• Elle me poursuit encore dans mes rêves
    Mais même en rêve je parviens
    Un peu, à la repousser

    Dans mon rêve, une nouvelle discipline
    De photographie : photographier
    Des événements futurs

    Petit déjeuner gargantuesque
    Rires et discussions
    Visite de l’atelier de Martin

    Parmi les bustes
    Que peint Martin
    Un que je reconnais bien

    Belle marche dans les ondulations
    Du Morvan, lumière changeante
    Pas de champignon mais un bel objet rouillé

    François nous reçoit
    Soupe de citrouille
    Lentilles riz, et un armagnac, et quel !

    François raconte une histoire (avec talent)
    Interminable (qu’il fait durer, durer, durer…)
    Avec une chute minuscule (j’adore)

    Une belle partie d’échecs avec Angelo
    Un verre d’Armagnac, un conte
    Et c’est l’heure de retourner travailler

    Retour à Autun
    Martin me file un coup de main
    Avec l’affiche de l’Étreinte

    Isa au sommet de sa sorcellerie
    Galettes coréennes
    Aux moules et crevettes. Extraordinaire

    Lesté de ma galette coréenne
    Je prends la route, haleine de poireaux
    Et musique à fond

    Je passe devant un troupeau
    De moutons aux yeux albinos
    Dans les phares de ma voiture

    Dans les phares de ma voiture
    Des moutons insomniaques
    Comptent les voitures qui passent

    http://www.desordre.net/musique/eels.mp3

    Les Eels chantent : I need some sleep
    I’ve tried counting sheep
    But there’s one I always miss
    . Je ris

    Dans une station-service déserte
    Un couple de vieux Russes
    Se dispute

    Un pâtisson
    Un potimarron
    Un butternut

    Un morceau de conté
    De la sauce de soja
    Et des rires. Souvenirs d’Autun

    Maison endormie
    Dans laquelle
    Je m’endors sans délai

    I need some sleep
    I’ve tried counting sheep
    But there’s one I always miss

    Je repense
    Aux moutons
    Insomniaques

    #mon_oiseau_bleu

  • http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/sons/haden-blackwell-cherry.mp3

    (ouh la comment je sens que je vais me faire engueuler par @intempestive et @reka sur ce coup-là)

    (Il est possible de lire cette chronique depuis cette adresse http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/index_194.htm laquelle donne accès aux nombreux liens hypertextes qui l’émaillent)

    J – 8 : Fin.

    Oui, je sais il y a rupture, je ne vais pas jusqu’au bout. Je n’irai pas jusqu’au bout. Et je reconnais mon échec. A vrai dire cet échec, si c’en est un, est le cadet de mes soucis.

    Il y a une chose que je veux faire désormais, apprendre à boucler, à écrire le mot Fin quand c’est effectivement la fin. Ne pas laisser les projets ouverts, non finis.

    Ca a l’air de me prendre comme ça. En fait pas du tout. Celles et ceux qui lisent entre les lignes, se sont sans doute rendus compte qu’en filigrane de Qui ça ? grandissait une histoire d’amour, j’ai tenté d’être le plus pudique et allusif possible (en gardant notamment des tas de pages secrètes, et les garder pour plus tard, peut-être, si Qui ça ? un jour devenait, par exemple, un livre en papier, au train où vont les choses dans le milieu de l’édition, il y aurait prescription quand cela sortirait), mais j’ai, malgré tout, produit quelques allusions pour la justesse de l’éclairage qu’elles apportaient — je n’aurais pas voulu que l’on me trouve anormalement bienveillant dans une chronique sans raison, il faut croire. Cette histoire d’amour vient de connaître une fin cassante qui me laisse sans force. Sans force comme on l’est au terme d’une nuit sans sommeil, nuit pendant laquelle j’ai eu peur et froid, nuit pendant laquelle il m’est arrivé de sangloter comme un enfant, une nuit de faille

    Il importe désormais que je me retranche.

    Le but plus ou moins avoué et plus ou moins annoncé de Qui ça ? était de tenir le journal d’une indifférence militante à la mascarade électorale en cours, je m’étais donné comme but d’en ignorer le plus possible, de systématiquement regarder ailleurs, un peu comme on se coupe par exemple de la télévision et tout d’un coup on se rend compte que l’on pense différemment sans le bruit de fond de la télévision justement, qui est tout sauf anodin — personnellement des décennies que je suis coupé de ce bruit de fond au point de de me demander si j’y ai vraiment été exposé. Ce but est atteint, mon indifférence est complète, pour le coup cette indifférence non feinte et complète est une victoire. Une victoire éclatante mais une victoire à la Pyrrhus. J’y laisse des plumes, c’est certain.

    Entre autres choses je réalise qu’en mettant un point final à Qui ça ? je mets également une manière de point final au cycle des Ursula . Et, est-que ce cycle des Ursula n’est pas aussi le dernier chapitre de Désordre . Entendons-nous bien. Désordre est un projet ouvert et sans bords et il apparaît donc assez vain d’y chercher ou d’y trouver une fin. Il y a bien une première page, et elle n’est pas jojo, il faut bien le dire, mais c’est la première, il y a une fausse dernière page aussi (voulue ironique), dont je sais où elle se trouve dans l’arborescence du Désordre , mais je n’ai plus aucune idée du chemin initial qui y mène, mais on comprend bien que ni cette première page, désormais uniquement accessible depuis la page historique du Désordre , ni cette fausse dernière page peuvent constituer des bords, des fins, ou même un début.

    En 2009, lorsque j’animais un stage de construction de sites Internet à l’école du Documentaire à Lussas, un stagiaire, Frédéric Rumeau pour ne pas le nommer, a eu cette question, le jour où je présentais le site et, comme me l’avait demandé Pierre Hanau, d’en donner à voir les ressorts de narration, Frédéric donc, m’avait posé cette question, mais pourquoi est que ce projet est sans fin, est-ce que vous ne pourriez pas, comme on fait avec un film, le terminer et en commencer un autre ? C’était une putain de question et elle ne m’a plus quitté depuis. Parfois cette question se rapprochait de moi avec beaucoup de prégnance, d’insistance même. Par exemple, début 2014, quand j’ai décidé de tenter une première grande expérience d’Ursula (un autre projet issu des stages de Lussas), certes je l’ai développée à l’intérieur du Désordre, pour commencer, mais dans mon idée, une fois que cette dernière aurait une forme satisfaisante, aboutie, je la déplacerai, et c’est pour cette raison d’ailleurs que ce soit le seul endroit du Désordre où il y a de nombreux fichiers doublons, notamment sonores, parce que je voulais pouvoir exporter Ursula hors du Désordre en un www.ursula.net qui n’a jamais vu le jour en tant que tel. Après six mois de développement en secret de ce projet, je me suis rendu compte que cela n’avait pas de sens qu’ Ursula était bien la fille du Désordre et que cela permettait même de donner une épaisseur supplémentaire au Désordre , d’autant qu’ Ursula commençait elle-même à produire des petits, notamment Le Jour des Innocents , le journal de Février , Arthrose , et donc Qui ça ? il était donc temps de réintégrer la fille prodigue du Désordre dans le désordre.

    Il existe plusieurs formes Ursula , l’initiale qui est assez roots , mais dont le principe est sain et bon, développé à la demande de Pierre Hanau pour Lussas. Puis il y a la première vraie Ursula , celle alimentée pendant toute l’année 2014, ses bouquets, son premier vrai enfant, Le Jour des Innocents qui est sans doute l’une des réalisations du Désordre dont je suis le plus fier et qui m’aura permis de passer le cap des 50 ans dans une manière de joie solaire, je sais on ne dirait pas sur la photographie.

    Février est la suite quasi naturelle, inscrite dans une logique de flux notamment d’images qu’il était presque inhumain, sans exagération de ma part, de tenir pour un seul homme, d’ailleurs le matériel a cédé un peu avant moi, l’appareil-photo, épuisé, au bout de presque 300.000 vues, chez le vétérinaire, ils n’en revenaient pas, ils n’avaient jamais vu un D300 usé jusqu’à la corde de cette manière, puis l’enregistreur, personne ne m’ayant prévenu qu’un tel appareil — pourtant vendu avec sa coque protectrice, j’aurais du me douter —, n’avait pas la robustesse d’un appareil-photo et ne devait en aucun cas être trimballé dans ma besace avec aussi peu de soin. Puis ce fut l’appareil-photo qui faisait office de caméra, lui n’a pas résisté à mon empressement lors de la réalisation d’une séquence de time lapse truquée, l’eau dont j’avais les mains pleines dans cette réalisation a pénétré le boitier, c’est désormais un ex-appareil-photo. Guy, mon ordinateur s’appelle Guy, a lui aussi manqué de lâcher, trop souvent soumis à des traitements en masse d’images et à des calculs de séquence vidéo qui n’étaient plus de son âge, il a manqué d’y passer, désormais il est à la retraite comme les vieux chevaux, je ne monte plus dessus mais on se promène encore ensemble.

    Bien sûr j’ai fini par racheter un appareil-photo tant il m’apparaissait inconcevable de n’en pas disposer d’un, ne serait-ce que pour photographier l’enfance autour de moi, leur laisser ce témoignage, mais il est étonnant de constater comment la frénésie dans laquelle j’avais été conduit avec la tenue du journal de Février a laissé le pas à un recul sans doute sain. Le seul petit flux que j’ai laissé ouvert est finalement celui de l’arbre du Bois de Vincennes, et sans doute que je continuerai avec l’entrée du hameau dans les Cévennes. Mais cette espèce de sauvegarde du réel, du quotidien, c’est comme si j’avais, enfin, compris, d’une part, sa vacuité, son impossibilité et même l’épuisement de soi qui se tramait derrière. Quand je pense qu’il m’arrive désormais de faire des photographies avec mon téléphone de poche !

    Ces deux dernières années, j’ai surtout passé beaucoup de temps à écrire. J’ai fini par reprendre Raffut qui était en jachère, sa première partie presque entièrement écrite, que j’ai achevée en un rien de temps et, dans la foulée, j’ai écrit la seconde partie. Quasiment au moment même où je mettais un point final à Raffut , sont survenus les attentats du 13 novembre 2015 dont j’ai réchappé miraculeusement en n’allant finalement pas dîner au Petit Cambodge . Le vertige que cela m’a donné, je l’ai soigné en écrivant Arthrose en un peu moins d’un mois et demi, j’y étais attelé tous les soirs jusque tard, j’avais commencé par en écrire le début de chaque partie ou presque et je faisais mon possible pour rédiger ces parties ouvertes en faisant appel à des souvenirs et des sensations encore tout frais. Ces deux rédactions coup sur coup ont lancé une dynamique, ont creusé un sillon, et je me suis lancé dans la réécriture d’ Une Fuite en Egypte avec l’aide précieuse de Sarah, puis de J. , puis de Je ne me souviens plus , puis, la première page de Punaises ! , les cinquante premières pages des Salauds , et au printemps j’entamais Elever des chèvres en Ardèche , sur lequel je continue de travailler encore un peu mais l’essentiel est là. Et il faudrait sans doute que je reprenne Portsmouth , et j’ai seulement brouilloné le début de La Passagère — je me lance courageusement dans la science fiction féministe.

    En septembre j’ai eu l’idée de Qui ça ?

    Arthrose j’avais décidé dès le début que ce serait un récit hypertexte ce que j’ai finalement réussi à faire, cela aura été du travail, mais un travail dont je me suis toujours demandé si quiconque en avait pensé quoi que ce soit, en tout on ne m’en a rien dit.

    Avec Qui ça ? , j’ai eu l’idée de faire vivre le texte en cours d’écriture sur seenthis , en même temps que j’expérimentais avec une nouvelle forme Ursula . Mais même pour les parties de Qui ça ? qui demandaient un peu de travail avec les images ou encore les mini sites qui le composaient de l’intérieur, j’ai senti que mon enthousiasme était moindre. J’ai eu un regain d’intérêt quand j’ai eu l’idée de faire en sorte que les différentes Ursula soient imbriquées les unes dans les autres, mais une fois réalisé (et cela n’a pas pris plus d’une heure), le plaisir était comme envolé, une fois que mon idée a été entièrement testée.

    Finalement elle est là la question, c’est celle du plaisir, de mon bon plaisir (et de mon propre étonnement parfois) quand je travaille dans le garage. Et le plaisir ces derniers temps était ailleurs, plus du tout dans le brassage de milliers de fichiers, surtout des images, au point qu’à force d’être laborieux et de peu jouir finalement, j’ai fini par me tarir. Pour le moment, je ne vois plus comment je pourrais encore secouer le Désordre , lui faire faire je ne sais quelle mue, je ne sais quelle danse, il faut dire aussi qu’à l’image du taulier, l’objet est un danseur lourd, 300.000 fichiers tout de même. Et puis je vois bien aussi que mes manières de faire ont vécu, qu’elles ne sont plus du tout comprises de la plupart des visiteurs qui doivent rapidement se décourager à l’idée de devoir manier ascenseurs, chercher les parties cliquables des images, naviguer, bref tout un ensemble de gestes qui ne sont plus attendus, qui sont entièrement passés de mode et avec eux ce qui relevait du récit interactif, peut-être pas, disons du récit hypertexte.

    Il faut que je me régénère, que je trouve de nouvelles idées. Si possibles compatibles avec les nouveaux usages. Ce n’est pas gagné.

    Paradoxalement avec la sortie d’ Une Fuite en Egypte en livre papier, le format du livre m’est apparu comme un havre, une retraite bien méritée en somme. En écrivant des livres, je n’ai plus besoin d’un ou deux ordinateurs connectés à un scanner, à une imprimante, avec une carte-son digne de ce nom, un lecteur de CD et DVD pour extraire des morceaux de musique et des bouts de films, des disques durs et des disques durs dans lesquels déverser des milliers d’images, des centaines de milliers d’images en fait, des logiciels pour traiter en nombre ces images, les animer éventuellement, les monter et, in fine, un programme également pour écrire le récit hypertexte qui reprend en compte toute cette matière première et la mettre en ligne. Une montagne, en comparaison d’un petit ordinateur de genou, simplement muni d’un sommaire traitement de texte et des fichiers, un par texte en cours, que je m’envoie par mail de telle sorte de pouvoir les travailler d’un peu partout, y compris depuis le bureau.

    Or je me demande si après dix-sept années de Désordre , je n’aspire pas un peu à la simplicité. Me recentrer, me retrancher. Par exemple, j’ai l’intuition que cela pourrait me faire du bien à la tête de ne pas avoir à mémoriser, et faute de pouvoir le faire, de devoir chercher mes petits dans cet amas de fichiers, de répertoires, de sous-répertoires et d’arborescences foisonnantes. En revanche je sais aussi très bien que si je retire mes doigts de la prise, il n’est pas garanti que je sois de nouveau en capacité dans quelques mois, dans quelques années de m’y remettre, le Désordre c’est un vaisseau pas facile à manier dans une rade, faut toujours avoir en tête ses dimensions et ses proportions et se rappeler des endroits où sont stockés objets et commandes — et je ne peux plus compter sur l’hypermnésie qui était la mienne il y a encore une dizaine d’années, ma mémoire du court terme a été sérieusement érodée par des années d’apnées nocturnes.

    Les prochains temps, je vais continuer le chantier en cours qui consiste surtout à reprendre toutes les pages qui contiennent un fichier sonore ou vidéo (et elles sont assez nombreuses, bordel de merde) pour les mettre dans un standard universel et qui le restera j’espère plus de six mois. Il y a aussi quelques chantiers de peinture ici ou là que j’ai pu laisser en l’état pendant ces dernières années en me promettant d’y revenir, j’ai gardé une liste de trucs à revoir. Je pourrais, j’imagine, de temps à autre penser à une petite série d’images, mais il ne sera plus question de remuer le site de fond en comble comme j’ai pu le faire les trois dernières années. De même je me garde le canal ouvert sur le Bloc-notes du Désordre et son fil RSS pour ce qui est de divers signalements — comme par exemple de vous dire que je vais présenter, lire et signer Une Fuite en Egypte , le mardi 16 mai à 19H30 à la librarie Mille Pages de Vincennes (174 Rue de Fontenay, 94300 Vincennes, métro Château de Vincennes) — mais qui pourrait dire que ce n’est pas la fin ? Ce que les joueurs de rugby appellent la petite mort , le jour où vous décidez que ce n’est plus de votre âge de mettre la tête où d’autres n’oseraient pas mettre les mains, le jour où l’on raccroche les crampons, le dernier match, le dernier placage, le dernier soutien, un sourire, des poignées de main et c’est fini.

    Il y aura au moins une chose que je regrette de n’avoir pas faite et que je ferai peut-être un jour, c’est le projet que j’avais intitulé Tuesday’s gone . Mais cela suppose un équipement dont je n’ai pas les moyens pour le moment — un scanner de négatifs haute définition —, et de partir à la recherche de mes archives américaines. Ne serait-ce que pour faire la sauvegarde de cette étrange partie de moi, la partie américaine, ses images, ses souvenirs, ses notes. Plus tard. Si j’en ai la force, l’envie. Je devrais sans doute déjà réserver le nom de domaine www.tuesdaysgone.net !

    Et au fait, à toutes celles et ceux auxquels j’ai demandé de s’arranger pour ne pas me faire partager les contours de la mascarade électorale en cours et de faire attention de me maintenir dans l’ignorance même du résultat final, vous êtes relevés de votre devoir, vous pouvez bien me le dire, ou pas, désormais je m’en fous royalement. Mais d’une force.

    Adieu A. C’était merveilleux de vous aimer et d’être aimé par vous, au point d’être à ce point douloureux ce matin, après cette nuit.

    Back to the trees.

    Merci à mes amis, tellement chers, qui m’ont soutenu pendant cette semaine de précipice, J., Sarah, Martin et Isa, Jacky, Valérie, Clémence, Daniel, Laurence, ça va, je vais remonter la pente, je remonte toutes les pentes jusqu’à la dernière chute.

    FIN (possible) du Désordre .

    Le Désordre reste en ligne, je rétablis même sa page d’accueil avec le pêle-mêle qui est finalement sa page index naturelle.

    #qui_ca

    • Merci @intempestive je pensais que tu me gronderais, mais je vois que les raisons qui m’amènent à ça sont compréhensibles, ce qui est une forme de soulagement. Oui, je ne suis pas mourru, je vais réfléchir à autre chose, continuer d’écrire, je reprendrai la photographie quand j’en aurais envie. Le moment est bien choisi pour une pause, pour la petite mort des rugbymen .

    • Je note, en revanche, c’est encourageant, que, désormais, je constate, de plus en plus souvent, que déchiffrant rapidement les gros titres de la presse à scandales, chez le kiosquier, je ne connaisse presque plus jamais les noms propres des personnes dont il est question dans l’équivalent français de la presse populaire anglaise, que les noms et les visages de toutes ces personnes, apparemment célèbres, célèbres pour quels talents, je préfère ne pas le savoir ni l’apprendre, ne me disent rien, n’évoquent rien. Pourtant je vais souvent au cinéma, je pourrais de la sorte reconnaître ici ou là le visage de tel acteur ou telle actrice, mais en fait non, quant aux vedettes de la variété et de la télévision, là je suis absolument sans repère. Pas de manchots non plus dans mon panthéon. Et même, même, je dois avoir déjà commencé il y a quelques années ce travail de désintérêt de la chose publique, parce que nombres de personnalités politiques commencent à me devenir inconnues, ou interchangeables, ce qui est un excellent signe, ainsi je crois que je ne serai pas nécessairement capable, même si ma vie en dépendait, de différencier des types de droite comme Laurent Wauquiez, Luc Chatel, François Baroin, David Martinon, Benoît Apparu, Éric Ciotti, leurs visages sont interchangeables quand à me souvenir des faits saillants de leur parcours, je me félicite de n’en rien savoir, ils sont à mes yeux insignifiants, est-ce à dire qu’ils n’ont sur moi aucun pouvoir ? Or c’est vraiment dans cette direction émancipatrice que je voudrais aller, celle qui retire, à tous ces très sales types de droite, la dernière once de pouvoir dont ils pensent sans doute se prévaloir, et, en vrai situationniste, les faire rejoindre les rangs des personnalités du spectacle, les pousseurs de citrouille, les brailleuses, les musiciens sans oreille, les starlettes et les belles gueules du cinéma, toutes ces légions d’insignifiants. Les ranger enfin à leur place, l’insignifiance. L’insignifiance de celles et ceux qui passent à la télévision. Qu’on ne regarde plus.

      Ignorer.

      Ignorer jusqu’au nom du prochain, ou de la prochaine, président, ou présidente, de cette république, agonisante.

      Voilà. Fin de parcours pour cette raie-publique qui se vautre dans la fange de l’industrie du spectacle. Ite missa est ... ainsi seront renvoyés à leurs vacuités les derniers fidèles du culte électoral.

  • J – 64 : Nous n’avons pas vu le retable du jugement dernier de Rogier Van der Weyden — puisque nous avons trouvé portes closes à Beaune —, mais nous avons fait le tour d’un petit lac dont les romains se servaient pour alimenter en eau la ville d’Autun.

    Nous n’avons pas mangé de cette côte de bœuf — puisque je ne mange plus de viande ? dont j’aimais régaler mes amis quand je viens à Autun, mais Martin a cuit excellemment nos maquereaux sur la braise.

    Nous n’avons pas fait de photographies des dernières réalisations d’Isa, mais j’ai pris presque 600 photographies pendant le week-end à Autun — alors que je ne prends presque plus de photographie.

    Nous n’avons pas regardé Toni Erdman sur l’écran géant du hangar, là-même où j’avais projeté les images d’ Apnées et celles du spectacle avec Brâhma , mais nous avons discuté de Carl André.

    Nous n’avons pas mangé de la sole, mais du cabillaud.

    Nous ne nous sommes pas quittés comme souvent peu de temps après le déjeuner du dimanche midi parce que chaque fois je dois prendre toutes les précautions nécessaires pour être rentré et accueillir les enfants, et de ce fait nous avons pu aller nous promener en forêt, une merveilleuse forêt aux immenses mélèzes et aux jeunes chênes.

    Nous n’avons pas bu de bourgogne blanc mais du Gamay et cela allait très bien avec les bulots et le cabillaud.

    Je n’ai pas pu écouter le disque offert par Sophie Agnel en trio, parce qu’il était en quatuor avec un drone, le moteur vrombissant de mon automobile, du coup j’ai écouté des variétés internationales, Frank Zappa.

    Je n’ai pas vu les éoliennes nuitamment sur le chemin du retour, mais j’ai deviné leurs grandes ombres à bâbord, dans la nuit.

    #qui_ca

  • J–137 : La plupart du temps quand vous entrez dans une exposition monographique à Beaubourg, vous pouvez sauter les deux ou trois premières salles qui sont habituellement consacrées aux œuvres de jeunesse de l’artiste dont c’est la rétrospective - vous ferez une exception pour Jeff Koons, pour qui c’est exactement l’inverse, la première salle de son exposition qui contenait plusieurs versions de son œuvre d’une inclusion d’un ballon de basket-ball étant la seule œuvre visible de toute l’exposition de cet artiste absolument merdique et sans intérêt. Il y a une autre exception, Cy Twombly, exposition qui dès la première salle, celle d’œuvres de jeunesse mais qui ne manquant pas de maturité, n’a pas fini de vous en remontrer. En fait, même quand il est encore jeune, étudiant au Black Mountain College , avec de chouettes camarades de promotion, Willem De Kooning, Robert Motherwell, John Cage et Merce Cunningham - qu’on y pense, y a-t-il déjà eu dans l’histoire de l’art une telle réunion de génies en herbe dans les mêmes murs, même l’atelier de Frédéric Bazille ne peut pas rivaliser, Charbier au piano, près du poelle, n’étant pas, loin s’en faut, le génie, immense, qu’était John Cage -, Cy Twombly semble déjà touché par une manière de grâce et surtout de liberté étonnante, de celle qui est normalement acquise au terme d’un parcours d’une longue émancipation, des normes en vigueur, de son enseignement, de soi-même, bref.

    Une des grandes qualités de l’exposition de Beaubourg est de donner à voir des séries quasi complètes pour beaucoup d’entre elles, certes rangées dans une manière d’ordre chronologique qui laisse entrevoir une manière d’évolution, ce qui n’est pas le plus intéressant dans l’œuvre de Twombly, mais surtout ces séries permettent de voir le peintre au travail - aux dépens sans doute de l’œuvres sculptée et de l’œuvre photographique qui sont à la fois mal et sous représentées, on peut se demander cependant s’il est possible de faire coexister ces trois pans du travail de Cy Twombly dans une même exposition. Ainsi quel luxe inouï que de pouvoir admirer les neuf toiles de la série des Neuf discours à propos de Commode . De voir comment ces neuf toiles ont sans doute été peintes de front, certains passages des unes répondant aux questions restées en suspens dans les autres et inversement, de retrouver dans une lente observation toutes les trajectoires certaines contradictoires dans le cheminement du peintre au travers de cette série, ses renoncement, ses hésitations, ses remords et ses fulgurances, avec toujours, cette habileté surnaturelle à tendre pendant longtemps vers une forme de déséquilibre de la composition avant de se rattraper aux dernières branches de l’arbre par quelques gestes nerveux, une simple tâche du peinture, un signe de pas grand-chose, un geste, un grattage, un coup de chiffon même.

    Or il est particulièrement intéressant de voir Cy Twombly au travail, comme cela l’est en général des peintres expressionnistes abstraits américains, Jackson Pollock en tête avec son geste ultime des drippings, mais aussi l’énergie fauve d’un Franz Kline, celle électrique, à peine plus contrôlée, d’un Willem De Kooning, et au contraire la gestuelle tout en retenue de Cy Twombly . Là où, comme l’a amplement démontré Clement Greenberg, les expressionnistes abstraits ont fait de leurs grands gestes empressés, enfiévrés même, le lieu même de leur peinture, et même d’un certain discours à propos de l’acte de peindre, la peinture de Cy Twombly, qui ne manque pas de nervosité gestuelle non plus, est plus celle des doutes et de la retenue, en dépit de cette science admirable de toujours retrouver un point d’équilibre dans la composition, science qui permet, sans doute en amont, toutes les audaces.

    La manière même de Cy Twombly d’intervenir, la plupart du temps, par touches successives, à l’intérieur de grandes toiles, dit assez bien les allers-retours qui ont sans doute été nécessaires, entre la toile elle-même et le siège depuis lequel le peintre devait prendre du recul, et dans ces allers-retours la contemplation, l’état intérieur supérieur, concentration c’est mal dire, et qui peut si magiquement se transmettre aux spectateurs de telles toiles, comme une paix, celle de l’atelier même, celle de la peinture même, quand cette dernière est enfin maîtrisée.

    De même sans cet atelier, dans cette peinture, souffle un vent puissant de liberté, celle de s’autoriser de minimes interventions sur de grands formats, celle de s’autoriser des écritures a priori sans grâce, et toujours cette capacité à rééquilibrer cette audace par quelque sorcellerie de peinture, liberté de coller à la va-vite de grandes feuilles de papier entre elles avec du ruban adhésif, de placarder quelques reproductions ici d’un livre de botanique, là d’une bacchanale (de Poussin ?) de même tout un vocabulaire librement choisi, là une feuille de calque, là du papier millimétré, et tout cela assemblé par des gestes seulement négligents en apparence, la tâche, le frottement d’un chiffon ou d’un outil contondant font intrinsèquement partie du répertoire de Twombly, qui, finalement, avec joie, semble partageur de son plaisir de peindre avec son spectateur et c’est possiblement là son immense gloire de peintre, celle du partage de ce plaisir de peindre.

    Je voudrais que l’on m’enferme pendant les cinq mois de cette exposition - je suis prêt à y mettre le prix, vaut mieux avec le peigne-culs de droite de Beaubourg qui vous font payer l’entrée à toutes les expositions quand bien une seule vous intéresse, en l’occurrence celle de Twombly , et ce n’est pas le nouvel accrochage des collections contemporains qui risque de rivaliser, je vous le dis, c’est quand même étonnant de mette pareillement en avant cette nullité de Jeff Koons et d’avoir apparemment rangé dans les réserves, Richard Serra et Eva Hesse - que je puisse, des heures entières, me tenir dans une sorte de transe observatrice benoîte de cette peinture, j’en perdrais jusqu’au manger, je crois. Après cinq moins d’un tel séjour, j’aurais entièrement brûlé de l’intérieur, je serais heureux, tellement heureux.

    Exercice #54 de Henry Carroll : Photographiez un animal comme s’il était un humain

    #qui_ca

  • Appel (désespéré) à l’aide en direction des quelques (remarquables) codeurs de seenthis :

    Pour les besoins d’un nouveau séquenceur dans mon petit site internet, photographies s’enchaînant les unes à la suite des autres avec une musique tout exprès, je ne parviens pas du tout à fait en sorte que le player flash parte tout seul. Autostart=true, autostart=yes, play=yes, play=true, rien n’y fait.

    Le chantier en cours, c’est ici :
    http://www.desordre.net/photographie/numerique/vanites/index.htm

    Ce que je voudrais éviter c’est que le visiteur soit obligé de déclencher la musique et ensuite de démarrer le séquenceur, histoire que les deux soient bien raccords.

    Le player que j’utilise se trouve là
    http://www.desordre.net/accessoires/applications/lecteur.swf

    L’appel du player se fait comme ceci
    <object class="playerpreview" type="application/x-shockwave-flash" data="../../../accessoires/applications/lecteur.swf" height="20" width="400">
    <param name="movie" value="../../../accessoires/applications/lecteur.swf" />
    <param name="bgcolor" value="#17171b" />
    <param name="FlashVars" value="mp3=sequenceur/musique/vanites_lldm_cdt.mp3" />
    <p>Musique de démonstration.</p>
    </object>

    Et je ne sais pas pourquoi j’ai tenté un autre player mais je ne parviens pas du tout à le faire marcher non plus.

    A gagner, un tirage de l’une des photos de la série (au choix).

    Et pour éviter d’embêter tout le monde (déjà là c’est un peu limite, même complétement limite, si je reçois un blâme, on ne pourra pas dire que je ne l’ai pas cherché), il est possible de m’écrire ici
    http://www.desordre.net/mail_pdj.htm

    J’ai honte, sauvez-moi

    Phil