• Six haltes dans la vie de Georges Tarabichi

    http://orientxxi.info/lu-vu-entendu/six-haltes-dans-la-vie-de-georges-tarabichi,1431

    Georges Tarabichi (1939-2016) était à la fois journaliste, traducteur, critique, écrivain et l’une des plumes les plus prolixes du monde arabe. Il a notamment traduit vers l’arabe Marx et Lénine, Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, et surtout Sigmund Freud. Syrien originaire d’Alep, Tarabichi a vécu à Beyrouth la guerre civile libanaise avant de s’installer à Paris, où il est décédé le 16 mars dernier à 77 ans. Il a été le critique majeur des travaux du philosophe marocain Mohamed Abed Al-Jabri, rejetant sa thèse d’une irrationalité fondamentale de la pensée arabe orientale opposée à un rationalisme maghrébin. Alors que la guerre de Syrie a été pour lui le douloureux temps du silence, l’écrivain a néanmoins rédigé cet article-testament, revenant s

    #littéraure #monde_arabe #syrie

    • Les lecteurs de cpa profitent de la fin de ce texte depuis 4 mois déjà (http://cpa.hypotheses.org/5885) et en prime ils ont un second texte plus sympa encore à mon avis : http://cpa.hypotheses.org/5900.
      Je me permets de redonner mon intro au texte redonné en français par Orient XXI, sur un ton moins compassé que celui d’Orient XXI.

      "Ce n’est pas politiquement correct, mais je me risque à écrire qu’on a souvent l’impression, en France, qu’il suffit de nos jours d’être syrien « de la bonne manière » pour être immédiatement adoubé comme un « grand quelque chose » : écrivain, artiste, penseur, la liste est longue… En revanche, l’oubli est le lot des Syriens qui ne sont pas dans la bonne ligne et qui persévèrent dans leur être, comme ils l’entendent, au mépris des modes…

      On en a une nouvelle illustration avec la mort à Paris, le 16 mars dernier, d’un très grand intellectuel arabe, Georges Tarabichi. Né à Alep en 1939, il a vécu un moment à Beyrouth avant de quitter le Liban au temps de la guerre civile. Pas un média français n’a jugé bon de consacrer quelques lignes au décès de cet écrivain qui laisse derrière lui près de deux cents ouvrages, entre traductions et œuvres personnelles. Pourtant, ce ne sont pas les « spécialistes » de la Syrie qui manquent ! Mais les ouvrages de Georges Tarabichi ont un immense défaut : ils sont en arabe et s’adressent, essentiellement, aux Arabes !

      Pour avoir quelque chose à dire sur « l’Orient compliqué », connaître Georges Tarabichi est pourtant loin d’être inutile comme en témoigne le parcours de cet homme qui s’est engagé très tôt dans les rangs du nationalisme arabe, puis du marxisme, avant de consacrer l’essentiel de sa vie à l’écriture : la traduction (beaucoup de philosophes et surtout l’œuvre de Sigmund Freud dont il fut un des principaux introducteurs dans le monde arabe), la critique littéraire, largement inspirée de ce qu’on appelait naguère la psychocritique, et surtout, la pensée arabe et en particulier la critique des thèses du philosophe marocain contemporain Mohamed Abed al-Jabri, « réfutation » à laquelle il a consacré près d’un quart de siècle de travail acharné.

      Impliqué des années durant dans la vie de revues aussi importantes que Études arabes (دراسات عربية) ou L’Unité (الوحدة ), figure centrale de la vie intellectuelle de la région durant plus d’un demi-siècle, ce défenseur acharné de la raison critique (il fut longtemps le secrétaire-général de la Ligue des rationalistes arabes (رابطة العقلانيّين العرب) s’est éteint sur le sol français, sans le moindre salut de la prétendue « patrie des Lumières ».

      En hommage à son remarquable parcours, quand bien même on ne le suivrait pas sur tout, CPA vous propose un extrait tiré d’un de ses derniers textes (si ce n’est le dernier). Publié un mois seulement avant sa mort et intitulé « Six étapes de ma vie » (ست محطات في حياتي), ce « testament intellectuel » se termine par un rappel du drame syrien. Georges Tarabichi s’y exprime avec une sincérité qui étonnera seulement ceux qui ne sont sensibles qu’au cliquetis des médailles sur la poitrine des grands hommes.