« Elles m’ont tout volé, mon corps, mon enfant, jusqu’à ma liberté de rêver » - Valentine LEROY

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  • Torturée par la Hisba, police des mœurs féminine de l’État islamique. Elle raconte son traumatisme.

    « Elles m’ont tout volé, mon corps, mon enfant, jusqu’à ma liberté de rêver » - Valentine LEROY - L’Orient-Le Jour
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    Alya inconsciente, la Hisba continue la séance de torture, mordant à plusieurs reprises la jeune femme, à l’épaule gauche cette fois. « J’ai découvert ça lorsque j’ai repris connaissance, par la suite », explique-t-elle. Quand Alya ouvre les yeux, l’une des femmes lui explique que tout cela n’est qu’une « simple leçon, pour le bien de tous ». « Je n’ai pas su réagir, et puis, il n’y avait rien à dire, ce sont des animaux, elles n’écoutent pas, elles mordent », murmure-t-elle. Lorsque la jeune femme évoque cette épreuve, les larmes coulent sur ses joues, sa voix tremble. Son mari lui serre la main, ne la quitte plus du regard. « J’ai cru mourir, j’ai voulu mourir, parfois je le veux encore. »

    De retour chez eux quelques heures plus tard, la jeune femme souffre le martyre. Elle enrage, pleure, frappe les murs, elle craque. Alya marque une pause, reprend son souffle. « Je ne comprenais pas, je ne comprends toujours pas comment des femmes peuvent infliger un tel supplice à d’autres femmes. Elles m’ont détruite. » La blessure infligée à sa cuisse mettra un mois et demi à se refermer, quand son épaule s’infectera à plusieurs reprises, avant de laisser une grossière cicatrice encore boursouflée, sur quinze centimètres.

    Ce traumatisme, Alya le revit encore et encore, chaque matin : « Quand je me lève, la première chose que je vois dans le miroir, ce sont ces cicatrices qui ne me quitteront jamais. C’est comme si la Hisba était là, tous les jours, pour me rappeler que j’ai eu le malheur de me perdre en rêverie pendant quelques secondes. » Enceinte de cinq mois au moment des faits, Alya perd son enfant quelques jours plus tard. « Il y a une certaine logique, je crois que mon corps a compris qu’aucun enfant ne devrait grandir dans un monde pareil. »

    Mossoul-Est est libérée, Alya est désormais réfugiée à Erbil, mais la jeune femme reste, en quelque sorte, prisonnière de l’EI. « Elles m’ont tout volé, mon corps, mon enfant, jusqu’à ma liberté de rêver. Je suis détruite, jamais je n’oublierai. »

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