Entretien avec Magid Cherfi, Zebda

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    • En même temps, si on se souvient bien, la déliquescence est assez ancienne, dans ses autres bouquins il disait déjà des horreurs, et même en 2002 :

      Entretien avec Magyd Cherfi
      Marlène Coulomb-Gully, Mots 70:125-131 (2002)
      http://mots.revues.org/9773

      Extraits :

      Mots : Qui se retrouve autour des symboles que vous proposez ?

      M. Cherfi : Les lilis et les bobos (les « lilis » désignent les « libéraux-libertaires » et les « bobos » les « bourgeois-bohèmes ».). Zebda fait maintenant partie du magasin politique branché. Et puis nos valeurs sont rassurantes : liberté, égalité, fraternité, République et francité… On est rassurants pour les progressistes.

      Mots : N’est-ce pas un échec ?

      M. Cherfi : Il ne peut pas en être autrement. Les enfants des quartiers écoutent « Nique ta mère », mais pas nos chansons. Pour eux, on est une bande d’intellos privilégiés par l’existence, des bobos de l’émigration, même si nos parents étaient des prolos. On n’est pas les porte-paroles des enfants de l’immigration ; on est d’abord français.

      Mots : Et pourtant, le nom même de « Zebda »… ?

      M. Cherfi : C’est de la provoc, ça veut dire « Nous, Français dont vous ne voulez pas ». La France peut être aussi multiculturelle que l’on veut tant que ça l’arrange, mais l’arabité ça ne passe pas.

      Mots : Est-ce que vous cherchez à discuter avec ces jeunes, ou est-ce que ce n’est plus votre problème ?

      M. Cherfi : On essaie d’abord d’être nous-mêmes ; les discours radicaux de certains beurs du type « La France est un pays raciste », « La France est une dictature colonialiste » ne sont pas les nôtres. Nous pensons que la France est avant tout un pays de droit, et cela nous coupe des jeunes des quartiers qui veulent entendre « La France nique notre race, elle nous tue »… Ce qui est aussi une réalité.
      Plus encore que des mots, les jeunes des cités ont besoin d’actes. Quand vous rentrez dans une boite de nuit, quand vous cherchez un appart, un boulot, quand vous allez à la sécu, à l’ANPE, à l’école…, c’est l’arabité qu’on vous renvoie à la figure.
      Un enfant issu de l’immigration échappe difficilement à quelque chose de l’ordre de l’échec. Mon identité est un échec ; ma langue est un échec ; mon nom est un échec ; mon pays est un échec ; ma religion est un échec : c’est Ben Laden plus que la spiritualité ou le Recteur de la Mosquée de Paris.
      Quand J. Chirac fait son discours sur le bruit et l’odeur, il nous fait perdre 30 ans. Pour moi, cette phrase ne passe pas et j’attends toujours des excuses… Les politiques ne sont pas là-dedans, ni J. Chirac, ni L. Jospin, ni le PC…Les beurs des partis politiques sont les colonisés d’aujourd’hui. Sur les listes électorales, ils figurent dans les dernières places.

      #Zebda #Musique #Musique_et_politique #socialiste !