La mesure de la réalité. La tendance à la quantification dans la société capitaliste naissante [Séminaire Anselm Jappe, 21 nov.]

/la-mesure-de-la-realite.la-tendance-a-l

  • Editions Allia - Livre - La Mesure de la réalité
    http://www.editions-allia.com/fr/livre/46/la-mesure-de-la-realite

    Au cours du Moyen Âge et de la Renaissance, un nouveau modèle de réalité a surgi en Europe. Artisans, cartographes, bureaucrates, entrepreneurs ont commencé à remplacer l’ancien modèle qualitatif par un modèle quantitatif. Nous les regardons comme les initiateurs d’un changement révolutionnaire, mais ils furent aussi les héritiers des changements de mentalité qui avaient fermenté pendant plusieurs siècles. Ce livre traite de ces changements.

    Alfred W. Crosby est professeur émérite à l’université d’Austin (Texas) et intervenant à l’université de Yale. Son œuvre, classique dans les pays anglo-saxons, tente de répondre à cette question : comment l’Occident, en si peu de temps, a-t-il pu conquérir une si grande partie du globe ? Dans La Mesure de la réalité, il s’attache à décrire le tournant qui, à la fin du Moyen Âge et à la Renaissance, vit l’Europe passer d’un modèle qualitatif de pensée à un modèle quantitatif. La société occidentale entreprit alors de mesurer le temps, l’espace, la distance, de traduire en nombres chaque aspect de la réalité. Ce changement de mentalité a rendu possible le développement de la science et de la technologie, en même temps qu’il instaurait le règne de l’argent et de la bureaucratie. Il a entraîné non seulement des révolutions techniques, mais également artistiques, dans le domaine de la peinture et de la musique. Mêlant érudition et anecdotes, La Mesure de la réalité offre un panorama complet de ce moment charnière de l’histoire où se sont mises en place les conceptions sur lesquelles repose encore notre civilisation.

    À l’occasion d’un commentaire de @ktche (que je remercie !) je découvre cet ouvrage que je vais m’empresser de dévorer. J’en fais un billet de plein rang pour archive perso, mais aussi parce qu’il me semble le mériter.

  • Percer le #secret sans le #complot, grâce à la #veille

    Plutôt que de considérer l’#attention partielle continue comme un problème ou un défaut, nous pouvons la réenvisager comme une compétence de survie numérique. Le plus souvent, notre attention est continue et partielle jusqu’à ce que nous soyons si puissamment saisis par quelque chose que nous devons nous fermer à tout le reste. Ces épisodes bénis d’absorption continue, concentrée et dénuée de toute distraction sont délicieux — et dangereux. C’est dans ces moments que nous ratons le gorille [cf. expérience du gorille de Daniel Simons] — et tout le reste.

    La leçon à tirer de la cécité attentionnelle, c’est que l’attention unique, concentrée, directe, centralisée sur une seule tâche — qui fournissait l’idéal de la productivité industrielle au XXe siècle — est certes efficace pour la tâche visée, mais qu’elle nous aveugle sur d’autres choses importantes que nous avons également besoin de prendre en considération.

    Dans notre monde global, divers, interactif, où tout semble avoir une face cachée, l’attention partielle continue pourrait bien être non seulement une condition de vie, mais aussi un précieux instrument de navigation au sein de ce monde complexe. Cela sera d’autant plus vrai que nous parviendrons à compenser notre propre attention partielle en collaborant avec d’autres personnes capables de voir ce que nous ratons. C’est à cette condition que nous pourrons augmenter nos chances de réussite et espérer voir la face cachée des choses — ainsi que la face cachée de cette face cachée elle-même.

    Source : Cathy Davidson, Now You See It, p. 287, cité (et traduit) par Yves Citton, Pour une écologie de l’attention, p. 268.