• « Implants files » : « Essure est une bombe qui nous détruit chaque jour un peu plus »
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    Aujourd’hui interdit en France, cet implant de contraception définitive commercialisé par les laboratoires Bayer est à l’origine de nombreux incidents aux lourdes répercussions sur le quotidien des victimes. Jeunes pour certaines, moins pour d’autres, ces femmes ont déjà connu la maternité et avaient décidé de prendre des précautions définitives pour éviter une grossesse non désirée. Pour répondre à cette demande, leur gynécologue leur avait posé ces implants, de petits ressorts en alliage de métaux promettant une contraception définitive. Elles pensaient donc être tranquilles, trouver la sérénité. Elles ont plutôt trouvé l’enfer. Douleurs atroces et inexplicables, règles hémorragiques, pertes d’audition, de cheveux ou encore de mémoire : pour de nombreuses patientes Essure, le quotidien après la pose des implants a viré au cauchemar, sur fond de longue errance thérapeutique. Des lectrices de 20 Minutes racontent leur calvaire.
    De lourds symptômes

    Après son remariage, en 2005, Virginie et son nouveau conjoint décident de ne pas avoir d’autres enfants. « Nous avons cru trouver la solution "miracle" avec Essure pour éviter d’être embêtés, se souvient-elle. Quelle erreur… J’ai passé sept ans avec des "bizarreries" – malaises, vertiges, allergies diverses, tennis-elbow, hernies discales aux cervicales. Puis, dès 2012, les choses se sont gâtées encore plus. J’avais des douleurs articulaires et musculaires insupportables qui m’handicapaient et qui ne m’ont pas permis de continuer la randonnée que je pratiquais depuis plusieurs années. Une fatigue ingérable qui me demandait de m’allonger plusieurs fois par jour, des allergies de plus en plus envahissantes, des problèmes digestifs énormes, des otites séreuses à répétition avec parfois perte d’audition totale, des tendinites, des problèmes de sinusite impossible à enrayer, des malaises plus importants, des problèmes de souffle et surtout des démangeaisons anales très désagréables, énumère-t-elle. Je passais ma vie dans les cabinets de radiologie, scanners, IRM et on ne me trouvait jamais rien ! »

    Même schéma pour Stéphanie, qui a été implantée en septembre 2015. « Au bout de quelques mois, la déchéance du corps a commencé. Douleurs musculaires, articulaires, crampes, perte de cheveux, fatigue extrême, troubles intestinaux », Stéphanie devient l’ombre d’elle-même, au point de « finir à ne plus savoir marcher, de plus savoir m’asseoir, l’impression d’avoir le corps d’une femme de 80 ans à l’aube de mes 40 ans », décrit-elle, triste.

    Ses premiers symptômes, Valérie les a eus « quatre mois après la pose de ses implants. J’ai commencé à ressentir des douleurs articulaires horribles à ne plus en dormir, raconte-t-elle. Règles hémorragiques, douleurs pelviennes, douleurs à une oreille, douleurs articulaires et musculaires, fourmillements à une jambe, pertes de mémoire, grosse fatigue » : la liste des symptômes de Valérie est longue. Pour de nombreuses femmes, les douleurs sont si fortes qu’elles rendent impossible une vie sexuelle épanouie.
    Une longue errance thérapeutique avant un traitement lourd et radical

    Pour Virginie, Valérie, Stéphanie et les autres, c’est le début d’une longue errance thérapeutique. « J’ai vécu une errance médicale totale, déplore Laurence. Je suis passée pour une femme faible, fragile et certainement névrosée ». Visite après visite, le médecin de Valérie n’a pas trouvé non plus l’origine de son mal et a fini par lui conseiller d’aller « consulter un psy car mes douleurs étaient dans ma tête », confie Valérie, blessée par le « mépris de nombreux médecins. Essure a gâché cinq ans de ma vie ». Pour elle comme pour d’autres victimes françaises, c’est au hasard d’une recherche sur internet ou d’un reportage télévisé entendu d’une oreille distraite que la révélation a eu lieu. Après de longs mois de souffrances physiques, « de siestes interminables et de larmes », de pertes de mémoire et de fatigue harassante, dont la cause reste sans réponse, Emilie pense devenir folle, perd pied et goût à la vie. Jusqu’à ce jour où, à la télévision, « j’entends distraitement qu’on parle d’implants contraceptifs, raconte-t-elle. Et là je comprends que je suis concernée. Je ne savais même pas qu’on appelait ça des implants, moi, on m’avait juste dit des "Essure". J’écoute, je suis suspendue aux paroles de cette femme qui explique son vécu. Nous sommes le 9 décembre 2016. Elle ne le sait pas encore, mais elle vient de me sauver la vie. Il s’agissait de Marielle Klein, qui a créé l’association Resist », qui vient en aide aux patientes Essure.

    Après des tests médicaux, Emilie, Virginie et leurs compagnes d’infortune découvrent qu’elles sont allergiques au nickel, l’un des métaux constituant les implants Essure. « J’ai fait le lien entre Essure et certains de mes symptômes en lisant sur le web que ces implants étaient faits, entre autres, à base de nickel, auquel je suis allergique », confirme Virginie, qui a fini par être déclarée « travailleuse handicapée ».
    « Essure est une bombe qui nous détruit chaque jour un peu plus »

    Une fois la cause de leurs souffrances identifiée, les options thérapeutiques offertes aux patientes sont lourdes et radicales. « J’ai dû être opérée d’une hystérectomie et d’une salpingectomie bilatérale », explique Stéphanie. Comme la pose du dispositif Essure est définitive, pour se le faire retirer, Stéphanie a également dû se faire retirer l’utérus et les trompes de Fallope. « Je n’avais rien demandé de tout cela, je n’avais aucune envie d’être mutilée », déplore celle qui a subi cette intervention « pour retrouver une vie normale ». Comme elle, Virginie, Valérie, mais aussi Patricia et Laurence ont subi la même lourde intervention chirurgicale « pour enfin revivre », commente la dernière. « Essure est une bombe qui nous détruit chaque jour un peu plus », résume Valérie.

    Rien qu’en France, 175.000 femmes ont été implantées avec le dispositif Essure depuis 2005. Il a été retiré de la vente en Europe en septembre 2017. Aujourd’hui, Marielle Klein, de l’association Resist, se bat pour que chaque porteuse du dispositif soit identifiée et informée des risques liés à cet implant.