Contents · LRB 6 January 2000

/v22

  • « Une amère déception » Edward Said sur sa rencontre avec Sartre, de Beauvoir et Foucault
    Etat d’Exception | Eugene Wolters | 25 septembre 2017 | Source : Critical Theory. |Traduit de l’anglais par SB, pour Etat d’Exception.
    http://www.etatdexception.net/une-amere-deception-edward-said-sur-sa-rencontre-avec-sartre-de-beau

    « Bien sûr, Sartre avait quelque chose pour nous : un texte préparé sur deux pages dactylographiées qui – j’écris entièrement sur la base d’un souvenir vieux de vingt ans – a loué le courage d’Anouar al-Sadate dans les platitudes les plus banales imaginables. Je ne me souviens pas qu’autant de mots aient été prononcés à propos des Palestiniens, du territoire ou du passé douloureux. Certes, aucune référence n’a été faite au colonialisme de peuplement israélien, semblable à bien des égards à la pratique française en Algérie […]. J’étais anéanti de découvrir que ce héros intellectuel avait succombé dans ses dernières années à un mentor si réactionnaire, et que sur la question de la Palestine l’ancien guerrier et défenseur des opprimés n’avait rien à offrir de plus que l’éloge journalistique le plus conventionnel pour un leader égyptien déjà largement célébré. Durant le reste de la journée, Sartre reprit son silence, et la discussion s’est poursuivie comme auparavant.

  • Edward Said · Diary: an encounter with J-P Sartre · LRB 1 June 2000
    http://www.lrb.co.uk/v22/n11/edward-said/diary

    ‘Demain Sartre parlera.’ And so we retired in keen anticipation of the following morning’s proceedings.

    Sure enough Sartre did have something for us: a prepared text of about two typed pages that – I write entirely on the basis of a twenty-year-old memory of the moment – praised the courage of Anwar Sadat in the most banal platitudes imaginable. I cannot recall that many words were said about the Palestinians, or about territory, or about the tragic past. Certainly no reference was made to Israeli settler-colonialism, similar in many ways to French practice in Algeria. It was about as informative as a Reuters dispatch, obviously written by the egregious Victor to get Sartre, whom he seemed completely to command, off the hook. I was quite shattered to discover that this intellectual hero had succumbed in his later years to such a reactionary mentor, and that on the subject of Palestine the former warrior on behalf of the oppressed had nothing to offer beyond the most conventional, journalistic praise for an already well-celebrated Egyptian leader. For the rest of that day Sartre resumed his silence, and the proceedings continued as before. I recalled an apocryphal story in which twenty years earlier Sartre had travelled to Rome to meet Fanon (then dying of leukemia) and harangued him about the dramas of Algeria for (it was claimed) 16 non-stop hours, until Simone made him desist. Gone for ever was that Sartre.

    […]

    ‘For example,’ B-HL intoned, ‘Sartre’s record on Israel was perfect: he never deviated and he remained a complete supporter of the Jewish state.’

    For reasons that we still cannot know for certain, Sartre did indeed remain constant in his fundamental pro-Zionism.

    • Merci Alain.

      Au passage, je vois que John Gerassi est décédé en 2012:

      John «Tito» Gerassi, l’ami américain de Sartre, mort à 81 ans
      http://www.lemonde.fr/disparitions/article/2012/08/10/john-tito-gerassi-l-ami-americain-de-sartre-mort-a-81-ans_1744962_3382.html

      John Gerassi était un rebelle non repenti, en état de belligérance depuis son adolescence avec le monde tel qu’il est, et avec le cancer qui le rongeait depuis une dizaine d’années. Il est mort en soins palliatifs, au Beth Israel Hospice de Manhattan, le 26 juillet, à 23 h 30, veillé par deux de ses étudiants. Il s’en est donc fallu d’une demi-heure qu’il ne meure pas à la date anniversaire d’une histoire qui avait compté dans son imaginaire politique : l’attaque ratée contre la caserne Moncada par Fidel Castro et ses compagnons, point de départ, en 1953, de l’épopée révolutionnaire cubaine.

      S’il avait depuis longtemps perdu ses illusions sur le régime castriste, John Gerassi n’en gardait pas moins foi dans la révolution et n’abandonnait pas sa conviction que le capitalisme, qu’il fût d’Etat comme dans les économies dirigées ou économico-financier comme dans les régimes dits démocratiques, menait la société humaine au fascisme. John Gerassi, que ses amis et ses étudiants appelaient « Tito », professait donc un marxisme virulent, d’orientation libertaire et fortement teinté d’existentialisme.

      Il faut dire que Jean-Paul Sartre fut le premier homme à le tenir dans ses bras, le 12 juillet 1931. Son père, le peintre Fernando Gerassi, attendait sa naissance à la Closerie des Lilas, en compagnie de Picasso, Breton, Chagall, Miro et quelques autres. Quand Sartre les rejoignit du Havre où il avait parlé du cinéma pour la distribution des prix de son lycée, il trouva ces artistes fins saouls et alla s’enquérir de l’état de la mère et de l’enfant à la clinique Tarnier, tout à côté. La mère, Stépha Gerassi, ravissante féministe ukrainienne, née Awdykowicz, amie de Simone de Beauvoir, lui tendit l’enfant à qui elle venait de donner le jour.