réfugiés, témoigne le jeune homme, qui a fui la guerre dans son pays. Il y a beaucoup de racisme ici. Les Mahorais ne veulent pas des Africains. Quand je monte dans un taxi collectif, on me dit : descend. »
    Comme tous les demandeurs d’asile, Amani a droit à une aide en bons alimentaires de 30 euros par mois. La plupart des réfugiés peinent à trouver un emploi, même non déclaré. Certains ressortissants somaliens songent à rentrer dans leur pays. « J’ai reçu un coup de fil d’un jeune me demandant comment joindre l’ambassade de son pays à Paris », témoigne Kitsuné, une dessinatrice réunionnaise qui s’est rendue dans le camp en août 2023.
    « Tout se passe comme si ces migrants fournissaient une explication à tous les maux de l’île », estime Charline Ferrand-Pinet. L’annonce du démantèlement du camp pose la question du relogement des migrants. « Les plus vulnérables devront être accueillis dans des hébergements d’urgence, qui sont limités dans l’île, souligne la directrice de Solidarité Mayotte. Les candidats au retour dans leur pays ne seront sans doute pas les plus nombreux. Il y a toutes les chances que ces migrants aillent s’installer ailleurs. »

    #Covid-19#migrant#migration#france#mayotte#hebergement#camp#migrationirreuguliere#afrique#somalie#violence#xenophobie#violence

  • Médecins diplômés à l’étranger : le gouvernement prolonge les autorisations de travail des praticiens ayant échoué au concours
    https://www.lemonde.fr/sante/article/2024/01/22/medecins-diplomes-a-l-etranger-le-gouvernement-prolonge-leurs-autorisations-

    Médecins diplômés à l’étranger : le gouvernement prolonge les autorisations de travail des praticiens ayant échoué au concours
    Le Monde avec AFP
    Un peu de répit administratif pour les médecins qui ont un diplôme étranger et qui étaient menacés de perdre leur poste s’ils avaient échoué à un concours sélectif cette année. Le gouvernement a annoncé lundi 22 janvier prolonger leurs autorisations de travail et permettre aux lauréats du concours de rester dans leurs services actuels.
    Dans un communiqué, la ministre du travail, de la santé et des solidarités, Catherine Vautrin, explique vouloir, à la demande du président de la République, « sécuriser la situation des Padhue (praticiens à diplôme hors Union européenne), médecins devenus indispensables à notre système de santé ». Les médecins qui n’ont pas eu le concours « ne seront pas laissés sans solution : le gouvernement les autorisera à continuer de travailler durant les mois à venir », précise Catherine Vautrin.
    Ces praticiens, qui travaillent souvent depuis plusieurs années dans les établissements de santé français, étaient cette année contraints de réussir un concours appelé « épreuves de vérification des connaissances » (EVC), pour pouvoir continuer à exercer. Un régime dérogatoire qui permettait auparavant aux établissements d’embaucher des non-lauréats sous divers statuts précaires s’est « éteint » au 31 décembre 2023, rendant impossible leur maintien en poste.
    Le nombre limité de places à ce concours, avec 2 700 postes pour plusieurs milliers de candidats, dont certains le passent à l’étranger, avait laissé une grande partie d’entre eux sur le carreau. Certains se sont même retrouvés sans papiers, car leur carte de séjour est souvent conditionnée à leur travail. Les chefs de service et syndicats hospitaliers avaient aussi dénoncé la répartition territoriale prévue pour les lauréats du concours, dont l’affectation est faite par les services de l’Etat, estimant qu’elle allait priver de nombreux services d’une partie de leurs bras.
    La prolongation des autorisations de travail pour les médecins qui ont un diplôme étranger vaudra jusqu’à « la publication des textes d’application de la loi du 27 décembre 2023 visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels [dite loi Valletoux], qui permettra la délivrance d’attestations provisoires d’exercice dans l’attente d’un nouveau passage des EVC en 2024 », précise la ministre.
    « La situation des près de 2 700 candidats lauréats » est elle aussi « clarifiée » : « pour garantir la continuité des soins et ne pas désorganiser les services (…), les lauréats exerçant déjà sur le territoire national seront maintenus dans leurs fonctions et structures actuelles », assure-t-elle. « Les autres lauréats choisiront leurs postes dans les prochaines semaines. »
    « Notre système de santé souffre d’un manque de moyens humains. Nous ne pouvons nous passer de ces milliers de femmes et d’hommes qui contribuent à assurer l’offre de soins », a déclaré Catherine Vautrin à l’Agence France-Presse. « Il était temps, c’est un premier élément de réponse à cette situation d’urgence qui était inacceptable », a réagi la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet. Mais des points « restent à régler », dont la durée « trop courte » des titres de séjour. Pour ceux qui se voient prolongés jusqu’aux EVC 2024, « si c’est pour refaire le même concours ça ne sert à rien », a-t-elle ajouté, estimant que ce concours est « trop académique » et « discriminant pour des médecins qui bossent soixante heures par semaine ».

    #Covid-19#migrant#migration#france#PADHUE#personnelmedical#immigration#systemedesante#economie#sante#santementale#regularisation

  • En France, les opposants à la loi immigration durcissent le ton contre sa promulgation - InfoMigrants
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    Actualités
    En France, les opposants à la loi immigration durcissent le ton contre sa promulgation
    Par FRANCE 24 Publié le : 22/01/2024
    Dernier coup de pression sur l’exécutif quatre jours avant une décision très attendue du Conseil constitutionnel. Entre 75 000 et 150 000 opposants à la loi sur l’immigration ont manifesté partout en France dimanche contre la promulgation d’un texte assimilé à une victoire idéologique « de l’extrême droite ».
    Plusieurs milliers d’opposants à la loi immigration sont descendus, dimanche 21 janvier, dans les rues de Paris, Bordeaux, Toulouse, Lille et ailleurs en France pour maintenir la pression contre la promulgation d’un texte qui consacre, selon eux, la victoire idéologique « de l’extrême droite » avant la décision du Conseil constitutionnel, le 25 janvier.
    En se ralliant à l’appel lancé initialement par 201 personnalités, les opposants veulent rassembler au-delà de la sphère militante traditionnelle pour faire pression sur l’exécutif, qui pourrait promulguer rapidement le texte voté mi-décembre notamment avec les voix du Rassemblement national, sauf censure complète et surprise par les Sages.
    Quelque 75 000 manifestants, selon le ministère de l’Intérieur, 150 000 pour la CGT, se sont ralliés partout en France à l’appel lancé initialement par 201 personnalités, pour faire pression sur l’exécutif, qui pourrait promulguer rapidement le texte voté mi-décembre notamment avec les voix du Rassemblement national, sauf censure complète et surprise par les Sages le 25 janvier
    Plus de 160 marches étaient prévues dans toute la France. Entre 3 000 et 4 000 manifestants selon les organisateurs, ont défilé dans les rues de Toulouse samedi. Plusieurs centaines de personnes se sont réunies à Metz dimanche matin. À Caen, les syndicats ont revendiqué dimanche matin entre 1 500 et 2 000 manifestants.
    À Lille, environ 2 000 personnes ont défilé avec en tête de cortège des travailleurs de communautés Emmaüs du Nord, en grève depuis six mois pour dénoncer leurs conditions de travail et demander leur régularisation.
    Dans la manifestation parisienne, qui s’est élancée en début d’après-midi de la place du Trocadéro, quelques milliers de personnes étaient présentes dès le départ, avec plusieurs responsables de gauche. La préfecture de police y a comptabilisé 16 000 participants. La CGT, 25.000."Ca fait mal de voir qu’on nous a vendu le barrage républicain et que finalement le gouvernement calque le programme du Rassemblement national", a déploré Ethan Marie, lycéen en région parisienne.Manon Aubry (LFI), Marine Tondelier (Ecologistes), Fabien Roussel (PCF) et Olivier Faure (PS) ont fustigé un exécutif « qui a ouvert le pont levis aux idées de l’extrême droite », selon le premier secrétaire du PS. « Cette loi c’est une rupture avec les principes français depuis 1789 pour le droit du sol et depuis 1945 pour l’universalité de la protection sociale », a expliqué la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet qui a appelé à la mobilisation avec son homologue de la CFDT, Marylise Léon.
    Au milieu des pancartes brandies par les manifestants, « Immigration une chance pour la France », « La France est un tissu de migration », Mady Cissé, Sénégalais de 59 ans, intérimaire dans le bâtiment, apprécie un « soutien important » mais « aussi logique ». « On forme une seule et même société : sans nous, le pays ne fonctionnerait pas, c’est nous qui nous levons à 5 h du matin pour aller travailler dans le bâtiment, pour sortir les poubelles... même les bureaux des préfectures qui nous refusent les papiers, c’est nous qui les nettoyons ! », observe l’ouvrier qui dispose d’un titre de séjour temporaire.
    « Cette loi est une dérive vers l’extrême droite, sur le plan politique », a observé l’ancien ministre RPR et ex-Défenseur des Droits Jacques Toubon présent à Paris, "et sur le fond vers la préférence nationale, qui n’est pas conforme à nos principes fondamentaux et constitutionnels."Les auteurs de l’appel à manifester, dont de nombreuses personnalités du monde de la culture comme la comédiennes Josiane Balasko et l’autrice Alice Zeniter, demandent à Emmanuel Macron de ne pas promulguer la loi.En cause, les nombreux ajouts du Parlement au texte initial du gouvernement, donnant une coloration très à droite à cette loi qui devait initialement reposer sur deux volets, l’un répressif pour les étrangers « délinquants », l’autre favorisant l’intégration.
    Désormais, le texte comprend de nombreuses mesures controversées, comme le durcissement de l’accès aux prestations sociales, l’instauration de quotas migratoires, ou le rétablissement du « délit de séjour irrégulier ».
    Interrogée dimanche dans l’émission « Questions politiques » diffusée simultanément sur France Inter, FranceinfoTV et Le Monde, la ministre déléguée à l’Égalité hommes/femmes, Aurore Bergé, a nié que le texte mette en place « la préférence nationale ».
    La ministre a renvoyé à ses opposants la responsabilité de la montée du RN qui arrive actuellement en tête des sondages pour les futures élections européennes. « Instiller l’idée qu’on est en train de reprendre les thèses et les thèmes du Rassemblement national, là, c’est sûr, on leur donne une victoire idéologique », a-t-elle déclaré.

    #Covid-19#migrant#migration#france#loiimmigration#manifestation

  • En Guinée, un « cycle de violences ininterrompu » poussent des dizaines de milliers de personnes à l’exil - InfoMigrants
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    Grand angle :En Guinée, un « cycle de violences ininterrompu » poussent des dizaines de milliers de personnes à l’exil
    Par Marlène Panara Publié le : 22/01/2024
    Avec plus de 18 000 de ses ressortissants débarqués en Italie en 2023, la Guinée est la première nationalité représentée parmi les migrants arrivés dans le pays. En cause ? Une précarité enracinée et une répression politique sans merci qui s’abat à la moindre dissidence. Et ce, depuis des années, quel que soit le régime en place.Fin du cauchemar pour Banfa. Après deux jours et une nuit sur un frêle bateau en fer, le Guinéen de 27 ans et les autres passagers de son canot sont secourus par les garde-côtes italiens au large de Lampedusa. Ce jour-là, le 12 septembre 2023, la petite île italienne fait face à un afflux d’exilés en provenance de Tunisie, qui sature son unique centre de premier d’accueil. À proximité du hotspot, une serviette sur la tête pour se protéger du soleil, Banfa avait partagé son amertume à InfoMigrants. « Tu es parti de chez toi, tu as quitté tes parents… Sans connaître la Méditerranée. On ne sait pas comment naviguer […] Et souvent les bateaux coulent », avait-il soufflé.
    La dangerosité de cette route en Méditerranée centrale, la plus meurtrière au monde, n’entame pas la détermination des candidats à l’exil. En 2023, 157 652 personnes ont débarqué en Italie, un record. Parmi eux, 18 211 Guinéens. Soit la première nationalité représentée par les migrants arrivés dans le pays, devant la Tunisie et la Côte d’Ivoire.Qu’est-ce qui poussent autant de citoyens guinéens à risquer leur vie en mer ? Pour Alhassane Balde, directeur du Laboratoire d’analyse socio-anthropologique de Guinée à l’Université du Québec, « l’instabilité politique » qui règne dans le pays, conjuguée à une situation économique moribonde constituent la cause de cet exode. « Tous les régimes qui se sont succédé depuis l’indépendance ont échoué à sortir le pays du sous-développement, engendrant des crises sociales à répétition. Résultat, en Guinée, il n’y a ni sécurité, ni réussite possible ».
    Depuis 1958 et la prise de pouvoir du père de l’indépendance Sékou Touré, la Guinée peine à endiguer la pauvreté. Malgré des sous-sols riches en bauxite, en or et en diamants, le pays stagne à la 182e place du dernier Indice de développement humain (IDH) de l’ONU publié en 2022, deux rangs derrière l’Afghanistan.
    Le coup d’État perpétré le 5 septembre 2021 par le colonel Mamadi Doumbouya - qui a précipité la chute du président Alpha Condé après onze ans en poste - avait pourtant « suscité de l’espoir chez tous les Guinéens », dont 61,6 % auraient moins de 25 ans, affirme Alhassane Balde. « La population s’attendait à ce que les choses changent. Mais sans bases solides, le développement prend plus de temps. Alors l’impatience grandit, génère de la frustration, qui s’exprime dans des manifestations lourdement réprimées. Créant un cycle de violences ininterrompu », explique l’enseignant.
    Malgré les promesses d’un autre « système » de gouvernance « respectueux de la justice et axé sur la lutte contre la corruption », le nouveau régime en place a rapidement fait siennes les méthodes de ses prédécesseurs. Les 28 et 29 juillet 2022, des manifestations anti-régime à Conakry ont été réprimées dans le sang, faisant au moins 5 morts.Le 21 septembre dernier, Mamadi Doumbouya a douché les derniers espoirs des Guinéens. Invité à la tribune de l’ONU à New York, le colonel s’est insurgé contre « le modèle démocratique insidieusement, savamment imposé à l’Afrique ». « La greffe n’a pas pris », a-t-il conclu.
    Ancien blogueur à Conakry, Ibrahima a fui le pays à 27 ans, par peur d’être emprisonné. En plus de ses écrits, le jeune homme participait régulièrement à des meetings et des marches « pour dénoncer la mauvaise gouvernance et la corruption ». « J’avais peur, car on savait qu’il y avait des tueries, des arrestations. Mais la défense de la démocratie était une cause qui me tenait vraiment à cœur », raconte-t-il à InfoMigrants.
    Un jour de 2017, lors d’une énième manifestation contre le régime en place, Ibrahima reçoit un appel inquiétant de son père. « Il m’a dit : ‘Ne rentre pas à la maison’. J’avais reçu une convocation de la police. En clair, j’allais être jeté à la Maison centrale [la prison de Conakry, où 1 200 détenus peuvent parfois s’y entasser pour une capacité de 400 places, ndlr], comme beaucoup de mes camarades ».
    Ibrahima se cache alors quelques semaines, avant de quitter définitivement la Guinée « dans le coffre d’une voiture, sous des bagages ». D’abord pour le Mali, puis l’Algérie et la Libye, où il enseigne pendant deux ans le français dans des écoles. Comme la plupart des ressortissants guinéens qui quittent leur pays, prendre la mer pour l’Europe n’est venu qu’en ultime recours : Ibrahima a pris sa décision lorsque des rafles anti-migrants ont été perpétrées en banlieue de Tripoli.
    « Franchement, tout ça, ce n’était pas prévu. Après mes études, j’étais bien, j’avais mon petit quotidien en Guinée. Mais vivre sous Alpha Condé, c’était trop dangereux pour moi, confie le jeune homme aujourd’hui en France. Après le coup d’État, je m’étais dit que je pourrais enfin revoir ma famille. Mais la junte au pouvoir n’a rien changé. Je reçois toujours des menaces ».
    Si la majorité des exilés sont de jeunes hommes, voire des mineurs, de nombreuses Guinéennes s’engagent sur les mêmes routes migratoires. Au manque de perspectives professionnelles, à la précarité et aux persécutions politiques s’ajoutent d’autres maux, comme « la polygamie, les mariages précoces et les mariages forcés », « encore la norme [en Guinée] », écrit le romancier Tierno Monénembo dans une tribune au Point Afrique."C’est la société patriarcale portée à son plus haut degré. Et la coutume l’emportant presque toujours sur la loi, la fillette, jusqu’à sa mort, est confrontée à la possibilité de violences de toutes sortes, de violences sans limites".
    De nombreuses femmes fuient aussi les mutilations génitales. Le pays détient d’ailleurs le deuxième taux d’excision du monde (96 %), derrière la Somalie. "Il n’y a aucune évolution à ce sujet, l’excision est toujours aussi présente en Guinée, déplore Diaryatou Bah, présidente de l’association « Excision, parlons-en ! », basée à Paris. L’État a tellement de problématiques à gérer que l’excision est très, très loin des préoccupations".À l’échelle familiale aussi, cette tradition reste très ancrée. « Si une famille arrête d’exciser, c’est mal vu, on va dire qu’elle trahit les coutumes. Il y a beaucoup de chemin à faire pour changer les mentalités, ajoute Diaryatou Bah. Mais il faut garder espoir. Un jour, ça changera ».

    #Covid-19#migrant#migration#guinee#crise#emigration#sante#mgf#patriarcat#sante

  • Le Canada limite le nombre d’étudiants étrangers pour une période de deux ans
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/22/le-canada-limite-le-nombre-d-etudiants-etrangers-pour-une-periode-de-deux-an

    Le Canada limite le nombre d’étudiants étrangers pour une période de deux ans
    En 2024, le Canada prévoit d’octroyer 364 000 permis d’études internationaux, un chiffre en baisse de 35 % par rapport à 2023, en réponse à la pression sur les logements et les soins de santé exercés dans certaines provinces par les étudiants étrangers.
    Le Monde avec AFP
    Le Canada a annoncé lundi 22 janvier la mise en place d’un plafond sur les permis pour les étudiants étrangers, dont le nombre a explosé ces dernières années, accentuant la crise du logement selon le gouvernement.« Pour garantir qu’il n’y ait pas de nouvelle croissance du nombre d’étudiants [étrangers] au Canada en 2024, nous fixons un plafond national des demandes pour une période de deux ans », a déclaré le ministre de l’immigration, Marc Miller. En 2024, le Canada prévoit donc d’octroyer 364 000 permis d’études internationaux, ce qui représente une baisse de 35 % par rapport à 2023.Le plafond ne va s’appliquer que sur les nouvelles demandes de permis et les étudiants étrangers déjà inscrits dans les universités canadiennes ne seront pas concernés, a assuré le gouvernement de Justin Trudeau, qui travaille avec les provinces, chargées du système éducatif, pour appliquer le plafond.
    « L’annonce d’aujourd’hui vise à protéger un système qui a ouvert la voie à des abus et à soutenir une croissance démographique durable au Canada », a poursuivi Marc Miller. Une estimation officielle indique que plus d’un million d’étudiants étrangers sont établis au Canada. La hausse « rapide » de leur nombre « exerce une pression sur les logements, les soins de santé et d’autres services » dans certaines provinces, a expliqué le ministre, déplorant sans les nommer le « peu de diversité » des pays d’où viennent les étudiants.
    Ce plafond vise également à empêcher certaines écoles privées de profiter du système. « Des établissements privés ont profité des étudiants étrangers en exploitant des campus dépourvus de ressources et en imposant des frais de scolarité élevés, tout en augmentant de manière considérable le nombre d’étudiants étrangers qu’ils accueillent », a déclaré Marc Miller.
    Avec le nouveau système, l’Ontario et la Colombie-Britannique – qui comptent de nombreuses universités à Toronto et Vancouver – devraient accueillir moins d’étudiants étrangers, contrairement au Québec, à l’Alberta et à la Saskatchewan. Le Canada, dont la population a franchi en juin la barre des 40 millions d’habitants, fait face à une importante crise du logement qui frappe toutes les régions du pays.

    #Covid-19#migrant#migration#canada#immigration#etudiant#logement#crise#sante

  • L’Allemagne durcit sa politique migratoire - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/54632/lallemagne-durcit-sa-politique-migratoire

    InfoMigrants L’Allemagne durcit sa politique migratoire
    Par La rédaction Publié le : 19/01/2024
    Les députés allemands ont approuvé jeudi une série de mesures visant à durcir la politique migratoire du pays, alors que le nombre de demandeurs d’asile a fortement augmenté en 2023. En ligne de mire du gouvernement : accélérer l’expulsion des demandeurs d’asile déboutés.Après la France et le Royaume-Uni, c’est au tour de l’Allemagne de durcir encore un peu plus sa politique migratoire. Le Bundestag, équivalent de l’Assemblée, a adopté jeudi 18 janvier un projet de loi afin d’accélérer l’expulsion des demandeurs d’asile déboutés vers leur pays d’origine. « Nous veillerons à ce que les personnes qui n’ont pas le droit de rester dans notre pays soient obligées de le quitter plus rapidement », a déclaré la ministre de l’Intérieur, Nancy Faeser, à propos de ce texte qui vise à « expulser de façon plus rapide et plus efficace ».
    Pour ce faire, les députés allemands ont approuvé le rallongement de la durée maximale de détention des étrangers en situation irrégulière. Désormais, les sans-papiers pourront être retenus 28 jours, contre 10 avant la loi, dans le but de donner plus de temps aux autorités pour organiser les expulsions.Par ailleurs, les mesures adoptées donnent à la police de nouveaux pouvoirs pour rechercher les personnes sommées de quitter le pays et pour établir l’identité des migrants. Dorénavant, les agents sont autorisés à pénétrer dans les chambres des logements partagés pour interpeller une personne en situation irrégulière – avant, ils pouvaient uniquement entrer dans la chambre de la personne concernée.
    La loi s’attaque aussi aux réseaux de passeurs : elle prévoit des sanctions plus sévères pour le trafic d’êtres humains, que les aides au passage soient rémunérées ou non. Toutefois, elle contient des dispositions limitant les poursuites à l’assistance sur terre, protégeant, selon le gouvernement, les ONG qui aident les migrants en mer.Le gouvernement estime que cet arsenal juridique entraînera 600 expulsions supplémentaires par an. Nancy Faeser a observé qu’une mise en œuvre plus ferme de la politique existante avait entraîné l’année dernière une augmentation de 27% des expulsions, pour atteindre le chiffre de 16 430.
    Renvoyer plus de personnes déboutées du droit d’asile dans leur pays d’origine permettra de libérer des ressources pour ceux que l’Allemagne doit accueillir, a assuré la ministre. « Ceux qui fuient la guerre et le terrorisme peuvent compter sur notre soutien », a ajouté Nancy Faeser. La hausse de plus de 50% des demandes d’asile en Allemagne l’an dernier - plus de 329 000 demandes ont été enregistrées en 2023 -, couplée à l’accueil d’un million de réfugiés ukrainiens, met à l’épreuve les capacités des collectivités locales (Länder) qui ont tiré la sonnette d’alarme.La situation profite également au parti d’extrême droite l’AfD (Alternative pour l’Allemagne), en forte progression dans les sondages.
    Fin 2023, le gouvernement allemand avait également décidé de réduire les aides financières versées aux demandeurs d’asile. Selon le ministre des Finances, le libéral Christian Lindner du parti FDP, cette mesure fera économiser un milliard d’euros. Elle permettra « non seulement de soulager les États et les municipalités », mais aussi de « réduire l’attrait de l’État-providence allemand », avait-il alors indiqué sur X (ex-Twitter).Les défenseurs des droits sont vent debout contre ces nouvelles dispositions. « Nous sommes horrifiés à l’idée que des personnes en fuite et ceux qui leur offrent une aide humanitaire puissent être menacés de peines de prison », a déclaré l’association de sauvetage en mer SOS Humanity.
    Pour Sea-Watch, « l’AfD n’a pas besoin d’être au gouvernement, il suffit que celui-ci lui cède ». « Contrairement à l’AfD, le gouvernement fédéral n’a pas besoin d’une réunion secrète pour discuter de la privation massive des droits, il la propose sous forme de loi », tance l’ONG de sauvetage en Méditerranée sur X (ex-Twitter).Sea-Watch fait référence à la révélation la semaine dernière d’une réunion secrète, qui s’est tenue en novembre, entre des membres de l’AfD, des néonazis et des entrepreneurs pour discuter de la mise en place d’un plan baptisé « Remigration » : un projet de déportation massif des demandeurs d’asile, des étrangers avec des titres de séjour et des citoyens considérés comme « non assimilés » du territoire allemand.
    Le cofondateur du Mouvement identitaire autrichien (IBÖ) Martin Sellner y a présenté un projet pour envoyer vers l’Afrique du Nord jusqu’à deux millions de personnes, affirme le média d’investigation Correctiv. Depuis ces révélations, des milliers de personnes manifestent chaque soir en Allemagne contre l’extrême droite accusée de miner la démocratie. « Nous ne laisserons pas les Nazis voler notre ville », « tous ensemble contre le fascisme », « contre l’AfD et la folie nationaliste » scandent les participants lors de ces marches pacifiques.

    #Covid-19#migration#migrant#allemagne#immigration#politiquemigratoire#remigration#asile#expulsion#estremedroite

  • France : les médecins étrangers se mobilisent une nouvelle fois pour une régularisation administrative - InfoMigrants
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    France : les médecins étrangers se mobilisent une nouvelle fois pour une régularisation administrative
    Par RFI Publié le : 19/01/2024
    Ils représentent environ un quart des effectifs dans les hôpitaux de France. Des médecins étrangers se sont mobilisés à Paris devant le ministère de la Santé jeudi 18 janvier pour réclamer leur maintien en poste et la régularisation de leur situation administrative.
    À cause de conditions météorologiques entrainant la suppression de plusieurs trains, ils étaient moins nombreux que prévu, mais les quelques dizaines présents ont bien donné de la voix sous les fenêtres de leur ministère pour demander la régularisation de tous les Padhue, les praticiens titulaires d’un diplôme obtenu hors Union européenne.
    Parmi les quelques dizaines de soignants à diplômes étrangers présents à la manifestation du jeudi 18 janvier à Paris, le docteur Bienvenu Luemba. Ce médecin généraliste de formation est arrivé du Congo-Brazzaville il y a moins d’un an. Marié à une Française, il n’a pas de problèmes administratifs, mais beaucoup de ses confrères sont dans une situation stressante, explique-t-il. « Ils sont tout le temps stressés, ils ne peuvent pas vraiment avoir de projets à long terme. Je connais un ami, par exemple, il ne peut pas aller voir sa famille dans son pays parce que son visa a expiré depuis octobre. Il l’a renouvelé, sauf que depuis, [le visa] n’est toujours pas sorti, et il n’est valable que six mois et chaque six mois, il faut le renouveler. »
    2 000 à 3 000 médecins étrangers risquent d’être licenciés
    Solidaires de leurs confrères étrangers, des praticiens français sont à leurs côtés comme le docteur Cyrille Venet, chef du service de soins intensifs au CHU de Grenoble. « Oui, je suis là par solidarité, mais je ne suis pas seulement là par solidarité, je suis là aussi pour mon intérêt propre, parce que mon intérêt, c’est que je puisse hospitaliser des malades, et pour ça, j’ai besoin de lits, et il se trouve que les collègues font le même boulot que nous – tiennent les services, tiennent les consultations, tiennent les listes de garde – et ça va nous impacter, donc on ne tiendra pas. »
    Ces médecins, comme l’a rappelé le président Emmanuel Macron mardi lors de sa conférence de presse, « tiennent parfois à bout de bras les services de soins en France ». Ils sont en effet plusieurs milliers à exercer dans les hôpitaux français où ils représentent environ un quart des effectifs. Depuis le 1er janvier dernier, selon les syndicats, 2 000 à 3 000 médecins étrangers qui exercent dans des établissements français risquent d’être licenciés de leur poste faute de renouvellement de leur contrat.
    Depuis plus de 20 ans, la désertification médicale a conduit de nombreux établissements de santé à recruter des médecins diplômés en dehors de l’Union européenne (UE). Très mal rémunérés et précaires, ils pouvaient espérer obtenir une « autorisation de plein exercice » après une procédure complexe de plusieurs années.
    Un régime temporaire supprimé en décembre
    Ces praticiens diplômés hors UE doivent en principe passer un concours sélectif, appelé « épreuves de vérification des connaissances », puis suivre un parcours de consolidation de compétences de deux ans à l’hôpital, avant de voir leur dossier examiné en commission. Mais un régime dérogatoire a longtemps existé, permettant aux hôpitaux de recruter des non-lauréats sous divers statuts très précaires, rémunérés entre 1 500 et 2 200 euros net par mois.
    Ce régime temporaire, plusieurs fois prolongé, s’est définitivement éteint au 31 décembre 2023. Impossible aujourd’hui de renouveler leurs contrats. Ils devaient tous réussir les épreuves requises cette année pour continuer à exercer. « Sauf qu’avec 10 000 candidats au concours - dont une partie inscrits de l’étranger - pour 2 700 postes ouverts, c’est impossible », déplore Halim Bensaïdi.
    Le docteur Halim Abdelhalim Bensaïdi, est venu d’Algérie. Ce diabétologue travaille depuis 2019 en France, il est le vice-président de l’association Ipadecc, Intégration des praticiens à diplôme hors Union européenne."Mon contrat a expiré hier et je n’ai toujours pas de réponse pour [mon] renouvellement ! Le président de la République promet de nous régulariser, sauf qu’officiellement, on n’a pas de texte qui nous permet de continuer l’exercice de notre noble métier, qu’on exerce dignement depuis des années, regrette-t-il."Sur le terrain, on est 2 000 médecins qui ne sont pas régularisés jusqu’à ce jour, malgré le discours du président de la République. On se pose des questions sur notre sort : qu’est-ce qu’on va devenir demain ? Et pour certains qui ont été licenciés le 31 décembre, qui ont reçu des OQTF [Obligation de quitter le territoire français, ndlr], on se pose vraiment cette question du manque de personnel médical alors qu’aujourd’hui, en France, on licencie et on donne des OQTF à des médecins qui sont prêts à exercer leur métier. Des gens sont payés entre 1 400 et 2 000 euros, c’est juste indigne par rapport à leur dévouement total au sein des hôpitaux français."

    #Covid-19#migrant#migration#france#immigration#PADHUE#sante#regularisation#CHU#systemesante#OQTF#personneldesante

  • « La loi “asile et immigration” réduit les personnes étrangères au statut d’une force de travail »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/19/la-loi-asile-et-immigration-reduit-les-personnes-etrangeres-au-statut-d-une-

    « La loi “asile et immigration” réduit les personnes étrangères au statut d’une force de travail »
    Johanna Dagorn Sociologue
    Corinne Luxembourg Géographe
    Mars 2020, 20 heures, les applaudissements aux balcons saluent l’engagement professionnel de femmes et d’hommes qui œuvrent pour que perdure la vie : soin, ravitaillement, hygiène, parfois même éducation… Le pays découvrait ces personnes indispensables à la solidité et au fonctionnement de notre société, à nos communs. Mais l’applaudimètre n’a pas signifié une reconnaissance sociale, et encore moins financière. Une fois cette parenthèse passée, le monde n’a pas changé : les invisibles ont été ramenés à leur ancienne invisibilité.
    Ces femmes et ces hommes nettoient les rues, les bureaux ou livrent des repas. Leur réalité est marquée par des horaires de travail fragmentés, rendant leur temps libre pratiquement inutilisable. Pour la plupart, ils appartiennent à ces minorités visibles, indépendamment de leur nationalité. En 2021, selon l’Insee, 14 % des immigrés en emploi ont le statut d’indépendant. Les jeunes hommes qui livrent des repas à domicile sont dans des conditions de travail extrêmement précaires. La contractualisation à travers des plates-formes électroniques et les discriminations à l’embauche les rendent particulièrement vulnérables.
    Les dangers de la circulation, les conditions météorologiques difficiles et la baisse de revenus de 10 % à 30 % actuellement constatée par les livreurs des plates-formes accentuent encore leur vulnérabilité. Les livreurs doivent couvrir des distances de plus en plus grandes pour tenter de maintenir leurs revenus. Dans ce contexte, le faible coût de livraison imposé par les plates-formes place les personnes consommatrices dans la position d’être servies presque instantanément, leur permettant d’employer de fait une domesticité systématiquement « invisibilisée ».
    Quant aux femmes, elles occupent une part significative des emplois liés au secteur des soins à la personne, le « care » : d’après une étude de la Dares, en 2021, 13 % des femmes immigrées en emploi travaillent comme agentes d’entretien. Ce chiffre est plus élevé que celui des femmes non immigrées en emploi, qui est de 6 %. Les femmes immigrées représentent par ailleurs 6 % des aides à domicile et aides ménagères et 9 % des aides-soignantes et assistantes maternelles.
    En utilisant comme base de l’octroi aux sans-papiers du titre de séjour « métiers en tension » la liste de ces métiers par région publiée au Journal officiel, la loi « asile et immigration » votée le 20 décembre 2023 réduit les personnes étrangères au statut d’une force de travail. Anonymes et réinvisibilisés, déchus de cette fugace reconnaissance nationale, ces femmes et ces hommes ne sont considérés que comme des bras et des corps dévolus à l’économie. Ils vivent de plus en plus souvent l’injonction à rejoindre un auto-entrepreneuriat aux allures de salariat déguisé pour les hommes, ou les métiers de service à la personne mal considérés et mal rémunérés pour les femmes immigrées, qui, au lieu de connaître le plafond de verre, butent sur un plancher collant.
    La loi « asile et immigration », si elle est promulguée, renforcera les inégalités sociales et discriminatoires entre les hommes, les femmes et les personnes désignées comme « éloignées de l’emploi » ou réduites à leur employabilité. Dans une logique adéquationniste, il reviendrait une nouvelle fois aux personnes les plus faibles de répondre aux exigences du marché. Au lieu de poser les bonnes questions, comme celle de la reconnaissance sociale et économique des métiers qui soutiennent nos sociétés, le « marché », soutenu par le législateur, va trier les « bons » et les « mauvais » immigrés, c’est-à-dire ceux qui s’adapteront ou non à cette logique adéquationniste. Cette approche, outre qu’elle pose des questions de justice sociale et économique, néglige une réflexion sur la véritable valeur de ces métiers pour nos sociétés.
    L’ambivalence de cette loi réside dans sa capacité à escamoter le besoin économique dans un tour de passe-passe idéologique tout en rendant visibles, mais sous un autre angle, ces personnes invisibles. Voilà les anciens « premiers de corvée » du Covid-19 à nouveau désignés comme la source principale des problèmes nationaux. Criminalisés par la loi « immigration », ils seront discriminés, au sens de la loi du 16 novembre 2001 sur les vingt-cinq critères de discrimination, puisque, au titre d’une origine nationale non communautaire, le droit pénal ne s’appliquera plus de la même façon sur le sol national.
    En pratique, cette loi interdira durant cinq ans l’obtention de prestations sociales, telles les allocations logement ou familiales. Elle établira des quotas annuels pour les entrées sur le territoire, durcira les conditions d’obtention du titre de séjour, exigera une caution pour les étudiants étrangers, donnant de fait la priorité aux étudiants ayant des ressources financières. De plus, elle vise à instaurer la primauté au droit du sang sur le droit du sol.
    Les législateurs ayant voté cette loi ont donc décidé de rendre ces personnes définitivement visibles d’un point de vue pénal. De plus, ils ont entaillé la lutte institutionnelle contre les discriminations en s’attaquant à l’un des critères de la loi de 2001. Cette approche soulève des préoccupations quant à l’équité et à la justice, remettant en question la protection des droits fondamentaux. Le vote de ce texte va au-delà d’un simple renforcement des frontières ethniques. Il représente une fissure dans le pacte républicain d’égalité.
    Johanna Dagorn est sociologue (université de Bordeaux) ; Corinne Luxembourg est géographe (université Sorbonne-Paris-Nord)

    #Covid-19#migrant#migration#france#loiimmigration#economie#maindoeuvre#discrimination#droit#travailleurmigrant#egalite

  • Les mineurs étrangers non accompagnés, si loin de leurs parents : « Je ne peux pas tout raconter à ma mère. Ça la tuerait »
    https://www.lemonde.fr/intimites/article/2024/01/20/les-mineurs-etrangers-non-accompagnes-si-loin-de-leurs-parents-je-ne-peux-pa

    Les mineurs étrangers non accompagnés, si loin de leurs parents : « Je ne peux pas tout raconter à ma mère. Ça la tuerait »
    Par Audrey Parmentier
    Patrice, 17 ans, est fier de présenter l’appartement où il a été placé, dans le 19e arrondissement de Paris : « Ici, c’est la chambre d’un Malien, là celle d’un Ivoirien et voici ma chambre. » L’adolescent camerounais, qui (comme tous les autres mineurs interrogés) a décidé de ne pas dévoiler son identité, montre une pièce ordonnée à la décoration sommaire. Posée sur son bureau dégagé, une pochette bordeaux. A l’intérieur, une boîte d’antidépresseurs. « C’est le psychiatre qui me les a prescrits. »
    Celui qui suit une formation de menuiserie a traversé de nombreuses étapes avant d’arriver à Paris. S’il a quitté le Cameroun, c’est pour une seule personne : sa mère malade. « Elle vendait des beignets dans la rue, elle s’est intoxiquée avec la fumée », relate ce mineur non accompagné (MNA) arrivé en France en mai 2022. A Douala, capitale économique, son père tenait le foyer à bout de bras. « Il est mort il y a trois ans à cause d’une maladie à l’estomac. » Patrice gagnait un peu d’argent pour nourrir sa mère et son frère jumeau : il portait les sacs des clients dans les supermarchés contre une poignée de francs CFA. Une rémunération insuffisante qui l’a poussé à traverser la frontière sans prévenir sa famille.
    « Ma mère n’aurait jamais accepté que je parte », confie Patrice. Sa vie, il l’avait d’abord imaginée au Nigeria, où il est resté deux jours avant de marcher vers l’Europe : Niger, Algérie puis Libye. Assis sur son lit, le jeune homme raconte son calvaire à Tripoli : il y est fait esclave et emprisonné à deux reprises. « Ces choses sont trop douloureuses, je ne peux pas les raconter à ma mère. Ça la tuerait. » La veille, Patrice lui a encore envoyé de l’argent : « Mon éducatrice me conseille de tout garder, mais je ne veux pas. Ce n’est pas grave si je ne mange pas. » De la précarité qu’il connaît à Paris, sa mère ne saura rien. « Ici, c’est pire que la Libye. Quand tu arrives en France, tu penses que le cauchemar s’arrête, mais non. »
    A son arrivée dans la capitale, Patrice est évalué par le Département, qui refuse sa prise en charge, estimant que le jeune homme n’est pas mineur. Sans ressources, Patrice vit plusieurs mois dans le bois de Vincennes, le temps de former un recours devant le tribunal des enfants. En octobre 2022, il est placé par l’aide sociale à l’enfance (ASE). D’abord dans un hôtel à Châtillon (Hauts-de-Seine), puis dans cet appartement, en septembre 2023.
    Un parcours similaire à celui d’une grande majorité des mineurs non accompagnés. En attendant une date d’audience pour la reconnaissance de leur minorité, et ainsi leur prise en charge par l’ASE, ils subissent la précarité et dorment dehors. « Je mentais à ma famille, car la vérité était trop dure. Je disais que je mangeais à ma faim et que je dormais dans un lit », se souvient Thierno (prénom modifié), 17 ans, maintenant placé dans un foyer de l’ASE des Yvelines.
    Cacher la vérité permet de camoufler une désillusion amère : « Quand j’étais au pays, je voyais les choses en grand. Aujourd’hui, je me rends compte que les professeurs de géographie nous ont menti. » Le jeune homme guinéen a longtemps rêvé d’Europe. C’est d’ailleurs pour rejoindre le « Vieux Continent » qu’il a abandonné le nid familial contre l’avis de ses parents.« J’ai pris cette décision à 50 %. Un ami de mon oncle voulait que je parte avec lui et il m’a emmené », raconte ce fils d’un commerçant et d’une mère au foyer. Pendant deux mois, sa famille reste sans nouvelles de lui. « Je ne voulais pas l’avoir au téléphone, j’avais peur que ma mère me dise de revenir », ajoute Thierno, les larmes aux yeux. Parler de ses parents, cela lui fait « remonter des émotions ».
    Une fois en France, une chape de plomb s’abat sur le passé de ces garçons. Un silence alimenté par le processus de reconnaissance de leur minorité. Au cours d’une évaluation, les MNA doivent prouver deux choses : avoir moins de 18 ans et être isolés. Pour satisfaire aux critères de l’évaluateur, il leur est conseillé de dire, par exemple, que leurs parents sont morts. Même si cela n’est pas toujours vrai.Ces adolescents marchent sans arrêt sur un fil, rapporte Noémie Paté, chercheuse en sociologie et maîtresse de conférences à l’Institut catholique de Paris. « D’un côté, le juge des enfants les encourage à renouer avec leur famille, mais de l’autre, ces jeunes savent que le titre de séjour est facilité quand ils n’ont plus de contact avec leurs parents. » En 2022, 14 782 mineurs non accompagnés sont entrés dans le dispositif de protection de l’enfance.
    « Je regrette de n’avoir personne qui veille sur moi, explique Thierno, qui vit douloureusement la séparation d’avec sa famille. Hier, j’avais mal au ventre. L’éducatrice de l’ASE ne répondait pas et je voulais aller aux urgences. Quand tu as tes parents, ce sont eux qui s’occupent de ça. » Il se tourne vers Marie (qui préfère ne pas donner son nom), bénévole aux Midis du Mie, une association d’aide aux adolescents étrangers. C’est elle qu’il a contactée récemment pour une opération chirurgicale. En deuxième année de CAP boulangerie, Thierno a été mis en arrêt maladie pendant trois semaines après son opération. Angoissé, il essaie d’arracher quelques paroles rassurantes à Marie : « Tu penses que mon patron me croit ? » A plusieurs reprises, il répète ressentir « une pression » du fait de se retrouver livré à lui-même.
    En face de lui, Adama acquiesce. Flanqué d’un tee-shirt de l’équipe de France orange et violet, le jeune Malien, 19 ans, a besoin d’une vingtaine de minutes avant de se sentir à l’aise. « Il faut se cogner la tête pour se souvenir », plaisante le jeune homme avant de dérouler son histoire. En 2018, il quitte la Mauritanie direction « la tour Eiffel ». Une décision qu’il prend seul : il ment à sa mère, lui disant qu’il part à Nouakchott, la capitale. A la place, il rejoint le Maroc avec d’autres jeunes de son âge. A 14 ans, Adama laisse derrière lui un petit boulot de berger payé au lance-pierre et quatre sœurs. « Je ne regrette pas, je n’avais pas d’avenir en Mauritanie », justifie celui qui, sur les 475 euros gagnés par mois grâce à son CAP plomberie, envoie un peu d’argent à sa mère. « J’ai mis du temps avant de lui dire que j’étais à Paris, elle était très inquiète. »
    Son titre de séjour en poche, Adama est fier de son parcours. Son prochain objectif : retourner en Mauritanie pour rendre visite à sa famille qu’il n’a pas vue depuis cinq ans. Selon Noémie Paté, « certains jeunes voient le départ comme un acte d’émancipation. Ils prennent la route dans l’objectif de rompre avec la tradition parentale et de conquérir une place sociale ». L’un des schémas classiques est celui de l’aîné de la fratrie qui migre en Europe pour subvenir aux besoins de sa famille.
    Loin de leurs proches, et malgré leur maturité, ces jeunes continuent à avoir des besoins d’enfant. « Les MNA veulent être protégés, aller à l’école, avoir un lieu sûr… », considère Marie Rose Moro, cheffe de service de la Maison de Solenn, qui abrite dans le 14e arrondissement de Paris une antenne destinée aux mineurs non accompagnés. En 2022, plus de 150 jeunes y ont bénéficié d’un suivi psychologique.De temps en temps, l’intervention des parents est indispensable. Comme pour ce jeune Afghan, Massoud, qui a plusieurs tentatives de suicide à son actif. « Il avait fait le trajet depuis un camp de réfugiés en Iran avec son cousin qu’il avait perdu sur la route en Allemagne. A cause de cela, il disait avoir failli à sa mission de “chef de famille”. Il ne se sentait plus digne d’en faire partie », narre Marie Rose Moro. Face à cette situation d’urgence, la pédopsychiatre retrouve sa mère grâce à la Croix-Rouge : « Au téléphone, elle l’a rassuré et Massoud allait beaucoup mieux. »
    D’autres jeunes n’ont pas cette chance. A l’instar de Jean, un Camerounais de 16 ans, qui n’a jamais connu sa mère. Et son père ? Un voile se pose sur ses yeux : « Il était violent et voulait me mettre dans la magie noire… C’est pour cela que j’ai voulu m’échapper. » Emmitouflé dans une polaire orange fluo, le jeune homme décrit une vie sans parents : « Dès 9 ans, je dormais seul dans les rues. Très vite, je ne pouvais plus réfléchir comme un bébé. » Lui-même le constate, son enfance lui a été confisquée.
    En septembre 2023, Jean est arrivé en France et a été accueilli par une dame retraitée à Versailles, grâce au réseau de l’association d’aide aux personnes étrangères Utopia 56. Depuis, il se remet à rêver, surtout au basket, son sport préféré. « Je vais percer. Je dois me fixer la barre très haut pour réussir », dit ce fan des Lakers. Son hébergeuse lui a déjà offert un ballon, un équipement et des chaussures, pour un nouveau départ.

    #Covid-19#migration#migrant#france#MNA#sante#santementale#minorite#ASE#ONG

  • Face à la vague de froid en Ile-de-France, la détresse de jeunes exilés « ni majeurs ni mineurs » aux yeux de l’Etat
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/01/19/face-a-la-vague-de-froid-en-ile-de-france-la-detresse-de-jeunes-exiles-ni-ma

    Face à la vague de froid en Ile-de-France, la détresse de jeunes exilés « ni majeurs ni mineurs » aux yeux de l’Etat
    Par Fatoumata Sillah
    Lasso Camara a regardé, dans un froid glacial, les flocons de neige recouvrir Paris dans la nuit de mercredi à jeudi. Le thermomètre est descendu jusqu’à − 5 °C. Paire de gants, chaussettes, pulls et couette issus de dons ne suffisent pas à le réchauffer. Le jeune Guinéen de 17 ans, arrivé à Paris il y a trois semaines, dort dans une tente sous le pont de Notre-Dame, en face de la Seine, et ce, depuis le mardi 9 janvier. C’était sa première nuit dehors, alors qu’une vague de froid touchait déjà l’Hexagone avec des températures négatives sur presque tout le territoire. L’adolescent n’a pas trouvé de solution d’hébergement d’urgence.
    Aux yeux des associations, Lasso est un « mijeur » (contraction de mineur et majeur). Aux yeux de l’Etat, il n’entre dans aucune case administrative. Ni officiellement mineurs ni majeurs, ces exilés n’ont pas obtenu la reconnaissance de leur minorité à leur arrivée en France, après une évaluation du département où ils ont tenté leur chance. Leurs documents d’identité, quand ils en ont, les preuves écrites de leurs parcours, ainsi que leurs récits, témoignent pourtant du contraire. S’ensuit alors une bataille administrative durant laquelle ils sont exclus des dispositifs de protection de l’enfance et ne peuvent prétendre aux aides réservées aux majeurs.
    « Des évaluateurs partent du principe que ces jeunes sont malhonnêtes », plutôt que de prouver leur minorité, « ils vont tenter de prouver qu’ils mentent et qu’ils sont incohérents », analyse Patricia Mothes, maîtresse de conférences en sciences de l’éducation à l’Institut catholique de Toulouse, dont les recherches portent notamment sur la scolarisation des enfants migrants.
    Après que le plan Grand Froid a été déclenché, le gouvernement a annoncé le déblocage d’une enveloppe correspondant à 10 000 places supplémentaires d’hébergement d’urgence en Ile-de-France. Paris a ouvert un gymnase pour mettre à l’abri cinquante jeunes durant quelques jours. Mais Lasso n’a pas obtenu de place. Ni lui, ni la centaine de migrants de toutes nationalités qui dorment dans les trente-neuf tentes de son campement, ou les près de six cents autres dispersés dans au moins une vingtaine de sites, identifiés par l’association de défense des exilés Utopia 56, dans Paris et sa première couronne.
    Le 115, numéro d’urgence pour les personnes sans abri, est, lui, saturé. « Quand on l’appelle, on ne nous répond pas, ou on nous rappelle que seuls les majeurs sont pris en charge. Quand on appelle le 119 [service de protection d’enfants en danger], personne ne vient nous chercher », rapporte Yacoub Cissé, 16 ans et voisin de Lasso. Alors, c’est la rue et pendant les épisodes de grand froid, « vraiment, c’est dur ». « Moi, j’ai cru que j’étais à la limite de mourir cette nuit. Il faisait tellement froid », témoigne, toujours choqué, Sekouba Traoré, 16 ans. Dans une boucle WhatsApp dédiée aux jeunes et aux familles qui campent dehors, Utopia 56 a diffusé des messages audio expliquant comment reconnaître une hypothermie et appeler les secours. Quand le jour se lève, Lasso, Yacoub et lui s’affairent à trouver des couches de vêtement en plus pour les prochaines nuits, si possible une couette et une couverture de survie pour le toit de la tente. « J’aimerais bien avoir au moins trois couvertures et plus de chaussettes », dit Lasso, qui espère, autrement, récupérer le duvet d’un de ses compagnons, là depuis plus longtemps, auquel il souhaite d’être enfin pris en charge par l’aide sociale à l’enfance.
    A Utopia 56, « on fait des maraudes chaque soir », raconte Alice Bertrand, chargée des mineurs non accompagnés au sein de l’association. Dans la nuit de mercredi 17 à jeudi 18 janvier, trois bénévoles d’une vingtaine d’années font le tour de l’est et du centre de la capitale. « Bonsoir, c’est Utopia, on a du thé et du café », annoncent-ils à leur arrivée dans les campements qu’ils ont identifiés en amont. En anglais, en français ou avec des traducteurs, selon la langue de leurs interlocuteurs, « avez-vous besoin de gants, manteaux ou chaussures ? », demandent Elias Hufnagel, Maëlle Foix et Thomas Dufermont.
    Dans leur voiture, ils ont des cartons de produits d’hygiène, de vêtements, quelques Sheltersuit, cette veste imperméable et coupe-vent qui peut se transformer en combinaison une fois zippée sur un sac de couchage, et des tentes. Même si Alice Bertrand et Thomas Dufermont constatent que les dons ont été nombreux cet hiver, les dix-neuf tentes que les bénévoles peuvent distribuer sont insuffisantes par rapport à la demande. « En ce moment, nous comptons entre 90 et 150 nouveaux mineurs non accompagnés par semaine », selon Alice Bertrand. Utopia se prépare par ailleurs à récupérer – « aujourd’hui, demain, on ne sait pas » – les jeunes à l’abri dans le gymnase ouvert à Paris lorsque le plan Grand Froid sera désactivé et qu’ils se retrouveront à la rue. Des tentes leur seront données pour leur première nuit.
    En France, il n’existe aucune donnée fiable sur le nombre précis de mineurs non accompagnés présents sur le territoire, selon l’ONG Médecins du monde. Le ministère de la justice communique seulement sur le nombre de jeunes pris en charge par l’aide sociale à l’enfance. En 2022, ils étaient 14 782, pour la plupart originaires de Côte d’Ivoire, de Guinée, de Tunisie, du Mali, d’Afghanistan ou encore du Bangladesh. L’association médicale et humanitaire estime toutefois que, dans 70 % des cas, la prise en charge est rejetée. Ces jeunes doivent faire une demande de recours pour que leur minorité soit finalement reconnue et faire valoir leur droit à être mis à l’abri. Le délai entre la saisine du juge des enfants et sa décision varie selon le département. « A Créteil, dans le 94 [Val-de-Marne], ça peut aller jusqu’à sept mois », d’après Renaud Mandel, de l’organisation Accompagnement et défense des jeunes isolés étrangers (Adjie). Le dossier de Lasso est à Créteil. Dans six mois et huit jours, il devra s’y représenter pour une première audience avec un juge. A l’issue de celle-ci, le magistrat peut demander des investigations complémentaires, comme un examen de maturation osseuse, pouvant prolonger de plusieurs semaines la décision, ou se prononcer. En attendant, Lasso sait qu’il continuera de dormir dehors. « On s’y habitue », lâche-t-il.
    Le traitement de ces jeunes migrants avant la reconnaissance de leur minorité ou lors de leur recours juridique est dénoncé par de nombreuses ONG, qui estiment que la Convention internationale des droits de l’enfant n’est pas respectée. La Cour européenne des droits de l’homme avait aussi condamné la France, en 2019, pour avoir infligé un « traitement dégradant » à un mineur isolé afghan lorsqu’il était en France. Cet enfant, âgé de 11 ans à l’époque, n’avait pas été pris en charge par les autorités. Il avait vécu environ six mois dans le bidonville de Calais (Pas-de-Calais). Unicef France a également interpellé la France à plusieurs reprises sur la situation de ces jeunes.
    L’Adjie a, de son côté, alerté, une nouvelle fois, la Mairie de Paris, en vain. « Nous vous demandons de bien vouloir, en urgence, demander la prise en charge de ces jeunes » face « à la situation de danger du fait de leur minorité et de leur isolement ». La vague de froid « ajoute un danger potentiel de mort pour ces jeunes aux organismes déjà affaiblis par de longues semaines d’errance dans les rues de la capitale », a écrit Renaud Mandel à Anne Hidalgo et Dominique Versini, l’adjointe à la maire de Paris en charge des droits de l’enfant et de la protection de l’enfance. « Avant on avait une réponse, maintenant plus personne nous répond », regrette-t-il. Dominique Versini n’a pas répondu aux sollicitations du Monde. Pas plus que le ministère du logement, dont le cabinet est vide dans l’attente de la nomination de toute l’équipe du gouvernement de Gabriel Attal. L’adjointe à la maire de Paris en charge des solidarités, de l’hébergement d’urgence et de la protection des réfugiés, Léa Filoche, renvoie, elle, vers l’Etat.

    #Covid-19#migrant#migration#france#MNA#hebergement#urgence#ASE#ong#campement#minorite#iseolement#sante

  • France : une centaine de migrants, dont de nombreux enfants, empêchés in extremis de traverser la Manche - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/54585/france--une-centaine-de-migrants-dont-de-nombreux-enfants-empeches-in-

    Actualités : France : une centaine de migrants, dont de nombreux enfants, empêchés in extremis de traverser la Manche
    Par La rédaction Publié le : 18/01/2024
    La police française a empêché mercredi le départ en mer d’une centaine de migrants qui s’apprêtaient à traverser la Manche pour tenter de rallier l’Angleterre depuis Sangatte. L’eau est actuellement à 9 degrés. Cette opération intervient quatre jours après un naufrage meurtrier au large de Wimereux, non loin de là.
    La police française a empêché mercredi 17 janvier le départ en mer d’une centaine d’exilés, dont des enfants. Les exilés s’apprêtaient à partir depuis la plage de Sangatte à destination de l’Angleterre.
    « Ce matin, les policiers ont empêché le départ en ’small boat’ d’une centaine de migrants positionnés au niveau de la commune de Sangatte » a expliqué la préfecture du Pas-de-Calais à l’AFP.
    Sur le réseau social X (ex-Twitter), la police a annoncé avoir découvert sur la plage dans la nuit de mercredi à jeudi « 26 gilets de sauvetage » et « deux bidons de 20 litres de carburant ».
    Selon un correspondant de l’AFP sur place, de nombreux policiers ont bloqué l’accès à la plage au groupe, qui comportait beaucoup d’enfants en bas âge. D’après la préfecture, « une proposition d’hébergement a été formulée aux familles et personnes vulnérables par l’opérateur social mandaté par l’État, comme pour chaque opération de secours ». Mais si « cette proposition a été dans un premier temps acceptée, ces personnes ont ensuite changé d’avis et ont finalement refusé d’être mises à l’abri avant de quitter les lieux », poursuit la préfecture.
    Cette arrestation intervient quatre jours après un naufrage dramatique survenu au large de Wimereux, à quelques kilomètres de Sangatte. Dans la nuit de samedi 13 à dimanche 14 janvier, cinq personnes sont mortes noyées alors qu’elles tentaient de rejoindre une embarcation en partance pour le Royaume-Uni. Deux adolescents syriens de 14 et 16 ans figurent parmi les victimes. L’eau était à 9 degrés. Mercredi toujours, la police du Pas-de-Calais a également indiqué sur le réseau X avoir intercepté la nuit précédente un véhicule transportant 40 migrants, dans la même commune de Wimereux. « Le conducteur, soupçonné d’être un passeur, a été interpellé et placé en garde à vue », écrit-elle.
    30 000 traversées en 2023, soit un tiers de moins qu’en 2022
    Depuis des années, la France et le Royaume-Uni multiplient les mesures pour empêcher les traversées de la Manche. En mars 2023, les deux États ont signé un énième accord pour le déploiement de patrouilles supplémentaires côté français notamment. Coût du dispositif pour Londres : près de 500 millions d’euros.
    Le Royaume-Uni s’est félicité en début d’année d’avoir récolté les fruits de ses lourds investissements dans la militarisation de sa frontière maritime. Le nombre de personnes atteignant le littoral anglais a baissé d’un tiers en 2023. Londres a enregistré 29 437 arrivées de migrants en « small boat » cette année-là, contre 45 000 en 2022.

    #Covid-19#migrant#migration#france#royaumeuni#traversee#manche#routemigratoire#pasdecalais#prefecture#sante

  • Royaume-Uni : le premier ministre, Rishi Sunak, parvient à faire voter le projet de loi visant à expulser des migrants vers le Rwanda
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/18/royaume-uni-le-premier-ministre-rishi-sunak-parvient-a-faire-voter-le-projet

    Royaume-Uni : le premier ministre, Rishi Sunak, parvient à faire voter le projet de loi visant à expulser des migrants vers le Rwanda
    Le Monde avec AFP
    Le premier ministre britannique, Rishi Sunak, a franchi une étape cruciale pour sa survie politique. Après deux jours sous haute tension au palais de Westminster avec des débats houleux, des tractations à huis clos et des démissions retentissantes, les députés ont adopté, mercredi 17 janvier au soir, le projet de loi controversé sur l’expulsion de migrants vers le Rwanda. Avec le retour dans le rang des dissidents, le texte a été approuvé en troisième lecture à la Chambre des communes par 320 votes pour et 276 contre.
    Chef d’une majorité largement devancée dans les sondages par les travaillistes en ce début d’année électorale, Rishi Sunak a mis tout son poids dans la balance pour faire aboutir ce projet censé montrer sa fermeté sur une préoccupation majeure de sa base électorale, mais qui aura exposé à vif les divisions de sa majorité, les modérés redoutant une atteinte au droit international et les plus à droite voulant aller plus loin.
    Ce texte vise à répondre aux objections de la Cour suprême britannique, qui a jugé le projet illégal dans sa version précédente par crainte notamment pour la sécurité des demandeurs d’asile expulsés envoyés au Rwanda. Selon le projet, ces derniers, d’où qu’ils viennent, verraient leur dossier examiné au Rwanda et ne pourraient ensuite en aucun cas retourner au Royaume-Uni, ne pouvant obtenir l’asile que dans le pays africain.
    Lors de son examen, des dizaines de députés conservateurs ont soutenu, en vain, des amendements visant à durcir le texte, tentant notamment de limiter le droit des migrants à faire appel de leur expulsion. La tension est également montée d’un cran après la démission, mardi, de deux vice-présidents des tories, partisans d’une ligne plus dure, qui ont reçu le soutien de l’ancien premier ministre Boris Johnson. Annoncé en avril 2022 par ce dernier, ce projet visait à décourager l’afflux de migrants dans des petites embarcations à travers la Manche : près de 30 000 en 2023 après un sommet de 45 000 en 2022.
    Ce week-end, cinq migrants sont morts alors qu’ils tentaient de rejoindre une embarcation dans une eau glaciale. Mercredi matin, d’autres bateaux ont été vus en train de tenter cette traversée périlleuse, a constaté un photographe de l’Agence France-Presse. Le texte n’a jusque-là jamais pu être mis en œuvre. Un premier avion a été bloqué in extremis par une décision de la justice européenne, puis la justice britannique avait, jusqu’à la Cour suprême, déclaré le projet illégal dans sa version initiale.
    Pour tenter de sauver son texte, vivement critiqué par les associations humanitaires, le gouvernement a signé un nouveau traité avec Kigali. Il est adossé à ce nouveau projet de loi qui définit le Rwanda comme un pays tiers sûr et empêche le renvoi des migrants vers leurs pays d’origine. Il propose également de ne pas appliquer aux expulsions certaines dispositions de la loi britannique sur les droits humains, pour limiter les recours en justice. Le Haut-Commissariat pour les réfugiés des Nations unies a estimé, mercredi, que la dernière version du projet n’était « pas compatible » avec le droit international.
    Un peu plus d’un an après son entrée à Downing Street, M. Sunak compte bien sur le succès de ce projet pour montrer qu’il est capable de tenir l’une de ses promesses-phares : celle de mettre fin à l’arrivée des bateaux de migrants sur les côtes britanniques.
    Son projet de loi devra désormais être approuvé par les membres non élus de la Chambre des lords, qui pourraient fort bien l’amender. Et s’il est adopté à temps avant les législatives, prévues en l’état à l’automne, le Labour, mené par Keir Starmer, a promis de l’abroger s’il arrive au pouvoir après quatorze ans dans l’opposition.
    Un durcissement trop important pourrait par ailleurs fragiliser le partenariat avec le Rwanda, qui a déjà reçu près de 240 millions de livres (280 millions d’euros) de la part du Royaume-Uni. « Cet argent ne sera utilisé que si les [migrants] viennent. Si ce n’est pas le cas, nous pourrons le rendre », a assuré le président rwandais, Paul Kagame, interrogé mercredi au Forum économique mondial à Davos, en Suisse.

    #Covid-19#migrant#migration#royaumeuni#immigration#asile#rwanda#droit#UNHCR#expulsion#sante

  • Au Royaume-Uni, la grande dépendance des universités à l’égard des étudiants étrangers
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    Au Royaume-Uni, la grande dépendance des universités à l’égard des étudiants étrangers
    Par Eric Albert (Londres, correspondance)
    Le courriel envoyé courant décembre 2023 par l’un des dirigeants du département d’enseignement en informatique de l’université d’York, au Royaume-Uni, à ses collègues était direct : « En réponse aux problèmes financiers actuels, l’université a décidé de réduire les notes demandées aux étudiants étrangers pour [l’admission dans] tous les cursus. » En clair, cette université, qui fait pourtant partie du prestigieux Russell Group, rassemblant les vingt-quatre meilleurs établissements de l’éducation supérieure du Royaume-Uni, a décidé d’accepter des étudiants étrangers de moins bon niveau.
    Comme l’indique le message interne, révélé par le Financial Times, l’explication est purement financière : un étudiant britannique paie des frais universitaires de 9 250 livres sterling (près de 10 800 euros) par an, un niveau qui est encadré par l’Etat et gelé depuis 2012 ; ceux qui viennent de l’international paient deux à trois fois plus cher, sans aucune limite imposée par les autorités. Dans le même temps, l’Etat britannique a fortement réduit son budget consacré aux universités. Le financement public par étudiant est au plus bas depuis vingt-cinq ans. Les étudiants internationaux représentent donc la dernière manne disponible : ils apportent désormais 20 % des revenus des universités, un doublement en une décennie. « Il y a un besoin urgent d’un débat national sur le financement des universités, notamment l’équilibre entre les frais payés par les étudiants britanniques, les fonds publics, et les étudiants internationaux », souligne Charley Robinson, chargé de l’international à Universities UK, qui représente les universités britanniques.
    Dans ce contexte, le courriel interne de l’université d’York dit tout haut ce qui se murmure tout bas depuis quelques années : les universités britanniques, en grande difficulté financière, risquent de créer des diplômes à deux vitesses, avec des exigences plus élevées pour les Britanniques. En deux décennies, le nombre d’étudiants internationaux a plus que doublé au Royaume-Uni, à presque 700 000 aujourd’hui, soit le quart de tous les étudiants. Dans certaines universités, le pourcentage dépasse allègrement la moitié : London School of Economics (66 % d’étudiants étrangers), University of the Arts London (54 %), Imperial College London (53 %), University College London (UCL, 52 %)… Au niveau des masters, les deux tiers des étudiants sont désormais internationaux. Le premier contingent vient de Chine, représentant environ le quart des étudiants étrangers. Les Indiens et les Nigérians sont aussi en forte hausse. Seul le nombre d’Européens, qui doivent payer les frais internationaux depuis le Brexit (alors qu’ils étaient limités aux frais britanniques auparavant), est en forte baisse.
    Ce système tourné vers le recrutement international, qui est certes la preuve éclatante de l’attractivité des universités britanniques, n’est-il pas en train d’aller trop loin ? Jo Johnson, ancien secrétaire d’Etat à l’éducation supérieure (et frère de Boris Johnson), a récemment tiré la sonnette d’alarme : « la limite politique » se rapproche. Le gouvernement du premier ministre, Rishi Sunak, s’agace de voir ces étudiants grossir les statistiques de l’immigration, un sujet explosif outre-Manche. Quant aux universités elles-mêmes, avec des classes parfois entièrement composées d’étudiants étrangers, ne risquent-elles pas d’atteindre un certain déséquilibre ?
    Coventry est une ville britannique qui a été presque rasée pendant la seconde guerre mondiale, bombardée intensément par l’armée allemande à cause de ses usines d’aviation. Reconstruite à la va-vite dans les années 1950, dominée par la circulation automobile, elle porte encore les stigmates du conflit. Aujourd’hui, partout dans cette cité des Midlands, des bâtiments affichent en grandes lettres capitales : « Logements étudiants ». Des tours sont apparues, entièrement destinées aux étudiants étrangers. Le mal nommé « City Village » (une grande barre d’immeubles sans charme) en fait partie.
    (...) Nattya, un nom d’emprunt, est une étudiante thaïlandaise qui y loge. Son master en énergie renouvelable à l’université de Coventry compte trente-cinq étudiants : « Un seul est Britannique. » La majorité des autres vient d’Inde, à laquelle il faut ajouter quelques Nigérians et des Indonésiens. Tous ont payé autour de 20 000 livres sterling de frais, auxquels il faut ajouter le prix d’un an de vie au Royaume-Uni. « Au total, ça me coûte environ 2 millions de bahts [autour de 50 000 euros] », explique Nattya dans un anglais encore hésitant. Ses parents, qui possèdent une petite entreprise de vente de voitures d’occasion, se saignent pour lui offrir ces études, mais elle assure que l’investissement en vaut la peine, estimant pouvoir tripler son salaire en rentrant en Thaïlande. Mais pourquoi une université britannique ? « C’est moins cher que d’autres pays, notamment les Etats-Unis, et c’est plus facile d’y avoir une place. » Bonne étudiante sans être brillante à Bangkok, elle n’a eu qu’à soumettre ses notes ainsi qu’une lettre de motivation – et un gros chèque – pour être admise. Le master qui ne dure qu’un an, au lieu de deux années dans de nombreux autres pays, est aussi un atout considérable, réduisant les dépenses.
    L’université de Coventry, où elle étudie, fait partie de ces établissements moyens, au 571e rang mondial dans le classement QS, qui fait référence. Mais elle a poussé particulièrement loin la logique de l’internationalisation. En 2010, l’établissement a ouvert un campus de 4 500 étudiants… à Londres, à plus de 170 kilomètres de la ville des Midlands. « Il a été créé dans le but explicite d’attirer les étudiants internationaux qui voulaient un diplôme de Coventry, mais souhaitaient vivre l’expérience londonienne », explique Ian Dunn, le recteur. L’université a désormais quatre campus à Londres. Dans la même logique qu’une multinationale, elle a aussi ouvert des sites en Pologne, au Maroc, en Egypte… Chacun offre un « diplôme de l’université de Coventry », mais sans que les étudiants aient besoin de mettre les pieds au Royaume-Uni, et à des prix beaucoup plus raisonnables. Comme pour une franchise, l’université supervise et garantit la qualité de l’enseignement. « Il s’agit d’apporter l’éducation là où elle est nécessaire », explique M. Dunn. Il assure qu’il n’est pas question de baisser la qualité de l’enseignement ni les critères d’admission.
    Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Au Royaume-Uni, un système de sélection à l’université sans anicroche
    Reste que la logique de ce développement est financière. « Il est désormais douteux que la survie des universités britanniques soit possible sans les revenus des étudiants étrangers », estime Richard Wells, chargé de la stratégie internationale de l’université de Coventry. Dans son établissement, les étudiants étrangers rapportent 47 % des revenus.
    Cette dépendance est la conséquence d’une décision politique prise en 2012. La décennie précédente, le nombre d’étudiants avait fortement augmenté, tandis que les financements ne suivaient pas. Le gouvernement de David Cameron avait alors décidé de tripler les frais universitaires, alors limités à 3 000 livres sterling. La décision a provoqué une violente tempête politique et d’importantes manifestations. Depuis, aucun gouvernement n’ose toucher à la limite de 9 250 livres sterling par année universitaire pour les étudiants britanniques. En valeur réelle, ce gel depuis douze ans représente une baisse d’un tiers. « Ce n’est pas un secret, les étudiants internationaux fournissent des revenus vitaux », souligne Ben Moore, de Russell Group. Selon lui, un étudiant international « subventionne » un Britannique à hauteur de 2 500 livres sterling par an. Désormais, la pression financière s’immisce même dans les tout meilleurs établissements. A UCL (neuvième meilleur établissement mondial, selon le classement QS), un professeur, qui requiert l’anonymat, raconte les consignes venant de sa direction pour sélectionner les étudiants. « Pour chaque classe, on me donne un quota d’étudiants étrangers. A moi, ensuite, de trouver les élèves qui ont le niveau. » (...)
    Cette vague d’internationalisation serait-elle cependant sur le point de refluer ? Le gouvernement britannique, soucieux de réduire l’immigration, a augmenté le coût des visas en 2023 et vient d’imposer des restrictions pour limiter le regroupement familial des étudiants en master. Selon le site Studyportals, qui aide les candidats aux études à l’étranger à s’y retrouver, les demandes de renseignements chutent : − 48 % en provenance du Nigeria, − 34 % du Sri Lanka (ces deux pays sont par ailleurs touchés par des crises économiques), − 22 % des Emirats arabes unis… « Nous pensons que nous avons atteint un pic du nombre d’étudiants internationaux en 2023, et nous sommes de plus en plus inquiets pour le recrutement des étudiants en 2024 », explique Mme Robinson, d’Universities UK. Pour le gouvernement, cela représente un dilemme difficile : soit mieux financer les universités, quitte à augmenter les frais universitaires pour les Britanniques, soit faciliter les visas. Un choix entre deux bombes politiques qu’aucun des deux grands partis n’ose discuter ouvertement, à moins d’un an des élections législatives.

    #Covid-19#migration#migrant#grandebretagne#universite#etudiant#immigration#economie#visas#politiquemigratoire

  • Aux Pays-Bas, le dirigeant populiste Wilders reçoit l’appui inattendu d’un rapport suggérant de limiter l’immigration
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/18/aux-pays-bas-le-dirigeant-populiste-wilders-recoit-l-appui-inattendu-d-un-ra

    Aux Pays-Bas, le dirigeant populiste Wilders reçoit l’appui inattendu d’un rapport suggérant de limiter l’immigration
    Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, correspondant)
    Les Pays-Bas « débordent » : sur le réseau social X, le populiste néerlandais Geert Wilders a repris et adapté, lundi 15 janvier, le slogan de son prédécesseur Pim Fortuyn, qui, en 2002, avait lancé : « Les Pays-Bas sont pleins », et inauguré ainsi un débat qui perdure sur l’immigration et l’identité nationale. Un thème qui a d’ailleurs été au cœur des élections législatives du 22 novembre 2023, marquées par la victoire du dirigeant d’extrême droite et de son Parti pour la liberté (PVV), arrivé en tête avec 37 sièges sur les 150 de la Deuxième Chambre.
    Alors qu’il tente de former une coalition avec trois autres partis, M. Wilders a reçu, lundi 15 janvier, l’aide inattendue d’une instance indépendante, mandatée en 2022 par les députés pour étudier la situation démographique du royaume. La commission d’Etat pour les développements démographiques 2050 a rendu un rapport prônant « une augmentation limitée de la population » afin de préserver le bien-être du pays. Elle suggère essentiellement une forte limitation de l’immigration, avec notamment davantage de sélectivité pour la main-d’œuvre étrangère et un frein au regroupement familial. Le nombre des naissances ne joue pas dans l’accroissement de la population du pays : le taux de natalité était de 1,49 en 2022 (1,55 pour les mères d’origine étrangère).
    Le rapport estime aussi que les autorités devraient obtenir une dérogation aux règles européennes sur l’asile et la libre circulation des personnes, a fortiori si l’Union devait s’ouvrir à de nouveaux pays, comme l’Ukraine. Les Pays-Bas ont, depuis 2015, accueilli annuellement quelque 100 000 migrants avec, en 2022, un pic à 150 000 (outre 113 000 Ukrainiens). Si cette évolution devait se poursuivre, le pays, peuplé actuellement de 17,9 millions de personnes, pourrait en compter jusqu’à quelque 23 millions en 2050, prédit la commission, dirigée par Richard van Zwol, un membre du Conseil d’Etat.
    Dans ce scénario, le plus extrême des cinq retenus, 45 % de la population serait alors d’origine étrangère, contre 26 % si l’immigration était plus contrôlée. La commission suggère, en tout état de cause, une limitation à 40 000, ou 60 000 au maximum, du nombre d’étrangers admis chaque année. Selon les experts, le royaume ne devrait pas totaliser plus de 19 ou 20 millions d’habitants s’il veut s’épargner « pénurie, nuisances et exaspération ». Un nombre trop élevé de résidents entraînerait par ailleurs un accroissement des inégalités et des tensions, nuirait à la nécessaire confiance dans l’Etat et mettrait en danger le système de sécurité sociale, affirme le rapport. Il met aussi en exergue l’exiguïté du pays, qui est le plus densément peuplé d’Europe après Malte, avec 529 habitants par kilomètre carré. Les Pays-Bas connaissent, par ailleurs, un problème criant de manque de logements : il faudrait en construire 100 000 par an au cours de la prochaine décennie, et un afflux supplémentaire de population rendrait la situation plus critique encore.
    La limitation du nombre d’étrangers recueillerait, selon les auteurs de l’étude, l’approbation de 87 % des Néerlandais. Une aubaine pour Geert Wilders, qui espère toujours former une coalition avec le Mouvement agriculteur-citoyen de Caroline van der Plas, le Nouveau Contrat social de Pieter Omtzigt et le Parti populaire pour la liberté et la démocratie de Dilan Yesilgöz, la ministre démissionnaire de la justice. Les quatre dirigeants, retirés dans un domaine proche d’Hilversum, dans la province de Hollande septentrionale, poursuivent des débats difficiles, même si le chef du PVV a gelé ses propositions les plus extrêmes, comme l’interdiction du Coran, la fermeture des mosquées ou la sortie des Pays-Bas de l’Union européenne. Il a aussi accepté de soumettre le reste de son programme à un examen portant sur la légalité de celui-ci. Et la rumeur indique qu’il serait même prêt à confier le poste de chef du gouvernement à une autre personnalité.
    Rien n’est toutefois réglé. Sur l’immigration, par exemple, M. Omtzigt évoque un quota annuel de 50 000 personnes, tandis que le parti agrarien en tolérerait 15 000 au maximum. Mardi 16 janvier, M. Wilders a par ailleurs déclaré : « Nous avons un problème », dans une allusion à un vote intervenu la veille au Sénat. Les élus libéraux de la Première Chambre ont, contre l’avis de la direction de leur parti, approuvé un projet de répartition obligatoire des demandeurs d’asile dans toutes les communes du royaume. Un texte fermement combattu par les populistes et condamné par Mme Yesilgöz.
    L’épisode démontre que celle-ci, qui a succédé à Mark Rutte à la tête de la formation libérale, ne contrôle pas ses élus, par ailleurs divisés quant à une participation gouvernementale avec le PVV. Mme Yesilgöz entretient dès lors le flou : acceptera-t-elle un accord gouvernemental, fera-t-elle capoter les discussions, ou apportera-t-elle un soutien à la carte à une éventuelle coalition à trois ?
    La relance spectaculaire de la thématique migratoire inquiète, en tout cas, les milieux économiques, qui évoquent depuis des années un manque criant de main-d’œuvre, impossible à régler, selon les patrons, sans le recours à des travailleurs étrangers. La commission sur la démographie prône, pour l’avenir, l’acceptation d’étrangers disposant d’un niveau de formation élevé, mais ce sont les secteurs de la logistique, de la distribution ou du transport qui recherchent des collaborateurs, en général faiblement qualifiés. L’éducation et la santé recherchent toutefois également de nombreux travailleurs migrants.

    #Covid-19#migration#migrant#paysbas#immigration#natalite#densite#economie#maindoeuvre#migrationqualifiee#demographie#vieillissement#sante

  • Tunisie : 20 jeunes sénégalais rapatriés à Dakar
    https://www.seneweb.com/news/Afrique/tunisie-20-jeunes-senegalais-rapatries-a_n_430772.html

    Tunisie : 20 jeunes sénégalais rapatriés à Dakar
    Par : - Seneweb.com | 17 janvier, 2024 à 15:01:28 | Lu 906 Fois |
    Tunisie : 20 jeunes sénégalais rapatriés à Dakar
    Bloqués à Tataouine (Tunisie) depuis plusieurs semaines, 20 sénégalais candidats à l’émigration clandestine ont été rapatriés à Dakar dans la nuit du mardi 16 au mercredi 17 janvier. L’information a été donnée par l’Association internationale pour Médina-Mary (AIMM) dans un communiqué.
    « Un groupe de plus de 20 jeunes Sénégalais a été rapatrié de Tunisie, dans la nuit du mardi 16 au mercredi 17 janvier 2024, après avoir échoué de rejoindre l’Europe par la Méditerranée. Ils étaient coincés à Tataouine, depuis plus d’un mois, alors qu’ils étaient avec des jeunes de Gambie (majoritaire), du Mali, Guinée, entre autres, qui eux, avaient été rapatriés par leurs gouvernements respectifs », lit-on sur le communiqué.Pris en charge par l’Organisation internationale des migrations à Tataouine, ces jeunes sénégalais avaient lancé un appel au Gouvernement, le 25 décembre dernier, pour les aider à rentrer au Sénégal. Mouhamed CAMARAÉ

    #Covid-19#migrant#migration#senegal#OIM#tunisie#rapatriement#migrationirreguliere#gambie#mali#guinee#jeunesse

  • Pas-de-Calais : 40 migrants interpellés dans un véhicule, le conducteur en garde à vue - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/54559/pasdecalais--40-migrants-interpelles-dans-un-vehicule-le-conducteur-en

    Actualités : Pas-de-Calais : 40 migrants interpellés dans un véhicule, le conducteur en garde à vue
    Par La rédaction Publié le : 17/01/2024
    Un véhicule chargé de 40 exilés a été intercepté dans la nuit de mardi à mercredi, à Wimereux. La commune a été récemment endeuillée par le naufrage, ce week-end, d’un bateau de migrants dans lequel cinq personnes ont perdu la vie
    S’apprêtaient-ils à traverser la Manche ? Mercredi 17 janvier à 3h30 du matin, 40 migrants enfermés dans un véhicule ont été interceptés par la police à Wimereux, dans le nord de la France, alors que celui-ci roulait sur la route départementale D237. « Le conducteur, soupçonné d’être un passeur, a été interpellé et placé en garde à vue », indique la police nationale du Pas-de-Calais sur X (ex-Twitter).Une enquête est en cours pour faire toute la lumière sur cette affaire, a-t-elle ajouté.
    Cette arrestation intervient quatre jours après un naufrage dramatique survenu au large de Wimereux. Dans la nuit de samedi 13 à dimanche 14 janvier, cinq personnes sont mortes noyées alors qu’elles tentaient de rejoindre une embarcation en partance pour le Royaume-Uni. Deux adolescents syriens de 14 et 16 ans figurent parmi les victimes. Le drame a suscité une onde de choc dans la petite commune. « On a vu des migrants qui n’arrivaient pas à monter sur le bateau. Tout le monde criait, tout le monde paniquait », témoigne Quentin auprès de France 3 qui se trouvait sur la digue de Wimereux vers 1h30 du matin. Avec ses amis, le jeune homme a essayé d’aider les migrants présents, en allant chercher des pulls, des joggings, des chaussettes. Il a été très choqué par ce qu’il a vu : « C’est traumatisant d’entendre des bruits, de voir des personnes en train de se noyer dans l’eau. Il y avait des personnes âgées, des bébés. Et de voir des corps morts sur la digue alors que ces gens-là ne veulent que sauver leur peau ».
    Depuis environ trois ans et l’augmentation des passages par la Manche, la France et le Royaume-Uni multiplie les mesures pour empêcher les traversées. En mars 2023, les deux États ont signé un énième accord pour le déploiement de patrouilles supplémentaires côté français notamment. Coût du dispositif pour Londres : près de 500 millions d’euros. Et ce, en plus des caméras thermiques, drones, clôtures, et barrages flottants déjà déployés dans la zone pour freiner les départs.
    Si le nombre de personnes atteignant le littoral anglais a baissé en 2023, la volonté des migrants, elle, reste intacte. « La surveillance policière n’entame pas la détermination des exilés », expliquait à InfoMigrants en décembre 2022 Amélie Moyart, coordinatrice d’Utopia56 à Grande-Synthe. « La traversée de la Manche, c’est la dernière étape. Même terrifiés, même dans le froid, ils prendront la mer. Et tant qu’il n’y aura pas d’accueil digne en France, et des routes sécurisées vers le Royaume-Uni, il y aura des drames ».
    Hussain, un Soudanais de 17 ans qui occupait le camp de Loon-Plage il y a un an, en était à sa sixième tentative. Malgré les dangers en mer, et l’intense surveillance policière. « Mais de toute façon, ici, soit on meurt de froid dans le camp, soit on meurt noyé dans la mer ». Selon la préfecture maritime de la Manche et de la Mer du Nord (Premar), 12 migrants ont perdu la vie en 2023 en tentant de traverser la Manche.

    #Covid-19#migration#migrant#france#pasdecalais#prefecturemaritime#grandsynthe#manche#traversee#grandebretagne#sante

  • Au Niger, la « porte du désert » est rouverte pour les migrants
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/01/17/au-niger-la-porte-du-desert-est-rouverte-pour-les-migrants_6211311_3212.html

    Au Niger, la « porte du désert » est rouverte pour les migrants
    Le Monde avec AFP
    Les visages sont couverts de turbans pour se protéger du soleil et du sable, et les doigts agrippés à de sommaires bâtons de bois pour éviter une chute mortelle depuis les véhicules qui fendent le désert. Juste avant le départ vers la Libye, ils sont des dizaines de migrants à être entassés à l’arrière des pick-up rassemblés dans la principale gare routière d’Agadez, ville du nord du Niger.
    « Ils sont serrés comme des sardines », reconnaît Aboubacar Halilou, passeur en visite sur les lieux. « Mais c’est notre boulot, il faut que les gens passent », dit-il. Agadez, surnommée la « porte du désert », renoue avec le business de la migration depuis que les autorités militaires ont abrogé en novembre une loi de 2015 criminalisant le trafic de migrants.
    Turbans, sachets d’eau, cigarettes… Les marchands ambulants se pressent autour des véhicules pour les dernières emplettes avant un long et dangereux voyage à travers le Sahara. Les retardataires s’activent pour payer leur billet et présenter leurs documents de voyage aux policiers. Les équipages ainsi enregistrés rejoignent un convoi militaire hebdomadaire qui fait route vers le nord, gage d’une relative sécurité.
    L’abrogation fin novembre de la loi de 2015, controversée et impopulaire dans le pays, est censée faciliter le voyage des migrants vers le Maghreb et l’Europe, mais aussi redynamiser l’économie d’une région en proie à une forte criminalité. « Les gens ont applaudi cette abrogation, se réjouit Aboubacar Halilou. Les passeurs qui étaient en prison sont déjà libérés et sont en train de reprendre le travail, parce que c’est une activité très lucrative. »
    Nœud de tous les trafics
    Mais la méfiance persiste et la plupart des chauffeurs fuient les interviews. Un nombre inconnu de transporteurs continue d’emprunter les voies clandestines, au mépris des risques. Les transporteurs « se sont habitués à contourner » et « ne font pas encore confiance au système », explique Mohamed Anacko, président du conseil régional d’Agadez.
    Les ruelles du quartier Pays-Bas, où les migrants embarquent dans les convois, sont pleines de pick-up sans plaque aux carrosseries usées, attelage distinctif des passeurs et des contrebandiers qui prospèrent dans cette vaste région désertique réputée être un nœud des trafics d’armes et de drogues transsahariens. Les convois clandestins partent de nuit, évitant la gare routière et les formalités administratives.
    Dans ce quartier, « les chargements se font à l’air libre, dans les rues. On ne sait pas qui est le chauffeur, qui sont les passagers, de quelle origine ils sont, ni leur destination », déplore Azizou Chehou, coordinateur de l’ONG Alarme Phone Sahara, qui secourt des migrants égarés dans le désert.Les associations espèrent que l’abrogation permettra de réguler le secteur et d’assurer ainsi la sécurité des candidats au voyage, comme Yousssouf Sakho, qui attend le jour du départ dans un « ghetto », des maisons discrètes où les passeurs hébergent leurs clients. Ce ressortissant ivoirien a confié son téléphone et 300 000 francs CFA (quelque 450 euros) à son passeur pour aller en Libye. « Le transporteur, tu ne peux pas avoir 100 % confiance en lui », reconnaît-il.
    Certains migrants découvrent à leur arrivée que l’argent versé n’a pas été remis au chauffeur et ils sont retenus jusqu’au paiement de leur dette. Et les chauffeurs qui empruntent les voies clandestines n’hésitent pas à abandonner leurs passagers dans le désert s’ils sont pris en chasse par des bandits ou les forces de l’ordre. « Il faut que l’on aille vers ces personnes pour leur dire qu’il faut revenir dans le formel et éviter les voies de contournement », assure Mohamed Anacko.
    Mais la tâche s’annonce ardue après neuf ans de clandestinité forcée, dans une région marquée par plusieurs rébellions et où la porosité des frontières encourage la fraude. « La majorité des personnes qui travaillent dans la migration sont des anciens rebelles », souligne Bachir Amma, président d’une association de passeurs. Privés de leur revenu par la loi de 2015, une partie non négligeable d’entre eux se sont reconvertis dans d’autres trafics ou le vol à main armée. « Pour nous, ce n’est pas un trafic, le migrant paye son billet. Nous faisons des feuilles de route, nous travaillons comme toute agence de voyage », affirme M. Amma.
    La loi de 2015 avait fait du Niger un partenaire stratégique de la politique migratoire de l’Union européenne (UE), qui peine à contenir les flux dans une Libye ravagée par la guerre civile. L’UE était le principal financier des projets de reconversion des acteurs de la migration dans la région d’Agadez, aux résultats jugés insignifiants.Mais après le coup d’Etat du 26 juillet 2023, l’UE a suspendu sa coopération au Niger. Les militaires au pouvoir ont dénoncé une loi adoptée « sous l’influence de certaines puissances étrangères » pour justifier son abrogation, largement saluée par les habitants d’Agadez. « Les autorités ont vu la communauté internationale lui tourner le dos. (…) Le Niger constituait une sorte de soupape pour les flux migratoires, alors il fallait rouvrir la soupape », estime Abdourahamane Touaroua, maire d’Agadez. Il soutient que les départs depuis sa ville ont « triplé » depuis l’abrogation, mais les transporteurs jugent la reprise encore timide et pensent que le niveau d’avant sera rapidement atteint.

    #Covid-19#migrant#migration#niger#UE#routemigratoire#agadez#libye#trafic#sante

  • Foundiougne / Émigration irrégulière : Démantèlement d’un réseau dont le cerveau est un étranger, 28 personnes arrêtées !
    https://www.dakaractu.com/Foundiougne-Emigration-irreguliere-Demantelement-d-un-reseau-dont-le-cerv

    Foundiougne / Émigration irrégulière : Démantèlement d’un réseau dont le cerveau est un étranger, 28 personnes arrêtées !
    Foundiougne / Émigration irrégulière : Démantèlement d’un réseau dont le cerveau est un étranger, 28 personnes arrêtées !
    Dans sa dynamique de lutte contre l’émigration irrégulière, la brigade territoriale de Foundiougne a organisé une opération qui a permis de démanteler un vaste réseau de trafic de migrants composés de sénégalais et d’étrangers. Le départ était prévu ce 15 janvier 2024 au quai de pêche de Foundiougne.Le cerveau est un étranger, propriétaire du bateau destiné au transport des migrants.
    Au cours de l’opération, 28 personnes ont été interpellées dont 01 Bissau guinéen, 10 gambiens, 17 sénégalais. En outre, 01 moteur hors bord a été saisi...

    #Covid-19#migration#migrant#senegal#migrationirreguliere#reseau#traficmigrant#quaidepeche

  • Royaume-Uni : le nouveau traité avec le Rwanda, de retour devant les députés, toujours illégal selon le HCR - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/54545/royaumeuni--le-nouveau-traite-avec-le-rwanda-de-retour-devant-les-depu

    Actualités : Royaume-Uni : le nouveau traité avec le Rwanda, de retour devant les députés, toujours illégal selon le HCR
    Par La rédaction Publié le : 16/01/2024
    Le nouveau traité, signé début décembre entre Londres et Kigali pour expulser au Rwanda les demandeurs d’asile arrivés de manière irrégulière au Royaume-Uni, revient mardi et mercredi en commission parlementaire, avec de vifs débats attendus. La veille, le Haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR) avait affirmé que le texte ne répondait toujours pas au droit international.
    Le projet de loi britannique visant à expulser des migrants vers le Rwanda aborde mardi 16 janvier une étape délicate pour le Premier ministre Rishi Sunak. Son camp risque de se déchirer autour de ce texte controversé.
    Destiné à répondre aux objections de la Cour suprême qui a bloqué une précédente version du texte, le jugeant illégal, le projet a franchi en décembre un premier obstacle au Parlement. Il revient désormais en commission parlementaire, mardi 16 et mercredi 17 janvier, avec de vifs débats attendus sur de nombreux amendements.
    L’aile droite des Tories, le parti au gouvernement, est en embuscade pour tenter de durcir la loi, via des amendements soutenus par une soixantaine de députés selon la presse britannique. Ces conservateurs jugent le texte trop édulcoré à leurs yeux. Certains députés souhaitent par exemple supprimer totalement les possibilités de recours pour les migrants expulsés.
    Après avoir essuyé les critiques cinglantes de son ex-ministre de l’Intérieur Suella Braverman et la démission de son secrétaire d’État à l’Immigration Robert Jenrick, le Premier ministre britannique fait à présent face à la rébellion de deux vice-présidents du parti conservateur, Lee Anderson et Brendan Clarke-Smith. Ils ont annoncé lundi soir qu’ils soutiendront les amendements réclamés par l’aile droite du parti. Mais un texte trop radical ne sera pas voté par les conservateurs modérés.
    Rishi Sunak est donc dans une situation délicate, lui qui a placé l’expulsion des migrants vers le Rwanda au cœur de sa politique migratoire."Je sais que tout le monde est mécontent - je suis mécontent au sujet de la situation - et veut voir la fin du manège juridique", a plaidé Rishi Sunak lundi, affichant sa détermination à voir ce projet aboutir.Annoncé en avril 2022 par le gouvernement conservateur de Boris Johnson, le projet n’a jamais pu être mis en œuvre. En juin de la même année, un premier avion a été bloqué in extremis par une décision de la Cour européenne des droits de l’Homme. Puis, le texte a subi une saga judiciaire pour finalement être jugé illégal par la Cour suprême, la plus haute juridiction britannique, en novembre 2023.
    Pour tenter de sauver le texte, le gouvernement a signé un nouveau traité avec le Rwanda en décembre dernier. Le nouveau projet de loi définit le Rwanda comme un pays tiers sûr et empêche le renvoi des migrants vers leurs pays d’origine. Lors de sa signature à Kigali, en effet, le ministre de l’Intérieur avait assuré que le nouveau texte « répondra aux préoccupations de la Cour suprême en garantissant notamment que le Rwanda n’expulsera pas vers un autre pays les personnes transférées dans le cadre du partenariat ».
    Il propose également d’appliquer la loi britannique sur les droits humains en ce qui concerne les expulsions - afin de limiter les possibles recours en justice.
    Mais pour le Haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR), le projet de loi n’est toujours « pas compatible » avec le droit international. Il « ne répond pas aux normes requises en matière de légalité pour le transfert des demandeurs d’asile », a tranché lundi l’agence onusienne après une évaluation juridique du projet.Le HCR accuse, une nouvelle fois, le Royaume-Uni, de violer l’esprit de la Convention de Genève, relative au statut de réfugié, en « déplaçant le fardeau » alors que la plupart des réfugiés sont hébergés dans les pays en développement. L’ONU rappelle également que les itinéraires sûrs et légaux vers la Grande-Bretagne sont « inaccessibles à l’écrasante majorité des réfugiés du monde ».

    #Covid-19#migrant#migration#grandebretagne#UNHCR#asile#rwanda#pactemigratoire#droit#refugie#legalite#sante

  • Le nombre d’entrées irrégulières connu dans l’Union européenne au plus haut depuis 2016
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/16/le-nombre-d-entrees-irregulieres-connu-dans-l-union-europeenne-au-plus-haut-

    Le nombre d’entrées irrégulières connu dans l’Union européenne au plus haut depuis 2016
    Leur nombre a augmenté de 17 % l’an dernier, a annoncé l’agence Frontex, mardi 16 anvier.
    Le Monde avec AFP
    Le nombre d’entrées irrégulières connu dans l’Union européenne a augmenté de 17 % en 2023 par rapport à l’année précédente, atteignant le niveau le plus élevé depuis 2016, a annoncé mardi 16 janvier l’agence européenne de surveillance des frontières, Frontex.
    Sise à Varsovie, l’agence a fait savoir qu’il s’agissait d’une « hausse significative du nombre d’entrées irrégulières en 2023 ». Le nombre d’entrées enregistrées s’est élevé à 380 000, dont 41 % via la route méditerranéenne centrale.
    Ces données annuelles confirment « une tendance à la hausse constante au cours des trois dernières années », constate l’agence dans un communiqué. Les deux autres routes de migrations les plus fréquentées en 2023 passaient par les Balkans occidentaux (26 %) et la Méditerranée orientale (16 %).
    « Les Syriens ont représenté plus de 100 000 passages irréguliers l’année dernière, soit le nombre le plus élevé parmi toutes les nationalités », suivis par les Guinéens et les Afghans, précise Frontex. « Ces trois nationalités ont représenté plus d’un tiers de toutes les détections », selon le communiqué. Environ 10 % des entrées irrégulières ont été effectuées par des femmes et quasi autant par des mineurs.

    #Covid-19#migration#migrant#UE#FRONTEX#migrationirreguliere#mediterranee#balkans#routemigratoire

  • Immigration : « Les partis de gouvernement s’alignent sur le cadre idéologique de l’extrême droite »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/17/immigration-les-partis-de-gouvernement-s-alignent-sur-le-cadre-ideologique-d

    Immigration : « Les partis de gouvernement s’alignent sur le cadre idéologique de l’extrême droite »
    Tribune : Jean-Claude Barbier
    L’irrationalité économique des politiques migratoires est prouvée et n’est pas propre à la France. C’est ce que montre très bien The Economist dans son édition du 23 décembre 2023, en demandant une « détoxification » de ces politiques. Qu’il s’agisse des bateaux sur la Manche ou de l’immigration en général, les hommes et femmes politiques du Vieux Continent pratiquent la surenchère, estime l’hebdomadaire économique britannique.
    L’économiste El Mouhoub Mouhoud démontre de son côté que le « régime d’immigration » hérité du colonialisme en France est peu compétitif internationalement. Une étude du Center for Global Development, parue en 2021, indiquait que le déficit de main-d’œuvre se situerait à environ 44 millions d’actifs en Europe, dont 3,6 millions au Royaume-Uni, 3,9 millions en France et 7 millions en Allemagne. On ne peut que constater les ravages croissants du populisme et la progression des idées d’extrême droite, mais aussi la confusion entretenue entre demande d’asile et autres formes de migration. La Commission européenne, chargée d’organiser la solidarité, montre son impuissance depuis 2015.
    Après la victoire de Geert Wilders aux élections législatives néerlandaises, les observations du politiste Cas Mudde confirment une situation inquiétante en Europe. L’élection a été orchestrée par les partis en lice en termes « racialisés » et le niveau de vie et le problème du logement sont présentés aux électeurs en matière d’immigration. Ce sont les partis de gouvernement qui sont à l’origine d’un alignement sur le cadre idéologique de l’extrême droite.
    Le parallèle ici est frappant avec ce qui se passe en France, où les partis, et non les sondages, imposent leurs thèmes. A cet égard, la recherche illustre le caractère fragile des études concernant les opinions relatives à l’immigration et le danger puissant de leur possible manipulation : la simple mention répétée des faits d’immigration modifie les opinions.En ce qui concerne le Danemark et la Norvège, l’idée de réserver aux nationaux les bienfaits de la protection sociale généreuse est apparue il y a trente ans chez les partis d’extrême droite. Ces partis ont ainsi inventé le « chauvinisme du welfare [Etat-providence] ». Au Danemark, des politiques ouvertement anti-immigrés ont émergé en 2002 avec le centre droit, puis se sont poursuivies avec l’arrivée au pouvoir du parti social-démocrate de Mette Frederiksen, en 2019.
    Le gouvernement danois a été jusqu’à reprendre le programme de l’extrême droite, avec comme but une politique de « zéro réfugié » et a lancé l’idée d’expatrier les candidats à l’asile au Rwanda. Au cas par cas, le Danemark négocie toutefois des exceptions pour ses difficultés de recrutement. Le point-clé danois reste la cohésion culturelle du pays.
    Au Royaume-Uni, le gouvernement de Rishi Sunak travaille sur le transfert des demandeurs d’asile au Rwanda, mais les conservateurs au pouvoir sont très divisés sur le texte et le Parti travailliste y est opposé. Le Labour a cependant révisé sa politique d’immigration, y compris avec des mesures strictes, notamment contre les passeurs. Il n’a surtout pas l’intention d’ouvrir les frontières. L’obtention d’un visa dans le pays est d’ailleurs conditionnée à un salaire plancher, ce qui correspond à une immigration « choisie ».
    Si la « solution » préconisée par M. Sunak n’a aucune chance d’advenir en France, du fait de la Convention européenne des droits de l’homme, le plus grand contraste règne en Europe, particulièrement entre la France et l’Allemagne. Le nombre d’immigrés ukrainiens dépasse le million en Allemagne alors qu’il n’est que de 60 000 en France. La législation allemande permet aux demandeurs d’asile de travailler et une procédure dite « de tolérance » protège certains travailleurs qui n’ont pas le statut de réfugié. Par rapport à celles de la France, les performances d’apprentissage de la langue allemande, malgré ses difficultés, sont sans comparaison !
    En Allemagne, l’immigration et l’asile se situent, proportionnellement à la population, à des niveaux beaucoup plus élevés qu’en France. Certes l’Allemagne a des besoins de recrutement supérieurs à ceux de l’Hexagone, mais le patronat français, comme le fait remarquer El Mouhoub Mouhoud, préfère s’arranger avec l’immigration irrégulière. Il se contente d’agir en cachette, alors que les pénuries de main-d’œuvre sont criantes, notamment s’agissant des chaudronniers dans le secteur du nucléaire.
    Le patronat allemand appuie publiquement, et de façon responsable, les projets du gouvernement relatifs à l’immigration qui promeuvent l’immigration de travailleurs extra-européens. Mieux encore, les hauts responsables du patronat allemand combattent les idées du parti d’extrême droite Alternative für Deutschland (AfD).Certes, la menace pèse lourd sur la coalition du Parti social-démocrate (SPD), des Verts et du Parti libéral-démocrate (FDP) d’une part, et sur l’Union chrétienne-démocrate (CDU) d’autre part, face à la montée en puissance de l’AfD. Pour autant, aussi bien le patronat allemand que les partis de gouvernement ont une position explicite contre l’extrême droite alors qu’en France la « normalisation » du Rassemblement national, elle, s’accélère.
    Une certaine démocratie sociale fonctionne encore en Allemagne face à la menace de la partie de l’extrême droite contaminée par le nazisme. On pourrait s’inspirer de cet exemple plutôt que de s’enfoncer dans un pacte toxique qui enferme le macronisme dans l’ombre du Rassemblement national.
    Jean-Claude Barbier est sociologue auprès du Centre national de recherche scientifique du Centre d’économie de la Sorbonne.

    #Covid-19#migration#migrant#france#immigration#populisme#extremedroite#politiquemigratoire#democratie

  • A New York, tollé après l’hébergement de migrants dans un lycée
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/16/a-new-york-tolle-apres-l-hebergement-de-migrants-dans-un-lycee_6210962_3210.

    A New York, tollé après l’hébergement de migrants dans un lycée
    Par Arnaud Leparmentier (New York, correspondant)
    Des pluies torrentielles étaient annoncées sur New York mardi 9 janvier dans la soirée. Les parents des 3 400 élèves du lycée James-Madison de Brooklyn ont alors été informés que les cours seraient dispensés à distance le lendemain. Pas pour protéger leurs enfants des intempéries, mais pour abriter temporairement cinq cents familles de migrants logées sous des tentes dans un aéroport désaffecté de New York, le Floyd Bennett Field, situé à 8 kilomètres de là. Avec le vent et la marée, les autorités craignaient que les tentes ne s’envolent et soient inondées.
    Vers 17 heures, les migrants sont arrivés par bus scolaires dans le gymnase du lycée. Le maire de la ville était présent, et s’est réjoui sur X en postant des photos : « Sur le terrain, au lycée James-Madison, les équipes font un excellent travail pour mettre les demandeurs d’asile en sécurité et au sec avant leur départ demain matin. » Tout s’est passé très vite, rudement : les familles de migrants ont ensuite dû se lever vers 2 heures du matin, et ont été promptement renvoyées sous leurs tentes. A 4 h 30 du matin, mercredi, elles avaient quitté les lieux tandis qu’entraient en scène les équipes de nettoyage. Ce fut pourtant un tollé auprès de nombreux parents, furieux qu’on prive leurs enfants d’école – les cours à distance promis pour le mercredi n’ont quasiment pas eu lieu, selon les témoignages. Certains insultèrent les migrants tandis que le lycée recevait un « torrent d’appels haineux et même une alerte à la bombe », selon les responsables de la ville.
    « Nous ne pouvons pas transformer les écoles en refuges. Ce n’est tout simplement pas bien », déplorait Michael Novakhov, républicain membre de l’Assemblée de l’Etat de New York, tout en déclarant sa compassion pour les migrants. Dans cette enclave conservatrice de Brooklyn, les responsables républicains ont soufflé sur les braises, rappelant des propos du maire de la ville, Eric Adams, qui annonçait, à l’été 2023, son intention de loger les migrants dans le parc privé de la ville.
    La chaîne conservatrice Fox News et le tabloïd New York Post, propriétés du groupe de Rupert Murdoch, en faisaient leurs choux gras. Tout le monde s’en est mêlé, y compris le milliardaire Elon Musk : « C’est ce qui arrive lorsque vous manquez de chambres d’hôtel. Bientôt, les villes seront à court d’écoles à libérer. Ensuite, ils viendront chercher vos maisons », écrit le patron de Tesla et de SpaceX. Les équipes du maire ont bien compris que le choix d’une école était explosif. « Nous ne prévoyons pas d’utiliser de nouveau le lycée James-Madison », a déclaré Zachary Iscol, commissaire à la gestion des urgences de la ville. Il n’empêche, l’affaire révèle que la crise migratoire se referme comme un piège sur New York, qui a vu arriver 160 000 migrants environ depuis le printemps 2022. Environ 70 000 sont à la charge de la ville, qui a une obligation légale de loger les sans-abri et loue des hôtels pour les héberger.
    Dans cette crise, les responsabilités sont multiples : le président démocrate, Joe Biden, qui n’arrive pas à tarir le flux de migrants venus via le Mexique ; les républicains du Texas, qui se font un plaisir d’envoyer par autobus les migrants dans les villes démocrates, notamment New York, pour confronter leurs idées généreuses à la réalité ; le maire de New York, Eric Adams, ancien policier afro-américain de Brooklyn, qui est débordé mais se voit reprocher d’avoir créé un appel d’air, en confirmant le statut de New York comme « ville sanctuaire », c’est-à-dire ne collaborant pas avec les autorités fédérales pour lutter contre l’immigration clandestine. Il en appelle à l’Etat fédéral, reprochant à Washington et à Joe Biden d’avoir « abandonné » New York. « L’aide n’arrivera pas », a déploré M. Adams en décembre, de retour d’un voyage à Washington.
    L’exaspération est partagée par l’ancien gouverneur démocrate de New York, Andrew Cuomo, contraint à la démission pour harcèlement sexuel en août 2021, qui rappelle dans une tribune publiée par le New York Post le 20 décembre 2023 que la politique d’immigration est du ressort de l’Etat fédéral et suggère d’attaquer ce dernier en justice : « La ville de New York est déjà en crise et doit gérer une économie post-Covid, des taux d’inoccupation [de bureaux] élevés, la criminalité, les sans-abri, l’immigration et les déficits budgétaires. Elle ne peut pas se permettre de financer les soins aux migrants, estimés à 12 milliards de dollars [près de 11 milliards d’euros] d’ici à la fin de l’exercice 2025. Elle ne peut pas non plus se permettre de supprimer des services essentiels alors que la qualité de vie est déjà en souffrance », écrit l’ancien élu.
    En attendant, pourtant, M. Adams a proposé des coupes budgétaires dans le ramassage des ordures et le nettoyage de la voirie, dans les écoles, les bibliothèques et la police, avant de se raviser sur le dernier dossier. La cote de popularité du maire est tombée en décembre à 28 %, le plus mauvais score jamais enregistré par un maire de Big Apple. Son cas est aggravé par des soupçons de financement illégal de sa campagne électorale par la Turquie dans une enquête menée par le FBI, tandis que la ville se divise sur le conflit israélo-palestinien. L’élu est confronté à une crise qui rappelle, sans être comparable, la faillite de New York dans les années 1970 et l’envolée de la criminalité dans les années 1990 sur fond de guerre de la drogue. Les maires de l’époque n’avaient fait qu’un seul mandat, et c’est le destin que prédit Michael Goodwin, l’éditorialiste du New York Post, à M. Adams.

    #Covid-19#migrant#migration#etatsunis#newyork#mexique#crisemigratoire#fluxmigratoire#hebergement#migrationirreguliere#sante

  • Balkans : en Slovénie, les arrivées de migrants ont doublé en un an - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/54515/balkans--en-slovenie-les-arrivees-de-migrants-ont-double-en-un-an

    Actualités : Balkans : en Slovénie, les arrivées de migrants ont doublé en un an
    Par La rédaction Publié le : 15/01/2024
    En 2023, plus de 60 000 exilés ont été détectés dans ce petit pays alpin, contre environ 30 000 l’année précédente. La plupart de ces personnes sont originaires d’Afghanistan, du Maroc et du Pakistan.
    Le nombre de migrants interpellés a quasiment doublé en 2023 sur un an en Slovénie. Selon les statistiques de la police consultées par l’AFP, 60 587 personnes sont arrivées l’an dernier dans le petit pays alpin, contre 32 024 en 2022, soit une hausse de 89%.
    La plupart sont arrivées en Slovénie via la Croatie voisine, entrée récemment dans l’espace Schengen. Environ 30% étaient originaires d’Afghanistan, 15% du Maroc et 9% du Pakistan. Le nombre de citoyens russes a également doublé, passant de 1 816 à 3 675.
    Presque toutes ces personnes ont émis le souhait de déposer une demande d’asile en Slovénie, avant de poursuivre leur chemin vers l’ouest et le nord de l’Europe le plus souvent. L’Allemagne, souvent le pays d’installation des migrants syriens, turcs et afghans notamment, a de son côté vu grimper les demandes d’asile de plus de moitié l’an passé.
    En 2023, les entrées d’exilés en Slovénie, pays de la route migratoire des Balkans, se sont multipliées. En réaction, les autorités ont introduit le 21 octobre des contrôles à ses frontières, dans le sillage d’autres pays de la Hongrie et de la Croatie. Dix jours plus tard, le 2 novembre, le ministre de l’Intérieur Davor Božinović a convenu avec ses homologues italien et croate de patrouilles conjointes.Dans ce contexte, la police slovène a détecté au cours des deux derniers mois une augmentation des tentatives de passage vers l’Autriche par des cols montagneux peu habités, selon l’agence de presse slovène STA. Au mois de juin pourtant, la Slovénie avait pris une décision à l’encontre de ses récentes décisions : la destruction de sa clôture anti-migrants, le long de la frontière avec la Croatie. Selon le chef du gouvernement slovène Robert Golob, « la clôture n’a pas rempli son but déclaré, qui était de décourager ceux qui voudraient franchir la frontière », avait-il dit devant les journalistes. Le mur a donc être démantelé « pour des raisons humanitaires et parce qu’il a échoué à atteindre son objectif ».
    Une « hostilité » même dans la mort
    Cette barrière, érigée en 2015 lorsque plus d’un demi-million d’exilés avaient transité par le pays, forçaient, d’après les associations, les migrants à emprunter d’autres chemins en pleine nature, plus dangereux. En décembre dernier 2021, une fillette de 10 ans est morte dans la Dragonja, la rivière qui sépare la Croatie de la Slovénie. Elle était sur les épaules de sa mère, qui tentait de gagner l’autre rive, lorsqu’elle a été happée par le courant. Le même mois, le corps d’un Bangladais avait déjà été retrouvé au même endroit. Le 1er janvier 2020, un autre cadavre avait été retrouvé près de là, à Socerb, à la frontière slovène : celui d’un Algérien de 29 ans, décédé après une chute dans un précipice.
    Il n’existe aucun chiffre officiel du nombre de victimes sur la route des Balkans. D’après une enquête de Lighthouse Reports, en collaboration avec d’autres médias et des universités britanniques, « l’hostilité à laquelle les gens sont confrontés aux frontières de l’Europe de leur vivant perdure également lorsqu’ils sont morts. Les autorités nationales ne font que peu ou pas d’efforts pour tenter d’identifier les migrants décédés ou pour informer leurs familles ».
    « Les cadavres non identifiés finissent entassés dans des morgues ou enterrés sans laisser de traces », d’après l’enquête. « Certains corps ne sont jamais retrouvés ».

    #Covid-19#migrant#migration#slovenie#croatie#balkan#routemigratoire#mortalite#frontiere#cadavre#sante

  • Une nuit de « chaos » : cinq migrants meurent dans la Manche en tentant d’atteindre le Royaume-Uni - InfoMigrants
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    Actualités
    Une nuit de « chaos » : cinq migrants meurent dans la Manche en tentant d’atteindre le Royaume-Uni
    Par La rédaction Publié le : 15/01/2024
    Cinq migrants sont morts dans la nuit de samedi à dimanche dans la Manche, alors qu’ils tentaient de rejoindre une embarcation à la mer dans une eau glaciale pour rejoindre le Royaume-Uni. Parmi les rescapés se trouvent des dizaines d’enfants en bas âge et un nourrisson d’un mois.
    C’est le premier drame de 2024 au large des côtes françaises. Cinq personnes ont péri noyées dans la nuit de samedi 13 à dimanche 14 janvier dans la Manche, et un sixième migrant en arrêt cardiaque a été transféré « en urgence absolue » à l’hôpital de Boulogne-sur-Mer, a indiqué la préfecture maritime de la Manche et de la Mer du Nord (Premar). Un autre exilé est légèrement blessé et 32 personnes ont été secourues, indique l’AFP alors que le quotidien régional la Voix du Nord évoque 71 rescapés, dont une dizaine d’enfants en bas âge et un nourrisson d’un mois.
    Selon le parquet de Boulogne-sur-Mer, « le bateau a été mis à l’eau à distance du rivage. Douze à quinze personnes étaient à bord, d’autres s’apprêtaient à monter » quand il « a basculé » à cause de « la houle et de la marée montante ». « C’est à ce moment-là que le drame s’est déroulé » aux alentours de 1h45, a-t-il expliqué à l’AFP. Les exilés ont eu du mal à monter dans l’embarcation en raison des vagues et de l’obscurité.
    Un Soudanais de 29 ans a raconté aux journalistes de la Voix du Nord qu’à « peine quelques mètres dans la mer, l’eau nous arrivait à la poitrine. Des personnes parvenaient à attraper le bateau et à grimper dedans. D’autres non ». Le jeune homme a aussi expliqué que « les vagues nous ramenaient vers la plage. J’ai vu des gens disparaitre en sautant du bateau. C’était quasi impossible de partir ».
    Un remorqueur d’intervention, « en patrouille dans la zone », a été mobilisé et l’équipage a identifié sur place « des personnes inanimées et inconscientes » dans une eau à neuf degrés et une température extérieure de quatre degrés, selon la Premar. Dans ces conditions climatiques, les chances de survie sont particulièrement réduites.
    Les rescapés ont dans un premier temps été conduits dans la salle des fêtes de Wimereux, où s’est produit le drame. Des agents d’astreinte de la ville et le premier adjoint au maire ont distribué de l’eau, du café et du thé aux survivants, précise la Voix du nord. Une cellule médicale a été installée et la Protection civile déployée. La préfecture a ensuite affrété un bus pour amener les exilés dans un hangar à Calais mis à disposition des migrants dans le cadre du plan grand froid. Jusqu’en milieu de matinée les « investigations en mer » pour retrouver d’éventuelles personnes en difficultés liées à ce naufrage « se sont poursuivies », a assuré la Premar. Plusieurs bateaux ont sillonné la zone et un hélicoptère de la Marine nationale a survolé le secteur avec un énorme projecteur. « Aucune nouvelle découverte n’a été faite », a ajouté la préfecture. Mais « nous ne sommes pas à l’abri de trouver d’autres corps dans les heures qui viennent ».Une enquête a été ouverte, notamment pour « homicide involontaire aggravé », « aide au séjour d’étrangers en situation irrégulière en bande organisée » et « association de malfaiteurs », a signalé le parquet de Boulogne-sur-Mer.
    Cette nuit-là, les départs ont été nombreux. Selon la Premar, au total, « 182 personnes ont été secourues au large par des moyens français » au cours de la nuit de samedi à dimanche et dans la journée de dimanche. et au total ce week-end, 400 exilés ont été pris en charge par les forces françaises. Les migrants ont profité d’une accalmie pour tenter la traversée. « Nous avons eu 26 jours consécutifs de mauvais temps. Là, les personnes ont profité de conditions un peu meilleures pour partir. Mais on voit bien que la situation n’était pas plus favorable », note Mathilde Potel, commissaire à la direction zonale de la police aux frontières du Nord, interrogée par la Voix du Nord. Pour les autorités, ce drame « nous démontre une nouvelle fois l’importance de notre mission de lutte contre les réseaux de passeurs et contre les traversées maritimes », a estimé lors d’un point presse le préfet du Pas-de-Calais (nord), Jacques Billant. « Ce sont là des réseaux criminels qui font courir des risques inconsidérés aux populations migrantes. Prendre la mer dans une eau à sept degrés, c’est aller à la mort avec une durée de vie limitée à dix minutes en cas de chavirage », a-t-il ajouté.
    Ce phénomène des « taxi-boats » s’est particulièrement développé ces derniers mois. Des bateaux pneumatiques partent plus au sud du littoral, souvent dans la Somme, où les contrôles sont moins fréquents, avec quelques personnes seulement – passeurs ou migrants – à bord. Ils mettent dans un premier temps le cap au nord, vers les plages plus proches de Calais, où se cachent les passagers ayant payé pour la traversée. Ceux-ci se jettent alors à l’eau pour embarquer : selon le droit maritime, les policiers ne peuvent pas interpeller les bateaux déjà en mer.Avec cette méthode particulièrement dangereuse, les exilés attendent les embarcations dans les eaux glaciales de la Manche, et sont parfois immergés jusqu’au torse. Le chef de la diplomatie britannique David Cameron a affirmé à la BBC que cette nouvelle « déchirante » lui « brisait le cœur ». Mais elle « montre aussi à quel point nous devons stopper les bateaux, stopper ces trafics et les êtres humains qui sont derrière », a-t-il ajouté. « Dans un monde idéal, nous renverrions juste ces personnes en France, et le trafic s’effondrerait. Mais ce n’est pas possible, et c’est pour cela que nous poursuivons cette politique avec le Rwanda », a-t-il poursuivi.Les députés britanniques doivent se prononcer cette semaine sur le projet de loi permettant d’expulser vers le Rwanda les migrants arrivés illégalement au Royaume-Uni. « Nous avons perdu le contrôle de nos frontières et nous devons faire quelque chose pour arrêter les bateaux. Maintenant, je pense que le point de départ pour cela est de s’attaquer aux gangs criminels qui mènent ce trafic ignoble », a réagi pour sa part Keir Starmer, leader de l’opposition travailliste, sur la BBC.
    Mais le maire de Wimereux, Jean-Luc Dubaële, pointe du doigt les autorités françaises et britanniques, coupables, selon lui, du drame. « Il est temps que l’État prenne les choses en main et tape sur la table au niveau des Anglais qui sont responsables de ces tragédies », fustige l’édile avant d’ajouter, en pesant ses mots : « Les passeurs sont eux aussi responsables de cette situation bien entendu, pour moi ce sont des assassins. » Douze migrants ont perdu la vie en 2023 en tentant de traverser la Manche, selon la Premar.

    #Covid-19#migrant#migration#france#grandebretagne#pasdecalais#traversee#mortalite#sante#migrationirreguliere#passeur#prefecturemaritime#taxiboat

  • Loi « immigration » : le risque d’une généralisation des droits différenciés pour les étudiants étrangers
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    Loi « immigration » : le risque d’une généralisation des droits différenciés pour les étudiants étrangers
    Par Minh Dréan
    C’était l’une des mesures les plus décriées du plan « Bienvenue en France », présenté par l’ancienne ministre de l’enseignement supérieur Frédérique Vidal. Depuis 2019, les étudiants étrangers doivent s’acquitter de droits d’inscription plus élevés que les candidats européens. Plusieurs universités s’étaient jusqu’ici engagées à ne pas mettre en place ce principe, mais la récente loi « immigration », en inscrivant celui-ci dans le code de l’éducation, rendrait obligatoire son application.
    En déplacement au salon d’orientation postbac de Paris-La Villette, vendredi 12 janvier, Sylvie Retailleau, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, reconduite au sein du nouveau gouvernement, a assuré avoir obtenu des engagements « forts » auprès du président de la République, Emmanuel Macron. Une manière de rassurer la communauté universitaire, qui avait fermement condamné les dispositions de la loi « immigration », dont la généralisation des droits différenciés. Ceux-ci ne sont pas une nouveauté. Depuis 2019, les étudiants extracommunautaires (hors Union européenne) qui souhaitent s’inscrire à un diplôme national de licence, de master ou de cycle d’ingénieur doivent débourser 2 270 euros pour une licence et 3 770 euros pour un master, contre 170 et 243 euros pour le reste des candidats.
    Le ministère avait cependant accordé, par décret, aux facultés la possibilité d’exonérer de droits d’inscription 10 % de leurs étudiants. Un dispositif que les présidents ont massivement choisi d’utiliser en faveur des candidats extracommunautaires. Ainsi en 2023, 57 % des universités (soit 42 d’entre elles) ont exonéré l’intégralité des étudiants étrangers, selon un décompte publié par l’agence de presse spécialisée AEF. Elles sont 16 (22 %) à en exonérer une partie, selon des critères académiques, de nationalités ou linguistiques. Seules 13 universités (18 %) appliquent complètement les frais majorés.
    Selon la vice-présidente de l’université Paris-II Panthéon-Assas, Emmanuelle Chevreau, à la rentrée 2023, ces frais majorés, mis en place par l’administration précédente, ont concerné 900 étudiants – sur les 3 000 candidats étrangers accueillis. Ces derniers peuvent ensuite faire une demande d’exonération partielle. « Ensuite, 50 % des demandes sont acceptées selon des critères économiques et sociaux. Cette année, seuls 10 % des étudiants en ont fait la demande », indique-t-elle.
    En pratique, rares sont les étudiants qui payent l’intégralité des frais : sur les 96 600 étudiants inscrits à la rentrée 2021, ils ne sont même que 6 %, indique une note du service statistique et analyse de l’enseignement supérieur parue en mars 2023. Près de 17 % en sont totalement exonérés, le reste bénéficiant d’exonérations partielles, décidées par l’établissement ou via des bourses du gouvernement et d’ambassade. A l’université de Limoges, jusqu’en 2021, la présidence avait refusé de faire payer davantage aux étudiants étrangers. Mais la nouvelle équipe, elle, a fait un autre choix. « Nous avons simplement décidé de respecter la loi », souligne le vice-président de l’établissement, Laurent Bourdier, qui réfute « toute considération idéologique ».
    « Nous avons essayé de faire quelque chose d’équilibré en mettant en place plusieurs garde-fous et surtout en jouant sur le jeu des exonérations par le biais d’attribution de bourses d’excellence », détaille-t-il. Sur les 2 000 étudiants étrangers accueillis sur le campus de Limoges, seuls 420 se sont bien acquittés des frais dans leur intégralité. « Le système reste imparfait, il y a eu quelques remous, ça a été difficile d’introduire les droits d’inscription différenciés auprès de nos équipes, reconnaît M. Bourdier. Je ne minimise pas le fait qu’il s’agit de frais importants qui peuvent freiner certains candidats. »
    Ces droits différenciés avaient été présentés par le ministère comme une manne financière devant permettre un meilleur accueil de ces étudiants. « Nous avons un devoir d’exemplarité envers tous ceux qui s’acquittent de ces frais », assure le responsable. A Limoges, ce sont donc 90 000 euros qui sont consacrés à l’accompagnement « individualisé » des étudiants étrangers. Entre 600 000 et 700 000 euros sont dévolus à l’agrandissement du campus international. En tout, les droits d’inscription différenciés rapporteraient environ 900 000 euros à l’établissement.
    D’autres universités arguent qu’elles n’ont pas d’autre choix que d’appliquer ces droits. C’est le cas à l’université de Strasbourg, où pour la première fois, en 2024, l’établissement appliquera les droits différenciés pour les étudiants étrangers puisque le seuil d’exonération de 10 % devrait être dépassé. Une règle a toutefois été décidée : exonérer complètement les étudiants en licence mais faire payer ceux arrivant en master. Certaines universités résistent pourtant tant bien que mal. A Rennes-II, les candidats étrangers représentent 15 % de la population étudiante (23 000) et 85 % d’entre eux sont des étudiants extracommunautaires. Vincent Gouëset, le président de l’université, s’était opposé, dès 2019, à la mise de cette mesure en pointant du doigt la « rupture d’égalité » pour les étudiants étrangers issus de milieux défavorisés. « Le choix de ne pas appliquer ces droits différenciés nous conduit à dépasser le seuil des 10 % autorisé, c’est un choix assumé qui répond aux valeurs d’inclusion et de justice sociale portées par l’établissement, le rectorat en est informé et ne nous a rien dit », déclare le président, conscient que l’adoption de la loi sur l’immigration pourrait pousser le rectorat à lui imposer une application plus stricte des textes.

    #Covid-19#migration#migrant#france#loiimmigration#etudiant#inegalite#université

    • « Dans la logistique, la loi immigration va faire des ravages ». Billet de Pierre, ouvrier
      https://www.revolutionpermanente.fr/Dans-la-logistique-la-loi-immigration-va-faire-des-ravages-Bill

      Fin décembre, le gouvernement a imposé ce qui est sans doute la loi la plus brutale et la plus raciste de l’Histoire de la V° République. Une loi qui va avoir d’énorme conséquences dans le monde du travail et notamment la logistique. Billet de Pierre, ouvrier et délégué syndical dans le secteur de la logistique.

      L’année 2023 s’est terminée avec l’adoption de l’une des lois les plus brutales envers les immigrés que la 5eme république ait connu. La loi immigration constitue une énorme offensive réactionnaire du gouvernement, avec l’appui de la droite et de l’extrême-droite. Remise en cause du droit du sol, durcissement des conditions de regroupement familial, modification de la « régularisation par le travail » : cette loi est une attaque globale qui touche aujourd’hui des millions de personnes en France, en particulier des travailleuses et des travailleurs des secteurs les plus précaires, des salariés du bâtiment jusqu’aux ouvrières et ouvriers du nettoyage, des CDI jusqu’aux intérimaires. Ces fameux travailleurs essentiels qui font des travaux difficiles et mal payés, ce sont eux qui seront les premiers attaqués.

      Concrètement, dans l’entrepôt de logistique ou je travaille, la grande majorité de mes collègues sont issus de l’immigration. Mais ce n’est pas une réalité seulement dans mon entrepôt. Comme l’explique la sociologue du travail Carlotta Benvegnù dans un article de Socialter les salariés dans la logistique « sont aujourd’hui environ 800 000, et même 1,5 million en comptant le transport. 80 % sont des hommes, pour la plupart racisés, et la grande majorité sont des ouvriers. En 2021, 13 % des emplois ouvriers en France relevaient ainsi du secteur de la logistique ». Il faut ajouter qu’« en France, le secteur de la logistique fait un recours massif au travail temporaire, avec près d’un quart des effectifs ouvriers en intérim, auxquels s’ajoutent 10 % de contrats à durée déterminée (CDD) » d’après une étude publiée par la Dares en 2020. Ces quelques données suffisent à comprendre que, dans la logistique, c’est une majorité des ouvrières et ouvriers qui sont directement concernés par les mesures de la loi immigration.

      Alors que la loi n’est pas encore promulguée, la situation est déjà catastrophique, avec des cas variés, du travailleur sans-papiers à la personne en attente du renouvellement de carte de séjour. Comme si cela ne suffisait pas, nombre de collègues sont aussi touchés « indirectement », que cela soit pour des membres de leurs familles présents en France, des proches ou des amis. Dans ce cadre, l’annonce de la loi et le durcissement des conditions pour obtenir des papiers, titres de séjour etc. va rendre la situation plus dramatique pour ceux déjà touchés… et mettre en difficulté des travailleurs étrangers supplémentaires En d’autre terme, dans la logistique comme ailleurs, la loi immigration va faire des ravages.

      Mais la nouvelle loi alimente aussi deux mythes qu’il faut déconstruire :

      Le premier est de penser que la demande de régularisation serait plus facile en tant que travailleur. En effet, parmi les mesures de la loi, il n’y aura plus besoin du certificat de l’entreprise pour une régularisation par le travail dans les métiers « en tension », ce qui est le cas pour la logistique. Certains collègues voient ce changement comme plutôt positif puisqu’il ne sera plus nécessaire de demander ce document à son patron. Malheureusement, cette disposition s’accompagne d’une batterie de mesures rendant plus difficile l’accès à la régularisation par le travail : non seulement les autres conditions nécessaires sont durcies (notamment le nombre de mois consécutifs au travail) mais surtout le pouvoir des préfets pour valider ou non ces régularisations sera renforcé ! Il ne faut pas se faire d’illusions quant au rôle des préfets qui sont sous l’autorité directe du ministre de l’Intérieur. Tout sauf une amélioration donc…

      Le deuxième mythe, alimenté par une propagande médiatique intense et sans interruption, serait que cette loi ne concernerait que les travailleurs étrangers. Derrière ça, le gouvernement cherche à nous diviser, surtout après les récents mouvement sociaux où on a vu que les travailleurs pouvaient s’unir pour s’opposer au gouvernement notamment contre la réforme des retraites. En réalité, laisser passer cette loi qui s’attaque à des travailleurs en leur conditionnant des aides selon leur nationalité c’est ouvrir la voie à toutes les attaques qui sont déjà annoncées contre les plus précaires, sur le RSA ou l’assurance chômage, ou bien encore la « nouvelle loi travail » qui attaquera l’ensemble des travailleurs, quelque soit leur nationalité.

      Au contraire, se battre tous ensemble contre la loi immigration, c’est refuser leur jeu de la division et potentiellement infliger un recul à un gouvernement anti-travailleur, pour mieux préparer les combats à venir dans les prochains mois. Il faudra être nombreux à dénoncer cette loi dans la rue. Aussi dans nos entreprises, ça va être décisif de dénoncer la loi immigration comme on l’a fait avec notre syndicat CGT ID Logistics Région Ouest pour montrer à nos collègues qu’ils ne sont pas seuls à affronter ces attaques racistes.