• Débat sur la violence des jeunes : « La répression est une idée populaire, mais c’est un échec »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/04/24/debat-sur-la-violences-des-jeunes-la-repression-est-une-idee-populaire-mais-

    Face à la description de la « violence déchaînée, morbide, sans règle » de certains jeunes, le 18 avril, par le premier ministre, les historiens que nous sommes proposent d’inscrire un nouveau chapitre au programme d’éducation civique qui lui tient tant à cœur. Il s’intitulerait : « La #justice des #enfants ou la longue histoire d’une addiction à la sanction ». Il permettrait de raconter à nos écolières et nos écoliers comment, depuis le XIXe siècle, ses prédécesseurs ont fait face au « fléau de la #délinquance_juvénile » décrite comme « toujours plus violente, plus nombreuse, plus précoce » (Le Petit Journal, 1907). Les élèves découvriraient sans doute avec surprise que ses propositions s’inscrivent dans une fascinante continuité, qu’elles ont été maintes fois appliquées et qu’à l’épreuve des faits leur efficacité est discutable.

    Le chapitre débuterait en 1810. On ouvrirait ensemble le code pénal de Napoléon (empereur peu réputé pour son laxisme), et les élèves liraient dans ses articles la volonté de ne plus juger un enfant comme un adulte, la nécessité de pouvoir l’excuser du fait de sa minorité. Ils observeraient aussi que, sans doute effrayé par sa propre hardiesse, le législateur impérial s’assure néanmoins que tout enfant capable de marcher et de voler une pomme puisse être envoyé en prison ordinaire.
    L’histoire se poursuivrait avec une analyse de la loi de 1850 « sur le patronage des #jeunes_détenus », censée répondre à l’échec de la #prison. Les députés républicains considèrent alors que le gamin de Paris, le petit vagabond, l’enfant de parents ouvriers – souvent décrits comme abrutis de travail et viciés par l’alcool – doit bénéficier d’une correction avant de « tomber dans la délinquance », pour reprendre les mots de M. Attal. Selon eux, pour le redresser, il est nécessaire de le placer en #internat_disciplinaire, loin de la ville et d’une famille défaillante, afin de le remettre sur le bon chemin.

    Malgré les rapports parlementaires dénonçant le coût de ces institutions, leur violence et le niveau élevé de récidive des jeunes placés, ces « colonies agricoles pénitentiaires » fleurissent. La France est inquiète ! Des bandes de jeunes gens cruels font régulièrement la une de la presse à grand tirage, et les statistiques, déjà, sont formelles : « De 16 à 20 ans le nombre de jeunes délinquants quadruple » (Le Temps, 1899) ; « Inquiétante augmentation de près de 50 % d’enfants délinquants en vingt ans » (Le Journal, 1901).

    Accompagnement social des mineurs

    Le cours aborderait ensuite les temps bouleversés du début du XXe siècle. En 1912, une nouvelle loi a le courage de considérer que l’accompagnement social des mineurs délinquants est une priorité. Elle n’aura ni les moyens ni le temps d’être appliquée, la Grande Guerre ravivant les angoisses d’une dérive de la jeunesse.
    Néanmoins, l’hécatombe de 14-18 modifie en profondeur le regard des Français sur l’enfermement et la peine. Les élèves liraient alors, médusés, que la presse en vient à se scandaliser du sort réservé aux jeunes délinquants dans les « bagnes d’enfants », certains allant même jusqu’à reprendre les mots d’un poète, Jacques Prévert, dénonçant la « chasse à l’enfant ». Soudain, il serait presque possible de croire que le temps de la jeunesse doit être une promesse.

    Nous pourrions poursuivre avec le second conflit mondial. La France occupée puis libérée, souvent grâce à la fougue de jeunes héros ; un hiver 1945 rude amenant son lot de destructions, de violences, de marché noir, et une explosion de la délinquance juvénile. La France peut alors compter sur l’autorité du général de Gaulle, et c’est bien sa signature qu’ils découvriront au bas du préambule de l’ordonnance du 2 février 1945 « relative à l’enfance délinquante ».

    Nous croiront-ils quand nous expliquerons que ce texte fait primer l’éducation sur la sanction ? Que la prison doit être l’exception ? Parviendrons-nous à faire admettre que l’article 17 expose alors que les mineurs « ne pourront faire l’objet que de mesures de protection, d’éducation ou de réforme, en vertu d’un régime d’irresponsabilité pénale » ? [principe jamais appliqué ; quant à l’éducation... ndc] Rapidement, nous devrons ajouter, pour être précis, que cette ordonnance prévoyait des dérogations, laissant la possibilité aux juridictions de lever l’excuse de minorité. Sans oublier que la peine de mort fut applicable aux mineurs jusqu’en 1981.

    Justice spécifique

    Enfin, il serait temps de conclure. Nous pourrions alors évoquer ce texte fondateur qu’est la Convention internationale des droits de l’enfant (1989), sanctuarisant une justice spécifique pour les #mineurs et l’inscrivant dans un ensemble de droits protecteurs et émancipateurs. Il faudrait des trésors d’imagination pédagogique pour expliquer comment cette apothéose des droits se transforme en véritable feu d’artifice de mesures répressives en France : lois, circulaires, ordonnances affirmant la « fermeté » des pouvoirs publics, création de foyers renforcés (1998) puis fermés (2002), construction d’établissements pénitentiaires pour mineurs (2002), levée de l’excuse de minorité pour les 16-18 ans en état de récidive (2007), peines plancher (2007), tribunaux correctionnels pour mineurs (2010), mise à l’épreuve éducative (2024)…

    La leçon se terminerait, et peut-être qu’un doigt se lèverait pour nous demander : mais alors, si les politiques affirment que la violence des jeunes ne cesse d’augmenter, c’est peut-être que toutes ces punitions ne fonctionnent pas ? Pourquoi continuer ?

    La répression est une idée populaire, mais c’est un échec. Pas tant parce que les jeunes seraient d’incorrigibles criminels biberonnés à la violence, mais parce que la sanction brute se fait toujours prophétie créatrice : elle fragilise des jeunes et leurs familles déjà vulnérables, elle sape le travail social et éducatif censé les aider à sortir de la délinquance. Et si, pour une fois, nous avions l’audace de mettre en application les réformes progressistes votées depuis plus de deux cents ans ?

    La supposée crise de l’autorité que nous traversons ne prend pas racine dans un affaiblissement des institutions. Bien loin d’un « réarmement civique » martial, c’est en conférant aux jeunes liberté, égalité et, in fine, pouvoir d’agir que nous les rendrons maîtres de leur propre destin, artisans de la paix sociale dans un monde qu’ils estiment plus juste et solidaire. En somme, sevrons-nous de l’autoritarisme en pensant l’émancipation de la jeunesse.

    Véronique Blanchard est historienne, enseignante-chercheuse à l’université d’Angers (Temos) ; David Niget est historien, enseignant-chercheur à l’université d’Angers (Temos). Ils sont tous les deux spécialistes de l’histoire de l’enfance, de la jeunesse et de la justice.

    #colonies_pénitentaires et aujourd’hui, outre les #CJD, les #établissements_pénitentiares_pour_mineurs, les #centres_éducatifs_fermés

    • Christian Mouhanna, sociologue : « En dépit de dramatiques faits divers, le nombre de mineurs auteurs de délits baisse »
      TRIBUNE
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/04/24/christian-mouhanna-sociologue-en-depit-de-dramatiques-faits-divers-le-nombre

      Une fois de plus revient sur le devant de la scène politique et médiatique le thème des #mineurs_délinquants, qui seraient de plus en plus jeunes et de plus en plus violents. Premier ministre, ministres, préfets et syndicalistes policiers reprennent tous cette assertion pour désigner une menace qui viendrait fragiliser la tranquillité et la cohésion de la société.

      L’actualité, il est vrai, invite les responsables à réagir : les meurtres de Grande-Synthe (Nord), Romans-sur-Isère (Drôme) ou Viry-Châtillon (Essonne) et l’agression de Montpellier, lors des deux premières semaines d’avril, choquent l’opinion publique. Faut-il pour autant en conclure que nous avons affaire à un phénomène de masse, accentué par les réseaux sociaux et la perte du sens de l’autorité et du devoir parmi les plus jeunes ? Sans minimiser l’émotion légitime suscitée par ces événements, on peut néanmoins observer que les chiffres disponibles ne confirment pas cette impression.

      Les statistiques des tribunaux nous montrent en effet une baisse notable des mineurs auteurs de délits. Ceux qui sont orientés vers les alternatives aux poursuites, sanctions qui concernent les cas les moins graves, ont diminué de 40 % entre 2018 et 2022. Quant aux faits plus graves, qui font l’objet d’une orientation devant les juges des enfants ou les juges d’instruction, ils baissent de 33 % sur la même période. Globalement, le nombre de mineurs condamnés n’a cessé de diminuer depuis 2017. Et ils représentent toujours une infime minorité des auteurs de meurtres ou tentatives de meurtre.

      Durcissement des lois

      On pourrait objecter qu’il s’agit là d’un effet du « laxisme »
      judiciaire dénoncé par certains, mais en ce qui concerne les majeurs, les condamnations et les incarcérations ont augmenté entre 2018 et 2022. Si l’on regarde les établissements pénitentiaires , ceux qui sont réservés aux mineurs – établissements pour mineurs et quartiers mineurs des prisons – affichent un taux d’occupation de « seulement » 60 % fin 2023, alors qu’il dépasse les 145 % dans les maisons d’arrêt pour majeurs. Et beaucoup de ces jeunes incarcérés (56 %) sont en détention provisoire, en attente de jugement. La baisse du nombre de mineurs sanctionnés par l’appareil judiciaire est d’autant plus remarquable que la période considérée se caractérise par un durcissement des lois visant les comportements jugés inappropriés ou incivils des jeunes, notamment dans l’espace public.
      Bien entendu, ces chiffres ne viendront pas consoler la peine des proches des victimes de ces actes. Ils viennent seulement interroger ceux qui instrumentalisent ces faits divers terribles pour en tirer des leçons sur les évolutions de la société et en faire le terreau de politiques prônant davantage de sanctions. Ces derniers ignorent, ou font semblant d’ignorer, que les lois pénalisant les mineurs n’ont cessé de se multiplier depuis le milieu des années 1990, et jusque très récemment.

      Le nouveau code de la justice pénale des mineurs est entré en vigueur le 30 septembre 2021, réformant l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante. C’est la quarantième fois que ce texte, à l’origine fondé sur un équilibre entre éducation et sanction, est modifié. Depuis 2002 et les #lois_Perben, une orientation toujours plus répressive n’a cessé de s’imposer à une justice des mineurs par ailleurs de moins en moins bien dotée en moyens matériels et humains. Cette sévérité renforcée n’a pourtant pas apaisé les discours punitifs. Depuis le début des années 2000, les ministres de l’intérieur successifs reprennent la rengaine des « mineurs délinquants de plus en plus jeunes et de plus en plus violents », alimentant un discours anxiogène sur le déclin supposé de nos sociétés.

      Ce discours n’est ni neuf ni étayé par des résultats scientifiquement prouvés, bien au contraire. Toute réflexion s’appuyant sur les nombreux rapports disponibles dans les ministères ou les assemblées législatives, sans parler des laboratoires de recherche et les universités, est écartée au profit d’une #réaction immédiate, sans mise en perspective.

      Au lieu de replacer ces événements dans un cadre plus large, les discours n’hésitent pas à monter en généralité à partir de faits divers certes réels, mais qui ne reflètent pas une situation d’ensemble. Et dans ce cadre du court terme, les solutions proposées ne sont pas le fruit d’une réflexion approfondie : on ressort sans cesse la menace de sanctions plus dures, sans évaluation et sans attendre les effets éventuels des précédents textes votés.

      Stratégie politique

      Dans une période où les fake news et les discours populistes et démagogiques sont dénoncés, il est dommage de voir un gouvernement prétendument réaliste sombrer, pour des raisons de stratégie politique, dans les mêmes travers que les pires idéologues fascinés par la punition des plus faibles. Car les mineurs sont aussi parmi les plus touchés par les homicides intrafamiliaux.

      Si le nombre de mineurs auteurs de délits baisse, en revanche celui de ceux qui sont pris en charge au titre de l’enfance en danger s’est accru. Il représente 72 % de l’activité des juridictions pour mineurs. A l’heure de la disparition de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants, il serait peut-être important de remettre ces résultats en perspective et de s’interroger sur le « processus de décivilisation » à l’œuvre, selon le président de la République dans son discours de mai 2023.

      S’agit-il d’un processus dont serait responsable une jeunesse spontanément ancrée dans la violence, ou bien du résultat de choix politiques peu cohérents ? Les cadres politiques actuels auront-ils le courage de leurs prédécesseurs de 1945, pour qui l’enfance délinquante était un défi qu’il fallait relever en donnant plus de moyens à l’éducatif ? Ou se contenteront-ils de continuer à tenter – inutilement – de se construire une légitimité fondée sur la peur et sur leur volonté d’y apporter une réponse par une sévérité accrue ?

      Christian Mouhanna est sociologue, chercheur au CNRS et au Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (Cesdip), où il étudie les organisations policières, la justice pénale et le milieu carcéral.

    • Enfants en danger : l’embolie des services chargés de leur protection provoque des situations dramatiques
      https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2022/05/11/la-protection-de-l-enfance-en-danger-confrontee-a-une-nouvelle-degradation_6

      La mise en œuvre des décisions de justice censées protéger les mineurs maltraités ou délaissés intervient avec des retards croissants, provoquant des situations dramatiques.

      https://justpaste.it/bg1y7

      #enfance

    • Délinquance des mineurs : « Les effectifs des éducateurs de rue sont devenus une variable d’ajustement économique », David Puaud, Anthropologue

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/04/24/delinquance-des-mineurs-les-effectifs-des-educateurs-de-rue-sont-devenus-une

      « Je vous le dis, la culture de l’excuse, c’est fini. » C’est avec cette ritournelle sécuritaire que le premier ministre, Gabriel Attal, a annoncé, jeudi 18 avril à Viry-Châtillon (Essonne) une série de mesures visant à lutter contre la violence d’une partie de la jeunesse. Ce discours à l’accent frontiste a réamorcé les vieilles antiennes de l’internat éducatif, de l’autorité à l’école ou de la responsabilisation des parents.

      La remise en cause par Gabriel Attal de l’« excuse de minorité », établie dans le code de la justice pénale des mineurs et dont le principe est consacré par le Conseil constitutionnel, vise une nouvelle fois à privilégier l’aspect répressif par rapport à la prévention et à la protection de l’enfance.

      Et pourtant, de nombreuses études attestent que la prévention et la protection sont essentielles à l’expérience de la citoyenneté et à la remédiation sociale de sujets en voie de marginalisation. A l’été 2023, après la mort de Nahel M. à Nanterre, la France avait été secouée par onze jours de violences urbaines. Au cœur de cette période de turbulences, les plus importantes depuis celles de novembre 2005, des éducateurs de prévention spécialisée, dits « éducs de rue », ont été en première ligne dans de nombreux quartiers populaires.

      Ces « fantassins du travail social », tels que les nomma Pierre Bourdieu dans La Misère du monde (Seuil, 1993), ont pour mission principale de travailler avec des jeunes en situation de marginalité plus ou moins avancée. Soumis à des principes d’intervention fondés sur la libre adhésion, l’anonymat et le secret professionnel, ils favorisent l’inclusion sociale de jeunes en situation de disqualification sociale et/ou préviennent les processus de désaffiliation sociale.

      Désengagement économique

      En 2021, la ministre déléguée chargée de la ville Nadia Hai avait recruté 600 « adultes-relais » au sein de « bataillons de la prévention » dans 45 quartiers prioritaires, 300 médiateurs et 300 éducateurs spécialisés afin de tisser un « filet de protection contre la délinquance de la ville ». On compte aujourd’hui en France environ 4 000 de ces éducateurs de rue, mais déjà en sous-effectifs, ils sont devenus dans de nombreux territoires de l’Hexagone une variable d’ajustement économique.

      Parce que son financement reste facultatif, des départements se désengagent de cette compétence, alors même qu’elle relève de l’aide sociale à l’enfance, dont ils sont responsables. Ainsi, le 29 mars, le conseil départemental de la Vienne a entériné une baisse de 250 000 euros de la dotation annuelle allouée aux services de prévention spécialisée de l’association départementale de sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence, tout en accordant une subvention de 190 000 euros pour le passage de la flamme olympique. Cette coupe budgétaire entraîne la suppression de cinq postes d’éducateurs dans des quartiers de Poitiers et Châtellerault touchés par les émeutes de l’été 2023. Ainsi, environ quatre cents enfants et familles ne seront plus accompagnés socialement par ces éducateurs de proximité.

      En 2022, le département de l’Ardèche avait annoncé la fin de ses financements en direction de la prévention spécialisée, avant de faire machine arrière et de réduire de moitié la baisse de subvention, en appelant d’autres collectivités à les compléter. A Cognac, le service de prévention spécialisée a disparu à la suite de la non-reconduction de la convention avec l’association socio-éducative locale chargée de cette mission. A Perpignan, huit des douze éducateurs des bataillons de la prévention ont été menacés de licenciement en 2024, et l’incertitude reste de mise pour 2025.

      Equations à inconnues multiples

      Dans de nombreux autres territoires de la République, les services sociaux de proximité sont régulièrement soumis à des équations budgétaires aux multiples inconnues. En effet, les injonctions sécuritaires se sont immiscées au cœur de l’éducatif dans la rue. Certaines équipes sont désormais municipalisées. D’autres, comme celles des bataillons, relèvent des préfectures. La majorité est rattachée aux conseils départementaux qui devraient leur garantir un cadre d’action structuré au sein de la protection de l’enfance. Pourtant, toutes se retrouvent au cœur d’enjeux politico-financiers locaux et nationaux.

      Ces professionnels attachés historiquement au secteur de la protection de l’enfance, dont la mission est d’« aller vers » des jeunes en situation de marginalisation, ont besoin de pérennité et d’engagement à long terme. Dans nos enquêtes menées ces dernières années sur les processus de violence et sur la prévention de la radicalisation, nous constatons que ces spécialistes contribuent à prévenir des situations dramatiques et à rétablir des liens entre les habitants des quartiers populaires et les institutions républicaines. La temporalité de leurs « terrains » est différente de celle du financeur, soumis aux aléas du politique à court terme.

      Force est de constater, malheureusement, que la montée de l’extrême droite et les enjeux électoraux à court et moyen terme ne laissent guère de place à la narration des résultats pourtant probants des actions de prévention qui se jouent sur le long terme.

      Cette cécité à l’égard des acteurs sociaux de proximité renforce la marginalisation d’une partie de nos concitoyens dans les zones dites pourtant « prioritaires ». Colette Pétonnet, pionnière de l’anthropologie urbaine, qualifiait en 1975 de catégorie sacrifiable ces « gens unanimement désignés comme marginaux, asociaux, inadaptés, ou handicapés, suggérant qu’ils sont à la société contemporaine ce que les pharmakoi étaient aux Athéniens, c’est-à-dire à la fois le mal et le remède ». A renier ainsi une partie de la population devenue « victime-émissaire », l’histoire nous raconte que nous en paierons comptant les conséquences sociétales.

      David Puaud est anthropologue au sein du Laboratoire d’anthropologie politique (CNRS-EHESS) et chargé d’enseignement à Sciences Po Paris (campus de Poitiers). Il a notamment écrit « Les Surgissants. Ces terroristes qui viennent de nulle part » (Rue de Seine, 2022) et « Un monstre humain ? Un anthropologue face à un crime sans mobile » (La Découverte, 2018).

    • Comme le souligne l’historienne, Véronique Blanchard, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, l’État a eu besoin de « forces vive » et a mis en place de nouvelles modalités de contrôle de la jeunesse, via l’ordonnance de 1945. L’étude des donnés statistiques concernant la population envoyées dans les colonies agricoles et industrielles montre que le nombre d’enfants détenus en ces lieux diminua à partir du moment où la législation prolongea l’âge de l’enseignement scolaire obligatoire. Il y a donc transfert de l’exercice du contrôle de la jeunesse, des structures répressive vers l’Éducation nationale. Ce temps scolaire, comme a pu l’être par le passé le service militaire, a pour objectif que le jeune devienne ce que la société attend de lui afin que le fonctionnement du pouvoir puisse perdurer.

      Milot L’incorrigible. Parcours d’un jeune insoumis à la Belle Époque, Collectif l’Escapade. Niet ! éditions.

    • 100 années d’éducation spécialisée mises à la poubelle. C’est ça, ça fait plus d’un siècle qu’on réfléchit à ces questions pour sortir de l’horreur autoritariste imposée par les bourgeois du XIXe… et ces salopards considèrent que rien de tout cela n’existe.

  • Women House, une exposition sur l’art féministe à voir d’urgence à la Monnaie de Paris - FéministOclic
    https://feministoclic.olf.site/women-house-exposition-art-feministe-monnaie-paris

    Les femmes sont restées assises à l’intérieur de leurs maisons pendant des millions d’années, si bien qu’à présent les murs mêmes sont imprégnés de leur force créatrice.

    écrivait Virginia Woolf dans Une chambre à soi en 1929. Mettre en avant une quarantaine de femmes artistes à travers la relation qu’elles entretiennent avec l’espace domestique, voilà le sujet de la passionnante exposition Women house, qui se tient à la Monnaie de Paris jusqu’au 28 janvier.
    Un hommage aux artistes féministes des années 70

    Le titre de l’exposition, Women house, est un hommage à l’exposition Womanhouse qui avait été organisée en 1972 à Los Angeles par Miriam Schapiro et Judy Chicago. Ces deux artistes avaient transformé temporairement une maison en un espace d’installations et de performances artistiques féministes. Les artistes impliquées y avaient dénoncé le rôle domestique réservé aux femmes par la société de l’époque.

    C’est par un reportage sur cette expérience artistique que commence l’exposition et tout de suite, le ton est donné : entre les interviews d’hommes totalement dépassés par les installations et performances proposées, et la présence à l’entrée de la salle d’un immense vagin tricoté au crochet conçu pour la Womanhouse de 1972, on comprend vite que le sens de l’humour et l’ironie seront à l’ordre du jour.
    Des Desperate housewives à Une chambre à soi

    Drôle mais aussi très documentée et pédagogique, l’exposition présente à travers huit salles la diversité des points de vue et messages transmis par les femmes artistes depuis les années 70 au sujet de leur vie domestique. Évidemment, elles sont nombreuses à montrer la maison comme un espace d’enfermement et à dénoncer l’ennui des tâches domestiques. Cela donne l’occasion de constater (pour ceux qui en doutaient encore) que le poids de la « charge mentale » ne date pas de 2017.

    L’artiste autrichienne Karin Mach, toute de noir vêtue, transforme une planche à repasser en sépulture, pendant que Valie Export parodie une madone de Michel-Ange et accouche par le tambour d’une machine à laver. Ces femmes rêvent toutes de liberté, comme en témoigne l’affiche de l’exposition où l’artiste nous dit qu’elle ne rêve que d’une chose : s’échapper de chez elle (« Ich möchte hier raus ! » / « je veux sortir d’ici ! »).
    Des femmes « architectes d’un nouveau monde »

    Mais, plus on progresse dans la visite, plus on découvre aussi la maison comme un espace de conquête d’une forme d’indépendance et comme lieu de construction d’une identité artistique. La maison est détournée, elle devient un studio photo ou un moyen de conquérir sa liberté par le voyage et le nomadisme.

    Même si certaines installations plus conceptuelles et contemporaines sont peut-être un peu moins convaincantes, en particulier la salle consacrée aux “Empreintes”, on est, dans l’ensemble, enthousiasmé par la diversité des techniques utilisées : si la photo est très présente, les murs sont parfois recouverts de tentures créées avec des vêtements recyclés, des vidéos, des sculptures en céramique ou encore des installations grandeur nature (et plus encore, puisque l’exposition se conclut par une œuvre spectaculaire de Louise Bourgeois). Des créations de femmes « puissantes », « architectes d’un nouveau monde », comme le rappelait récemment Camille Morineau, la commissaire de l’exposition.

    Si vous voulez les découvrir, dépêchez-vous : vous n’avez plus que jusqu’au 28 janvier pour visiter cette passionnante Women house !

    L’expo est fini, je découvre seulement aujourd’hui son existence.

  • Pourquoi l’ordre des avocats de Chartres n’a-t-il rien fait contre ce confrère accusé d’agressions sexuelles ?
    https://www.buzzfeed.com/lorriauxaude/lordre-des-avocats-de-chartres-na-rien-fait-contre-ce?bfsource=bbf_frfr

    Lorsqu’on lui lit l’article 187, maître Caré semble gêné. Il se défend, mais se montre moins affirmatif : « Dans la pratique, il faut une plainte. » Avant de reconnaître : « Si j’avais, moi, cinq femmes qui arrivaient à la queue leu-leu en me décrivant des faits [sans écrit ndlr], je me poserais la question... ». « Le problème, c’est que les bâtonniers changent... Si vous aviez un seul bâtonnier pendant 15 ans... », lâche-t-il aussi, avant d’admettre :

    « C’est toujours délicat de faire une enquête sur un confrère. »

    Si ces agissements ont perduré sans que l’ordre des avocats réagisse, selon l’AVFT, ce n’est pas parce qu’il n’y avait pas de plainte, mais parce qu’il existe au sein de la profession une confraternité étouffante. Depuis près de 50 ans, les avocats prêtent serment et jurent de respecter les principes « de confraternité, de délicatesse, de modération et de courtoisie ». « On se protège entre pairs. C’est une protection patriarcale et de confrérie. La confraternité bousille tout, aucun de ces bâtonniers n’aurait eu le courage de faire une enquête sur lui sans le prévenir, ça serait manquer à leur serment d’avocat », estime Laure Ignace.

    #fraternité #culture_du_viol #viol #domination_masculine #travail #violophiles
    Ils sont beaux tous ces ordres, ici l’ordre des avocats qui protège les violeurs et agresseurs sexuels. Au passage ce que l’ordre des avocats appel « que des mains balladeuses » ce sont des agressions sexuelles.

    • Comme je repasse par ici je met la suite de l’affaire :

      L’ex-avocat Sidney Amiel condamné à 10 ans de prison
      L’ancien ténor du barreau, qui a nié tout au long du procès, n’a pas convaincu les jurés. Il a été reconnu coupable de viol et d’agressions sexuelles.

      http://www.lepoint.fr/justice/l-ex-avocat-sidney-amiel-condamne-a-10-ans-de-prison-23-06-2017-2137832_2386

      Cette condamnation est désigné comme un « séisme » dans la profession par l’echo républicain ! Les avocats sont choqués de plus pouvoir violer et agressé sexuellement les femmes en toute quiétude...
      http://www.lechorepublicain.fr/chartres/justice/2017/06/26/le-proces-de-l-avocat-de-chartres-sidney-amiel-est-un-seisme-pour-l

    • Procès Amiel, la fin de l’impunité : décryptage féministe d’une stratégie d’agresseur - FéministOclic
      https://feministoclic.olf.site/proces-amiel-fin-de-limpunite-decryptage-feministe-dune-strategi

      Cibler les victimes, les isoler, les mettre sous terreur, les dévaloriser, inverser la culpabilité, agir en mettant en place les moyens d’assurer son impunité : il s’agit d’une stratégie qu’installent tous les coupables de violences sexistes pour organiser les agressions qu’ils commettent. Cette stratégie a été mise en évidence par le Collectif Féministe Contre le Viol (CFCV). Elle permet de montrer qu’il s’agit d’actes volontaires qui ont été préparés, réfléchis par l’agresseur. Il répète la même logique contre toutes les victimes et l’adapte en fonction des leviers de pouvoir dont il dispose. Amiel, comme tous les agresseurs, sait ce qu’il fait dès la première remarque sexiste. Identifier la stratégie de l’agresseur permet également de venir en aide à la victime en déjouant cette stratégie.

      Que l’on soit la victime ou la personne qui l’accompagne, ces éléments de stratégie peuvent être dévoilés en posant quelques questions simples :

      – Dans quel contexte de vulnérabilité l’agresseur a-t-il ciblé la victime ?

      – De quelle manière l’a-t-il isolée ?

      – Comment lui a-t-il fait peur ?

      – Qu’a-t-il fait pour la dévaloriser, pour affaiblir sa confiance en elle ?

      – Qu’a-t-il mis en place pour s’assurer que la victime gardera le secret, qu’il ne sera pas puni ?

      – Et surtout, quelles mines a-t-il mises en place pour inverser la honte et la culpabilité ? Comment s’y est-il pris pour faire croire à la victime qu’elle avait “une part de responsabilité” dans le système agresseur ?

      Ce procès montre aussi qu’un même agresseur fait le plus souvent plusieurs victimes, en utilisant le même mode opératoire, tant qu’il n’est pas mis hors d’état de nuire par la justice. Comme Amiel, dont la plupart des victimes l’avaient rencontré dans un cadre professionnel, alors qu’une d’entre elles a fait partie de sa famille, ils n’agissent pas nécessairement non plus dans un même contexte. Ils agressent des filles et des femmes partout et autant qu’ils le peuvent.

      L’avocat de Sidney Amiel a fait appel du verdict.

    • Procès pour viol : un ex-avocat condamné à trois ans ferme

      En première instance, Sidney Amiel, ex-figure du barreau de Chartres, avait été condamné à dix ans de prison pour le viol d’une collaboratrice et les agressions sexuelles de deux clientes et de son ex-belle fille.

      https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/10/25/proces-pour-viol-un-ex-avocat-condamne-a-trois-ans-ferme_5374141_1653578.htm

      Avocat « brillant » pour les uns, personnage « pervers » pour les autres : l’ex-figure du barreau de Chartres Sidney Amiel a vu sa peine de dix ans de prison réduite à cinq ans dont deux avec sursis en appel et a été acquittée d’une partie des poursuites.

      Le verdict rendu mercredi 24 octobre par la cour d’assises des Hauts-de-Seine l’a déclaré coupable du viol d’une ancienne collaboratrice et d’une agression sexuelle d’une cliente mais innocent concernant les tentatives d’agression sexuelle de deux clientes et les agressions sexuelles de son ex-belle-fille.

      En première instance, Sidney Amiel avait été reconnu coupable de l’ensemble de ces faits. La cour a cette fois-ci estimé les preuves insuffisantes pour condamner totalement Sidney Amiel. A l’énoncé du verdict, les parties civiles étaient effondrées, certaines pleurant prostrées sur le banc de la salle d’audience.
      Elu municipal

      A la tête de l’un des cabinets d’avocats les plus florissants de la ville de Chartres pendant trente ans, spécialiste reconnu du droit social et élu municipal socialiste, Sidney Amiel avait pignon sur rue jusqu’en 2010, lorsque l’une de ses clientes l’accusa d’agression sexuelle. Quatre autres femmes se joindront à la procédure dont une l’accuse d’un viol.

      Sidney Amiel, 68 ans, a toujours clamé son innocence. « J’aime les femmes au sens propre du terme », a-t-il répété en confessant « un côté volage » ; « je ne sais pas forcer une femme, je ne l’ai jamais fait de ma vie ».

      Il « est un homme d’une autre époque », a plaidé son avocat, Frédéric Landon. On peut le condamner « pour sa rudesse, pour sa grivoiserie, pour sa non-attention aux autres », mais « vous ne pouvez pas le condamner » pour les faits reprochés.

      Sidney Amiel « est un coucheur, un lubrique » mais « les lubriques ne sont pas des violeurs et nous ne sommes pas là pour faire la morale », a complété son autre conseil, Caroline Toby. « Il y a des violeurs incontestables », mais ici, « on est dans une zone grise, où rien n’est certain », a-t-elle ajouté.
      « Acharnement »

      L’ex-avocat a en particulier contesté avec vigueur les accusations de son ex-belle fille, s’effondrant en larmes à la barre pour dénoncer un « acharnement ». La cour a jugé que les faits reprochés à Sidney Amiel la concernant ne pouvaient constituer une infraction car « les gestes rapportés sont analogues à ceux portés à l’égard de ses propres enfants ».

      La jeune fille l’accusait entre autres de lui avoir posé une main sur la cuisse lors d’un voyage en voiture ou de lui avoir touché le haut des fesses sous le maillot en lui étalant de la crème solaire sur le dos, lorsqu’elle était adolescente.

      Concernant les autres accusatrices, M. Amiel a reconnu « des gestes et des mots qui ont pu être mal interprétés », mettant son comportement sur le compte de son côté « tactile », « méditerranéen », selon lui propre à ses « origines juives marocaines ».

      Plus de cent témoins ont défilé à la barre pendant les deux semaines et demie du procès. Parmi eux, dix-sept femmes – anciennes clientes, secrétaires ou collaboratrices – ont fait état de gestes déplacés de la part de Sidney Amiel et parfois même de viols. Tous ces faits sont aujourd’hui prescrits. Chacune de ces femmes a décrit une « ambiance particulière » au sein du cabinet Amiel : incessantes blagues graveleuses, mains sur les cuisses, baisers volés.

      Sidney Amiel n’a rien reconnu, hormis un comportement inapproprié avec deux secrétaires, avec qui il a admis être allé « trop loin » en essayant de les embrasser. Il a dit avoir eu des relations « consenties » avec une des femmes l’accusant de viol. Pour le reste, aucun souvenir si ce n’est quelques entreprises de séduction, parfois réciproques selon lui.

  • Décrypter le langage du sexe
    https://feministoclic.olf.site/sous-le-consentement-la-contrainte

    Le minou, la nenette, la foufoune… Autant de mots employés, tant par les hommes que par les femmes, pour désigner le sexe féminin. Mais ces expressions que l’on entend partout, par qui ont elles été introduites ? Et surtout, que révèlent-elles de notre vision du sexe féminin et, plus globalement, de la sexualité ? Dans l’imaginaire collectif, le sexe féminin est avant tout un trou : il est un vide, un néant à combler par le coït. Pour preuve, ne parle-t-on pas dans tous les manuels d’anatomie d’ »entrée du vagin’’, ou de « vestibule » pour en désigner la partie basse ? Ne serait-il pas plus judicieux de parler de « sortie du vagin » puisque le sang des règles, les pertes blanches et même les nouveaux-nés en sortent ? Cette dénomination est clairement issue d’une perspective de pénétration, masculine et coïtale. Le mot vagin lui-même vient du latin vagina, qui n’est autre que le fourreau de l’épée. Il est donc défini uniquement comme le complément, le logement du pénis. La “fente” autre terme pour désigner le sexe féminin renvoie à l’idée de déchirure par la pénétration. Un point de vue encore masculin d’un phallus conquérant. Quant aux expressions souvent employées comme synonymes de ”faire l’amour”, elles renvoient souvent à un vocabulaire de colonisateur, réifiant violemment les femmes (“lui bourrer le sac”…) Les mots comptent : pour poser les bases une sexualité égalitaire, non-violente et épanouissante, la transformation de notre langage est nécessaire.

    Lucile

    #féminisme #femmes #langage #vocabulaire #sexisme #sexe #sexualité #vagin #domination_masculine
    Sur ce lien il y a aussi un texté sur le #consentement

    • Si une personne le qualifie comme du viol, c’est une notion à prendre en compte. Muriel Salmona dit qu’il faut un consentement enthousiaste et explicite afin d’évité toutes les notions flous de la sexualité patriarcale.

  • L’hymen, un myth patriarcale
    https://feministoclic.olf.site/lhymen-mythe-patriarcal

    Tout le monde a entendu parler de l’hymen, cette partie mystifiée du corps de la femme qui incarne le culte de la virginité dans nos sociétés patriarcales. Mais sait on vraiment de quoi il s’agit ? Sachez que le véritable « hymen » n’a rien à voir avec l’image que l’on s’en fait, celle d’une fine membrane recouvrant le vagin des femmes comme un couvercle, et vouée à être déchirée lors du premier coït. D’ailleurs, les très rares hymens qui recouvrent entièrement le vagin doivent être incisés médicalement à la puberté pour permettre l’écoulement des règles. Le plus souvent, l’hymen prend la forme d’un pli de la membrane vaginale. Élastique, il se déchire rarement lors du premier coït. Si l’on saigne lors de notre « première fois », c’est plus probablement du à un partenaire maladroit ou pressé qui blesse notre vagin qu’à une rupture de l’hymen.

    C’est sur ce pas grand chose que le patriarcat et les religions ont construit un mythe oppressant aujourd’hui encore des millions de femmes, conditionnant (à tort !) la virginité à son existence, l’érigeant en critère décisif pour définir la “pureté” des femmes . Aujourd’hui en France, des chirurgiens complaisants sous couvert de faux diagnostic de kyste vulvaire, acceptent encore de pratiquer des hymenoplastie pour simuler une défloration la nuit de noces. L’hymen, une arnaque patriarcale d’un archaïsme insupportable !

    Chloé

    #femmes #domination_masculine #patriarcat #hétérosexisme #virginité #vierges #féminisme #sexualité

  • https://feministoclic.olf.site/rocco-medias-histoire-de-fascination

    Le film « Rocco » de Thierry Demaizière et Alban Teurlai est à l’affiche depuis mercredi. Articles, interviews, critiques de films, plateaux télé… pas un média n’a écarté le sujet et la revue de presse semble infinie.

    Oscillant entre rejet et fascination, les journalistes peinent à choisir. Bien sûr, ils évoquent les violences du porno… mais pour mieux les évincer. Une phrase, deux au maximum comme dans l’article du Monde où les réalisateurs précisent « C’est un univers très dur, et quelques images des bleus sur les corps des actrices, de leur fatigue suffisent à en montrer la violence »… avant de très vite passer à autre chose. Car ce n’est pas le sujet. Finalement, le seul objet de ce documentaire comme de tous les articles qui lui sont consacrés reste le même : se concentrer sur ce qui intéresse vraiment, sur ce qui passionne, l’homme.

    Il suffit pour s’en convaincre de voir comment Rocco Siffredi est nommé. « Força du sexe » (Le Point), « l’étalon italien » (Le Monde), « la bête de sexe » (Le Parisien)… les qualificatifs virilistes ne manquent pas. Même Thierry Demaisère parle de « monstre sacré, une sorte de Mike Tyson du porno » (20 Minutes). Pourtant, après deux ans à suivre le personnage, on pouvait espérer un peu plus de recul.

    A chaque article, les chiffres dégoulinent. La taille de son sexe, le nombre de films, de « partenaires »… Et puis le voyeurisme prend la suite : on veut savoir comment il vit ce « métier », son articulation avec sa vie de famille, ce qu’il raconte à ses enfants, sa relation à sa mère… Et qu’elles soient bonnes ou mauvaises, les critiques du film transpirent de la même déception : l’homme fascine et les journalistes auraient adoré que le documentaire leur en révèle plus. Ils sont comme hypnotisés par ce personnage qui concentre à lui seul tous les codes d’une sexualité sexiste, violente et malsaine, construite uniquement sur un rapport de domination.

    D’ailleurs, les journalistes n’arrivent pas à distinguer la violence de la sexualité ni à voir le rapport pathologique que l’homme entretient avec la pornographie. Ils nous parlent d’un homme « enchaîné à ses besoins sexuels » (Huffington Post ), « qui dut errer avec son désir trop grand » (Le Point), « d’addiction au sexe » (Télérama ) ou de sa vie « hanté par le désir » (Paris Match). Or, il ne s’agit nullement de sexe ni de désir mais bien d’un homme addict à la domination et à la violence que génère le porno. Mais de ça, vous n’entendrez rien ou si peu.

    #male_gaze #phallolatrie #domination_masculine #culture_du_viol #malealphisme

    • Et qui pour remettre en cause ses propos ? Le pire reste lors des interviews où l’on veut nous faire croire que le porno, c’est drôle. Ainsi, on se gausse avec l’acteur sur le plateau du Quotidien. Personne pour s’interroger quand il répond à une question sur le respect des femmes par une histoire de gifles. Personnes pour évoquer les coups portés pendant les tournages ou cette mauvaise blague dans le documentaire « le 24, tu tournes avec Rocco, le 25 on t’enterre ». Personne non plus pour lui rappeler qu’il a agressé Florence Foresti et Cécile de Ménibus en direct…

      Et puisqu’il est là, autant tout se permettre. Alors, quand Panayotis Pascot fait un sketch sur une application qui permet, à partir de la photo d’une femme, de retrouver des films pornographiques avec des « actrices » lui ressemblant, pourquoi faudrait-il rappeler à quel point c’est déshumanisant ? Non, il faut rire puisqu’on vous dit que c’est drôle.

      Alors que seul LCI a jugé bon de rappeler que ce documentaire est « un docu complaisant et racoleur qui dégrade l’image de la femme », il semble important de rappeler certaines réalités.

      Le porno n’est pas cool ou mainstream.
      Le porno n’est pas du sexe.
      Le porno n’est pas du cinéma.

      Le porno, c’est de la prostitution filmée, de la violence réelle subie par des femmes et organisée par une industrie destructrice.

      Des documentaires sur la violence de l’industrie pornographique existent. Mais dans une société où la parole est donnée par des hommes essentiellement à leurs pairs, ces films ne reçoivent pas le même écho. Les victimes ne fascinent pas les journalistes. Les bourreaux, oui.

      Le 25 novembre, nous demandions aux journalistes de mieux traiter des violences faites aux femmes. La médiatisation du film « Rocco » montre l’ampleur du chemin qu’il reste à parcourir : il semble que pour certains journalistes, la première étape à franchir ne soit pas de mieux parler des violences mais déjà de les identifier. Et ne plus être dans le camp des agresseurs.