J – 184
Un film paradoxal
Un documentaire de science-fiction
Un film dans lequel il ne se passe rien, mais de façon fascinante
Un film politique sans aucune parole échangée
Un manifeste muet
Un film sans surprise qui n’en finit pas de surprendre
Un film qui représente quelque chose que personne ne pourra voir
Un film apocalyptique sans aucune scène d’action
Un film catastrophe sans le moindre bruit
Un film humain sans la moindre figure humaine
Un film historique sans le moindre fait, sans le moindre événement.
Un film muet aux très nombreuses réflexions.
Un film sans le moindre individu dedans et qui tend un miroir au spectateur.
Un film dont la clef de compréhension est contenue seulement dans le titre du film.
Un film de voyage sans le moindre mouvement.
Un film avec des images magnifiques représentant un immense gâchis, des choses laides.
Un film qui est déguisé en séquenceur, mais dans lequel les infimes mouvements sont importants
Un film qui n’est d’emblée pas un film
Un film devant lequel on peut se retrouver fort seul, notamment dans la salle de cinéma.
Un film à propos de la mort, pas une trace de cadavre
Un film à propos de la nuit des temps, en plein jour
Un film dramatique sans acteur
Un film documentaire sans objet
Un film d’une grande beauté mais laquelle est futile.
Un film à propos des images quand ces dernières n’ont plus de spectateurs.
Un film à propos de l’humanité toute entière avec une dizaine de noms au générique.
Un film musical en son direct
Un film poignant sans personnages
Un film ni triste ni joyeux, un film neutre.
Un film à propos du jugement dernier, sans jugement. Sans juge aussi. Ou alors soi-même. Et n’être que son propre juge.
Un film philosophique, sans concept.
Un film qui ne nous dit pas que nous allons tous mourir un jour, un film qui nous dit que nous sommes tous déjà morts.
Homo Sapiens de Nikolaus Geyrhalter
Exercice #24 de Henry Carroll : Utilisez l’ouverture pour saisir la mélancholie.