CNNum : « La question des choix technologiques de l’Etat reste entière »

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    Faire contrepoids aux grandes entreprises américaines, c’est aussi une question de souveraineté nationale et/ou européenne ?

    C’est une question de souveraineté, de diplomatie culturelle, de présence francophone à venir… On le voit bien sur le cas des données de l’éducation, avec l’autorisation donnée par la Direction du numérique éducatif aux établissements scolaires d’utiliser les services numériques de Google ou Microsoft. Ce sont des données qui ont de la valeur, qui permettent de la R&D en matière d’apprentissage adaptatif, par exemple, et qui sont parties vers des acteurs privés. Or, on pourrait négocier autrement l’utilisation et la régulation de ces données. Quand l’Etat répond par des « chartes de confiance », plutôt que par des standards et des négociations d’égal à égal, il néglige la capacité que nous devrions avoir de réagir, de pousser à transformer les usages et à les questionner. Nous ne sommes pas assez créatifs, mais je pense que nous allons le devenir. Les sujets européens, ce ne sont pas seulement la régulation ou la fiscalité, mais aussi la littératie numérique ou l’éducation au XXIe siècle. Et tous ces sujets gagneront en puissance si nous travaillons en réseau.

    Parmi les sujets que vous mettez en avant figure « [l’équilibre] entre augmentation du niveau de sécurité des citoyens et respect des libertés individuelles et collectives ». Le CNNum s’est souvent exprimé sur ces questions, de manière très critique, mais n’a pas été écouté…

    Nous avions fait le constat qu’il y avait eu, en quelques années, seize lois censées lutter contre le terrorisme, dont certaines n’étaient même pas allées jusqu’aux décrets d’application. Nous avons toujours été très sensibles au fait que de nouvelles lois permettaient subrepticement de restreindre les libertés portées par le Web, sans même parler des libertés publiques en général. Quand nous avons discuté du fichier TES [le mégafichier qui doit regrouper les données d’identité des Français ndlr], nous nous sommes rendu compte que dans la complexité technologique, juridique, dans la difficulté des mesures d’impact, la question des choix technologiques de l’Etat restait ouverte. Il y a un effort de reconception à faire sur la manière dont sont opérés ces choix technologiques de grand impact. Le fichier TES a toujours été présenté comme une simple réforme organisationnelle des services administratifs, et les aspects politiques ont été volontairement minorés. Or ce qui a été engagé sera difficilement réversible… Avec le nouveau gouvernement, nous pouvons espérer peser sur le fait qu’il est nécessaire de ne pas cacher qu’une réforme organisationnelle a un impact politique, un impact sur les libertés. La question des choix technologiques reste entière, elle n’est pas assurée aujourd’hui.