« Un mathématicien aurait-il plus de valeur qu’un historien ou un artiste ? »
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On peut se demander si le bagage scientifique permet réellement de s’adapter à tous types de filières. Moi-même, cet été, je me suis posé cette question. Ayant été admis dans une filière pluridisciplinaire centrée sur les sciences économiques, sociales et juridiques, après un baccalauréat économique et social, quelle ne fut pas ma surprise de découvrir que je devais rattraper certains points du programme de terminale S en mathématiques, tandis que dans le même temps, les élèves issus de cette même terminale S n’avaient, eux, absolument aucun rattrapage à faire en économie ou en sociologie.
Inimaginable d’entrer dans ce type de filières sans connaître les formes indéterminées des limites de fonctions en maths, mais normal d’y entrer sans connaître Bourdieu, Durkheim ou Keynes ? Je m’interroge toujours. Malgré la diversification toujours plus importante des parcours scolaires proposés et les déclarations de l’éducation nationale sur le fait que toutes les filières se valent et offrent de multiples débouchés, il existe toujours une hypocrisie au sein même du système scolaire.
Nouvel exemple personnel : lors du troisième trimestre de ma seconde, avec la meilleure moyenne générale de la classe, j’étais le seul élève au-dessus de 13 de moyenne à demander la filière ES. La proviseure du lycée, s’étonnait : « Il ne veut vraiment que ES ? », alors même qu’elle déclarait quelques semaines auparavant devant des parents d’élèves qu’il « n’existe aucune hiérarchie des filières, que chacun doit choisir en fonction de ses goûts et pas parce que telle ou telle filière est réputée d’excellence ». Cette réaction traduit parfaitement à quel point cette hiérarchisation est ancrée dans le système éducatif et caricature bien l’idée selon laquelle les « bons » élèves devraient devenir mathématiciens ou ingénieurs.
Comme de nombreux étudiants que j’ai rencontrés au cours de mes études, je pense qu’il faut en finir avec cette vision des choses. En finir avec l’admiration béate que l’on voue à la « rigueur », à l’« esprit de synthèse et de logique » qu’offre la filière scientifique, et valoriser à leur juste niveau les compétences diverses qu’offrent les autres filières.
Le dicton populaire a coutume de dire « il n’y a pas de sot métier ». Il serait désormais temps de l’appliquer au système scolaire et de montrer, une fois pour toutes, qu’« il n’y pas de sotte filière ».
cc @heautontimoroumenos
Au passage je mentionne que les filières scientifiques sont celles discriminant le plus les filles et les femmes. D’ou les nombreuses initiatives "femmes et mathématiques"