“Les enfants volés d’Angleterre”, une saisissante enquête à suivre sur France 5 - Télévision

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  • “Les enfants volés d’Angleterre”, une saisissante enquête à suivre sur France 5

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    Tout découle du Children act, une loi adoptée en 1989 par Margaret Thatcher, qui donne la possibilité aux services sociaux de retirer leur(s) enfant(s) à des couples soupçonnés de maltraitance ou de maltraitance future. Ces décisions touchent aussi bien des familles établies, dont les enfants semblent présenter des signes de maltraitance psychologique, physique ou émotionnelle, que des couples en attente d’enfant, qui « risqueraient » d’être de mauvais parents car trop pauvres, trop malades, trop fragiles…

    C’est le cas de Nicky et Mark Webster, dont les trois enfants leur ont été retirés après qu’ils ont été jugés coupables des fractures découvertes sur leur fils cadet, emmené à l’hôpital pour tout autre chose. La culpabilité des Webster prononcée, les trois enfants ont aussitôt été déclarés adoptables. De manière irrévocable, puisqu’en Angleterre, c’est le régime de l’adoption plénière qui s’applique, rompant tout lien entre un enfant et ses parents biologiques. Les Webster ont réussi à prouver par eux-mêmes, après plusieurs années de lutte, que la fracture était en réalité due au scorbut. Ils ont été innocentés, mais ne récupéreront jamais leur progéniture. « Les parents victimes de ces retraits ont interdiction de voir leurs enfants, ou de prononcer leur prénom. Ils ne peuvent créer aucun lien, ce qui empêche tout processus psychologique de construction de l’histoire de ces enfants… au nom de leur protection », commente Pierre Chassagnieux.

    Derrière le Children act, se lit l’hypothèse que faire adopter des enfants précaires par une famille plus aisée va résorber la pauvreté. « C’est une forme d’eugénisme social », conclut Stéphanie Thomas. Une politique qui entérine l’idée fataliste qu’un enfant né au sein d’un foyer pauvre ne pourra pas s’en sortir. Qui exclut, aussi, toute idée de seconde chance. « Le cas de Claire et Colin illustre la différence entre les approches sociales française et anglaise, juge Eric Colomer. Si Claire tombait enceinte en France, les services sociaux se diraient qu’il faut soutenir cette famille, qu’elle est fragile, et l’accompagnerait. Les services sociaux anglais se disent « Oula ! elle est enceinte celle-là ? »

    La méfiance envers les plus démunis se combine à une exigence de rentabilité insensée, qui met les services publics anglais sous une folle pression. En 2000, les travaillistes ont imposé des quotas d’adoption aux autorités locales chargées de la protection de l’enfance. L’Etat sanctionne depuis 2008 le budget de celles qui ne les remplissent pas. « Au départ, rappelle Eric Colomer, le système ne prévoyait pas le placement en familles d’accueil ou en foyers, mais l’adoption des enfants retirés à leurs parents. Mais les Anglais n’y arrivent plus, tant les cas sont nombreux. Les placements provisoires coûtent 2,8 milliards d’euros par an à l’Etat. La priorité est de faire adopter tous ces enfants en attente, qui lui coûtent une fortune. » Tandis que le retrait et l’adoption plénière sont encouragés, la justice ne dispose que de vingt-six semaines pour enquêter et se prononcer sur la culpabilité des parents. Le tout sans aucune obligation de contre-expertise… « Le soupçon étant inscrit dans la loi, il suffit : pourquoi faudrait-il avancer des preuves ? », souligne Eric Colomer.