Je rêve d’incorporer dans une exposition
Une radiographie de mes calculs
De vésicule biliaire. Refus du médecin.
Je me lève
Comme un ressort
Pour noter mes rêves
La Corée du Nord esquisse
Un geste vers la désescalade
Avec les Etats-Unis
Niveau bac à sable :
C’est le plus intelligent des deux
Qui arrête en premier ?
Pendant ce temps-là, les personnes photographiées
Autour de Kim Jong-Un continuent, inlassablement
De prendre des notes sur de petits calepins
Un coup de plumeau
Sur la tête de lièvre de Martin
Et elle redevient une œuvre d’art
J’entame le ménage de ma chambre
Cela n’avance pas, trop de livres
Trop d’images et trop de souvenirs
Et si c’était cela ma plus grande difficulté
Dans l’existence, trop de livres, d’images
Et de souvenirs qui me barrent la route ?
Et les souvenirs
Souvent le sentiment
De les fabriquer dans l’instant
Fabriquer des souvenirs
Dans l’instant, vous voulez dire
Photographier ?
Je me demande si
Sister Amxociline ne serait pas en train
De me foutre la paix : j’écris !
Sentiment enivrant s’il en est
Recouvrer ses facultés mentales
Si décevantes soient-elles, parfois
Sentiment enivrant
Recouvrer l’appétit
Se cuisiner du poisson
Certaines fictions hollywoodiennes
Convalescence, creusent de ces sillons !
Quand dois-je rencontrer Winona Ryder ?
La seule trace du rêve de cette sieste
Est un détail pauvrement érotique
Je ne demande pourtant pas grand-chose
Je ne demande pourtant pas grand-chose
Une situation de départ légèrement illogique
Je m’occupe du reste pour ce qui est du récit
Ferais-je aussi bien de tout inventer ?
Non, la seule chose qu’on ne peut pas inventer
Dans une fiction, ce sont les rêves
La Corée du Nord
A-t-elle les moyens
De lancer une attaque nucléaire ?
Le bilan des enfants morts
Dans un hôpital public indien
S’alourdit
Après Charlottesville,
Des manifestants abattent
La statue d’un soldat confédéré
Je jette un œil à mes récits en cours
X, Punaises, Les Salauds, la Passagère et, même
La petite fille qui sautait sur les genoux de Céline
Aucun pour lequel
J’aurai, aujourd’hui
Le courage de m’y (re)mettre
Et du coup j’attaque la salle de bain
Effort assez différent
Mais, pareillement, l’opiniâtreté paie
Je tente une sortie
Entre deux ondées
Bien m’en prend, pas une goutte
Impression admirable des rues désertes
Baignées d’une lumière sombre et grise
Les odeurs capiteuses des jardins après la pluie
En chemin je me tiens compagnie
Avec quelques rêveries éveillées
Je fais la connaissance d’une architecte
Elle porte des chaussettes
Aux orteils séparés et multicolores
Elle construit des ponts de par le monde
Sur la petite place du Village
On sert des bières à des jeunes parents
Pas très attentifs à leurs enfants
Une voiture crisse en freinant
Un enfant épargné, on engueule
La conductrice, ma charmante architecte
Je ne sais plus quoi inventer
Pour rencontrer cette charmante architecte
Je la sauve de mille périls, je suis comme ça
Mais chaque fois
Une manière d’impossibilité
Se met de nouveau en travers de notre rencontre
Finalement mes rêveries éveillées
Sont à peine meilleures
Que mes rêves sous Amoxiciline
Je rentre
Je me fais une soupe froide
Comme d’autres prennent une douche éponyme
Je me demande si je n’ai pas gâché
Ma promenade avec mes rêveries
Du Ventre de l’architecte
Je sais très bien ce que je fais
En prenant une douche avant
D’aller voir Nostalghia au Keaton
Toute
Ma
Tête !
Nostalghia
D’Andreï Tarkovski
Sous Amoxiciline
La beauté à couper le souffle
Des panoramiques
D’Andreï Tarkovski
Les surprises narratives
D’Andreï Tarkovski
Quand on ne les attend plus
La magie poétique
Des décors d’Andreï Tarkovski
Le dernier plan qui pourrait me faire pleurer
La photographie
D’Andreï Tarkovski
Et tout est comme ça dans ce film
Quitte à restaurer le film
N’aurait-il pas été utile
De resynchroniser la bande-son ?
Ou est-ce les bruits de pas
Qui précèdent les pas
Ne concourent pas à la nostalgie ?
Les rues
Se repeuplent
Hélas