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  • Le gouvernement continue de supprimer des lits d’hospitalisation : la carte des hôpitaux concernés (Bastamag.net)
    https://www.crashdebug.fr/le-gouvernement-continue-de-supprimer-des-lits-d-hospitalisation-la-carte

    L’article de Bastamag date du 29/10/2020, mais je pense que c’est important à savoir.

    Amitiés,

    f.

    Gouvernement et autorités sanitaires continuent de fermer des centaines de lits dans les hôpitaux, malgré la pandémie. Voici la carte des suppressions de lits à venir que nous publions en exclusivité.

    On aurait pu penser qu’avec la première vague du Covid qui a déferlé au printemps, les autorités sanitaires, les Agences régionales de santé (ARS), les directions des hôpitaux auraient remis en question la politique de suppression de lits d’hôpitaux qui prime depuis des années. Il n’en est rien. Au moins treize hôpitaux vont continuer de perdre des places d’hospitalisation.

    En septembre 2020, la direction du CHU de Besançon a annoncé la suppression d’un service entier de soins de suite et de réadaptation, (...)

    https://www.uspsy.fr/Supprimer-des-lits-au-CH-du-Rouvray-Et-puis-quoi-encore.html
    https://www.mediapart.fr/journal/france/181020/au-chu-de-nantes-plus-de-100-lits-ont-ete-fermes-en-pleine-crise-sanitaire
    https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/le-chu-de-besancon-va-supprimer-28-lits-1600928512
    https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/strasbourg-une-vingtaine-de-lits-de-reanimation-menaces-de-fermeture-selo
    https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/es2019.pdf
    https://www.politis.fr/articles/2020/06/le-chu-de-reims-defend-ses-lits-42034
    https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/au-chru-de-tours-les-restructurations-se-poursuivent-denoncent-les-syndic
    https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/faut-il-supprimer-200-lits-au-chu-de-caen-des-parlementaires-posent-la-qu
    https://www.lepopulaire.fr/limoges-87000/actualites/tensions-autour-du-projet-chu-2020-a-limoges_12779170
    https://www.apmjob.com/news/338
    https://www.lequotidiendumedecin.fr/hopital/lap-hm-confirme-la-suppression-de-230-lits-et-mise-sur-lambulat
    https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/haute-garonne/toulouse/plein-covid-chambre-comptes-occitanie-recommande-suppre
    https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/essonne-150-manifestants-contre-la-fermeture-de-trois-hopitaux-1518285763
    https://www.leparisien.fr/seine-saint-denis-93/a-saint-ouen-l-hopital-du-futur-doit-pousser-en-pleine-ville-13-01-2019-7
    https://www.lanouvellerepublique.fr/poitiers/vienne-au-1er-janvier-2021-le-chu-et-l-hopital-nord-vienne-ne-f

  • Crise : priorité aux rentiers ? par Erwan Manac’h | Politis
    https://www.politis.fr/articles/2020/10/crise-priorite-aux-rentiers-42409

    Banquiers, assureurs, propriétaires fonciers devraient-ils assumer une part des pertes enregistrées à la suite des fermetures administratives ? L’ont-ils fait ? « Rien, peste Anthony Gratacos. En dehors de l’Urssaf et des impôts, il n’y a eu d’annulation nulle part. Nous avons obtenu des reports de mai à septembre, mais les sommes sont dues, chacun va devoir négocier individuellement ses créances. » Il a notamment dû continuer à assurer des véhicules à l’arrêt (avec une ristourne de moitié) et la société de leasing qui lui loue ses voitures régularise désormais les mensualités reportées, sans lui avoir demandé son avis.

  • Gabriel Matzneff et la presse de droite : voyage au bout la honte | Sébastien Fontenelle
    http://les-jours-heureux.nursit.com/spip.php?article7

    Depuis le début de ce qu’il est désormais convenu d’appeler l’affaire Matzneff – du nom de l’écrivain pédophile Gabriel Matzneff, contre qui le parquet de Paris a ouvert en janvier 2020 une enquête pour viols sur mineurs après la publication du livre dans lequel l’une de ses victimes, Vanessa Springora, a narré son calvaire -, la presse de droite semble être frappée d’amnésie. Source : Les Jours Heureux

    • Puis Le Figaro s’en retourne, pour quelques temps, à la défense des valeurs familiales qui lui fera par exemple se demander, trois ans plus tard, si le mariage pour tous ne serait pas « contraire à l’intérêt supérieur de l’humain ».

    • C’est paresse intellectuelle que d’expliquer l’indulgence dont a bénéficié le dandy pervers par « le triomphe du gauchisme culturel ».
      Politis janvier 2020 un article de Michel Soudais :
      https://www.politis.fr/articles/2020/01/la-droite-de-matzneff-41227

      Dans l’ombre de Matzneff, l’extrême droite pédophile
      https://www.streetpress.com/sujet/1604673651-ombre-matzneff-extreme-droite-pedophile-grece-alain-benoist-
      Streetpress - Christophe-Cécile Garnier 11/2020

      L’écrivain Gabriel Matzneff, soupçonné de viol sur mineur, a de nombreux amis et soutiens à l’extrême droite. Certains, comme Alain De Benoist, lui demeurent fidèles. StreetPress s’est aussi plongé dans les revues pédo-nationalistes. Enquête à la BNF.

      #pédocriminalité #extrême_droite

    • Oui, et l’amalgame avec Hocquenghem et d’autres est tout à fait déplacé, ou plutôt se place fort bien dans le « il faut en finir avec 68 ».

      Dans les débats actuels portant sur les défenses latentes ou manifestes de la pédophilie par le militant homosexuel Guy Hocquenghem dans les années 1970, les confusions, les mensonges, les dénis et les idées lumineuses qu’ils transportent, ont le mérite, même si Hocquenghem y perd des plumes, de rouvrir des plaies mal cicatrisées du mouvement de libération sexuelle. (...) On a eu droit comme pièces à conviction des phrases extraites de leur contexte (historique et politique) mais aussi de leur structure argumentative (ce qui me semble le plus grave). Or pour lire Hocquenghem sur l’enfance il faut comprendre deux choses : la première, qui le distingue d’écrivains évoquant leur désir pour les mineurs, est qu’il parle depuis sa position d’adolescent, en tant que sujet désirant.

      LIRE HOCQUENGHEM I - Ouverture de Co-ire ; II - L’Education antisexuelle ;
      https://trounoir.org/?Lire-Hocquenghem

    • vous chercher à faire quoi là ? Parce que défendre l’indéfendable c’est marrant cinq minutes mais au bout d’une moment, ça devient pénible. D’abord le soutien d’hocquenghem, de foucault, de la gauche et de l’extrême gauche à la cause pédophile n’est pas une question d’interprétation. ça s’est passé, pleinement. Si vous voulez on ressort le numéro de « recherche » où guy dit qu’un adulte de 40 ans qui n’a pas envie d’enculer un gosse de 14 ans n’est pas vraiment un homme « désirant »... mais je crois que vous ne voulez pas ("tout à fait déplacé" je rêve...)

      Deuxièmement les arguties argumentatives du style « il parle en tant qu’adolescent » (des années plus tard, quand même, si je ne m’abuse à moins qu’il n’ait écrit ses livres à 14 ans) ont été démontés, 200 000 mille fois. Oui on a pas toujours conscience d’être victime et ça peut même prendre des années, et peut-être même qu’il a a vraiment kiffé, mais c’est un fait incontestable que l’asymétrie du rapport pédophile est criminelle, dégueulasse, et très souvent extrêmement vulnérante.

      Alors oui, on s’est servi des écrits pédophile de cohn bendit pour liquider 68 à droite au début 2000 et on continue à le faire, c’est pas bien, mais il ne s’agit pas, pour défendre 68, d’encore défendre ce qui ne peut plus l’être.

      B i e n h e r e u s e m e n t.

      Par contre je ne vais même pas débattre hein, parce que c’est pas exactement le dimanche que j’ai envie de passer là, à me battre... donc dernier message pour moi.

    • Faire des pétitions et des tribunes sur les envies de meurtre...

      Par contre je ne vais même pas débattre hein, parce que c’est pas exactement le dimanche que j’ai envie de passer là, à me battre... donc dernier message pour moi.

      J’ai pas la force non plus. Je rappel juste au passage que les soutiens au viols d’enfants se sont trouvé à gauche comme à droite et que c’est aussi laid de voire l’opportunisme, le déni et l’instrumentalisation des violences sexuelles faites aux enfants et ados utilisé par les deux camps.
      #déni

  • « La lutte contre la surveillance est un anticapitalisme » par Romain Haillard | Politis
    http://www.politis.fr/articles/2020/04/la-lutte-contre-la-surveillance-est-un-anticapitalisme-41802

    Drôle d’époque. Des drones survolent nos têtes pour nous intimer de rester chez nous ; nos téléphones caftent nos déplacements aux opérateurs télécoms, qui eux-mêmes caftent aux décideurs ; des multitudes d’acteurs économiques trouvent des « solutions » technologiques aux problématiques liées au coronavirus ; les géants du numérique épaulent nos gouvernements pour mieux nous surveiller. À la manière de Michel Foucault, Christophe Masutti réalise une archéologie du capitalisme de surveillance dans Affaires privées, chez C&F Éditions. Selon le membre administrateur du réseau d’éducation populaire Framasoft, formuler une critique de la surveillance aujourd’hui ne peut plus se faire sans l’adosser à un anticapitalisme farouche.

    Est-il toujours pertinent de différencier surveillance d’État et capitalisme de surveillance ?

    Christophe Masutti : Les solutions développées par le capitalisme de surveillance deviennent des instruments de gouvernance. Ces marchands de la surveillance vont faire croire aux technocrates qu’il y aura un moyen d’automatiser des processus coûteux dans un moment où tout doit concourir à la réduction de la dépense, et donc à la réduction de l’État. Mais il y aura toujours besoin de -l’humain. Quand nous voyons l’état de l’hôpital aujourd’hui, l’utilité des machines se voit vite dépassée. Comme l’idée de faire un traçage des individus avec l’application StopCovid.

    C’est l’idée du solutionnisme technologique. Tout problème, économique ou politique, pourrait trouver une réponse technologique. Cette conception domine la Silicon Valley et a fait des émules – nos gouvernants n’y échappent pas. Cette idéologie qui ne se revendique pas comme telle affaiblit le pouvoir politique. Les décisions devraient s’enfermer dans des choix techniques dépolitisés. Macron et la startup nation se marient bien à cette dépolitisation. Mais quand nous dépolitisons, nous n’agissons plus par conviction – de droite comme de gauche. Ne reste plus que l’État seul, hors sol, plus que la technocratie.

    #Christophe_Masutti #Affaires_privées #Capitalisme_surveillance #C&F_éditions #Interview

  • « Bananas (and kings) », Julie Timmerman : Le rire anti-trust par Gilles Costaz | Politis
    https://www.politis.fr/articles/2020/09/bananas-and-kings-julie-timmerman-le-rire-anti-trust-42348

    Très bel article dans Politis sur le travail politique et théâtral de Julie Timmerman. J’ai vu la pièce qui réussit à parler d’une situation dramatique sans ennuyer. Jeu d’acteur + mise en scène inventive, une belle soirée assurée.

    Et pour continuer le plaisir, n’hésitez pas à vous plonger dans "Un démocrate" (https://cfeditions.com/bernays).

    Jeune metteuse en scène et créatrice de la compagnie Idiomécanic Théâtre, Julie Timmerman ne cache pas ses intentions. En exergue de son nouveau spectacle, Bananas (and kings), elle écrit : « Qu’en est-il de nos démocraties à l’heure où les multinationales ont un tel pouvoir ? Que nous reste-t-il pour lutter contre la confiscation de notre pouvoir de citoyens ? C’est le rôle du théâtre de traquer la matrice [de la mainmise des grands groupes états-uniens sur l’économie], de la disséquer et d’exposer ses entrailles, pour armer les peuples contre elle. » Elle fait donc une forme de théâtre politique, mais limite les déclarations d’intention aux documents de communication. Sur scène, ses pièces ne sont pas discoureuses, elles dénoncent à coups de sketchs percutants, retrouvant la forme un peu disparue de l’agit-prop que pratiquaient les révolutionnaires russes et qu’ont reprise des artistes comme Erwin Piscator ou Dario Fo. Pour cette artiste, le théâtre affirme sa puissance de plaisir par le filtre pamphlétaire.

    Julie Timmerman avait déjà frappé un grand coup avec Un démocrate, écrit, mis en scène et joué à partir de 2016. Ce spectacle eut un tel retentissement qu’il continue de tourner en France. Il y avait là un gros lièvre de levé : Edward Bernays, l’un des inventeurs de la propagande moderne, l’Austro-Américain qui établit le mécanisme de la manipulation des masses. Ce parfait « démocrate », qui n’avait rien à se reprocher puisqu’il était rarement hors la loi, donna aux managers et aux hommes politiques les clés pour vendre tout ce qu’il était possible de vendre : du tabac, des produits de consommation, l’altruisme des discours et l’oppression des peuples démunis.

    Des chercheurs et des réalisateurs ont eux aussi sorti de l’oubli – récemment – ce sinistre Bernays, mais Julie Timmerman a beaucoup contribué à mettre au jour cette page d’histoire, car son spectacle repose sur une longue enquête faite en dialogue avec des sources états-uniennes. C’est d’ailleurs une maison d’édition numérique à caractère universitaire, C&F Éditions, qui a choisi d’éditer la pièce et de la faire suivre d’un dossier composé d’études sur celui qui fut le maître de la propagande dans la sphère libérale.

    La nouvelle pièce de Julie Timmerman, Bananas (and kings), naît de la précédente. Dans le premier texte, il était question rapidement du rôle de la United Fruit Company dans le coup d’État ourdi par la CIA au Guatemala en 1954, quand les États-Unis étaient parvenus à mettre fin à la réforme agraire de ce pays pour rétablir leur pouvoir commercial sur le colossal marché des fruits. Le texte, joué à présent à la Reine-Blanche, avant de tourner dans un certain nombre de villes de la banlieue parisienne et des régions, se concentre sur la banane et ses enjeux quasi mafieux.

    Ah, la banane, fruit délicieux, facile à cultiver et à exporter, alors d’un exotisme aisé à amplifier, et auquel on peut même ajouter une connotation sexuelle (ce qui, pour dire vrai, ne figure guère dans le spectacle) ! En fait, c’est moins un fruit qu’un tiroir-caisse à l’échelon mondial. Ce que conte Julie -Timmerman, dans une -succession chronologique mais avec la férocité allègre de la satire, c’est l’histoire de cette United Fruit Company, plus puissante qu’une armée en marche. Au Guatemala surtout, mais avec des réseaux qui agissent à travers les deux -Amériques.

    Les tableaux qui s’enchaînent donnent à voir les patrons voyous du groupe (disons plutôt gang-sters, c’est Chicago à Wall Street) mettant en place leur stratégie de rouleau compresseur, les petites mains qui font le sale travail, les réticents et les opposants vite rétamés, un effarant successeur du premier PDG et les élus guatémaltèques broyés tour à tour par le même pouvoir olympien.

    Allez, allez, mangez des bananes ! Ne prenez pas celles des paysans qu’on étouffe, mais celles du trust qui s’empare tranquillement de leurs terres ! Elles vont devenir d’un beau bleu, comme les pesticides qui s’y sont infiltrés et comme les hommes qui les cueillent et meurent parfois d’avoir respiré ce venin bleuté. Et toute personne qui n’applaudit pas aux méthodes de l’United Fruit Company est un communiste !

    Mais nous sommes au théâtre, sur une scène qui pourrait être dans la rue ou dans une cour d’usine, ou à un cabaret de l’histoire où l’on rêverait de voir en nombre les classes dites laborieuses. On est là pour se venger de l’injustice en riant. Dans ce style, Julie Timmerman déploie un savoir-faire qu’elle dit brechtien. Il y a de ça, en effet. Les dessins sont brossés à gros traits et les affrontements claquent comme les lanières d’un fouet. On ne peut pas se tromper sur les méchants ! Mais il y a là une épaisseur historique qui est propre à la compagnie Idiomécanic. Même réécrits, souvent tournés à la farce (farce glaçante, bien sûr), les épisodes sont vrais, contiennent des paroles et des textes qui ont vraiment été dits ou publiés.

    Les quatre interprètes jouent un grand nombre de rôles, sans en rester à leur genre. Julie Timmerman elle-même termine en homme humilié et en statue de la Liberté parodique. Elle associe étonnamment punch et sensibilité. Anne Cressent s’intègre au jeu pamphlétaire avec une forte dimension dramatique souterraine. Mathieu Desfemmes et Jean-Baptiste Verquin manifestent ensemble et séparément un art de jouer les crapules qui les situe haut dans le guignol politique. De même qu’Apollinaire disait : « Que la guerre est jolie ! », on osera dire qu’ainsi croquée cette ignominie est fort réjouissante.

    Bananas (and kings), théâtre de la Reine-Blanche, Paris, 01 40 05 06 96. Jusqu’au 1er novembre. Puis aux Rencontres Charles-Dullin (Orly, Fresnes, Le Kremlin-Bicêtre) et en tournée jusqu’au 27 mai. À lire : Un démocrate, Julie Timmerman, C&F éditions.

    #Julie_Timmerman #Un_démocrate #Bananas_and_kings #C&F_éditions

  • André Cicolella : La crise sanitaire, 4e crise écologique par André Cicolella | Politis
    https://www.politis.fr/articles/2020/07/andre-cicolella-la-crise-sanitaire-4e-crise-ecologique-42197

    L’épidémie de Covid-19 aura eu le mérite de faire émerger la notion de crise sanitaire. Cette crise aura montré l’impasse d’un système de santé s’il n’est qu’un système de soins sans politique de santé environnementale pour agir sur les causes des maladies.

    Mais de quelle crise sanitaire parle-t-on ? Une première lecture basique fait le focus sur le stock de masques et de blouses. Si le bilan en restait là, la société française ne se préparerait pas à faire face à l’émergence d’autres pandémies, cette probabilité n’étant plus contestée.

    En 2018, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) publiait un rapport sur les maladies infectieuses émergentes, qui requièrent des efforts urgents de recherche et de développement. Le rapport évoquait la « maladie X », ainsi présentée par Peter Daszak, un des auteurs du rapport, dans une interview au New York Times en mars dernier : « Cette maladie X résulterait probablement d’un virus d’origine animale et émergerait quelque part sur la planète où le développement économique rapproche les humains et la faune. Elle se propagerait rapidement et silencieusement, exploitant les réseaux de voyage et de commerce humains, atteindrait plusieurs pays et serait difficile à contenir. » En 2008, Nature avançait dans un article le chiffre de 335 maladies infectieuses émergentes depuis les années 1940, dont 60 % de zoonoses, 72 % provenant de la faune sauvage, et montrait que l’augmentation était régulière d’une décennie à l’autre.

    Le bilan de cette crise est donc impérieux pour préparer la résilience des sociétés humaines face aux menaces à venir. C’est l’analyse du directeur de l’OMS Europe, dans un article publié le 8 mai dans The Lancet : « La pandémie de Covid-19 a eu de nombreux effets sur la santé, révélant la vulnérabilité particulière de ceux qui souffrent d’affections sous-jacentes. La prévention et le contrôle de l’obésité et des maladies non transmissibles sont essentiels pour se préparer à cette menace et aux menaces futures pour la santé publique. »

    Les cas d’obésité, d’hypertention, de diabète augmentent régulièrement.

    Pour certains patients, l’âge a très vite été mis en avant comme unique cause de vulnérabilité, mais la caractéristique commune à toutes les victimes, quel que soit leur âge, est la présence de comorbidités : obésité, hypertension, diabète, maladies cardiovasculaires et respiratoires. Or le nombre de ces maladies chroniques progresse régulièrement en France. Entre 2003 et 2017, le nombre cumulé de maladies cardiovasculaires et de diabète est passé de 3 millions à 6 millions. On peut donc en déduire que la crise du Covid-19 aurait fait grosso modo moitié moins de victimes il y a quatorze ans. Qu’en sera-t-il si l’épidémie continue ? Selon le dernier rapport de la Caisse nationale d’assurance maladie, publié en juillet, le nombre de malades chroniques passera de 20 millions en 2017 à 23 millions en 2023. Sur dix ans, le surcoût de cette épidémie s’élève à 120 milliards d’euros. Il est donc plus que temps d’agir, pour des raisons tant sanitaires qu’économiques. C’est le système solidaire d’assurance maladie qui est lui-même en danger.

    La France a signé les deux déclarations adoptées par l’Assemblée générale de l’ONU sur l’épidémie de maladies chroniques, en septembre 2011 (« Principal défi pour le développement durable en ce début de XXIe siècle ») et en septembre 2018 (« D’ici 2030 : diminution de la mortalité prématurée par maladies chroniques de 30 % et arrêt de la progression de l’obésité et du diabète »), mais sans leur donner une suite concrète.

    L’épidémie du Covid-19 est la conséquence d’une politique de gestion du système de soins purement financière, de la mondialisation qui favorise la circulation des virus, de la déforestation qui les met en contact avec les humains, mais c’est aussi la conséquence de la faiblesse de la politique de santé environnementale. Les grandes causes sont connues : alimentation ultra-transformée, sédentarité, pollution de l’air et contamination chimique, mais aussi plus largement urbanisme pathogène qui a produit les autoroutes urbaines et une ville minérale, pauvre en espaces verts. Cette situation risque de s’aggraver avec la crise climatique. Lutter contre les passoires thermiques sans s’attaquer à la pollution intérieure aggravera le coût sanitaire. Il est temps de considérer la crise sanitaire comme la quatrième crise écologique au même titre que celles touchant au climat, à la biodiversité et à l’épuisement des ressources naturelles.

    André Cicolella Président du Réseau environnement santé.

    #Crise_sanitaire #Epidémies #Ecologie

  • Françoise Vergès : « Qu’on m’explique pourquoi l’État a fait de Gallieni un héro national ! » | Patrick Piro
    https://www.politis.fr/articles/2020/06/francoise-verges-quon-mexplique-pourquoi-letat-a-fait-de-gallieni-un-hero-na

    Politiste, militante féministe, Françoise Vergès est très engagée dans les débats sur la « décolonialisation ». Elle se trouvait jeudi 18 juin place Vauban à Paris pour soutenir une action symbolique : le dépôt d’un drap noir sur la statue du général Gallieni. Promoteur de concepts raciaux, il s’est distingué à Madagascar à la fin du 19e siècle par une politique radicale de colonisation ayant conduit à des massacres et l’usage du travail forcé. Source : Politis

    • Au déboulonnage des statues s’oppose la proposition d’apposer des plaques rétablissant la vérité historique sur la carrière de ces personnages. Quelle est votre position ?

      Françoise Vergès : Mais, pour Gallieni, il faudrait en raconter énormément ! Et puis l’on se rendra compte que la plaque informative est une solution d’évitement. Car, enfin, il ne s’agit pas de relater les horreurs qu’il a commises à Madagascar, mais surtout de nous expliquer pourquoi la France a fait un héros national d’un massacreur, qui a imposé le travail forcé, privé les gens de citoyenneté, etc. Je suis pour une pédagogie active, et pas seulement « littéraire ». La place de cette statue est plutôt dans un musée, où seraient expliqués son parcours et l’idée qu’il avait des races. On entendrait des témoignages de Malgaches et de Vietnamiens dont les mouvements de résistance à la colonisation ont été écrasés. Et l’on expliquerait pourquoi, avec un tel parcours, la France a fait de Gallieni un héros national. C’est une explication que je n’ai jamais entendue. Emmanuel Macron nous dit qu’il ne faut pas effacer l’Histoire. Mais dites-nous pour quelle raison célébrer Gallieni ! Et pas plutôt Aimé Césaire, par exemple, ou Maurice Audin, Henri Alleg, Louise Michel…

  • Hôpital de Lisieux : la fermeture d’un service entier alarme les soignants | Nadia Sweeny
    https://www.politis.fr/articles/2020/06/hopital-de-lisieux-la-fermeture-dun-service-entier-alarme-les-soignants-4208

    Tout le service de médecine interne de l’hôpital de Lisieux (Calvados) ferme ses portes début juillet. En cause : le départ à la retraite du chef de service, non remplacé. Alors que la direction tente de calmer les esprits, les soignants, vent debout, appellent à l’aide. Source : Politis

    • Le texte de l’appel :

      Nous sommes nombreuses, nous sommes nombreux : nous sommes tant et tant à penser et éprouver que ce système a fait son temps. Mais nos voix sont dispersées, nos appels cloisonnés, nos pratiques émiettées. Au point que quelquefois nous doutons de nos forces, nous succombons à la détresse de l’impuissance. Certes, parfois cette diffraction a du bon, loin des centralisations et, évidemment, loin des alignements. Il n’empêche : nous avons besoin de nous fédérer. Sans doute plus que jamais au moment où une crise économique, sociale et politique commence de verser sa violence sans faux-semblant : gigantesque et brutale. Si « nous sommes en guerre », c’est bien en guerre sociale. D’ores et déjà les attaques s’abattent, implacables : le chantage à l’emploi, la mise en cause des libertés et des droits, les mensonges et la violence d’État, les intimidations, la répression policière, en particulier dans les quartiers populaires, la surveillance généralisée, la condescendance de classe, les discriminations racistes, les pires indignités faites aux pauvres, aux plus fragiles, aux exilé-es. Pour une partie croissante de la population, les conditions de logement, de santé, d’alimentation, parfois tout simplement de subsistance, sont catastrophiques. Il est plus que temps de retourner le stigmate contre tous les mauvais classements. Ce qui est « extrême », ce sont bien les inégalités vertigineuses, que la crise creuse encore davantage. Ce qui est « extrême », c’est cette violence. Dans ce système, nos vies vaudront toujours moins que leurs profits.

      Nous n’avons plus peur des mots pour désigner la réalité de ce qui opprime nos sociétés. Pendant des décennies, « capitalisme » était devenu un mot tabou, renvoyé à une injonction sans alternative, aussi évident que l’air respiré – un air lui-même de plus en plus infecté. Nous mesurons désormais que le capitalocène est bien une ère, destructrice et mortifère, une ère d’atteintes mortelles faites à la Terre et au vivant. L’enjeu ne se loge pas seulement dans un néolibéralisme qu’il faudrait combattre tout en revenant à un capitalisme plus « acceptable », « vert », « social » ou « réformé ». Féroce, le capitalisme ne peut pas être maîtrisé, amendé ou bonifié. Tel un vampire ou un trou noir, il peut tout aspirer. Il n’a pas de morale ; il ne connaît que l’égoïsme et l’autorité ; il n’a pas d’autre principe que celui du profit. Cette logique dévoratrice est cynique et meurtrière, comme l’est tout productivisme effréné. Se fédérer, c’est répondre à cette logique par le collectif, en faire la démonstration par le nombre et assumer une opposition au capitalisme, sans imaginer un seul instant qu’on pourrait passer avec lui des compromis.

      Mais nous ne sommes pas seulement, et pas d’abord, des « anti ». Si nous n’avons pas de projet clé en mains, nous sommes de plus en plus nombreuses et nombreux à théoriser, penser mais aussi pratiquer des alternatives crédibles et tangibles pour des vies humaines. Nous avons besoin de les mettre en commun. C’est là d’ailleurs ce qui unit ces expériences et ces espérances : les biens communs fondés non sur la possession mais sur l’usage, la justice sociale et l’égale dignité. Les communs sont des ressources et des biens, des actions collectives et des formes de vie. Ils permettent d’aspirer à une vie bonne, en changeant les critères de référence : non plus le marché mais le partage, non plus la concurrence mais la solidarité, non plus la compétition mais le commun. Ces propositions sont solides. Elles offrent de concevoir un monde différent, débarrassé de la course au profit, du temps rentable et des rapports marchands. Il est plus que jamais nécessaire et précieux de les partager, les discuter et les diffuser.

      Nous savons encore que cela ne suffira pas : nous avons conscience que la puissance du capital ne laissera jamais s’organiser paisiblement une force collective qui lui est contraire. Nous connaissons la nécessité de l’affrontement. Il est d’autant plus impérieux de nous organiser, de tisser des liens et des solidarités tout aussi bien locales qu’internationales, et de faire de l’auto-organisation comme de l’autonomie de nos actions un principe actif, une patiente et tenace collecte de forces. Cela suppose de populariser toutes les formes de démocratie vraie : brigades de solidarité telles qu’elles se sont multipliées dans les quartiers populaires, assemblées, coopératives intégrales, comités d’action et de décision sur nos lieux de travail et de vie, zones à défendre, communes libres et communaux, communautés critiques, socialisation des moyens de production, des services et des biens… Aujourd’hui les personnels soignants appellent à un mouvement populaire. La perspective est aussi puissante qu’élémentaire : celles et ceux qui travaillent quotidiennement à soigner sont les mieux à même d’établir, avec les collectifs d’usagers et les malades, les besoins quant à la santé publique, sans les managers et experts autoproclamés. L’idée est généralisable. Nous avons légitimité et capacité à décider de nos vies – à décider de ce dont nous avons besoin : l’auto-organisation comme manière de prendre nos affaires en mains. Et la fédération comme contre-pouvoir.

      Nous n’avons pas le fétichisme du passé. Mais nous nous souvenons de ce qu’étaient les Fédérés, celles et ceux qui ont voulu, vraiment, changer la vie, lui donner sens et force sous la Commune de Paris. Leurs mouvements, leurs cultures, leurs convictions étaient divers, républicains, marxistes, libertaires et parfois tout cela à la fois. Mais leur courage était le même – et leur « salut commun ». Comme elles et comme eux, nous avons des divergences. Mais comme elles et comme eux, face à l’urgence et à sa gravité, nous pouvons les dépasser, ne pas reconduire d’éternels clivages et faire commune. Une coopérative d’élaborations, d’initiatives et d’actions donnerait plus de puissance à nos pratiques mises en partage. Coordination informelle ou force structurée ? Ce sera à nous d’en décider. Face au discours dominant, aussi insidieux que tentaculaire, nous avons besoin de nous allier, sinon pour le faire taire, du moins pour le contrer. Besoin de nous fédérer pour mettre en pratique une alternative concrète et qui donne à espérer.

      Dès que nous aurons rassemblé de premières forces, nous organiserons une rencontre dont nous déciderons évidemment ensemble les modalités.

      #le_monde_d'après #convergence #résistance #convergence_des_luttes #se_fédérer #détresse #impuissance #diffraction #guerre_sociale #inégalités #capitalisme #capitalocène #néolibéralisme #égoïsme #autorité #profit #productivisme #collectif #alternative #alternatives #bien_commun #commun #commons #partage #solidarité #marché #concurrence #compétition #rapports_marchands #affrontement #auto-organisation #autonomie #démocratie #brigades_de_solidarité #mouvement_populaire #fédération #contre-pouvoir #alternative

  • « Les trois de Melle », symbole de la répression contre les opposant·es aux E3C | Chloé Dubois
    https://www.politis.fr/articles/2020/05/les-trois-de-melle-symbole-de-la-repression-contre-les-opposant-es-aux-e3c-4

    Au lycée de Melle (79), trois enseignant·es ont été suspendu.es à titre conservatoire pour leur engagement contre la réforme Blanquer. Le rectorat a ouvert une enquête administrative au sein de l’établissement. Récit d’une opposition contre l’organisation des épreuves de contrôle continu. Source : Politis

  • « La lutte contre la surveillance est un anticapitalisme » par Romain Haillard | Politis
    https://www.politis.fr/articles/2020/04/la-lutte-contre-la-surveillance-est-un-anticapitalisme-41802

    Interview par Romain Haillard

    La lutte contre les technologies de surveillance est indissociable de celle contre le capitalisme, estime Christophe Masutti, membre de l’association d’éducation populaire Framasoft.

    Drôle d’époque. Des drones survolent nos têtes pour nous intimer de rester chez nous ; nos téléphones caftent nos déplacements aux opérateurs télécoms, qui eux-mêmes caftent aux décideurs ; des multitudes d’acteurs économiques trouvent des « solutions » technologiques aux problématiques liées au coronavirus ; les géants du numérique épaulent nos gouvernements pour mieux nous surveiller. À la manière de Michel Foucault, Christophe Masutti réalise une archéologie du capitalisme de surveillance dans Affaires privées, chez C&F Éditions. Selon le membre administrateur du réseau d’éducation populaire Framasoft, formuler une critique de la surveillance aujourd’hui ne peut plus se faire sans l’adosser à un anticapitalisme farouche.

    Est-il toujours pertinent de différencier surveillance d’État et capitalisme de surveillance ?

    Christophe Masutti : Les solutions développées par le capitalisme de surveillance deviennent des instruments de gouvernance. Ces marchands de la surveillance vont faire croire aux technocrates qu’il y aura un moyen d’automatiser des processus coûteux dans un moment où tout doit concourir à la réduction de la dépense, et donc à la réduction de l’État. Mais il y aura toujours besoin de -l’humain. Quand nous voyons l’état de l’hôpital aujourd’hui, l’utilité des machines se voit vite dépassée. Comme l’idée de faire un traçage des individus avec l’application StopCovid.

    C’est l’idée du solutionnisme technologique. Tout problème, économique ou politique, pourrait trouver une réponse technologique. Cette conception domine la Silicon Valley et a fait des émules – nos gouvernants n’y échappent pas. Cette idéologie qui ne se revendique pas comme telle affaiblit le pouvoir politique. Les décisions devraient s’enfermer dans des choix techniques dépolitisés. Macron et la startup nation se marient bien à cette dépolitisation. Mais quand nous dépolitisons, nous n’agissons plus par conviction – de droite comme de gauche. Ne reste plus que l’État seul, hors sol, plus que la technocratie.

    La frontière entre ces deux surveillances apparaît donc de plus en plus ténue ?

    Au point de ne plus pouvoir faire la différence. Il ne faut pas s’étonner de voir de plus en plus de pantouflage entre l’administration et les géants du numérique, par exemple. Peu à peu, il y a un glissement, une délégation des fonctions régaliennes à des agences qui ont la capacité de fournir une solution technologique. Prenez par exemple le représentant de Facebook en France. À la suite des attentats contre Charlie Hebdo, il a fait une présentation à Sciences Po Paris de son système de surveillance contre les fausses informations en ligne. Le choix du lieu n’est pas anodin. Le danger, c’est de ne plus gouverner classiquement et de s’engouffrer dans une expertise de la mesure.

    En quoi cette expertise de la mesure peut-elle être faussée – en opposition à l’idée d’une machine surpassant l’homme ?

    Faisons une analogie avec la cartographie. Nous avons toujours eu besoin de cartes pour gouverner. Il faut une représentation du pays, de son territoire. Mais la carte n’est pas le territoire, c’en est une représentation. Les prophètes du solutionnisme ne confondent pas la carte avec le territoire, mais estiment qu’elle en serait une représentation fidèle. Ils tiennent des discours sur la représentation et non sur l’objet lui-même. La cartographie n’est pas neutre, comme le profilage ne l’est pas. Nos profils, nos doubles numériques ne sont qu’une représentation ultra-simplifiée de nous, et non pas notre reflet pur.

    Comment défendre la prédation de nos profils numériques ?

    Si nous envisageons la défense de nos données personnelles uniquement sous le prisme individuel, alors nous arrivons à des aberrations comme la patrimonialisation des données défendue par Gaspard Koenig. Prenons l’exemple du patrimoine génétique humain. Nous en sommes propriétaires, mais nous ne pouvons pas en faire commerce. C’est un patrimoine propre à chacun, mais aussi un patrimoine commun à l’humanité. Même chose pour nos données personnelles. Ces data se construisent par nos interactions et nos relations avec les autres. Défendre nos libertés individuelles alors, c’est défendre notre droit de disposer de nos données, collectivement.

    Donc des protections comme le règlement général de protection des données (RGPD) apparaissent comme une mauvaise réponse au problème.

    Cette réglementation prouve que nos institutions veulent agir, c’est une marque de bonne volonté. Mais le RGPD ne fait que formaliser le don du consentement. Prenons l’exemple d’Equifax aux États-Unis. Dans les années 1960 et 1970, cette société récoltait toute sorte d’informations sur des clients potentiels de compagnie d’assurances pour évaluer le risque de défaut de paiement. Ces informations étaient évidemment récoltées sans leur consentement. Ces méthodes ont choqué à l’époque et ont poussé à adopter une réglementation sur ces informations. Equifax a alors lancé « Buyer’s Market » en 1990. Les clients payaient un abonnement annuel de 10 dollars et donnaient sciemment leur profil, contre des coupons de réduction.

    Les informations recueillies avec notre consentement permettent d’avoir une analyse encore plus fine de nos comportements. Grâce à l’onboarding, c’est-à-dire du reprofilage. Il est possible ensuite d’associer votre attitude à un moment t avec des jeux de données antérieures – glanées depuis des dizaines et des dizaines d’années par des sociétés comme Axciom. Donc, si vous donnez votre consentement, votre profil peut être reconstruit. Avant même les premières discussions sur le RGPD, le Boston Consulting Group, un cabinet de conseils en stratégie, prédisait en 2014 : « Dans un domaine aussi sensible que le big data, la confiance sera l’élément déterminant pour permettre à l’entreprise d’avoir le plus large accès possible aux données de ses clients, à condition qu’ils soient convaincus que ces données seront utilisées de façon loyale et contrôlée. » Le temps est malléable avec les data. Grâce à cet accès, vous êtes déterminés par ce que vous faites, ce que vous avez fait et ce que vous allez faire. C’est une construction où la notion de choix n’existe plus.

    Soit un monde orwellien…

    Attention à la dystopie orwellienne. Déjà, dans les années 1970, était brandie la peur d’une société sur le modèle de 1984. Nous n’avons plus à avoir peur de cette société : nous y sommes déjà. Ce chiffon rouge nous empêche de penser, de voir la réalité. La surveillance selon Orwell provenait d’une volonté étrangère à l’homme, pas de l’homme lui-même. Notre société de surveillance émane aussi de notre propre culture, de notre acculturation à l’informatique et donc à la surveillance. Notre consentement, nous l’avons fabriqué.

    Quels comportements trahissent notre acculturation à la surveillance ? Et comment s’en sortir ?

    Le plaisir d’aller sur Facebook. Le goût d’être partagé et aimé sur Twitter. Je prends un exemple plus ancien. Avant, il n’y avait pas de portiques antivol dans les supermarchés. Mes parents, quand ils les ont découverts, s’en sont offusqués : « Alors nous serions tous suspectés d’être des voleurs ? » Désormais, non seulement il y a les portiques, mais il y a aussi les caméras et un vigile à chaque entrée. Et peu de personnes pour revenir sur ce déploiement. Pour s’en sortir, j’ai ma recette : l’usage inconditionnel du chiffrement de nos données. L’utilisation de réseaux fédérés comme Mastodon à la place des Gafam. Et, enfin, utiliser au maximum des logiciels libres, construits sur la base du droit à partager et donc dans une idée d’émancipation collective.

    La critique de la surveillance en dehors de toute critique anticapitaliste est-elle possible ?

    Non. Pour la sociologue Shoshana Zuboff, notre capitalisme est « malade », alors il faudrait le réguler. Elle se focalise uniquement sur les Gafam, même si elle le fait avec un grand talent. Les Gafam mettraient en danger nos démocraties. Mais le problème est bien plus profond. Le modèle dans lequel nous nous trouvons est dépendant de ses infrastructures numériques : les ordinateurs, les réseaux…

    Le capitalisme de surveillance ne vient pas de nulle part. Cette forme de libéralisme se fonde sur la transformation de l’information en un bien capitalisable. Le consumérisme, la surfinanciarisation reposent sur nos données comme bien, c’est systémique. Ne pas inscrire cette critique dans l’anticapitalisme, c’est oublier que cette surveillance se nourrit des inégalités sociales pour opérer un tri de la population.

    L’analyse doit-elle se traduire dans les luttes ? Faut-il opposer à la surveillance une lecture anticapitaliste pour lutter efficacement contre ?

    J’en suis persuadé. Et j’ajouterais que, ce qui est intéressant, ce ne sont pas les luttes en elles-mêmes, mais les contre-modèles mis en place dans le combat. La sociologue Marianne Maeckelbergh appelle cette démarche la « préfiguration ». Le fonctionnement du collectif devient aussi important que l’alternative proposée elle-même. Le mouvement altermondialiste, les gilets jaunes, les ZAD, la communauté libriste… Ces mouvements – qui ne sont pas aussi marginaux qu’on voudrait le croire – réfléchissent autant que leurs actions s’inscrivent dans la spontanéité. C’est un retour à ce que nous appelions l’action directe. Elle n’est pas forcément violente, elle peut être altruiste.

    C’est le sens de ce que nous faisons à -Framasoft et dans la communauté du logiciel libre. Nous aimons dire : « faire, faire sans eux, faire contre eux, faire quand même ». Et notre communauté n’est pas à écarter des autres luttes. Il y a une archipellisation. Une pensée n’a de sens qu’à partir du moment où elle entre dans un dialogue. Tout ne doit pas s’uniformiser et se centraliser dans une doctrine unique. À l’image d’un archipel, il y a des îles, des faunes et des flores différentes, qui forment un « tout » hétérogène certes, mais un « tout » quand même.

    Chistophe Masutti Docteur en histoire et en philosophie des sciences et des techniques

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  • « La lutte contre la surveillance est un anticapitalisme » par Romain Haillard | Politis
    https://www.politis.fr/articles/2020/04/la-lutte-contre-la-surveillance-est-un-anticapitalisme-41802

    La lutte contre les technologies de surveillance est indissociable de celle contre le capitalisme, estime Christophe Masutti, membre de l’association d’éducation populaire Framasoft. Drôle d’époque. Des drones survolent nos têtes pour nous intimer de rester chez nous ; nos téléphones caftent nos déplacements aux opérateurs télécoms, qui eux-mêmes caftent aux décideurs ; des multitudes d’acteurs économiques trouvent des « solutions » technologiques aux problématiques liées au coronavirus ; les géants du (...)

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  • Revenu de base : l’urgence d’une société plus solidaire
    https://www.politis.fr/articles/2020/04/revenu-de-base-lurgence-dune-societe-plus-solidaire-41623

    En ces temps de crise sanitaire, économique, sociale et environnementale, l’idée d’un revenu universel, inconditionnel et individuel revient en force …

  • Free impose des heures supplémentaires à ses salariés par Erwan Manac’h | Politis
    https://www.politis.fr/articles/2020/03/free-impose-des-heures-supplementaires-a-ses-salaries-41585

    Pire, l’entreprise refuse désormais les arrêts de travail délivrés par l’Assurance maladie pour les parents d’enfants de moins de 16 ans, mesure pourtant déployée depuis la fermeture des établissements scolaires et des crèches dans de nombreuses entreprises où le télétravail n’est pas possible. « La direction considère que nous pouvons faire du télétravail tout en gardant nos enfants, ce qui est impossible avec les cadences de travail que nous devons suivre », s’indigne un opérateur.

  • Workers Are More Valuable Than CEOs
    https://jacobinmag.com/2020/03/coronavirus-low-wage-workers-front-lines-grocery-store

    Low-wage workers are on the front line in the battle against coronavirus. While many workers have started telecommuting — and many others have unfortunately been laid off — low-wage workers are busy cleaning our streets, making sure we have enough to eat, and, of course, nursing us back to health if we get COVID-19. Despite being linchpins of a functional society, these workers are often treated as expendable or dismissed as “unskilled.” But over the past few weeks, we’ve seen just how irreplaceable they are.

    #travail #ligne_de_front #coronavirus #riches_planqués