Israël et Palestine : le colonialisme de peuplement et la liberté académique

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  • Israël et Palestine : le colonialisme de peuplement et la liberté académique
    5 mars | Ilan Pappé |Traduction JPP pour l’AURDIP
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    Au cours des dix dernières années, un ancien paradigme universitaire qui était utilisé pour l’analyse historique des mouvements colonialistes européens, dans les différentes parties du monde et à différentes périodes, a refait surface aux États-Unis et en Australie, avec le désir nouveau de comprendre l’histoire moderne de ces pays. Des historiens de premier plan du monde entier ont restructuré le paradigme du colonialisme de peuplement pour y intégrer les lieux où les immigrants européens ont colonisé des terres non européennes, d’abord avec l’aide des Empires coloniaux, puis en luttant contre l’Empire et la population locale indigène.

    Tous les pays d’Amérique du Nord, centrale et du Sud, sont des pays colonisés. Tout comme l’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’Algérie, le Zimbabwe et l’Afrique du Sud. Par cela, nous voulons dire que, soit ils ont une histoire coloniale de peuplement, soit ils sont toujours engagés dans une lutte contre la population originaire du pays. (...)

    Eleonora Roldán Mendivíl est une jeune universitaire qui enseigne un cours intitulé « Le racisme dans le capitalisme » à l’Institut Otto-Suhr de l’Université libre de Berlin. Après que d’obscurs blogueurs sionistes de droite ont prétendu que son évaluation sur Israël, comme projet colonial et État d’apartheid, constitue une déclaration antisémite, allégation reprise par le journal populiste de droite Jerusalem Post et par un groupe d’étudiants pro-Israël à l’Université libre, son nouvel emploi à l’Institut Otto-Suhr prévu pour le prochain semestre a été annulé. Il est important d’indiquer que son évaluation sur Israël a été exprimée dans un contexte militant, pas dans sa classe. Son travail est en cours d’être évalué au regard des allégations susmentionnées, et avec tout le respect dû à notre collègue le Prof. Dr. Benz qui le dirige, j’espère que cela se fait dans l’esprit scientifique exposé ci-dessus. Pour autant que les questions de mon expertise soient pertinentes, je suis heureux de contribuer à cette évaluation.

    Le professeur Farid Esack est un théologien musulman de la libération, ancien dirigeant dans le combat anti-apartheid et responsable BDS pour l’Afrique du Sud. Jusqu’à récemment, il occupait le poste de professeur invité à l’Académie des religions du monde à l’Université de Hambourg. Lui aussi a été traité d’antisémite, terroriste, dénonciateur de l’holocauste. La presse allemande a été heureuse de parler de Mr Esack – et de répéter l’accusation sans fondement portée contre lui – mais, à quelques exceptions près, elle a été incapable de communiquer directement avec lui. Le plus grand parti d’opposition de Hambourg, le CDU, doit soumettre un projet de résolution au parlement d’État (‘Bürgerschaft’) de l’État fédéral de Hambourg, résolution qui, si celui-ci l’adoptait, déclarerait le BDS antisémite. (...)