Francis Dupuis-Déri – L’anarchie dans la philosophie politique (2007) – Le Partage

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    Francis Dupuis-Déri – L’anarchie dans la philosophie politique (2007)
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    Posted By : LePartage 30 décembre 2014

    Dupuis_D_ri_FFrancis Dupuis-Déri (né en 1966 à Montréal) est un écrivain et professeur québécois. Depuis 2006, il enseigne au département de science politique et à l’Institut de recherches et d’études féministes (IREF) de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Il a été chercheur au Massachusetts Institute of Technology et au Centre de recherche en éthique de l’Université de Montréal (CREUM). Il détient un doctorat en science politique de l’Université de la Colombie-Britannique (UBC) à Vancouver. Il a collaboré à des journaux tels Alternatives, Le Couac et Le Devoir. Il travaille occasionnellement comme analyste pour la Société Radio-Canada.

    Francis Dupuis-Déri étudie notamment les mouvements sociaux tels l’altermondialisme, l’antiféminisme et le masculinisme. Il se prononce sur plusieurs sujets tels les hommes proféministes, la répression policière, l’anarchisme, le profilage politique, la guerre et la démocratie.

    Pour ceux qui ne l’auraient pas vu, une excellente vidéo où il parle de ce qu’est, et devrait être, une vraie démocratie !

    “L’anarchie dans la philosophie politique. Réflexions anarchistes sur la typologie traditionnelle des régimes politiques”

    Introduction

    « Quel est le meilleur régime politique ? » Voilà la question fondamentale à laquelle la philosophie politique occidentale s’est traditionnellement attribué le devoir de répondre, dénombrant généralement trois types purs de régimes (la monarchie, l’aristocratie et la démocratie) et un régime mixte (la république), constitué d’éléments des trois régimes purs [1]. Sous certaines conditions, ceux qui exercent le pouvoir dans ces trois régimes purs peuvent chercher, défendre et promouvoir la réalisation du « bien commun » pour l’ensemble de la communauté politique, ainsi que la « vie bonne » pour chacun de ses membres. À l’inverse, ceux qui exercent le pouvoir dans les régimes dégénérés (la tyrannie, l’oligarchie, etc.) cherchent uniquement à jouir égoïstement d’une bonne vie (d’un point de vue matériel plutôt que moral) au détriment du bien commun et de la réalisation de la vie bonne pour leurs sujets. Quant à l’« anarchie », les philosophes les plus influents de la tradition occidentale l’ont identifiée comme la forme dégénérée et pathologique de la démocratie, entendue ici sous sa forme directe où tous les citoyens peuvent participer à l’assemblée où se prennent les décisions politiques collectivement et à la majorité.

    Assimiler ainsi l’anarchie à une forme dévoyée de la démocratie directe constitue une erreur grave qui appauvrit la philosophie politique. Je prétends au contraire qu’une typologie des régimes politiques doit inclure l’anarchie non pas comme une forme dévoyée de la démocratie, mais plutôt comme l’un des idéal-types des régimes politiques légitimes. Je vais identifier l’anarchie comme un quatrième type de régime politique pur dans lequel tous les citoyens se gouvernent ensemble directement grâce à des délibérations consensuelles, sans avoir recours à une autorité dotée d’appareils coercitifs. Il s’agit donc d’offrir un tableau plus complet et cohérent des régimes politiques que ne le propose la tradition de la philosophie politique occidentale, et de démontrer que l’anarchie ne doit pas être conçue comme une forme dérivée d’aucun des autres régimes. Pour mener cette démonstration, il convient dans un premier temps de synthétiser le discours quantitatif des philosophes politiques au sujet des types purs de régimes politiques, d’analyser ensuite l’approche qualitative utilisée par les philosophes pour distinguer entre les « bons » et les « mauvais » régimes politiques, puis finalement de discuter de la nature de l’anarchie. Cette démarche se heurte toutefois à un défi important lorsqu’il convient de distinguer l’anarchie de la démocratie, les deux régimes ayant plusieurs caractéristiques en partage. Une attention particulière sera donc portée à la relation ambiguë qu’entretiennent ces deux régimes dans la tradition occidentale.