Humiliations sexuelles : la banalité méconnue des contrôles d’identité - Page 1

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  • Humiliations sexuelles : la banalité méconnue des contrôles d’identité | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/160217/humiliations-sexuelles-la-banalite-meconnue-des-controles-d-identite?ongle

    Après l’agression dont a été victime Théo à Aulnay-sous-Bois, les langues se délient. Si les viols sont exceptionnels, ce n’est pas le cas des palpations humiliantes sur des zones érogènes, accompagnées d’insultes homophobes, lors des contrôles d’identité effectués sur les Noirs et les Arabes. Éducateurs, avocats, victimes et chercheurs témoignent et analysent ces humiliations.

    Recueillir cette parole est en effet complexe, au-delà de considérations d’ordre général. Les jeunes préfèrent souvent raconter l’expérience en se cachant derrière une tierce personne même s’ils parlent d’eux-mêmes (« je connais quelqu’un qui… »). Issa Coulibaly, président de l’association Pazapas dans le quartier de Belleville, explique : « Le contrôle peut donner lieu à un récit entre amis (“l’enculé m’a palpé les couilles”), mais on n’en parle pas à sa copine, pas à ses parents, pas aux travailleurs sociaux. » Et encore moins à un journaliste.

    Dans ces conditions, pourquoi faire état d’un « simple » attouchement, qui ne laisse aucune trace, et qui risque d’attirer plus de moqueries que de compassion ? Que vaudra la parole d’une victime face à celle des policiers ? « Les jeunes savent bien que s’ils protestent lors d’un contrôle, on va leur coller un outrage, qu’ils passeront du statut de victime à coupable. » Fait révélateur, explique Issa, « la seule proposition de loi qui touche de près ou de loin aux contrôles actuellement [celle qui assouplit les règles de légitime défense pour les policiers – ndlr] vise à durcir les peines pour outrages aux forces de l’ordre. Alors qu’aucune politique publique ne s’attaque à la question des contrôles abusifs »

    Pour Omer, les pratiques ont changé. « Quand j’étais jeune, on nous demandait de baisser notre froc et de nous pencher pour voir notre trou de balle version panoramique. Mais sans attouchements. C’était déjà humiliant. Depuis les années Sarko, les jeunes subissent des palpations pour voir s’ils n’ont pas quelque chose de planqué, et hop, je te glisse le doigt dans la raie des fesses. C’est régulier, et ça devient systématique. Ça fait partie du cérémonial et c’est accompagné de paroles du genre “T’es une tafiole ?”, “Tu fais le malin, petite fiotte ?”. » Ou encore, comme le rapporte Slim Ben Achour, des propos visant à humilier au sein d’un groupe : « Alors Mohamed, qu’est-ce qui t’arrive quand je te touche ? Ce serait pas une érection ? » Omer poursuit : « Sinon, ils ouvrent le calbar et ils matent. C’est sorti à Paris XII, ça aurait pu sortir n’importe où. Mais qui a envie de dire ça ? D’être le sac de sable ? Il faut garder une position, faire le mec. Et si t’as pas envie de passer quatre heures au poste, tu fermes ta gueule. En tant qu’éducateurs, on est obligés d’apprendre à des jeunes qu’on traite comme des merdes, qui sont insultés, traités de “bamboulas” ou de “tafioles”, qu’ils doivent fermer leur gueule, être dociles, pour ne pas être embarqués au poste ou humiliés devant tout le monde. Mais on fabrique des enragés, des bombes ambulantes qui se retrouvent en Syrie. Et un jour, on va avoir un gamin qui va planter un flic à cause de ça. »

    Emmanuel Blanchard, historien au Cesdip, considère que les palpations font partie de la « cérémonie de dégradation », une expression utilisée par le sociologue américain Harold Garfinkel pour montrer comment, devant la justice, les gens sont remis à leur place. « Le contrôle d’identité ne sert pas à identifier des individus parfaitement connus, ni à mettre au jour des délits et des crimes : l’immense majorité des contrôles ne connaissent pas de suite. Ils servent à dévaloriser ceux que les policiers voient comme des Français racisés, moins légitimes à être Français que les autres, et à leur rappeler qu’ils ne sont que des Français de papier, des citoyens diminués, ce qui renvoie à l’histoire coloniale. »

    Pour la chercheuse, face à cette culture, « la solution est à chercher du côté d’une population trop consentante : à chaque contrôle d’identité, un citoyen devrait s’arrêter, prendre le temps de regarder les policiers. Le contrôle social doit venir de l’extérieur ».

    #police #racisme

  • #Humiliations sexuelles : la banalité méconnue des #contrôles_d’identité

    Après l’agression dont a été victime Théo à Aulnay-sous-Bois, les langues se délient. Si les viols sont exceptionnels, ce n’est pas le cas des #palpations humiliantes sur des zones érogènes, accompagnées d’#insultes homophobes, lors des contrôles d’identité effectués sur les #Noirs et les #Arabes. Éducateurs, avocats, victimes et chercheurs témoignent et analysent ces humiliations.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/160217/humiliations-sexuelles-la-banalite-meconnue-des-controles-d-identite
    #homophobie