Commentaires | lettre ouverte à Edwy Plenel

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  • Suite à l’interview de macron par mediapart.
    Tolérance 0 dans les quartiers.

    La mondialisation de la "tolérance zéro". Loïc Wacquant. octobre 99. Agone 22 « État, démocratie et marché »
    http://www.homme-moderne.org/societe/socio/wacquant/montoler.html
    http://agone.org/libre/ebook_326.pdf
    Depuis le début des années 80, un réseau de think tanks néoconservateurs basés principalement sur la côte est des États-Unis mène une offensive concertée visant à saper la légitimité de l’État-providence et à lui substituer, dans les régions inférieures de l’espace social, un État-pénitence capable de « dresser » les fractions de la classe ouvrière rétives à la nouvelle discipline du salariat précaire et sous-payé, et de neutraliser ceux d’entre leurs membres qui s’avèrent par trop disruptifs. C’est ainsi qu’après avoir mené campagne en faveur du démantèlement des programmes d’aide aux familles démunies (welfare) entamé par Ronald Reagan et parachevé par Bill Clinton, le Manhattan Institute, centre névralgique de la guerre intellectuelle à l’État social avec l’American Enterprise Institute et le Cato Institute, s’est employé à populariser une séries de mesures policières et judiciaires qui, en instaurant une véritable « chasse aux pauvres » dans la rue, reviennent à pénaliser la précarité résultant justement de la démission organisée de l’État sur le front économique et social.

    pointg.gif (57 octets) Parmi les notions et les dispositifs que ces intellectuels-mercenaires ont activement propagé parmi les journalistes, chercheurs et dirigeants du pays : la soit disant « théorie de la vitre cassée », opportunément exhumée du cimetière criminologique où elle gisait depuis quinze ans, selon laquelle la lutte contre la grande violence criminelle nécessite une répression sévère et tatillonne de la petite délinquance et des comportements incivils qui en seraient les signes avant-coureurs ; l’impératif de « qualité de la vie », prétexte à une politique de nettoyage de classe des espaces publics dans les villes ; et le slogan « la prison marche », bien fait pour justifier l’expansion exponentielle et indéfinie du système pénitentiaire dans lequel sont désormais entreposés les indésirables — la population carcérale des États-Unis a quadruplé en vingt ans pour frôler les deux millions alors même que la criminalité stagnait puis reculait durant cette période. Ces mesures ayant été adoptées par son nouveau maire, Rudoph Giuliani, grand partisan du remplacement de l’aide sociale par le travail forcé (workfare), la ville de New York est devenu le laboratoire où s’invente un nouveau gouvernement de la misère qui marie la « main invisible » du marché du travail déqualifié et dérégulé au « poing de fer » d’un appareil policier et pénitentiaire omniprésent, intrusif et hypertrophique.(1) De New York, ces notions et ces dispositifs se sont diffusés à travers les États-Unis avant d’être importés par un nombre sans cesse croissant de pays d’Europe et d’Amérique latine dont les gouvernements se révèlent avides d’engranger les profits électoraux promis par l’éventuel succès de la « lutte contre l’insécurité ».❞

    La tolérance zéro en France | Cairn.info
    https://www.cairn.info/revue-francaise-de-science-politique-2009-4-page-655.htm

    S’il est un domaine où, au cours des dernières années, les élites politiques françaises ont cherché à l’étranger de nouvelles recettes d’action publique, c’est bien celui de la lutte contre l’insécurité. Nombreux sont les emprunts, les références mobilisées par les acteurs politiques français pour définir, dans leurs discours, « la » politique qu’il conviendrait de mener pour lutter contre la délinquance. L’emprunt à des programmes et des idées venant de l’étranger s’est posé à de nombreuses reprises : le plaider coupable instauré en 2002 n’est-il pas une importation du plea bargaining américain ? L’adoption du bracelet électronique et la définition de ses modalités de mise en œuvre n’ont-elles pas été précédées de fréquents voyages au cours desquels parlementaires et membres du ministère de la Justice ont observé les pratiques existantes ailleurs
     ? Les peines planchers pour les multirécidivistes adoptées par la nouvelle majorité en 2007 ne sont-elles pas la directe application des politiques américaines imposant des sanctions sévères et rigides aux délinquants les plus dangereux ?

    On le voit, la référence aux pays anglo-saxons, et notamment aux États-Unis, apparaît ici essentielle. Si bien qu’en matière de politiques de sécurité et en matière criminelle, s’est posée de façon récurrente la question de l’importation du modèle américain. Assistet-on en France, comme dans d’autres pays occidentaux, à une américanisation des politiques publiques ?