De facto, la politique de métropolisation peut se penser comme une politique de recentralisation multipolaire. La concentration des services publics autour des centres urbains de forte densité de population produit des situations redondantes d’abandon des territoires périphériques et ruraux. Ce déséquilibre se fait par creusement des inégalités entre les urbains surconnectés, surdesservis et le reste de la population qui est repoussée de plus en plus loin des centres de vie et de décision par la force centrifuge des couts immobiliers.
Toutes les politiques des transports, de la santé, de l’éducation ou même des salaires concentrent les moyens sur une part de plus en plus réduite de la population : les jeunes urbains des catégories supérieures. Les autoroutes, les gares, les aéroports dessinent le schéma d’un pays à deux vitesses : celui des habitants privilégiés des centres urbains qui bénéficient de l’interconnexion des transports, des services publics, des centres de formations et d’éducation, de la concentration des équipes de santé, de la rapidité de mouvement, de la multiplicité des choix ; puis celui des périphéries, des campagnes assujetties aux seuls besoins d’emprise territoriale des métropoles, des transports inexistants, des écoles qui ferment et s’éloignent, de la difficulté permanente de se déplacer, d’accéder à des professionnels de santé, à des emplois de qualité…
Concrètement, il n’y a plus aucune égalité de traitement et de chances entre les citoyens de ce pays et les ségrégations spatiales se renforcent à un niveau encore inconnu en France.
Les besoins d’une minorité de la population (pourtant celle qui cumule les meilleurs capitaux financiers, culturels, professionnels, etc.) s’imposent assez brutalement à tout le reste des citoyens. Les zones périphériques des métropoles sont des espaces de stockage d’une main-d’œuvre abondante et subalterne asservie aux besoins des populations du centre pendant que les populations rurales sont des colonisées de l’intérieur, des réservoirs d’espaces de villégiature ou de productions alimentaires à couts contrôlés, totalement inféodés à l’emprise des métropoles régionales. Les moyens de transport performants les traversent, les hachent ou les contournent, les dessertes se font uniquement en fonction du calendrier et des besoins des populations des métropoles. L’éducation et la santé sont à l’avenant.
Tout se passe comme si les citoyens des zones périphériques étaient des citoyens de seconde zone, avec moins de besoins, de perspectives et d’autonomie.