[infokiosques.net] - Si on se touchait ?
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Je suis un homme cissexuel [1], blanc, avec des papiers français, presque la trentaine, hétérosexuel, valide, avec une formation universitaire relativement élevée, issu d’une famille bourgeoise de gauche et qui joue parfois avec son apparence de genre.
Si ces deux textes m’ont touché c’est parce qu’ils portent sur deux thèmes de réflexion qui m’accompagnent beaucoup ces derniers temps.
Le premier, Les hommes #proféministes et leurs ami.e.s, essaye de comprendre pourquoi les hommes hétérosexuels ayant des réflexions féministes n’arrivent à entretenir, majoritairement, des relations amicales sincères, sensuelles, confiantes et intimes qu’avec des femmes. Je me retrouve beaucoup là-dedans, même si je ne me définis pas comme proféministe. Il m’est rarement arrivé dans ma vie de vivre des relations d’amitié intense avec d’autres garçons et je cherche toujours à comprendre pourquoi (même si je sais en partie) et surtout comment changer cela.
Le second, A genoux : connaissance charnelle, dissolution masculine, faire du #féminisme, parle d’#hétéronormativité et de désir. Il utilise les concepts de déterritorialisation, puissance et pouvoir de Deleuze et Guattarri et les applique au corps des hommes. Pourquoi cherchons-nous si souvent à conquérir l’espace, prendre de la place, tout en nous protégeant constamment contre les attaques, en fermant notre corps ? Pourquoi avons-nous si peur de la pénétration ? Pourquoi ai-je vécu l’extrême majorité de ma vie sexuelle hétéro sans même imaginer que je pouvais être attiré par d’autres hommes ? Comment atteindre le désir féministe ?
Sans toujours en parler explicitement, ces textes proposent tous les deux des pistes particulières par rapport à la place des hommes dans les luttes contre le #patriarcat. Plutôt que de se demander si et comment un homme pourrait être féministe, ou si un oppresseur peut participer aux luttes des individus qu’il opprime (ce qui reste une bonne question), ils proposent que les hommes ne soient plus seulement des soutiens aux luttes féministes mais travaillent sur leurs relations au sein de leur #classe de genre. En dehors des propositions de #déconstruction de l’#éducation genrée masculine, peu de mecs prônent aussi ça. J’ai moi-même longtemps plus travaillé sur mon rapport aux femmes, sur comment je peux prendre de la place, comment je rabaisse mes copines, comment je fais pas toujours gaffe au #consentement, comment je profite parfois de mes #privilèges sans m’en rendre compte, etc., sans réfléchir à pourquoi je trainais surtout avec des non-hommes et me sentais plus à l’aise en leur compagnie. C’est sûr qu’il ne faut pas arrêter de se poser ces questions. Mais j’ai de plus en plus le sentiment que de soutenir les copines dans leurs luttes (quotidiennes ou non) en participant à des groupes de réflexion et d’action en #mixité, est nécessaire mais pas suffisant. Il faut aussi qu’entre personnes construites comme oppresseurs (par exemple par la non-mixité), on arrive à faire un travail que seuls nous pouvons faire, et qui va dans le sens de l’#abolition du patriarcat. Sans tomber dans la solidarité masculine, il faut qu’on arrive à casser cette froideur souvent ressentie face aux autres hommes, qu’on bosse sur nos amitiés, nos intimités, nos sexualités... qu’on supprime notre homophobie et les relations de pouvoir entre hommes. Cela permettra peut être, comme le dit Pronger, d’incarner le désir féministe et comme le dit Schmitt, de rééquilibrer le rapport genré à la prise en charge affective.