Quelques centaines de personnes se sont rassemblées, vendredi 27 janvier, à la nuit tombante, sur le parvis de la gare de Venise, devant le Grand Canal, pour rendre hommage à un inconnu. Parmi les manifestants, une trentaine de migrants africains venus des structures d’accueil du quartier de Mestre, à qui de nombreuses personnes, souvent les larmes aux yeux, prodiguent de timides gestes d’affection. Une couronne de fleurs déposée sur l’eau a flotté quelques minutes avant de disparaître.
Pateh Sabally est mort ici même cinq jours plus tôt. Dimanche 21 janvier, ce réfugié gambien de 22 ans, arrivé en ville par le train, s’est assis sur les marches de la gare quelques minutes, puis il est venu se glisser dans l’eau glaciale, laissant sur le bord un sac plastique contenant ses maigres effets personnels. Il a succombé en quelques minutes, devant des centaines de témoins.
Une vidéo de la scène, diffusée sur le site du journal local Il Gazzettino, a fait le tour du monde en quelques jours. Sur ces images insoutenables, on entend distinctement, en italien, des « idiot ! », « rentre chez toi ! » ou même « laissez-le mourir ! ». Sur un autre enregistrement, diffusé par la suite, on distingue des bouées jetées d’un vaporetto. Le jeune homme ne s’en saisit pas. En avait-il encore la force ?