• RÉFUGIÉS : LA SLOVÉNIE VEUT S’AFFRANCHIR DU DROIT INTERNATIONAL POUR MIEUX EXPULSER
    De notre correspondant à Ljubljana | lundi 9 janvier 2017

    Le gouvernement va proposer au Parlement une nouvelle « Loi sur les étrangers » (sic), qui permettra d’accélérer les procédures d’expulsion, sans même examiner le dossier des demandeurs d’asile. La société civile dénonce un projet contraire au #droit_international, ainsi que les discours alarmistes du gouvernement, alors que la Slovénie accueille en tout et pour tout... 315 demandeurs d’asile.

    Par Charles Nonne

    La Slovénie se prépare à l’arrivée possible d’une nouvelle crise migratoire, et les discours alarmistes sont à l’ordre du jour. « Nous faisons face à une augmentation de 100% des migrations illégales, de 500% du nombre de demandes d’asile », s’est récemment inquiétée la ministre de l’Intérieur, Vesna Györkös Žnidar. Le chef de la diplomatie, Karel Erjavec, a mis en garde contre le risque d’une vague fondamentalement différente de la première, car constituée de migrants économiques mais aussi d’anciens combattants de Syrie.

    Les autorités slovènes ne se contentent pas de muscler leurs discours : en plus de projets sur l’équipement des policiers, encore dans les cartons, la nouvelle loi prévoit une série de mesures d’urgence applicables en cas de « circonstances exceptionnelles ». Son objectif : permettre au pays de renvoyer légalement des migrants en masse.

    Les reconduites immédiates à la frontière seront facilitées dès lors que les entrants potentiels ne rempliraient pas les « conditions nécessaires ». L’expulsion automatique des arrivants sera rendue possible sans le moindre examen de leur dossier, à partir du moment où ils seront entrés illégalement sur le territoire slovène, ou à partir d’un autre pays de l’Union européenne (UE) — en l’occurence de la Croatie voisine.

    Ce projet détonne dans un pays où les demandeurs d’asile, au nombre de 315, perçoivent une indemnité de 18 euros par mois. En guise de garde-fou, le projet exclut les mineurs non-accompagnés et les personnes « en grave danger » ou dans une situation médicale critique – ces précautions ne suffisent pas, cependant, pour rassurer les défenseurs des droits des réfugiés.

    “Un projet contraire au droit humanitaire international, au droit de l’UE et à la Constitution slovène elle-même.”

    Les critiques ont immédiatement plu, dénonçant un projet contraire au droit humanitaire international, au droit de l’UE et à la Constitution slovène elle-même. Miha Kordiš, député de la Gauche Unie (opposition), estime que « le gouvernement se cherche un ennemi extérieur en créant des peurs inutiles [...] et concrétise tous les fantasmes de la droite slovène ». Pour Saša Zagorc, éminent professeur de droit constitutionnel, cette loi « bafoue tout ce pourquoi nous avons gagné notre indépendance il y a 25 ans ». Dans un communiqué cinglant, un collectif des ONG les plus influentes de Slovénie déplore le fait que « le gouvernement pourra désormais piétiner les droits de la personne à chaque fois qu’il estimera que des ’conditions exceptionnelles’ sont réunies ».

    Unique fissure dans l’unanimité gouvernementale, le ministre de la Justice Zoran Klemenčič, ancien champion de la lutte anti-corruption, s’est abstenu lors du vote de la loi par le gouvernement. Le projet est désormais au Parlement, où il doit obtenir les deux tiers des voix pour entrer en vigueur.

    www.courrierdesbalkans.fr/le-fil-de-l-info/slovenie-loi-sur-les-etrangers-liberticide.html
    #Slovénie #expulsions #asile #migrations #réfugiés #renvois