A propos du hashtag vengeur #balancetonporc et de ses implications Erik Empatz (Extrait - Canard Enchaîné - 18 Octobre 2017)
Finasser sur la brutalité des mots « porc » et « balance » peut sembler aussi déplacé que de s’indigner d’une main sur la figure méritée après une main au cul non souhaitée. Mais si le choix des mots de ce hashtag vengeur dérange, ce n’est pas par ce que la violence de son intitulé n’est rien par rapport à celle qui a été subie, et qu’il entend mettre à mal. si #balancetonporc met mal à l’aise, ce n’est pas par ce qu’il dénonce, c’est la façon dont il le fait.
Traiter les hommes de « porcs » quels qu’ils soient et quoi qu’ils aient fait, c’est régler des comptes en usant d’une violence contre une autre. Et inviter à « balancer » avec tous les risques de dérives et de dérapages que l’on sait, ce n’est pas dénoncer à la justice, c’est dans une logique de vengeance justicière, livrer des hommes à la vindicte populacière. Les femmes victimes de ces actes insupportables, et pas seulement celles des milieux où s’exerce le pouvoir, méritent mieux que d’être des « balances » . Et même si les réseaux sociaux ont un rôle à jouer dans la prise de parole et de conscience, ces femmes ont droit à une autre justice que celle, expéditive et arbitraire des vengeurs de twitteur ou des Zorro anonymes de la Toile, qui ne s’embarrassent pas de preuves.
La culpabilité d’un agresseur sexuel, d’un violeur ne se décrète pas sur twitter. Elle relève d’une démarche judiciaire. Les lois en ce sens existent et ne manquent pas. Elles peuvent sans doutes être améliorées, et la difficulté des victimes d’apporter des preuves, comme celle d’en parler, ne facilite pas, bien sur leur application. Mais dans une démocratie, ce n’est en rien une raison de vouloir se venger des « porcs » par une justice de « cochon ».
#Justice #agression_sexuelle #dérives potentielles
La publication de ce texte ne signifie nullement qu’il reflète systématiquement ce que je pense.