• Des revers en cascade - RipouxBlique des CumulardsVentrusGrosQ
    http://slisel.over-blog.com/2016/11/des-revers-en-cascade.html
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    Achat d’hélicoptères américains par la Pologne, rejet de la résolution française sur la Syrie à l’ONU, annulation de la visite de Vladimir Poutine à Paris : courant octobre, en quelques jours, notre diplomatie a connu trois revers majeurs, dont elle s’offusque, alors même qu’elle en porte l’entière responsabilité en raison de la politique erratique conduite par nos dirigeants.
    Des revers en cascade

    La « trahison » polonaise n’a surpris que ceux qui ne s’intéressent pas à ce pays, car il est clair que la défense de ses intérêts nationaux – et sa défiance légitime à l’égard de son voisin russe – a toujours conduit Varsovie, depuis 1991, à privilégier l’alliance avec Washington plutôt que la solidarité européenne. On ne peut guère reprocher aux Polonais de nous l’avoir caché, car ils ont montré à plusieurs reprises, sans ambigüité aucune – notamment sur le dossier ukrainien – de quel côté leur cœur penchait. Mais nos politiques se bercent d’illusions. Non seulement ils n’ont pas voulu tenir compte de cette évidence, mais pire, ils se sont persuadés que notre refus de livrer deux navires amphibies Mistral à la marine Russe – sous la pression américaine – conduirait notre partenaire européen à choisir notre offre. Bien sûr, il n’en a rien été et l’annulation de la visite présidentielle à Varsovie comme les critiques du ministre des Affaires étrangères illustrent à quel point nos dirigeants ont pris leurs désirs pour la réalité… laquelle semble totalement leur échapper.
    L’émotion de nos gouvernants au sujet de la bataille d’Alep en est un autre exemple. Leur « révolte » face aux « exactions » des forces russes et syriennes se fonde sur une vision totalement partiale de la situation, diffusée par les médias occidentaux.
    A Alep, tout ceux qui connaissent la situation de terrain savent que les djihadistes d’Al-Nosrah pilonnent quotidiennement depuis plusieurs années les quartiers dont la population est restée fidèle au gouvernement de Damas[1] – ciblant prioritairement les quartiers chrétiens -, faisant de nombreuses victimes innocentes ; mais sans doute ces vies ont-elles moins de valeur que celles de ceux qui soutiennent les djihadistes. En effet, les témoins locaux confirment que tous les quartiers bombardés par les aviations russe et syrienne sont ceux dans lesquels la population a pris ouvertement parti pour les islamistes et où flotte ostensiblement le drapeau de Daech… ce que le médias ne nous montrent jamais[2].
    Cette présentation totalement déformée de la réalité est insupportable. Pourtant elle est à l’origine des envolées lyriques et outragées de François Hollande et de Jean-Marc Ayrault, qui se sont même montrés menaçants à l’égard de Moscou. Voir nos autorités réagir à partir d’éléments aussi faux conduit à s’interroger sur leur connaissance réelle du dossier ou leur indépendance d’esprit vis-à-vis de Washington. De plus, ces positions de Matamore ne sont d’aucun effet. Les dirigeants français ont peut être l’illusion d’être des acteurs entendus et écoutés ; mais il n’en est rien. Ils sont aussi insignifiants qu’inaudibles. Notre proposition de résolution à l’ONU a été rejetée et nous ne sommes même plus invités aux négociations internationales sur la Syrie à Genève.
    En toute logique, devant l’hostilité manifestée à son égard par nos gouvernants, les menaces de poursuivre Moscou devant la Cour pénale internationale (CPI), la surenchère de nos médias qui font du Poutine Bashing leur sport favori et la présentation totalement partiale du conflit syrien, le président russe a décidé d’annuler sa visite dans notre pays, jugeant le contexte peu favorable à des discussions sereines. Cette décision semble avoir pris au dépourvu notre président qui pensait pouvoir tancer son homologue russe sans que celui-ci ne réagisse, puis sans doute l’accueillir pour lui faire la leçon.
    Une perception des faits totalement orientée
    Il n’est pas question de faire l’apologie de Vladimir Poutine ou de Bachar El-Assad, ni de nier que la guerre tue, à Alep ou ailleurs ; mais il est bon de rétablir certaines vérités qui sont délibérément dissimulées par les stratèges de la communication américains et les médias Mainstream à leur service.
    Depuis qu’ils sont devenus l’unique superpuissance, les Etats-Unis n’ont cessé de prendre des libertés vis-à-vis du droit international. Pourtant, rares ont été les médias à dénoncer leurs méfaits et les ONG ou les Etats les ayant menacé de poursuites juridiques internationales ou déclaré qu’ils en porteraient la responsabilité devant l’histoire. Rappelons quelques faits :
    – l’invasion illégale de l’Irak – passant outre le véto de la ONU -, laquelle a permis la naissance de Daesh et a provoqué la mort et la désolation dans ce pays, faisant plus de victimes encore que la dictature de Saddam Hussein. Cette action a tout autant violé le droit international que l’action russe en Crimée ;
    – les nombreuses victimes collatérales des frappes de drones dans le cadre de la Global War on Terrorism (GWOT)[3] ;
    – la légalisation la torture et la multiplication des arrestations extra-judiciaires (Rendition) et des prisons secrètes dans le cadre de la GWOT ; la généralisation de l’espionnage de leur population et de leurs alliés. Pourtant ni l’une ni l’autre de ses mesures n’ont été d’une grande efficacité dans la lutte contre le terrorisme ;
    – le soutien à l’Arabie saoudite et au Qatar – deux Etats qui exportent leur islam radical archaïque dans le monde et soutiennent les djihadistes -, à la confrérie des Frères musulmans – dans le cadre du « printemps arabe » – et aux djihadistes liés à Al-Qaïda pour renverser le régime syrien.
    Mais les Etats-Unis ne sont pas les seuls dans ce cas. Ces pratiques concernent aussi plusieurs de leurs alliés.
    L’Arabie Saoudite, non contente d’exporter le wahhabisme de par le monde et d’avoir soutenu les djihadistes, est intervenue au Bahrein à l’occasion du printemps arabe (2011) pour mater une révolte populaire sans que personne ne s’en offusque. Elle semble pourtant incapable d’assurer la sécurité des pélerins se rendant à La Mecque pour le hadj, ainsi qu’en témoignent les incidents à répétition survenus ces dernières années ayant entrainé la mort de centaines de croyants. Surtout, depuis dix-huit mois, elle a déclenché une guerre sanglante au Yémen (opération Tempête décisive), laquelle semble ne pas intéresser grand-monde, contrairement au conflit syrien.
    Depuis mars 2015, une coalition internationale[4] menée par Riyad s’attache à remettre au pouvoir le gouvernement d’Abd Rabo Mansour Hadi, afin d’empêcher l’installation d’un régime chiite à sa frontière méridionale. Dans ce conflit, les Saoudiens sont aidés par les Etats Unis qui leur fournissent armement, renseignements et ravitaillent leurs avions. Les combats ont déjà provoqué plus de 10 000 morts dont beaucoup de civils. L’Arabie saoudite bombarde systématiquement les infrastructures du pays – y compris les hôpitaux – et exerce un blocus sur les zones rebelles au point que des millions de Yéménites n’ont plus de quoi se nourrir ; trois millions ont fui les zones de combat. Le 8 octobre dernier, les avions saoudiens ont pris pour cible une cérémonie funéraire à Sanaa, tuant au moins 140 personnes et en blessant 500. Ces frappes relèvent pleinement d’un crime de guerre ; pourtant aucun Etat occidental ne l’a signalé ni n’a protesté. Tout juste les Américains ont-ils fait savoir qu’ils allaient reconsidérer leur soutien aux Saoudiens dans ce conflit.
    A noter également que plusieurs milliers de véhicules Toyota ont été achetés par les pays du Golfe (Arabie saoudite, Qatar, Émirats arabes unis et Jordanie) pour être livrés à l’État islamique,en Syrie et en Irak. C’est le constructeur japonais, accusé à tort de commercer avec Daesh, qui a révélé la liste de ses principaux clients dans la région. Ainsi, 22 500 véhicules auraient été vendus aux Saoudiens, 32 000 aux Qataris et 11 650 aux Emiratis. Puis, selon des informations provenant des services russes – à considérer naturellement avec circonspection -, l’armée jordanienne aurait facilité le transfert de ces véhicules en Syrie et en Irak. Une fois encore, les dénonciations de ce soutien des monarchies pétrolières à l’Etat islamique, sont rares.
    La Turquie est dirigée par un président membre de la confrérie internationale des Frères musulmans, qu’il a soutenu en Tunisie, Libye, Egypte et Syrie à l’occasion des « printemps arabes ». Erdogan a aussi longtemps laissé à Daesh la libre utilisation de son territoire pour son approvisionnement et ses opérations en Syrie et en Irak. Par ailleurs, il ne cesse de renforcer son pouvoir personnel – dans le but de devenir président à vie – et d’encourager l’islamisation de la société. A la suite d’une tentative avortée de coup d’Etat contre lui[5], il s’est livré à une gigantesque purge afin de liquider ses opposants et d’installer ses affidés. C’est-à-dire que l’un des pays membre de l’OTAN est dirigé par un islamiste radical aux tendances despotiques, bafouant les droits de l’homme, sans que cela ne choque personne ni ne remette en cause notre politique à l’égard d’Ankara. Et l’on parle toujours d’une éventuelle entrée de la Turquie dans l’Union européenne… Rappelons également, les forces turques ont pénétré illégalement dans le nord de la Syrie et de l’Irak et occupent une portion du territoire de ces deux Etats sans que la communauté internationale ne trouve à y redire.
    Les faits ci-dessus montrent sans ambiguïté que le droit international est, depuis quinze ans, davantage bafoué par Washington et ses obligés que par Moscou ou Damas ; et que les victimes civiles du « camp de la liberté » sont tout aussi innocentes et bien plus nombreuses que celles qui tombent lors des opérations russo-syriennes. Mais dès lors que des actions de force sont américaines ou alliées de Washington, elles sont, par essence, « justes, légitimes et utiles ». Seuls ceux qui n’appartiennent pas à ce camp ou qui ne soutiennent pas cette politique sont coupables : Moscou, Damas, Téhéran, etc.
    Il faut le réaffirmer sans cesse : contrairement aux idées reçues, la société de l’information dans laquelle nous vivons n’a que très marginalement permis d’améliorer la qualité et l’objectivité des données à la disposition du public. Au contraire, en dépit de la multiplication des canaux médiatiques, leur concentration entre les mêmes mains permet encore davantage de manipulation des faits qu’avant son émergence. Les événements actuels en sont la flagrante illustration.
    La provocation délibérée du Russian Bashing
    Pour envenimer la situation, dirigeants politiques, responsables militaires et journalistes occidentaux ne cessent d’évoquer la montée en puissance de la menace russe et le retour d’une nouvelle Guerre froide… voire pour certains, le spectre d’une nouvelle guerre mondiale[6] !
    Mais le Russian Bashing impulsé par les milieux anglo-saxons ne reflète pas la réalité. Rappelons que le budget de la défense des Etats-Unis (près de 600 milliards de dollars) est de très loin le premier au monde et qu’il est supérieur aux budgets cumulés des dix pays qui le suivent ; la Russie (avec un budget de moins de 70 milliards de dollars) n’arrive elle-même que loin derrière la Chine et l’Arabie saoudite. Moscou dépense ainsi pour sa défense huit fois moins que Washington. La « menace » doit donc être fortement relativisée. Elle est pourtant largement utilisée par Hillary Clinton dans le cadre de sa campagne présidentielle, comme si elle cherchait par avance à remettre en cause une éventuelle victoire de Donald Trump… avec le soutien des hackers russes !
    Il convient également de réfuter la soi-disant volonté hégémonique de Moscou. Poutine n’a d’autre but que de mettre fin aux humiliations répétées dont son pays a été victime depuis vingt ans et au grignotage de ses marges. Il n’accepte plus sans réagir que la Russie soit provoquée ou que ses intérêts soient bafoués. Pourtant, c’est aujourd’hui Moscou qui apparaît comme « fauteur de troubles ».
    A l’opposé, il faut être aveugle pour ne pas mesurer le comportement impérialiste croissant de Washington, tant par ses interventions extérieures qui ne résolvent rien, que par l’application extraterritoriale de son droit au monde entier.
    Bien sur, il ne fait aucun doute que de tels propos seront immédiatement qualifiés de « pro Poutine » et que leur auteur sera accusé d’être un relais de l’influence russe. En effet, c’est une technique régulièrement utilisée ces dernières années que de mettre systématiquement en doute l’objectivité et l’indépendance de ceux qui critiquent la politiqueMainstream. Ainsi, les médias nous rebattent régulièrement les oreilles au sujet des réseaux d’influence russes en France – ce qui est une réalité, tout comme l’espionnage de Moscou -, mais sans jamais parler des réseaux d’influence et d’espionnage infiniment plus puissants des Américains
    Nous vivons une période difficile dans laquelle les esprits sont l’enjeu des stratégies des uns et des autres et où les médias sont devenus un véritable champ de bataille. En la matière, par leur maîtrise des canaux de communication mondiaux, les Etats-Unis disposent d‘un net avantage ; ils ont réussi à imposer leur vision du monde, laquelle répond à la promotion et la défense de leurs intérêts… mais en rien à ceux de la démocratie ni de l’Occident – et surtout pas de la France. Ils ont également réussi à convaincre que leur point de vue était « la » vérité objective et que tous ceux qu’ils désignent comme leurs adversaires sont le « mal ». Evidemment, la réalité est quelque peu différente. Mais nos élites ne semblent pas le percevoir.
    Pour nous Français, l’enjeu n’est pas Moscou, Damas ou Alep, ni Poutine ou Bachar. Il est de retrouver une indépendance de vue et une objectivité d’analyse que nous avons abandonnées depuis plus d’une décennie et d’échapper à la vision sectaire du monde qu’imposent les Américains.
    D’autant plus qu’à la différence des Britanniques, nous ne reconnaissons ni ne cherchons à analyser nos erreurs. Le parlement du Royaume Uni a publié, en juillet et en septembre dernier, deux rapports remettant en cause la décision de David Cameron d’intervenir en Libye, jugeant que les informations l’ayant conduit à lancer cette opération étaient infondées. Qu’avons nous fait en France ? Strictement rien ! Interviewé par la presse, Nicolas Sarkozy a persisté, déclarant qu’il avait pris alors « la bonne décision ».
    *
    La très grande majorité des spécialistes de géopolitique, des relations internationales et des diplomates nous répètent à l’envi depuis un quart de siècle que le monde a changé. Certes. Cela est indéniable. Nous le mesurons chaque jour.
    Ce qui n’a pas changé en revanche, c’est la grille de lecture sur laquelle ils fondent leur analyse. Elle est restée, pour l’essentiel, basée sur des critères d’évaluation datant de la Guerre froide : le bien, la vérité et la justice sont américains ; le mal, le mensonge et l’injustice demeurent russes ou iraniens. D’où leurs jugements erronés et leurs conseils inadaptés pour la conduite des politiques étrangères européennes… et les erreurs à répétition de celles-ci.
    Le monde évolue donc plus vite que les analyses qu’en font ces « experts » et les choses ont changé de manière bien plus profonde qu’ils ne l’observent, même si des constantes demeurent. C’est pourquoi il est nécessaire d’adopter une nouvelle lecture de la situation internationale afin d’essayer de redonner à la France – et plus largement l’Europe – la boussole dont elle semble démunie.
    Seule lueur de lucidité dans ce sombre tableau, le remarquable rapport récemment publié par les députés Pierre Lellouche et Karine Berger, relatif à l’application extraterritoriale du droit américain[7]. Voilà enfin une réflexion de fond sur un sujet stratégique pour notre économie et nos entreprises, auquel le gouvernement ne s’est guère intéressé, en dépit des affaires BNP et ALSTOM. A lire absolument.
    Eric Denécé | 04-11-2016
    [1] Il convient également de rappeler que depuis cinq ans la population fidèle au régime n’a cessé d’être ciblée par les djihadistes : coupures d’eau et d’électricité, bombardements, blocus du ravitaillement, assassinats, enlèvements, tortures…
    [2] Voir à ce sujet l’excellente analyse de Richard Labévière : http://prochetmoyen-orient.ch/mossoul-alep-la-diagonale-du-fou
    [3] Outre les frappes de drones – qui créent plus de terroristes qu’elles n’en éliminent – ces frappes ont eu lieu à plusieurs reprises en Afghanistan à l’occasion fêtes de mariage, faisant chaque fois une centaine de victimes civiles. Rappelons également que les forces aériennes américaines ont bombardé, le 3 octobre 2015, un hôpital à Kunduz, en Afghanistan, faisant 42 morts et 37 blessés, parmi lesquels des membres Médecins sans frontières ; et qu’elles ont tué une centaine de soldats syriens, mi-septembre 2016, dans un bombardement effectué « par erreur », ce qui a par ailleurs permis à Daesh de s’emparer d’une position stratégique.
    [4] Elle comprend une dizaine de pays arabes et sunnites : les membres du Conseil de coopération du Golfe (Oman excepté), le Maroc, la Jordanie, le Soudan et l’Egypte.
    [5] La genèse de cet événement n’est toujours pas claire. De fortes suspicions existent quant à la parfaite connaissance de ce complot par Erdogan, qui pourrait avoir laissé faire afin de procéder à une purge radicale dans tous les domaines de l’appareil d’Etat.
    [6] Cf. Alain Rodier, « Autour des conflits syriens et irakiens : Etats-Unis et Russie, ils sont tous devenus fous ! »,Note d’actualité n°456, www.cf2r.org, octobre 2016.
    [7] Pierre Lellouche et Karine Berger, Rapport d’information des commissions des Affaires étrangères et des Finances sur L’Extraterritorialité de la législation américaine, Assemblée nationale, Paris, 5 octobre 2016.
    Source : http://www.cf2r.org/fr/editorial-eric-denece-lst/une-lecon-meritee.php

  • Yémen : Iran – pays sunnites la guerre est lancée

    http://www.cf2r.org/fr/notes-actualite/yemen-iran-pays-sunnites-la-guerre-est-lancee.php

    En soutenant par des livraisons d’armes et de l’instruction les Al-Houthi, Téhéran « encercle » son adversaire saoudien[4]. De plus, si les Al-Houthi s’emparent durablement des côtes occidentales du Yémen, les pasdaran pourront y dépêcher secrètement des forces qui seront à même de menacer directement le détroit de Bab el-Mandeb qui commande la mer Rouge et donc le canal de Suez. Ils sont déjà en mesure de fermer le détroit d’Ormuz grâce, en particulier, aux nombreuses batteries de missiles sol-mer qu’ils ont déployées dans des abris fortifiés le long de la côte iranienne et dans les îles avoisinantes[5]. Par contre, Téhéran se heurte à un problème géographique vital : le Yémen et loin et le ravitaillement des rebelles peut être contré par le blocus aérien et maritime qui est en train de se mettre en place. Sur le plus long terme, l’Iran n’a pas les moyens financiers de soutenir un gouvernement qui se mettrait en place, quand bien même il ne « règnerait » que sur la partie ouest du pays. En effet, il devrait subvenir aux besoins élémentaires des populations qui sont déjà extrêmement pauvres.

    Tous les pays sunnites de la région craignent la fermeture possible de la mer Rouge, ce qui serait une véritable catastrophe pour les économies nationales. C’est même une question de vie ou de mort pour les régimes politiques en place en Egypte et au Soudan car un étranglement économique leur serait fatal.

    L’Arabie saoudite est désormais directement face à face avec son adversaire chiite iranien. Elle a réussi à s’assurer la coopération du Qatar - ce qui est politiquement une victoire -, du Pakistan - ce qui lui donne un poids politico-militaire impressionnant -, du Maroc et des pays du Golfe, ce qui est parfaitement logique. La libre circulation des hydrocarbures au Moyen-Orient est le point nodal de cette crise. Preuve en est le prix du pétrole qui a augmenté de 6% un jour après le déclenchement de l’opération Decisive Storm[6]. La contradiction provient du fait que Riyad a aussi deux autres ennemis mortels : les Frères musulmans et AQPA. Il semble que la famille Saoud ait choisi d’établir un ordre de priorité : ils s’occupent de l’Iran et de ses alliés yéménites en premier, avant de se retourner contre les Frères musulmans et AQPA. Il n’est pas certain que ce soit le bon choix, les salafistes-jhadistes représentant aujourd’hui un danger de déstabilisation beaucoup plus important que l’Iran pour les gouvernements arabo-musulmans.

    Énormément d’inconnues surgissent désormais. Quel va être l’avenir des négociations 5+1 portant sur le nucléaire iranien ? Quelle va être la position d’Israël également concerné par la liberté de circulation en mer Rouge ? Les salafistes-jihadistes ne vont-ils pas profiter de la situation pour étendre encore plus leurs activités ?

    Le Moyen-Orient est en train de se recomposer sous nos yeux, mais les tambours de guerre qui résonnent ne promettent rien de bon. Il ne s’agit pas d’une opposition religieuse[7] mais une question d’influence politique : l’Arabie saoudite, le Qatar, la Turquie et les autres contre l’Iran et ses alliés : le monde sunnite contre le « croissant chiite ».

    #Yemen #Arabie_saoudite #Al-Houthi #Sunnites #Chiites #Salafistes

  • CF2R - Irak : les milices chiites à la pointe du combat
    http://www.cf2r.org/fr/notes-actualite/irak-les-milices-chiites-a-la-pointe-du-combat.php

    La bataille pour la reprise de Tikrit, la ville natale de Saddam Husseïn, est suivie de près par tous les observateurs pour tenter de décrypter l’attitude du pouvoir en place à Bagdad. Il apparaît de plus en plus que ce dernier est placé sous la tutelle, au moins sur le plan tactique, des Iraniens. Les Gardiens de la Révolution iranienne (pasdaran) constituent le bras armé de la politique de Téhéran. Ils commandent, soutiennent, équipent les milices chiites irakiennes lesquelles sont beaucoup plus importantes et actives que l’armée qui se retrouve cantonnée à un rôle de supplétif. Le grand problème réside dans le fait que cet état de fait ne va pas dans le sens de ce qui est souhaité par la communauté internationale : la réintégration de la minorité irakienne sunnite dans les structures étatiques. Cela est d’autant plus vrai que les sunnites sont toujours considérés comme des complices de l’Etat islamique (EI ou Daech).

    Un comportement condamnable vis-à-vis des sunnites

    Ainsi, le Premier ministre - chiite - Haider al-Abbadi a déclaré : « il n’y a pas de neutralité dans la bataille contre l’EI. Si quelqu’un fait preuve de neutralité vis-à-vis de l’EI, alors c’est l’un des leurs ». Cette affirmation péremptoire va à l’encontre du souhait du grand Ayatollah Ali al-Sistani, la plus haute autorité religieuse irakienne. Ce dernier exhorte les miliciens chiites à « respecter les civils et leurs biens ». Les forces qui tentent de libérer Tikrit de l’emprise de Daech sont au deux tiers des milices chiites. Ces dernières risquent de trouver dans le « blanc seing » délivré par le Premier ministre - qui s’est toutefois comporté avec plus de modération après cette déclaration guerrière - la justification pour se venger de la population sunnite soupçonnée avoir soutenu Daech lors de la conquête de la ville en juin 2014.
    . . .

    #Irak #Iran #Chiites #Sunnites #Daech

  • CF2R - Syrie : recomposition de la rébellion
    http://www.cf2r.org/fr/notes-actualite/syrie-recomposition-de-la-rebellion.php

    La guerre civile qui perdure en Syrie évolue considérablement avec le temps. Daech tient toujours le haut du pavé de l’insurrection mais ne progresse plus depuis des mois, en grande partie en raison des frappes aériennes de la coalition auxquelles ne participe pas la France pour ne pas « aider » indirectement le pouvoir de Bachar el-Assad[1] toujours considéré en haut lieu comme l’ennemi à abattre. Les Américains, qui présentent moins de « pesanteurs sociologiques », constatent tout de même que les frappes aériennes ne seront pas suffisantes pour venir à bout de ce mouvement salafo-jihadiste.

    Ce dernier fait d’ailleurs tout pour attirer au sol les forces occidentales, que ce soit en Syrie en Irak. La destruction des sites archéologiques et des œuvres d’art anciennes entre d’ailleurs dans cette stratégie : agiter un chiffon rouge. Abou Bakr al-Baghdadi sait que l’intervention de « croisés » directement sur le terrain ne pourrait que pousser les populations sunnites à soutenir sa cause, voire à le rejoindre, tant la haine anti-occidentale est grande dans ses rangs. C’est d’ailleurs la différence qui existe entre les tribus sunnites syriennes et irakiennes. Si ces dernières lui sont encore globalement favorables, ce n’est pas le cas en Syrie où les combattants de Daech sont perçus comme des « étrangers ».

    Pour contourner cette difficulté, les Américains, soutenus par la Turquie, l’Arabie saoudite, les Emirat du Golfe persique et la Jordanie, aident la rébellion syrienne, espérant créer des brigades de combattants « modérés » qui s’opposeront à la fois Daech et au régime en place à Damas. Toutefois, les difficultés proviennent de deux domaines.

    D’abord, les Kurdes, certes très combatifs - cela a été démontré lors de la bataille de Kobané -, n’ont aucune intention de poursuivre la guerre plus au sud, hors de leurs zones de peuplement. Leur objectif est connu : établir à terme un Etat kurde le long de la frontière turque . . .

    #Syrie #Bachar el-Assad #Kurdes #Daech

  • CF2R - CENTRE FRANÇAIS DE RECHERCHE SUR LE RENSEIGNEMENT
    http://www.cf2r.org/fr

    Chérif Amir, Histoire secrète des frères musulmans, Ellipses, Paris 2015.

    Avant-propos d’Eric Denécé, directeur du Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R)

    Préface d’Alain Chouet, ancien chef du service de renseignement de sécurité de la DGSE.

    Le mouvement des Frères musulmans a pour objectif de recréer le califat islamique disparu en 1923 et de soumettre le monde à un islam radical régi par la charia. Dans cette perspective, son idéologie extrémiste et sectaire prône le jihad armé, laquelle est servie par une organisation solide, totalement dévouée à l’atteinte de ces buts depuis plus de huit décennies, par tous les moyens, y compris les plus violents.

    Car en effet, derrière une façade pouvant laisser croire à une certaine respectabilité, la confrérie n’est qu’un mouvement terroriste ayant fait de très nombreuses victimes. Né en Egypte en 1928, à l’initiative d’Hassan Al-Banna, le mouvement n’a cessé d’essayer de prendre le pouvoir dans ce pays, perturbant profondément son évolution historique et politique, coopérant tour à tour avec le pouvoir en place ou s’y opposant le plus souvent. La lutte entre la confrérie, les pouvoirs successifs et le peuple est donc une composante majeure de l’histoire moderne de l’Egypte. . . .

  • Centre Français de Recherche sur le Renseignement

    Le sort du Moyen-Orient se joue-t-il au Yémen ?
    http://www.cf2r.org/fr/notes-actualite/le-sort-du-moyen-orient-se-joue-t-il-au-yemen.php

    Une guerre civile se déroule aujourd’hui au Yémen, loin des projecteurs médiatiques. Et pourtant, c’est peut-être le sort du Moyen-Orient qui y en en train de se jouer en prolongement du théâtre de jihad que constituent la Syrie et l’Irak. En effet, cette guerre n’est que le prolongement du « grand jeu » extrêmement complexe qui a lieu dans la région opposant le monde chiite et le sunnite, lui-même divisé entre salafistes-jihadistes, Frères musulmans, wahhabites saoudiens et « modérés ».
    Les tribus chiites Al-Houthi à la manoeuvre

    Les tribus zaydites[1] Al-Houthi du Nord Yémen ont conquis 8 des 21 provinces du pays. Le peu de pouvoir dont disposait le président Abel Rabbou Hadi Mansour a été réduit à néant et ce dernier a été placé en résidence surveillée depuis début février. Il a présenté sa démission au parlement - qui l’a refusé - mais, dans les faits, il ne décide plus rien. De toutes façons, Abdel Malek Al-Houthi, le chef des tribus zaydites, demande la dissolution du parlement pour installer de nouvelles autorités. La question se pose : lesquelles ?

    Devant la dégradation de la situation, les Américains, suivis par les Français, les Britanniques, les Allemands, les Hollandais et les Italiens, puis par les Saoudiens ont été contraints de fermer leurs représentations diplomatiques et de demander à leurs ressortissants d’évacuer en urgence le pays.

    Les Al-Houthi sont épaulés par des membres des forces de sécurité fidèles[2] à l’ancien président Ali Abdullah Saleh, déposé en 2003.

    Al-Qaida dans la péninsule arabique (AQPA) est reparti à l’assaut des tribus Al-Houthi et de ce qui reste du pouvoir central, notamment en multipliant les actions terroristes dans la capitale Sanaa. La ville de Radaa, au centre du pays, et la région environnante sont l’objets d’intenses combats entre les deux parties. Les tribus sunnites du centre et du sud qui craignent l’avancée des chiites apportent maintenant leur soutien direct à AQPA, jugé comme le mouvement le plus à même de les défendre contre l’offensive des Al-Houthi. Même le parti Al-Islah, la branche yéménite des Frères musulmans, se tourne désormais vers les salafistes-djihadistes. Cette conjonction Frères musulmans/tribus sunnites/AQPA est extrêmement inquiétante car leurs forces réunies sont redoutables.

    Il semble évident que Téhéran est derrière les Al-Houthi, ayant trouvé là le moyen d’ouvrir un nouveau front contre la suprématie saoudienne dans la région. Riyad se retrouve désormais dans une position très inconfortable. En effet, la famille royale n’a plus que des ennemis dans cet Etat frontalier. Les AL-Houthi, car ils sont les alliés de son vieil adversaire iranien ; bien sûr AQPA ; qui poursuit l’objectif de la maison mère, Al-Qaida « canal historique », de renverser le régime considéré comme « traître à l’islam » ; et les Frères musulmans qui, en désespoir de cause, ont fait alliance avec les salafistes-jihadistes. Les tribus qui pouvaient encore être fidèles à Riyad n’attendent plus rien du royaume, du moins dans l’immédiat.

    #moyen-orien #salafistes-jihadistes #wahhabites #Al-Qaida

    • « Devant la dégradation de la situation, les Américains, suivis par les Français, les Britanniques, les Allemands, les Hollandais et les Italiens, puis par les Saoudiens ont été contraints de fermer leurs représentations diplomatiques et de demander à leurs ressortissants d’évacuer en urgence le pays. » Le « principe de précaution » sans doute ! Sauf qu’en Libye... Quant au président, il est ce jour à Aden. Affaire yéménite à suivre, avec une nouvelle destruction d’un pays de la région fort probablement.

  • Une nouvelle unité des forces spéciales du Hezbollah aurait reçu de l’équipement russe high-tech selon une note du CF2R, s’appuyant sur un article russe repris par la presse libanaise :
    http://www.cf2r.org/fr/notes-actualite/les-forces-speciales-du-hezbollah.php

    Un site internet d’information libanais a publié une photo d’un homme masqué, le présentant comme un membre d’une unité méconnue des forces spéciales du Hezbollah. Cette unité aurait été aperçue cette semaine dans la banlieue sud de Beyrouth, à l’occasion de la fête religieuse chiite d’Achoura. L’article présente cette formation comme l’équivalent de l’unité de reconnaissance EGOZ de la brigade Golani ou des groupes SWAT américains.
    Selon une source proche du parti, cité par la presse du pays de cèdres, cette unité ferait partie des « Brigades militaires Redwan ». Anciennement appelée « Forces d’intervention », elle regroupe les soldats d’élite du Parti de Dieu. Elle a été restructurée pendant le conflit de juillet 2006 par l’ancien chef militaire du Hezbollah, Imad Mughniyeh, tué en Syrie en 2008 lors d’une opération attribuée au Mossad israélien. La brigade porte d’ailleurs l’un des noms de guerre de Mughniyeh, qui se faisait appeler - entre autres - Hajj Redwan. [...]
    Une unité équipée par la Russie
    Les hommes armés et masqués apparus lors du dernier discours de Nasrallah ont attiré l’attention des observateurs sur leur matériel, notamment un casque équipé de lunettes électroniques. La raison de leur apparition pourrait être un message adressé aux adversaires du Parti pour montrer sa capacité opérationnelle et surtout ses moyens techniques.
    A la suite de cette démonstration, plusieurs journaux libanais ont fait état d’un accord secret entre le Parti de Dieu et l’industrie de l’armement russe portant sur la livraison de 500 casques avec lunettes électroniques que certains membres de l’unité de protection de Nasrallah portaient. La particularité de ces casques serait leur capacité à détecter des explosifs dans leur champ de vision. Le montant de cette transaction n’a pas été communiqué par la Pravda, le journal russe qui a révélé l’information, reprise par la presse libanaise. Mais la presse libanaise a désigné Wafiq Safa comme le responsable de cette transaction.

  • CF2R - Présentation du CF2R
    http://www.cf2r.org/fr/cf2r/presentation.php
    #espionnage
    #renseignement

    Les publications du CF2R comprennent :
    des rapports de recherche, des bulletins de renseignement, des notes d’actualité, d’histoire ou de réflexion rédigés régulièrement par ses experts et disponibles sur son site internet,
    le bulletin électronique hebdomadaire Renseignor , qui offre une synthèse de l’écoute des programmes radiophoniques étrangers en langue française,
    le bulletin électronique mensuel I-Sources , qui recense l’ensemble des publications internationales récentes consacrées au renseignement,
    la revue quadrimestrielle Renseignement et opérations spéciales (180 pages, éditions L’Harmattan),
    la lettre mensuelle Intelligence et Stratégie , qui décrypte le dessous des cartes de la géopolitique mondiale et des grands enjeux internationaux,
    plusieurs collections consacrées au renseignement (éditions Ouest France, Ellipses, L’Harmattan), ainsi que divers ouvrages individuels et collectifs.
     
    Depuis sa création, le CF2R a réalisé un travail considérable pour une meilleure connaissance du renseignement en France et dans le monde francophone. Il a publié plus de 70 livres, 60 rapports de recherche, 300 articles, 350 notes d’analyse et 700 bulletins d’écoute radio. Le Centre a créé quatre revues ou lettres électroniques et a organisé 40 dîners-débats et une dizaine de colloques. Ses chercheurs ont donné plus de 150 conférences, animé de nombreux séminaires et ont accordé plus de 2 000 interviews dans les médias (TV, radio, presse écrite).

  • CF2R - Intervention en Syrie : La recherche d’un prétexte à tout prix [1]
    Eric Denécé / 06-09-2013
    http://www.cf2r.org/fr/editorial-eric-denece-lst/intervention-en-syrie-la-recherche-un-pretexte-a-tout-prix.php

    Les objectifs véritables d’une intervention en Syrie

    Dès lors, on est en droit de s’interroger sur les raisons réelles de cet acharnement contre Bachar Al-Assad et d’en rechercher les enjeux inavoués. Il en existe au moins trois :

    – casser l’alliance de la Syrie avec l’Iran ; le dossier iranien conditionne largement la gestion internationale de la crise syrienne. En effet, depuis trois décennies, Damas est l’allié de l’Iran, pays phare de « l’axe du mal » décrété par Washington, que les Américains cherchent à affaiblir par tous les moyens, tant en raison de son programme nucléaire, de son soutien au Hezbollah libanais, que de son influence régionale grandissante ;

    – rompre « l’axe chiite » qui relie Damas, Bagdad, Téhéran et le Hezbollah, qui est une source de profonde inquiétude pour les monarchies du Golfe qui sont, ne l’oublions pas, des régimes autocratiques et qui abritent d’importantes minorités chiites. Ainsi, Ryad et Doha ont désigné le régime iranien comme l’ennemi à abattre. Elles veulent la chute du régime syrien anti-wahhabite et pro-russe, afin de transformer la Syrie en base arrière pour reconquérir l’Irak - majoritairement chiite - et déstabiliser l’Iran. Elles cherchent aussi à liquider le Hezbollah libanais. En cela, leur agenda se confond avec celui de Washington ;

    – détruire les fondements de l’Etat-nation laïc syrien pour le remplacer par un régime islamiste. Cela signifie livrer Damas aux forces wahhabites et salafistes favorables aux pétromonarchies du Golfe, ce qui signifie l’éclatement du pays en plusieurs entités en guerre entre elles ou, pire, l’asservissement voire le massacre des minorités non sunnites.

    Ces objectifs non avoués n’ont pas été jusqu’ici atteints et ne le seront pas tant qu’existera le soutien sino-russe et tant que l’axe Damas-Téhéran ne se disloquera pas.

    * [1] Ce texte reprend, pour partie, des analyses produites par Alain Chouet, Alain Corvez et Alain Rodier, tous trois anciens officiers du renseignement français.

  • « Arabesque américaine » : Printemps Arabe ou révolutions colorées fomentées par les USA ? — Ahmed BENSAADA
    http://www.legrandsoir.info/arabesque-americaine-printemps-arabe-ou-revolutions-colorees-fomentees

    Souvent évoqué, parfois décrié, mais rarement analysé, le rôle des États Unis dans les révoltes de la rue arabe fait enfin l’objet d’un travail sérieux, rigoureux et fort bien documenté. Arabesque américaine* est l’ouvrage d’Ahmed Bensâada, un chercheur algérien établi à Montréal.

    Dès les premières lignes, l’auteur annonce la couleur « une chose est évidente : le mode opératoire de ces révoltes a toutes les caractéristiques des révolutions colorées qui ont secoué les pays de l’Est dans les années 2000. Comme il est de notoriété publique que ces révolutions ont été structurées, formées et financées par des organismes américains, il serait logique de conclure qu’il y a présence d’une main américaine derrière ces révoltes de la rue arabe ». Tous les faits et les arguments présentés sont vérifiables, selon l’auteur, par simple consultation des références mentionnées.

  • À lire. Ce rapport, Syrie : une libanisation fabriquée, circule semble-t-il beaucoup dans les cercles français qui se piquent de renseignement, de diplomatie et de défense nationale.
    http://www.cf2r.org/fr/rapports-de-recherche/syrie-une-libanisation-fabriquee.php

    Le rapport (format PDF) :
    http://www.cf2r.org/images/stories/RR/rr11-syrie-une-libanisation-fabriquee.pdf

    Organisée à l’initiative du Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R1) et du Centre international de recherche et d’études sur le terrorisme et d’aide aux victimes du terrorisme (CIRET–AVT2), une délégation internationale d’experts s’est rendue en Syrie du 3 au 10 décembre 2011, afin d’évaluer la situation syrienne en toute indépendance et neutralité et de rencontrer les protagonistes de cette crise qui dure depuis neuf mois. Elle a complété sa mission d’évaluation par des rencontres avec divers représentants de l’opposition syrienne à l’étranger, ainsi qu’avec de nombreux experts européens des questions proche–orientales.

    La délégation comprenait les personnalités suivantes :
    Mme Saïda Benhabylès (Algérie), ancienne ministre de la Solidarité, ancien Sénateur, membre fondateur du CIRET–AVT, Prix des Nations Unies pour la société civile ;
    Richard Labévière (France), consultant international et écrivain spécialiste des Proche et Moyen–Orient, ancien rédacteur en chef à Radio France internationale (RFI), de Défense (revue de L’Institut des hautes études de Défense nationale (IHEDN) et membre fondateur du CIRET–AVT ;
    Eric Denécé (France), directeur du Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R).

    Mme Anne–Marie Lizin (Belgique) a également participé à la préparation et à la rédaction de ce rapport, bien que n’ayant pu se rendre en Syrie avec les autres membres de la délégation pour des raisons d’emploi du temps.

    On lit notamment cette première conclusion très intéressante :

    Cette « libanisation » est fabriquée par trois groupes d’acteurs principaux :
    – le régime syrien, ses unités militaires opérationnelles et ses différents services de renseignement ;
    – les responsables politiques et confessionnels dont les Frères musulmans et les chefs de groupes salafistes soutenus par les gouvernements ou des forces politiques des pays voisins : Jordanie, Liban, Turquie et, dans une moindre mesure, l’Irak ;
    – les puissances régionales et internationales impliquées dans la zone : le Qatar, l’Arabie saoudite, les Etats-Unis et, dans une moindre mesure, la France.

    Les risques de confrontation confessionnelle tous azimuts, de « libanisation généralisée » et de guerre civile totale ne sont pas fatals. Mais les groupes armés ne déposeront pas les armes, engagés dans une fuite en avant qui spécule sur une intervention de la communauté internationale similaire à celle effectuée en Libye. Pour les minorités alaouites, chrétiennes, kurdes et, dans une moindre mesure, druze, la fin du régime baassiste qui verrait le départ de Bachar al-Assad provoquerait une guerre civilo-régionale lourde de conséquence, comparable à celle des Balkans avec ses 300 000 victimes.

    Tout dépendra, malgré le nombre des victimes, de la propension du président Bachar al-Assad à fédérer les forces progressistes du pays en leur concédant les ouvertures politiques et la libéralisation économique auxquelles elles aspirent. Aujourd’hui le risque est grand d’assister à une « libanisation » de la Syrie, avec à la clef, un élargissement d’une fitna généralisée entre un pôle alaouite/chiite confronté aux communautés sunnites de la région. Ce scénario catastrophe qui causerait certainement des centaines de milliers de victimes n’est toutefois pas fatal.