Les dilemmes stratégiques du Front national

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  • Les dilemmes stratégiques du Front national - Page 2 | Mediapart
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    Prendre le pouvoir par le bas ou par le haut ? « Ni gauche ni droite » ou à droite toute ? Conservateur-autoritaire ou national-interventionniste ? Mediapart publie les bonnes feuilles du livre du politologue Joël Gombin, qui décrypte la stratégie de prise de pouvoir de #Marine_Le_Pen, et ses nombreux dilemmes.

    Progressivement, des positions économiques plus protectionnistes et moins libérales sont mises en avant. Si l’initiative économique est valorisée, l’État-providence est accepté et promu. Le FN se rapproche ainsi d’un modèle européen de partis de droite radicale populistes, que la politiste néerlandaise Sarah de Lange a qualifié de « nouvelle formule gagnante4 ». Ces partis prennent leur distance avec le néolibéralisme, voire le critiquent franchement, tout en maintenant des positions autoritaristes et ethnocentristes. C’est en particulier la dimension libre-échangiste du néolibéralisme qui est critiquée ; mais la « nouvelle formule gagnante » suppose aussi une défense de l’État-providence, dès lors qu’il bénéficie en priorité, voire exclusivement, aux nationaux – ce que certains politistes ont appelé le « chauvinisme de l’État-providence » (welfare chauvinism).

    Dans le cas du FN, le principe de « préférence nationale », rebaptisé « priorité nationale » par Marine Le Pen, correspond parfaitement à cette idée. La force de cette approche est de parvenir à lier des prises de position de nature économique à des enjeux d’ordre identitaire – « les allocations pour les Français » –, moraux – la dénonciation de « l’assistanat » conjuguée à la défense du principe de l’État-providence – et politiques – la souveraineté comme principe directeur de la politique macro- économique. De fait, pour les militants aussi bien que pour les électeurs, les enjeux proprement économiques sont secondaires par rapport aux enjeux culturels ou identitaires. Dans tous les cas, les premiers sont appréhendés à travers le prisme de ces derniers. C’est pourquoi l’opposition, régulièrement soulignée par nombre d’observateurs, entre une aile libérale incarnée par #Marion_Maréchal-Le_Pen et une aile plus sociale et protectionniste incarnée par #Florian_Philippot, a relativement peu d’importance : ce ne sont pas les enjeux sur lesquels la majorité des électeurs du FN se déterminent.

    Prise du pouvoir par le bas ou par le haut ?

    Un dernier dilemme posé au FN concerne la stratégie à suivre pour conquérir le pouvoir d’État – étant entendu que cet objectif est aujourd’hui très largement partagé par les élites du parti. Deux approches sont possibles : la première met l’accent sur une prise du pouvoir par le haut, c’est-à-dire par les structures étatiques même, par le sommet de l’État. Cette approche est illustrée par la mise en scène, par le FN, du recrutement d’énarques et de hauts fonctionnaires qui rendraient le parti apte à exercer le pouvoir d’État. En réalité, hors le cas de Florian Philippot, la récolte est relativement modeste, ce qui se comprend d’ailleurs aisément tant il peut être coûteux professionnellement pour un haut fonctionnaire de s’afficher aux côtés du Front national. La seconde approche considère plutôt que le pouvoir se conquiert par le bas, c’est-à-dire par le local et la société civile. À cet égard, le Front national de Marine Le Pen a beaucoup insisté sur les efforts consentis pour conquérir des positions électives locales et exercer le pouvoir à cet échelon de manière durable, ainsi que sur la création d’une série de collectifs supposés quadriller la société civile, renouant ainsi avec de vieilles tentatives du FN dans les années 1980, puis 1990. Les deux approches ne sont d’ailleurs pas antinomiques.

    #PhoneStories #Linfiltré #FN