Miguel Abensour (1939-2017), philosophe subversif | Le Club de Mediapart
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Un article passionnant sur l’utopie, le marxisme et l’auto-émancipation.
Miguel Abensour nous a quittés, une très grande perte pour la raison utopique. Il fut sans doute un des penseurs les plus importants, les plus novateurs et les plus percutants de la France contemporaine ; son œuvre est incomparablement plus riche et plus intéressante que celle des philosophes conformistes qui occupent les plateaux télévisés et les rayons des supermarchés du livre. Il représente, dans le spectre de la philosophie politique moderne, la radicalité utopique libertaire dans toute sa force subversive.
Dans ce petit hommage à un très grand philosophe, nous allons passer en revue, brièvement, deux livres de Miguel Abensour sur l’utopie, et un ouvrage récent, dédié à sa pensée.
L’ouvrage L’Utopie, de Thomas More à Walter Benjamin (Paris, Sens & Tonka, 2000, 211 pages) est composé de deux essais denses et profonds, portant sur deux moments forts de l’histoire de l’utopie moderne : l’invention, par Thomas More, d’un nouveau dispositif littéraire, philosophique et politique, et la reformulation du projet utopique, face au péril extrême, dans les derniers écrits (1935-40) de Walter Benjamin.
L’auteur n’hésite pas à prendre le contrepied de la doxa dominante, figée dans sa haine de l’utopie - cette passion triste, ce « symptôme répétitif qui, de génération en génération, affecte les défenseurs de l’ordre existant en proie à la peur de l’altérité ». Ce n’est pas l’utopie qui est génératrice de totalitarisme, c’est une société sans utopie qui est très exactement une société totalitaire, prise dans la dangereuse illusion de l’accomplissement.