• « Ecologistes, nous choisissons Emmanuel Macron ! »
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/03/06/ecologistes-nous-choisissons-emmanuel-macron_5089992_3232.html

    A quelques semaines de l’élection présidentielle, Jean-Paul Besset, Daniel Cohn-Bendit (anciens députés européens EELV) et Matthieu Orphelin (ancien porte-parole de la Fondation Nicolas Hulot) annoncent qu’ils voteront pour Emmanuel Macron, le mieux placé pour battre Marine Le Pen.

    #quo_non_descendet

  • « L’histoire qui se trame autour de Monsanto a tous les ingrédients d’un scénario à la Erin Brockovich »

    http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/03/06/le-cancer-de-monsanto_5089702_3232.html

    Dans sa chronique, Stéphane Foucart, journaliste au service Planète, explique comment une toxicologue de l’agence américaine de protection de l’environnement a expliqué dès 2013 qu’il est « fondamentalement certain que le glyphosate est cancérogène ».

    Une multinationale, une scientifique muselée par sa hiérarchie, une class action conduite par des avocats rusés et enfin la découverte d’une pièce à conviction explosive… L’histoire qui se trame depuis quelques mois en Californie a tous les ingrédients d’un scénario à la Erin Brockovich, le film de Steven Soderbergh nommé cinq fois aux Oscars en 2001, dont le prix de la meilleure actrice pour Julia Roberts.
    L’affaire ne commence pas dans les prétoires américains, mais au Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) – l’agence des Nations unies chargée d’inventorier les substances cancérogènes.
    En mars 2015, les experts réunis par le CIRC classent le glyphosate (le principe actif de l’herbicide Roundup) comme « cancérogène probable » pour l’homme. Ils estiment le produit mutagène, cancérogène pour l’animal, et citent plusieurs études épidémiologiques suggérant un lien entre le lymphome non-hodgkinien (un cancer du sang) et le produit phare de Monsanto – qui est aussi la pierre angulaire de son modèle économique (la vente liée du pesticide et des cultures transgéniques qui le tolèrent).

    La firme de Saint-Louis (Missouri) proteste, mais le mal est fait. Aux Etats-Unis, plusieurs actions en justice, individuelles ou collectives, voient le jour. L’une d’elles, plaidée devant la cour fédérale de San Francisco (Californie), rassemble plusieurs centaines d’employés agricoles et de fermiers touchés par un lymphome après avoir travaillé au contact de l’herbicide.

    Bien sûr, les avocats de Monsanto ne se laissent pas intimider. Fin avril 2016, par une coïncidence extraordinaire, le brouillon d’une expertise de l’agence américaine de protection de l’environnement (EPA) – lancée en 2009 – est mis en ligne par erreur. Les toxicologues de l’agence, réunis au sein du Cancer Assessment Review Committee (CARC), y estiment que le glyphosate est improbablement cancérogène. Les avocats de la firme de Saint-Louis en font leur miel même si le rapport, provisoire, est rapidement ôté du site de l’EPA.

    « Ce n’est pas éthique »

    Hasard des acronymes : d’un côté le CIRC, de l’autre le CARC. Deux groupes d’experts, deux avis opposés. Les avocats des plaignants se sont donc demandé par quelle étrangeté des experts pouvaient soutenir des opinions aussi divergentes.

    Cherchant une réponse à cette question, ils ont déniché une pièce à conviction redoutable. C’est un courriel daté du 21 mars 2013 et adressé par Marion Copley, une toxicologue galonnée de l’EPA, à l’un de ses supérieurs, qui supervise le CARC. La missive est terrible. Marion Copley écrit avoir, sur la foi de « décennies d’expertise en pathologie », « des commentaires qui pourraient être très utiles au CARC ».

    Le glyphosate ? La chercheuse énumère quatorze mécanismes d’action par lesquels la substance, dit-elle, peut initier ou promouvoir la formation de tumeurs. « Non seulement chacun de ces mécanismes est à lui seul capable de provoquer une tumeur, mais le glyphosate les enclenche tous de façon simultanée, ajoute Marion Copley. Il est fondamentalement certain que le glyphosate est cancérogène. » La scientifique, qui travaille depuis près de trente ans à l’EPA, écrit ces mots deux ans avant l’expertise du CIRC et alors que celle du CARC est entamée depuis plus de trois ans.

    Bien mal entamée selon elle. Le propos se durcit. « Jess [c’est le prénom du destinataire], nous nous sommes toi et moi disputés de nombreuses fois à propos du CARC et tu me contredis souvent sur des sujets hors de ta compétence, ce qui n’est pas éthique, ajoute-t-elle, de plus en plus amère. Ta maîtrise obtenue en 1971 au Nebraska est complètement obsolète, en vertu de quoi la science du CARC a 10 ans de retard sur la littérature scientifique. »

    Les accusations vont crescendo : « Pour une fois, écoute-moi et arrête tes connivences et tes jeux politiques avec la science pour favoriser les industriels, écrit-elle. Pour une fois, fais ce qu’il y a à faire, et ne prends pas tes décisions en fonction de la manière dont elles vont affecter ton bonus. »

    Ce n’est pas tout. Marion Copley accuse aussi le destinataire d’avoir « intimidé les experts du CARC » et d’avoir « modifié » deux autres rapports après leur finalisation, « pour favoriser l’industrie ». Deux autres scientifiques de l’EPA sont mis en cause nommément… La lettre de Marion Copley pourrait peser très lourd. Non seulement sur l’issue de la procédure, mais sur l’avenir même du glyphosate : celui-ci est toujours en cours de réévaluation, aux Etats-Unis et en Europe. Le courriel de Marion Copley pourrait bien être à Monsanto ce que le cancer est aux humains.

    « J’aurais fait ce que j’avais à faire »

    Dans une requête transmise le 10 février à Vince Chhabria, le juge fédéral chargé de l’affaire, les avocats des plaignants demandent à ce que le supérieur de la toxicologue – qui n’a pas répondu aux sollicitations du Monde – soit entendu. « Lorsque l’on considère l’importance des expertises de l’EPA, et leur importance dans ce contentieux, il semble approprié de prendre [sa] déposition », a déclaré le juge Chhabria, le 27 février au cours d’une audition, selon l’agence Bloomberg.

    En attendant, il est raisonnable de réserver son opinion car, après tout, Marion Copley peut avoir écrit sous le coup de la colère ou cherché à nuire à des collègues honnis. Peut-être. Mais lorsque Marion Copley écrit ces lignes, elle se trouve à un moment très particulier de la vie, où il n’y a plus rien à gagner, ni à perdre. « J’ai un cancer, écrit-elle, et je ne veux pas que ces graves problèmes au sein du département soient mis sous le boisseau avant que je ne sois au fond de ma tombe. » Depuis quinze ans, elle lutte contre un cancer du sein et se sait condamnée. « J’aurais fait ce que j’avais à faire », conclut-elle.

    Quelques mois plus tard, le 21 janvier 2014, Marion Copley, 66 ans, était emportée par la maladie.