/8a7843de4aa37abe9ecfe55827d94e.jpg

  • Front national : un programme économique et social incohérent et xénophobe
    https://france.attac.org/actus-et-medias/le-flux/article/front-national-un-programme-economique-et-social-incoherent-et-xenopho

    Cette note des Économistes atterrés propose une analyse détaillée du programme économique et social du Front national : un programme avant tout au …

    • Le programme du FN voudrait avoir un parfum de gauche en vue du second tour des élections présidentielles. Mais, sur le plan économique et social, c’est un programme d’extrême droite, indigne, au service de l’intérêt des puissants. Son contenu ne permet pas de considérer comme anecdotiques les tristes mesures prises par les élus des « mairies brunes » après les municipales de 2014.

      Le programme du FN cherche à séduire les classes populaires par un saupoudrage de propositions sociales (retraite à 60 ans, maintien du taux de TVA, accès des bénéficiaires de logement sociaux à la propriété) ou qui portent atteinte aux intérêts des puissants (maintien de l’ISF, sanctions contre les entreprises multinationales qui pratiquent l’évasion fiscale).
      Mais son « patriotisme économique » est fondé sur le logiciel néolibéral du FN. Il est au service du patronat français et des rentiers. En cherchant à affaiblir et émietter les syndicats, il s’en prend aux salariés qui ont plus que jamais besoin de syndicats puissants. Son « patriotisme économique » est fondé sur les mythes et les valeurs de l’extrême droite. Il veut faire croire que la France est un pays d’immigration massive qui ne peut se permettre de continuer à accueillir des étrangers. Comme si les étrangers prenaient les emplois des Français ou étaient attirés par les prestations sociales... dont ils sont souvent exclus lorsqu’ils arrivent en France, poussés par les guerres ou la misère. Comme si les immigrés ne participaient pas pleinement à l’activité économique de la France, comme s’ils ne contribuaient pas au financement de la protection sociale davantage qu’ils n’en bénéficient.

      La promesse d’une « France prospère » repose sur la vision enchantée d’un souverainisme et d’un protectionnisme « patriote » mal compris, dont les effets, supposés immédiatement bénéfiques signalent que l’organisation de la transition est un impensé du programme. Comme s’il suffisait de claquer des doigts pour sortir de l’Union européenne et en retirer aussitôt des bénéfices inouïs. Comme si sortir de l’euro et retrouver le franc allait permettre à la Banque de France de financer sans limite les politiques publiques annoncées. À moins que le FN n’imagine pouvoir retirer une manne économique en excluant les étrangers de l’emploi et des prestations sociales et en mettant un coup d’arrêt à l’immigration ? Quoi qu’il en soit, le modèle productif de cette « France prospère » repose sur la réindustrialisation, en particulier dans le domaine militaire, et se situe aux antipodes de la transition écologique annoncée : il ne s’agit en aucun cas d’imposer aux entreprises de se reconvertir ou de changer leurs manières de produire.

      Les mesures d’emploi et les mesures sociales du programme du FN consistent pour l’essentiel à institutionnaliser une « priorité nationale » discriminatoire à l’encontre des étrangers : taxe sur l’embauche des travailleurs étrangers, allongement de la condition d’antériorité de résidence à 20 ans pour accéder au minimum vieillesse, système de santé et accès au logement social réservés aux Français. Si le FN veut supprimer la directive sur les travailleurs détachés, ce n’est pas pour améliorer leurs droits mais pour protéger les entreprises françaises. Et c’est un malentendu : loin de mettre fin au travail détaché et à ses abus, la suppression de cette directive ne ferait qu’exacerber le dumping social.

      Quant à la prétendue défense des droits des femmes revendiquée par Marine Le Pen, elle ne doit tromper personne. Sous le vernis moderne et féministe se cache une attaque contre une religion, l’islam – jetant le soupçon sur ceux qui la pratiquent ou sont supposés la pratiquer. Le FN n’a jamais été et n’est pas devenu féministe. Loin de défendre l’autonomie des femmes, il est conservateur, exprimant tout haut ses réserves sur le droit à l’avortement ou son rêve d’un statut des femmes au foyer.

      Nous ne pouvons pas dire que nous ne savons pas.

      Anne Eydoux
      Sabina Issehnane