Relation sexuelle avec une mineure de 11 ans : un homme poursuivi pour « atteinte sexuelle »

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    Une adolescente de 11 ans avait porté plainte pour « viol » en avril 2017 contre un homme de 28 ans. Le parquet a considéré que la fillette était consentante et qualifié les faits « d’atteinte sexuelle ».

    Comment qualifier pénalement les faits dont a été victime Sarah, 11 ans ? Le parquet de Pontoise a estimé qu’il s’agissait d’un délit et plus précisément d’une « atteinte sexuelle sur mineur de 15 ans ». La partie civile conteste : c’est un viol, passible de la cour d’assises. Le procès qui devait se tenir aujourd’hui devant le tribunal correctionnel de Pontoise a été renvoyé le temps d’examiner des nullités soumises par un avocat de la défense qui s’est récemment constitué. Il ouvre néanmoins un débat : celui du consentement d’une enfant de 11 ans. « Ce qui est scandaleux, c’est que les faits datent du mois d’avril et ils ont été jugés en juin, avant un premier renvoi de l’audience. C’est donc un traitement expéditif ! », dénonce Me Carine Diebolt, avocate de Sarah. Je suis également choquée par la qualification retenue. »

    Revenons aux faits, révélés ce mardi par Mediapart. Un jour d’avril 2017, sur le chemin du retour du collège, Sarah est abordée par un inconnu de 28 ans. Elle accepte de le suivre jusque dans un immeube où il essaie de l’embrasser. « Elle a compris à cet instant que le piège s’était refermé sur elle, qu’on avait endormi sa conscience. Mais elle était tétanisée, elle n’osait pas bouger, de peur qu’il la brutalise. Elle a pensé que c’était trop tard, qu’elle n’avait pas le droit de manifester, que cela ne servirait à rien, et elle a donc choisi d’être comme une automate, sans émotion, sans réaction », témoigne sa mère dans Mediapart. L’homme exige une fellation, la fillette obtempère. Puis, elle le suit jusqu’à son appartement où il la pénètre sexuellement. A peine sortie, paniquée, Sarah prévient sa mère et lui raconte tout.

    « Ce ne sont pas des mécanismes de défense mais de survie »

    Le parquet de Pontoise a choisi de ne pas retenir la qualification de viol qui figurait initialement sur la plainte. Pour rappel, selon le code de procédure pénale (art 222-22 et 222-23), pour qu’un viol soit caractérisé juridiquement il faut démontrer que la victime a subi une « contrainte, une violence, une menace ou une surprise ». Le fait que Sarah ne soit âgée que de 11 ans ne change rien à cela, il n’existe aucune atténuation en cas de minorité. La France se démarque ainsi d’autres pays occidentaux comme l’Espagne, l’Allemagne, les Etats-Unis, la Belgique, l’Angleterre, le Danemark ou la Suisse qui considèrent qu’il existe une « présomption irréfragable d’absence de consentement du mineur d’acte sexuel » tout en retenant des seuils d’âges différents. La loi française ne fixe pas non plus d’âge du discernement, « il appartient aux juridictions d’apprécier si le mineur était en état de consentir à la relation sexuelle en cause », a rappelé le Conseil constitutionnel dans une décision de février 2015.

    Dans le cas présent, le parquet a donc établi que la passivité de la fillette, son absence de réaction ou de contestation ne permettait pas de qualifier le viol. Me Carine Diebolt conteste : « Le parquet est passé à côté d’une juste analyse de la situation. Sarah n’a pas crié, elle ne s’est pas débattu, elle dira elle-même dans une audition qu’elle était "bloquée". En psychotraumatologogie, cela s’appelle de la sidération. L’expertise dit bien qu’elle est "sidérée" et "dissociée". Ce ne sont pas des mécanismes de défense mais de survie. » Le parquet qui voit plutôt un consentement s’est appuyé sur l’article 227-5 du code pénal pour qualifier l’atteinte sexuelle sur mineur de 15 ans : « le fait, par un majeur, d’exercer sans violence, contrainte, menace ni suprise une atteinte sexuelle sur la personne d’un mineur de quinze ans est puni de 75 000 euros d’amende et cinq ans d’emprisonnement ». La procédure n’étant pas criminalisée, il n’y a pas eu de saisine obligatoire du juge d’instruction. Le dossier devrait finalement être jugé en février prochain devant le tribunal correctionnel. « Pour moi, il est clair que l’agresseur a agi par surprise et a exercé une contrainte morale sur Sarah, ce qui permet de constituer le viol. Et c’est ce que je vais plaider », conclut Me Carine Diebolt.

    Affaire scandaleuse mais tristement banale s’il n’y avait le très jeune âge de la victime. Cela démontre une méconnaissance totale des mécanisme psychologiques en situation d’aggression mais est ce étonnant ?
    Le viol est un paradoxe total révélateur de l’incapacité ou plutôt du refus de la société à criminaliser cette violence extrême. En terme de droits la société ne peut que criminaliser l’acte lui même sous peine de passer pour une société dégénérée. Le viol est donc passible de très fortes peines et le mis en examen doit être jugé aux assises.
    Dans les faits, le corps des femmes et des enfants étant considéré comme la propriété du père, frère, oncle, mari, amant, patron etc on fait en sorte que les viols ne soient quasiment jamais condamnés. Environ 1% des viols commis voient leurs auteurs condamnés aux assises. Qu’est ce donc sinon une impunité quasi totale ?
    Le système est organisé dans ce sens à partir des faits commis et tout le long de la chaîne : l’entourage, le regard social, la confrontation avec la police, avec la justice, le milieu professionnel éventuel, les confrontations avec le bourreau, la correctionnalisation, les medias, le code pénal, le jugement… en cohérence avec l’invariant sexiste de la société française.
    Chaque expérience à laquelle il m’a été donné d’assister dans mon entourage m’a amenée à la conclusion que si la victime n’est pas très, très bien entourée socialement et juridiquement elle y laissera des plumes. C’est à dire qu’être entourée ne permet pas d’avoir gain de cause, cela permet juste de ne pas ressortir de ce marathon judiciaire complètement détruite psychologiquement.
    On en arrive à une situation où il est plus dangereux pour la victime de porter plainte que de se taire. Et vu ce qu’il se passe, il est hélas parfois préférable dans son intérêt individuel de ne pas porter plainte, même si ce n’est pas comme ça qu’on arrivera à faire bouger les choses. Je ne sais pas comment on peut lutter efficacement contre cette situation. Il faut une implication concrète des militant-e-s, des associations mais pour ça il faut de l’argent et il n’y en a pas.

    Autre article : http://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/justice-pourquoi-l-agression-sexuelle-d-une-enfant-n-a-pas-ete-qualifiee-de

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