• l’histgeobox : 327. Jean Ferrat : « La montagne » (1964)
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    La Montagne dresse le portrait d’un monde paysan en perte de repères et dont le travail dépend moins des sols et du climat que des produits phytosanitaires ou du cours des denrées agricoles. D’aucuns y voient la première chanson écologiste et une dénonciation avant-gardiste de la malbouffe. Le chanteur perçoit déjà les limites du modèle agricole productiviste lorsqu’il s’inquiète de la standardisation des produits en mentionnant ce « poulet aux hormones » désormais élevé en batterie.
    D’autres regrettent le contraste caricatural établi par Ferrat entre un environnement rural dépeint comme authentique et l’univers frelaté et artificiel des villes. Celui qui part abandonne une vie rude mais saine pour une existence étriquée à manger du poulet aux hormones dans un HLM... en attendant peinard « que l’heure de la retraite sonne ». Pas glop.
    Le monde rural y est envisagé comme un ordre éternel. Ce tableau de l’agriculture de montagne mêle nostalgie et idéalisation plus ou moins irénique d’une vie paysanne statique et hors du temps. Cette conception s’inscrit dans « un renversement des valeurs attachées au monde paysan. A la dévalorisation du début des années 1950, succède l’engouement des citadins pour le rural et le triomphe du paysannisme. La plupart des thèmes qui ont resurgi à la fin des années 1960 faisaient déjà partie du discours agrarien au début du siècle. S’y ajoute l’idée que les agriculteurs sont des privilégiés parce qu’ils bénéficient de la qualité de la vie : la campagne est assimilée à la nature. Maints citadins recomposent ainsi leurs racines sur le mode de la nostalgie. Ils transcendent le passé, se recréant une mémoire familiale idéalisée. »