La première femme députée aborigène émeut le Parlement australien
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Une peau de kangourou posée sur les épaules. Linda Burney a choisi un habit peu commun pour ses premiers pas au parlement australien. C’est « un manteau qui raconte mon histoire personnelle », a-t-elle confié à ses collègues députés : il porte le totem de son clan, le varan, ainsi qu’un cacatoès blanc. Cet oiseau « très bruyant », qui ne passe jamais inaperçu, est l’animal protecteur de la nouvelle députée. Cette session du 31 août, au Parlement à Canberra, restera dans les mémoires.
La travailliste Linda Burney, élue en juillet, est la première femme aborigène à entrer à la Chambre basse australienne. Avant elle, un homme avait ouvert la voie : le conservateur Ken Wyatt en 2010. L’ex-championne olympique Nova Peris, elle, fut la première femme aborigène à entrer au Sénat, en 2013.
« Je suis née à un moment où le gouvernement australien savait combien de moutons se trouvaient dans le pays, mais pas combien d’Aborigènes », a-t-elle lâché. Ce n’est qu’à partir de 1967, dix ans après sa naissance, que ces derniers ont été comptabilisés dans le recensement. « Les dix premières années de ma vie, je n’ai pas existé en tant que citoyenne. »
Extrait du premier discours de Linda Burney devant le parlement australien
Linda Burney est la fille d’une Blanche et d’un Aborigène. « Je suis née à un moment où le fait qu’une Blanche ait un enfant aborigène était choquant, et d’autant plus si elle n’était pas mariée », a-t-elle déclaré. Adoptée par sa grand-tante, écossaise d’origine, elle a rencontré son père à l’âge de 28 ans et découvert qu’il avait eu dix autres enfants vivant à quarante minutes de chez elle.
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Grandir à l’écart de sa famille aborigène ne l’a pas préservée du racisme. En 2010, elle est retournée dans le village de son enfance pour le 150e anniversaire de son école publique. Ce jour-là, comme un rappel de l’opprobre subi par son peuple, un homme s’est approché d’elle pour lui glisser à l’oreille : « Tu sais, Linda, le jour où tu es née a été l’un des plus sombres que ce village ait connus. » Stupéfaite, la battante au CV impressionnant n’a rien su répondre.