La civilisation industrielle ou L’asservissement collectif au développement technologique (par Jaime Semprun) – Le Partage

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  • La civilisation industrielle ou L’#asservissement collectif au développement technologique (par Jaime Semprun) – Le Partage
    http://partage-le.com/2017/10/7952

    Tout cela parut assez osé, et aujourd’­hui encore on se récriera en donnant tel ou tel exemple des services que nous rendent les #machines, sans aucune contre­par­tie  ; et de citer, qui le lave-vais­selle, qui le télé­phone mobile, etc. Mais c’est chaque fois en répé­tant l’er­reur de juge­ment réfu­tée par Butler : en ne voyant qu’un objet isolé, tel que son utilité ponc­tuelle le fait passer pour bénin et de peu de consé­quences. En revanche, dès qu’on le consi­dère comme partie inté­grante d’un ensemble, tout change. Et ainsi l’#au­to­mo­bile, machine on ne peut plus triviale et presque archaïque, que chacun s’ac­corde à trou­ver bien utile et même indis­pen­sable à notre liberté de dépla­ce­ment, devient tout autre chose si on la replace dans la société des machines, dans l’or­ga­ni­sa­tion géné­rale dont elle est un simple élément, un rouage. On voit alors tout un #système complexe, un gigan­tesque orga­nisme composé de routes et d’au­to­routes, de champs pétro­li­fères et d’oléo­ducs, de stations-service et de motels, de voyages orga­ni­sés en cars et de grandes surfaces avec leurs parkings, d’échan­geurs et de rocades, de chaînes de montage et de bureaux de « recherche et déve­lop­pe­ment »  ; mais aussi de surveillance poli­cière, de signa­li­sa­tion, de codes, de régle­men­ta­tions, de normes, de soins chirur­gi­caux spécia­li­sés, de « lutte contre la pollu­tion », de montagnes de pneus usés, de batte­ries à recy­cler, de tôles à compres­ser. Et dans tout cela, tels des #para­sites vivant en #symbiose avec l’or­ga­nisme hôte, d’af­fec­tueux aphi­diens chatouilleurs de machines, des hommes s’af­fai­rant pour les soigner, les entre­te­nir, les alimen­ter, et les servant encore quand ils croient circu­ler à leur propre initia­­tive, puisqu’il faut qu’elles soient ainsi usées et détruites au rythme pres­crit pour que ne s’in­ter­rompe pas un instant leur repro­duc­tion, le fonc­tion­ne­ment du système géné­ral des machines.