Richard Falk : la colère envers mon rapport sur l’apartheid met en danger la liberté d’expression

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  • Richard Falk : la colère envers mon rapport sur l’apartheid met en danger la liberté d’expression
    Middle East Eye | Richard Falk | 29 mars 2017
    http://www.middleeasteye.net/fr/opinions/richard-falk-la-col-re-envers-mon-rapport-l-onu-392190213

    Je suis arrivé à Édimbourg le 13 mars pour entamer une série de conférences de dix jours organisées par mon éditeur, Pluto, pour le lancement de mon nouveau livre, Palestine’s Horizon : Towards a Just Peace.

    La phase écossaise de cette visite s’est déroulée sans heurts avec des entretiens et des discussions très suivies à Aberdeen, Glasgow et Édimbourg sur les thèmes principaux du livre.

    Puis, le 15 mars, le calme a été brisé.

    La Commission économique et sociale des Nations unies pour l’Asie occidentale (CESAO) a publié un rapport que j’ai co-écrit avec Virginia Tilley, politologue à l’Université du Sud de l’Illinois, lequel cherchait à déterminer s’il existait des preuves suffisantes pour conclure que les formes de contrôle exercées par Israël sur le peuple palestinien constituaient le crime international d’apartheid.

    Il s’agissait d’une étude universitaire qui analysait les questions pertinentes du point de vue du droit international et résumait les pratiques et les politiques israéliennes présumées discriminatoires.

    Avant d’être publiée, cette étude avait été envoyée par la CESAO pour examen à trois éminents spécialistes internationaux des droits de l’homme et du droit international, et chacun avait présenté des avis très favorables à la contribution scientifique du rapport.

    Alors pourquoi cette véritable tempête ? Dès sa sortie à Beyrouth lors d’une conférence de presse à laquelle le professeur Tilley et moi avons participé via Skype, la furie s’est déchaînée.

    D’abord, le rapport a été dénoncé par la nouvelle ambassadrice américaine à l’ONU, Nikki Haley, et par le diplomate et agitateur israélien Danny Danon.

    Rapidement a suivi une déclaration publiée par le nouveau secrétaire général des Nations unies, António Gutteres, indiquant qu’« en l’état, le rapport ne représente pas les vues du secrétaire général » et qu’il a été publié « sans consultation auprès du Secrétariat de l’ONU ».

    La directrice de la CESAO, Rima Khalaf, titulaire de la haute fonction de secrétaire générale adjointe, a été chargée de retirer notre rapport du site web de la CESAO et a choisi de démissionner par principe plutôt que de se plier à cet ordre.

    Interprétation académique

    Il y a tellement de « fausses informations » entourant cette réponse à notre rapport qu’il devient difficile de séparer la vérité de la rumeur.

    L’ambassadrice Haley, par exemple, a affirmé avec autosatisfaction : « Lorsque quelqu’un publie un rapport faux et diffamatoire au nom de l’ONU, il convient que cette personne démissionne ».

    Le rapport était clairement étiqueté comme étant le travail d’universitaires indépendants et ne reflétait pas nécessairement les opinions de l’ONU ou de la CESAO. En d’autres termes, il ne s’agissait pas d’un rapport de l’ONU, ni d’un rapport approuvé par l’ONU.

    Au-delà de cela, comment pourrait-il être « faux et diffamatoire » alors que son analyse ne représentait ni plus ni moins qu’une interprétation savante d’un concept juridique et une présentation des pratiques israéliennes ?

    L’ambassadeur Danon, comme Haley, a qualifié le rapport de « méprisable » et de « mensonge flagrant ». Il a apparemment oublié que différents dirigeants israéliens avaient averti depuis au moins 1967 que si un État palestinien séparé n’était établi bientôt, Israël deviendrait un État d’apartheid.(...)