Un rare mammifère ovipare « redécouvert » au bout de 60 ans dans les monts Cyclope - Sciences et Avenir
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Une expédition scientifique menée en Indonésie, dans les monts Cyclope, a permis d’observer un animal disparu des radars depuis 60 ans : l’échidné à bec courbe d’Attenborough (Zaglossus attenboroughi). Il a pu être photographié et filmé (voir vidéo ci-dessous) pour la toute première fois.
« Le dernier jour, avec les dernières images sur la dernière carte mémoire »
Cette espèce monotrème (il s’agit de l’une des cinq espèces de mammifère qui pond des œufs) n’avait été documentée par la communauté scientifique qu’en 1961, par un certain Pieter van Royen, un botaniste néerlandais. Une équipe composée notamment de scientifiques de l’Université d’Oxford, de l’Université indonésienne Cenderawasih et de l’ONG YAPPENDA n’a pas ménagé ses efforts pour la retrouver. Ses membres ont grimpé plusieurs fois des montagnes afin de déployer 80 pièges photographiques sur le terrain.
Et même ainsi, l’échidné a bien failli échapper aux spécialistes. Durant les quatre semaines que l’équipe est restée dans la forêt tropicale indonésienne des monts Cyclope, les pièges photographiques n’ont pas relevé sa présence. « Le dernier jour, avec les dernières images sur la dernière carte mémoire, l’équipe a obtenu ces clichés du mammifère insaisissable – les toutes premières photographies de l’échidné d’Attenborough », raconte dans un communiqué publié le 9 novembre 2023 l’Université d’Oxford. Cette identification a, plus tard, fait l’objet d’une confirmation en bonne et due forme.
Une espèce à surveiller
Cette espèce, baptisée d’après l’écrivain et naturaliste britannique David Attenborough, est nocturne et vit dans des terriers. Selon la description du Dr James Kemption, le biologiste qui a conduit l’expédition, « l’échidné à bec courbe d’Attenborough a les épines d’un hérisson, le museau d’un fourmilier et les pattes d’une taupe ». Il ne semble pas vivre ailleurs que sur les monts Cyclope, une région particulièrement inhospitalière (lire encadré ci-dessous).
Entre 1961 et cette « redécouverte », des signes de sa présence avait été rapportés par la communauté Yongsu Sapari, vivant sur place, et lors de la pré-expédition. Des trous réalisés par le « nez » de l’animal, afin de trouver des invertébrés dans le sol, avaient notamment été relevés. Si la documentation d’un spécimen en Indonésie est une bonne nouvelle, l’espèce reste néanmoins classée dans la catégorie « En danger critique » de la Liste rouge de l’Union internationale de la nature. Alors qu’elle est maintenant repérée, les chercheurs souhaitent veiller à sa protection.
De multiples découvertes
L’expédition n’a pas été une partie de plaisir. L’équipe a affronté un tremblement de terre, l’un de ses membres s’est cassé le bras, un autre a attrapé le paludisme, et un troisième a eu une sangsue attachée à son œil durant un jour et demi. Mais ces sacrifices ont payé : les chercheurs ont découvert plusieurs dizaines d’espèces d’insectes totalement inconnues et un nouveau genre de crevettes. Ils ont aussi repéré de nouvelles espèces d’arthropodes sous terre dans un système de grottes inexplorées. Pour couronner le tout, l’expédition a aussi retrouvé une espèce d’oiseau, Ptiloprora mayri, dont les chercheurs avaient perdu la trace depuis 2008.