Tous les subterfuges sont bons
Pour retarder la reprise du travail
Je fais un long détour à pied
Je fais un long détour à pied
Même sous le crachin
Je garde ma tête de cévenol encore quelques jours
Mais mes pas sont impuissants
À m’égarer complètement
Et je finis par entrer dans l’immeuble
Je suis assailli par mille souvenirs
Notamment olfactifs, en redoutant
Qu’ils ne viennent effacer ceux cévenols
C’est donc ici ma place à nouveau
Pour une nouvelle année ?
Pour combien de nouvelles années ?
J’estime être en droit
D’attendre des réponses claires
À ces deux questions
Je bois
Mon premier café
De captivité
J’avoue ne pas comprendre du tout
La langue dans laquelle sont écrits
Tous les mails reçus en mon absence
Incroyable, à peine croyable
Apparemment, je n’en reviens pas
Je sais encore me servir d’un ordinateur
Après une heure
D’open space
Une céphalée
Après deux heures d’open space
C’est comme si tout ce qui avait été pensé
Patiemment dans les Cévennes, était anéanti
Cela faisait longtemps
Que tu n’avais pas écrit
Des phrases comminatoires
Harengs à l’huile
Poivrons farcis au boulgour et pois
Clafoutis aux prunes – café
Rires et souvenirs cévenols
Avec Clément et Juliette
Dois-je vraiment retourner en open space ?
Bref échange de messages textuels avec elle
Et déjà des envies d’école buissonnière
Dire que c’est de la sorte que les choses ont commencé
Que
Veut-
–Elle ?
Et
Qu’est-ce
Je veux ?
Pourrait-on
Vouloir
La même chose ?
Que veut-elle ? ― aucune idée
Et qu’est-ce que je veux ? ― pas bien sûr
Pourrait-on vouloir la même chose ? ― j’en doute
Aucune idée
Pas bien sûr
J’en doute
Le bilan de la première journée
D’open space est maigre, si ce n’est
Céphalée, douleur dans le poignet
Ce n’est pas facile
Tous les jours
La vie de poète
Et avec horreur
Je constate qu’après une journée d’open space
Je n’ai envie de rien en particulier
En une seule journée d’open space
Avoir annihilé des ressources
Patiemment amassées pendant un mois
Des fois ce n’est que cela
Attendre patiemment devant l’écran
Et attraper le poème au vol
Dans une petite rue de Montreuil
Un jeune homme fume son narguilé
Avec un serpent en écharpe
Deux rues plus loin
Une clocharde fait du scandale
Et insulte qui passe
Rue Marceau
Toute une école
A été détruite
Je ne suis pas sûr
De disposer des forces nécessaires
À une telle vie, à un tel retour
J’ai envie de faire
De nouvelles choses
Pour cela que je range le garage
J’ai envie de faire de nouvelles choses
Pour cela que je m’achète
Un nouvel ordinateur
L’ Amoxiciline
Laisse derrière elle
D’impressionnants sillons de fatigue