• Accusée d’exploiter ses salariés, la grande enseigne Primark a-t-elle changé ses pratiques ?
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    En octobre 2016, le magazine Boutique2Mode publiait une enquête sur Primark, le troisième distributeur mondial de textile, qui avait débarqué en France tambour battant. Reproduit sur Basta !, l’article révélait des méthodes de management hyper-agressives, violant les droits des salariés, poussant ces derniers à bout. Depuis, « rien n’a changé », raconte le journaliste Laurent Maurel, qui a continué à suivre l’entreprise et à collecter les témoignages de ses salariés. Ce dernier vient de publier deux (...)

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    • Patron voyou, salariés en danger
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      « C’était le premier jour de notre formation. Tous les vendeurs étaient réunis dans le magasin, et un responsable nous a clairement dit : “ Chez Primark on a beaucoup d’argent ; même si vous nous envoyez aux prud’hommes, cela ne nous fait pas peur. Nous avons les moyens de payer“. » Le ton est donné pour Camille, ex-caissière au magasin de Lyon. « Quand Primark a ouvert son premier magasin, c’était vraiment du grand n’importe quoi », confirme Delphine Prisciotta, déléguée du personnel à Marseille. « On avait l’impression qu’ils ne connaissaient absolument rien au droit du travail. Par exemple, au début, un salarié qui portait des chaussures de marque apparente ou un jean légèrement gris clair [alors que le noir est obligatoire] était renvoyé chez lui sans être payé, au mépris de la loi. Même chose pour les pauses, qui étaient décidées arbitrairement », peut-on lire dans un témoignage qu’elle livre sur le site de la CFDT.

      Le cas de la tenue de travail et des temps de pause font souvent débat. A Lille notamment, plusieurs salariés témoignent qu’il leur est interdit de porter une veste pour se protéger du froid dans la réserve. « Comme ce n’est pas la tenue réglementaire ils ne veulent pas qu’on en mette, du coup certains tombent malade », dénonce Sébastien*, vendeur. « S’ils oublient d’amener leur t-shirt Primark, on leur en donne un sale, alors que pourtant il y en a des propres disponibles, dénonce pour sa part Sophie, qui a travaillé au service RH de Marseille. Pour les pauses aussi le système est assez mesquin : elles sont chronométrées, et il nous arrivait qu’un manager nous demande de retirer une minute de travail quand un salarié dépassait le temps imparti. »
      Ruptures programmées des périodes d’essai

      Officiellement, le problème n’existe pas. « Il n’y a jamais eu de fins de périodes d’essai programmées », se défend Christine Loizy. Sur le cas de Sophie Duray, qui a décidé de saisir les prud’hommes, la PDG France se montre pourtant plus prudente : « Je ne commenterais pas une affaire en cours ». Le témoignage de cette ex-salariée de La-Valette-du-Var est éloquent. « Le 22 avril 2016, la direction nous avait réunis pour annoncer certaines ruptures de période d’essai. Lorsque j’ai demandé si j’en faisais partie, on m’a répondu par la négative », se souvient-elle. Pourtant, le jour même, une lettre l’attendait chez elle pour lui notifier son licenciement. « C’est grâce à la page Facebook Primark la Valette des employés scandalisés que j’ai décidé de me lancer dans cette procédure, voyant que je n’étais pas la seule dans cette situation. »

      En effet, les langues se délient sur la page Facebook en question (qui totalisent plus de 4000 « j’aime »), si bien que l’avocat de Sophie Duray, Maître Frédéric Casanova, affirme que plus de « 50 ex-salariés de La-Valette-du-Var se sont manifestés suite à la médiatisation de l’affaire ». Selon Sophie Duray, une centaine auraient subi le même sort qu’elle. Quel intérêt pour Primark de procéder ainsi ? « Quand une entreprise recourt massivement à des CDD ou des contrats d’intérims, elle doit s’acquitter de primes de précarité. Une sorte d’amende qui ne s’applique pas si vous renvoyez des CDI avant la fin de leur période d’essai », répond Frédéric Casanova.