Voile : ni obligation religieuse ni interdiction étatique (2004)
▻http://archives.rezo.net/archives/cntait-info.mbox/HAN3Q36A3DR46KLXSOJ5EIN6RBKRPZLG
Une mère juive (rappelons ici que, pour en être une, il n’est pas nécessaire d’être juif ni même d’être une mère - c’est un archétype universel) offre à son fils deux cravates, l’une est rouge, l’autre est bleue. Pour lui faire plaisir, il en porte une le lendemain, mettons la rouge. En le voyant, dépitée, la mère fond en larmes :
« J’étais sûre que l’autre ne te plairait pas ». Immanquablement, s’il avait porté la bleue, il aurait droit exactement à la même scène. Face à cette « double contrainte », il ne lui reste plus que deux choix : porter les deux cravates ensemble, c’est-à-dire devenir fou, ou bien n’en porter aucune, c’est-à-dire rompre avec sa mère. Le lien avec les femmes musulmanes ?
Celles-ci sont également soumises à une double contrainte : la religion les somme de porter le voile alors que l’État le leur interdit (à l’école). Pour se libérer d’un de ces pouvoirs, elles sont contraintes de se soumettre à l’autre et réciproquement. Il leur reste alors, tout comme au fils juif, deux possibilités. Soit elles se plient aux deux autorités, donc tentent en même temps de porter et d’ôter leur voile, ce qui est contradictoire donc impossible. Soit elles refusent simultanément l’obligation et l’interdiction de le porter, ce qui est absurde mais constitue la seule réponse logique au monde absurde dans lequel elles vivent. Ce deuxième choix est aussi contradictoire que le premier mais, ici, la contradiction est dépassable : refuser les deux injonctions revient à rompre avec tous les pouvoirs à la fois, en somme, à entonner encore une fois ce bon vieux « ni dieu, ni maître ».