Les kapos aussi ont fini dans les chambres à gaz.

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  • BALLAST | Gaëtan Flocco : « Tous les sujets ont intériorisé les catégories capitalistes »
    https://www.revue-ballast.fr/gaetan-flocco

    Entièrement. Évidemment, l’opposition travail/capital est structurante et il ne s’agit nullement de l’évacuer de l’analyse. D’ailleurs, dans son livre d’où est extraite cette citation, Frédéric Lordon le rappelle bien2 : pour lui, le rapport salarial, c’est-à-dire cette asymétrie objective entre des travailleurs dénués de tout, qui ne peuvent faire autrement pour vivre que d’échanger leur force de travail contre de l’argent, et des capitalistes qui, eux, possèdent tout, demeure le cadre structurant de l’enrôlement capitaliste. Toutefois, il est fondamental de montrer aussi combien ce cadre structurant ne se résume pas à une opposition manichéenne, les cadres illustrant bien une intrication ou un entremêlement entre le travail et le capital. D’un côté, on a en effet un statut qui les range du côté des salariés, leur faisant dire parfois qu’ils seraient des travailleurs comme les autres, les « grouillots de base » ou les « OS de l’an 2000 ». De l’autre, on a aussi des individus qui adhèrent à des valeurs, des modes de vie, des attentes, des conceptions du travail et de l’entreprise qui les rapprochent des classes dirigeantes.

    Les cadres se font enfler par l’illusion d’être du côté des #dominants.
    Ils collaborent activement à l’exploitation des employés parce qu’ils s’imaginent ne pas être des #prolétaires eux-mêmes. Et les employeurs se frottent les mains et entretiennent soigneusement cette #confusion : elle leur permet d’avoir des relais serviles et zélés pour mieux presser le travailleur tout en en faisant porter la responsabilité à des sous-fifres clairement identifiables par les exploités.
    J’avais déjà écrit sur ce marché de dupes : https://blog.monolecte.fr/2006/01/11/les-kapos-aussi-ont-fini-dans-les-chambres-a-gaz

    S’il a un petit pécule et pas mal d’avantages immédiats, le cadre oublie un peu trop facilement que son aisance vient tout de même du #salaire et non pas de la rente (même s’il tente de s’en constituer une dans le temps !) et qu’il suffit que le capitaliste lui retire son poste de #travail pour que tous ses avantages disparaissent. Il est en fait aussi dépendant que le petit employé des systèmes de #solidarité sociale qu’il conchie pourtant abondamment tant il croit être au-dessus de cela, voire en #compétition avec des dispositifs qui lui coûtent (et entament son #rêve de rente), alors qu’en fait, même s’il mettra un peu plus de temps à consommer ses éconocrocs, le #chômage, ce grand égalisateur par le bas, le remettra forcément à sa place de simple variable d’ajustement.

    • La même arnaque est à l’œuvre avec la figure de l’auto-entrepreneur, qui s’imagine petit #patron et donc #pré-capitaliste, alors qu’en fait, il n’est qu’un #auto-exploité et surtout la nouvelle chair à canon de l’économie néolibérale : le #sous-traitant isolé, sans aucune espèce d’assise ou de défense, livré tout ficelé aux appétits sans fin des grosses entreprises qui fixent unilatéralement les règles d’un jeu qui ne profite plus qu’à une toute petite poignée d’individus.

      Il s’imagine un aigle, alors qu’il n’est que le gros pigeon dune autofiction, celle qui consiste à faire passer le pire des #lupemprolétaires, le travailleur à façon pour le prototype du nouveau #capitaliste postindustriel.

      La figure de l’entrepreneur acquiert un rôle majeur dans la sphère publique depuis que la crise économique de 2008 a mis en évidence la difficulté d’intégrer socialement la population par le mécanisme du travail salarié. Comme il est désormais plus difficile de garantir un volume de travail suffisant et ininterrompu pour la majorité de la population, on voit apparaître cette injonction à entreprendre, couplée à une rhétorique de type « poursuis tes rêves, pars à la conquête du succès. Car quand on veut, on peut ».

      C’est une manière de contourner les problèmes économiques structurels de nos sociétés occidentales, marquées par la crise des compromis sociaux de l’après-guerre. Pour moi, c’est une véritable crise de régime qui frappe une société dont la colonne vertébrale est l’emploi, en tant que voie d’accès à la citoyenneté, aux droits sociaux, à la consommation. Tout cela est en passe de s’effondrer.

      http://lvsl.fr/entretien-avec-jorge-moruno

    • Envisager l’économie de cette façon mais aussi la société dans son ensemble en entretenant la confusion sur les intérêts de classes. Mais ça marche ...

      L’auto-entrepreneur ou comment aller tous les matins sur le chantier pour vendre sa force de travail.